Incendie en vol menant à un impact avec un plan d'eau
Swissair Transport Limited
McDonnell Douglas MD-11 HB-IWF
5 nm au sud-ouest de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
Le 2 septembre 1998, le vol 111 de Swissair quitte New York (États-Unis) à 20 h 18, heure avancée de l'Est, pour un vol régulier à destination de Genève (Suisse) avec 215 passagers et 14 membres d'équipage à bord. Environ 53 minutes après le départ, alors que l'avion vole en croisière au niveau de vol 330, les membres de l'équipage de conduite sentent une odeur anormale dans le poste de pilotage. Leur attention est alors attirée vers une zone non précisée, située derrière et au-dessus d'eux et ils commencent à rechercher la cause de cette odeur. Ce qu'ils voient au départ n'est plus perçu comme étant visible peu de temps après. Ils se mettent d'accord pour conclure que l'origine de l'anomalie est le système de conditionnement d'air. Lorsqu'ils déterminent que de la fumée est visible et qu'elle l'a assurément été, ils décident de se dérouter et amorcent d'abord un virage en direction de Boston; toutefois, lorsque les services de la circulation aérienne mentionnent Halifax (Nouvelle-Écosse) comme aéroport de dégagement, ils changent leur destination pour l'aéroport international de Halifax. Pendant que les membres de l'équipage de conduite se préparent à atterrir à Halifax, ils ne se rendent pas compte qu'un incendie est en train de se propager au-dessus du plafond, dans la partie avant de l'avion. Environ 13 minutes après détection de l'odeur inhabituelle, l'enregistreur de données de vol de l'avion commence à enregistrer une succession rapide de défaillances liées aux systèmes de bord. L'équipage de conduite déclare une situation d'urgence et indique qu'il doit atterrir immédiatement. Environ une minute plus tard, les communications radio et le contact du radar secondaire avec l'avion sont interrompus, et les enregistreurs de bord cessent de fonctionner. Environ cinq minutes et demie plus tard, l'avion s'abîme dans l'océan à quelque cinq milles marins au sud-ouest de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse), au Canada. L'avion est détruit et il n'y a aucun survivant.
1.0 Renseignements de base
L'enquête sur l'accident du vol 111 de Swissair (SR 111) a été complexe et a entraîné l'examen détaillé de nombreuses questions opérationnelles et techniques. L'information figurant dans la Partie 1 du rapport est organisée selon la présentation des rapports d'enquête de l'Organisation de l'aviation civile internationale. L'enquête a permis de découvrir de nombreux faits relatifs au vol, à l'avion, à la maintenance, au personnel, et ainsi de suite, mais seules les données factuelles permettant de comprendre l'accident de SR 111 sont fournis dans la présente partie ainsi qu'une évaluation préliminaire (première analyse) servant de base aux parties Analyse, Conclusions et Mesures de sécurité du rapport.
1.1 Déroulement du vol
La présente section résume, par ordre chronologique en fonction du temps universel coordonné (UTC)Note de bas de page 1, les principaux événements qui se sont produits pendant le vol et qui sont directement liés à l'accident de SR 111, lequel s'est terminé par l'impact de l'avion avec un plan d'eau, près de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse), au Canada. Consulter l'Annexe A – Profil de vol : événements choisis pour voir la représentation graphique de la trajectoire de vol de l'avion.
À 0 h 18 UTC (20 h 18, heure normale de l'Est), le 2 septembre 1998, l'avion McDonnell DouglasNote de bas de page 2 (MD) MD-11, vol SR 111, a quitté l'aéroport international John F. Kennedy, à Jamaica (New York), aux États-Unis, pour un vol à destination de Genève (Suisse). Deux pilotes, 12 agents de bord et 215 passagers se trouvaient à bord. Le copilote était le pilote aux commandes. À 0 h 58, SR 111 a contacté le Centre de contrôle régional (ACC) des Services de la circulation aérienne (ATS) de Moncton (Nouveau-Brunswick) et a indiqué qu'il se trouvait au niveau de vol (FL) 330Note de bas de page 3.
À 1 h 10 min 38 s, les pilotes ont senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage et ils ont commencé à en rechercher la cause. Ils ont déterminé qu'il y avait un peu de fumée dans le poste de pilotage, mais pas dans la cabine. Ils ont estimé que l'odeur et la fumée étaient liées au système de conditionnement d'air. À 1 h 14 min 15 s, SR 111 a envoyé un message radio Pan PanNote de bas de page 4 à l'ACC de Moncton. L'avion se trouvait à environ 66 milles marins (nm) au sud-ouest de l'aéroport international de Halifax (Nouvelle-Écosse). Les pilotes ont signalé qu'il y avait de la fumée dans le poste de pilotage et ils ont demandé à retourner immédiatement à un endroit convenable. Les pilotes ont cité Boston (Massachusetts), qui se trouvait à environ 300 nm derrière eux. Le contrôleur de l'ACC de Moncton a immédiatement autorisé SR 111 à virer à droite vers Boston et à descendre au FL310. À 1 h 15 min 6 s, le contrôleur a demandé aux pilotes de SR 111 s'ils préféraient se rendre à Halifax (Nouvelle-Écosse). Les pilotes ont indiqué leur préférence pour Halifax, qui était beaucoup plus proche. Ils ont reçu immédiatement une autorisation des ATS pour voler directement vers Halifax, qui se trouvait alors à environ 56 nm au nord-est. À ce moment, les pilotes ont mis leur masque à oxygène.
À 1 h 16 min 34 s, le contrôleur a autorisé SR 111 à descendre à 10 000 pieds (pi) au-dessus du niveau de la merNote de bas de page 5 et a demandé le nombre de passagers ainsi que la quantité de carburant à bord. Les pilotes ont demandé au contrôleur de rester à l'écoute pour ces renseignements. À 1 h 18 min 17 s, le contrôleur a donné instruction à SR 111 de communiquer avec l'ACC de Moncton sur la fréquence radio (RF) de 119,2 mégahertz (MHz). SR 111 a immédiatement établi le contact avec l'ACC de Moncton sur 119,2 MHz et a indiqué que l'avion quittait le FL254 en descente sur un cap de 050°Note de bas de page 6 sur l'axe de Halifax. Le contrôleur a autorisé SR 111 à 3 000 pi. Les pilotes ont demandé une altitude intermédiaire de 8 000 pi jusqu'à ce que tout soit prêt dans la cabine pour l'atterrissage.
À 1 h 19 min 28 s, le contrôleur a donné instruction à SR 111 de virer à gauche sur un cap de 030° pour un atterrissage sur la piste 06 de l'aéroport international de Halifax et il a indiqué que l'avion se trouvait à 30 nm du seuil de la piste. L'avion était en train de franchir le FL210 en descente, et les pilotes ont indiqué qu'ils avaient besoin de plus de 30 nm. Le contrôleur a donné instruction à SR 111 de virer sur un cap de 360° pour donner plus de distance à l'avion afin qu'il puisse perdre de l'altitude. À 1 h 20 min 48 s, les membres de l'équipage de conduite ont discuté entre eux du largage du carburant en fonction de la masse brute de l'avion et, selon la perception des indications qu'ils avaient de l'état de l'avion, ils se sont entendus pour larguer du carburant. À 1 h 21 min 20 s, le contrôleur a demandé une deuxième fois le nombre de personnes à bord et la quantité de carburant à bord. SR 111 n'a pas communiqué le nombre de personnes à bord, mais a indiqué qu'il y avait 230 tonnes de carburant à bord (c'était en fait la masse de l'avion à ce moment-là, et non la quantité de carburant) et qu'il devait larguer du carburant avant l'atterrissage.
À 1 h 21 min 38 s, le contrôleur a demandé aux pilotes s'ils étaient en mesure de virer vers le sud pour larguer le carburant, ou s'ils souhaitaient demeurer à proximité de l'aéroport. Après que les pilotes eurent confirmé qu'ils pouvaient virer au sud, le contrôleur a donné instruction à SR 111 de virer à gauche sur un cap de 200°; et a demandé aux pilotes de l'aviser lorsqu'ils seraient prêts à larguer le carburant. Le contrôleur a précisé à SR 111 qu'il avait encore 10 nm à parcourir avant d'atteindre la côte et que l'avion se trouvait toujours dans un rayon de 25 nm de l'aéroport de Halifax. Les pilotes ont répondu qu'ils viraient et descendaient à 10 000 pi pour le largage du carburant.
À 1 h 22 min 33 s, le contrôleur a entendu, mais n'a pas compris, un message radio de SR 111 qui avait été émis en alémanique, et il a demandé à SR 111 de répéter le message. Les pilotes ont répondu que le message radio n'était qu'un échange entre eux; le message avait trait à la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air (voir l'Annexe B – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air).
À 1 h 23 min 30 s, le contrôleur a donné instruction à SR 111 de faire virer l'avion plus à gauche sur un cap de 180°, et il a informé les pilotes qu'ils atteindraient la côte au bout de 15 nm environNote de bas de page 7. Les pilotes ont accusé réception de leur nouveau cap et indiqué que l'avion était en palier à 10 000 pi.
À 1 h 23 min 53 s, le contrôleur a avisé SR 111 que l'avion demeurerait à 35 ou 40 nm de l'aéroport au cas où il faudrait s'y rendre précipitamment. Les pilotes ont répondu que cela leur convenait et ils ont demandé d'être avisés lorsqu'ils pourraient commencer à larguer le carburant. Vingt secondes plus tard, les pilotes ont informé le contrôleur qu'ils avaient dû passer en pilotage manuel et ils ont demandé l'autorisation de voler entre 11 000 et 9 000 pi. Le contrôleur a avisé SR 111 qu'il était autorisé à voler à n'importe quelle altitude entre 5 000 et 12 000 pi.
À 1 h 24 min 42 s, les deux pilotes ont déclaré presque simultanément une situation d'urgence sur la fréquence de 119,2 MHz; le contrôleur a accusé réception de ce message. À 1 h 24 min 53 s, les pilotes de SR 111 ont indiqué qu'ils commençaient à larguer du carburant et qu'ils devaient atterrir immédiatement. Le contrôleur a répondu qu'il serait à eux au bout de quelques milles. SR 111 a accusé réception de ce message.
À 1 h 25 min 2 s, SR 111 a déclaré une autre fois une situation d'urgence, et le contrôleur a accusé réception du message. À 1 h 25 min 16 s, le contrôleur a autorisé SR 111 à larguer du carburant; il n'y a eu aucune réponse de la part des pilotes. À 1 h 25 min 40 s, le contrôleur a répété son autorisation. Il n'y a pas eu d'autres communications entre SR 111 et le contrôleur.
Vers 1 h 30 min, des observateurs situés dans la région de la baie St. Margaret (Nouvelle-Écosse) ont aperçu un gros avion les survoler à basse altitude et ils ont entendu le son de ses moteurs. Vers 1 h 31 min, plusieurs observateurs ont entendu un bruit qu'ils ont décrit comme un fort claquement. Des sismographes situés à Halifax et à Moncton ont enregistré un événement sismique à 1 h 31 min 18 s, ce qui coïncide avec le moment où l'avion a heurté le plan d'eau. L'avion a été détruit par les forces de l'impact. Il n'y a eu aucun survivant.
L'accident s'est produit après le coucher du soleil. Le centre de la zone des débris, situé au fond de l'océan à une profondeur d'environ 55 mètres (m) (180 pi), se trouvait approximativement à 44° 24′ 33″ de latitude Nord et 63° 58′ 25″ de longitude Ouest.
Le Tableau 1 donne la durée générale de ces événements entre le moment où l'odeur inhabituelle a été décelée dans le poste de pilotage et le moment de l'impact de l'avion avec le plan d'eau.
Heure UTC |
Durée (en minutes) |
Événement |
---|---|---|
1 h 10 min 38 s | 0 | Odeur inhabituelle décelée dans le poste de pilotage. |
1 h 13 min 14 s | 2 min 36 s | Évaluation d'une présence visible de fumée à un endroit dans le poste de pilotage; aucune odeur n'est signalée dans la cabine. |
1 h 14 min 15 s | 3 min 37 s | Appel radio de SR 111 : « Pan Pan Pan »; déroutement demandé à Boston (on ne sait si la fumée visible était toujours présente dans le poste de pilotage). |
1 h 15 min 36 s | 4 min 58 s | Décision de se dérouter vers Halifax (Nouvelle-Écosse). |
1 h 20 min 54 s | 10 min 16 s | Décision de larguer le carburant. |
1 h 23 min 45 s | 13 min 7 s | Commutateur CABIN BUS sélectionné sur OFF. |
1 h 24 min 9 s | 13 min 31 s | Le pilote automatique 2 se débraye, et l'enregistreur de données de vol (FDR) commence à enregistrer des défaillances de systèmes de bord. |
1 h 24 min 42 s | 14 min 4 s | Déclaration d'une situation d'urgence. |
1 h 25 min 2 s | 14 min 24 s | Les ATS reçoivent le dernier message de SR 111. |
1 h 25 min 41 s | 15 min 3 s | Les enregistreurs cessent de fonctionner. |
1 h 31 min 18 s | 20 min 40 s | Impact avec le plan d'eau. |
Pour une description plus détaillée de la chronologie des événements, de leur déroulement et du profil de vol, consulter les rubriques 1.18.8.3 et 1.18.8.4 ainsi que l'Annexe A – Profil de vol : événements choisis et l'Annexe D – Chronologie des événements.
1.2 Victimes
Équipage | Passagers | Tiers | Total | |
---|---|---|---|---|
Tués | 14 | 215 | - | 229 |
Blessés graves | - | - | - | - |
Blessés légers/Indemnes | - | - | - | - |
Total | 14 | 215 | - | 229 |
Les renseignements médicaux et pathologiques obtenus après l'accident sont présentés à la Section 1.13, Renseignements médicaux.
1.3 Dommages à l'aéronef
L'avion a été détruit par les forces de l'impact avec le plan d'eau. La plupart des débris de l'avion ont coulé au fond de l'océan. Dans un premier temps, quelques débris de l'avion ont été retrouvés flottant dans la zone où ce dernier s'était abîmé, tandis que d'autres débris ont dérivé légèrement à l'ouest du lieu de l'accident. Au cours des semaines qui ont suivi, des débris de l'avion ont été retrouvés flottant le long des zones côtières ou rejetés sur diverses plages.
1.4 Autres dommages
Il y a eu du carburéacteur à la surface de l'eau, près du lieu de l'impact, pendant un certain nombre d'heures avant qu'il ne s'évapore. Les débris de l'avion n'ont causé aucun dommage visible à l'environnement. La zone entourant le lieu de l'impact a été fermée à la circulation maritime, y compris aux pêcheurs locaux et aux bateaux d'excursion, pendant les opérations de repêchage, lesquelles ont duré environ 13 mois.
1.5 Renseignements sur le personnel
1.5.1 Généralités
L'équipage de conduite de SR 111 comprenait un commandant de bord et un copilote. L'équipage de cabine se composait d'un maître de cabine et de 11 agents de bord.
Un agent technique d'exploitation a fourni à l'équipage de conduite le soutien normal pour la préparation du vol avant son départ de l'aéroport John F. Kennedy (JFK).
Deux contrôleurs de la circulation aérienne à l'ACC de Moncton avaient été en contact radio avec l'avion : un contrôleur de l'espace aérien supérieur et un contrôleur terminal.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
1.5.2 Équipage de conduite
Commandant de bord | Copilote | |
---|---|---|
Âge | 49 ans | 36 ans |
Licence | Pilote de ligne (Suisse) | Pilote de ligne (Suisse) |
Date d'expiration du certificat de validation | 1er novembre 1998 | 1er juillet 1999 |
Heures de vol totales | 10 800 | 4 800 |
Heures de vol sur type | 900 | 230 |
Heures de vol dans les 90 derniers jours | 180 | 125 |
Heures de vol sur type dans les 90 derniers jours | 180 | 125 |
Heures de service avant l'accident | 3 | 3 |
Heures libres avant la prise de service | 27 | 27 |
1.5.2.1 Commandant de bord
Le pilote aux commandes (commandant de bord) de SR 111 a été décrit comme étant en bonne santé et apte au vol, et il ne prenait aucun médicament de prescription. Il passait pour quelqu'un qui savait créer une atmosphère amicale et professionnelle dans le poste de pilotage et il était connu pour travailler avec exactitude et précision. Selon l'information recueillie, il n'y avait aucune tension dans le poste de pilotage lorsqu'on volait avec ce commandant de bord.
Le commandant de bord avait commencé à voler pour son plaisir en 1966 alors qu'il avait 18 ans. En 1967, il s'était joint à la Force aérienne suisse et il était devenu pilote de chasse. Il avait commencé sa carrière avec Swissair en juillet 1971 à titre de copilote sur McDonnell Douglas DC-9 et, par la suite, était passé comme copilote sur McDonnell Douglas DC-8.
Il avait été promu commandant de bord en avril 1983 sur DC-9 et il avait volé sur McDonnell Douglas MD-80 comme pilote commandant de bord de 1986 à 1994. En août 1994, il avait effectué sa formation de transition pour piloter l'Airbus A320, puis il était devenu commandant de bord sur A320 et pilote instructeur. En juin 1997, il avait effectué sa formation de transition sur MD-11. Il avait été qualifié et certifié en fonction de la réglementation suisse. Il était titulaire d'une licence de pilote de ligne suisse. Ses qualifications selon les règles de vol aux instruments (IFR) pour les approches de catégorie I et de catégorie III étaient valides jusqu'au 21 octobre 1998. Il totalisait 9 294 heures de vol chez Swissair. Sa dernière vérification de compétence pilote avait eu lieu le 23 février 1998.
Le commandant de bord n'avait jamais fait l'objet d'une enquête réglementaire ou administrative. Il n'existe aucun dossier indiquant qu'il avait vécu une urgence réelle en vol à quelque moment que ce soit au cours de sa carrière de pilote.
Tout en étant pilote de ligne, le commandant de bord était aussi pilote instructeur sur le MD-11. Il donnait de l'instruction dans un simulateur de vol pour tous les exercices, y compris la leçon de formation à la qualification de pilote dans laquelle on doit recourir à la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue (voir l'Annexe C – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue). Le commandant de bord était réputé pour donner des exposés détaillés à ses stagiaires avant, durant et après leurs sessions en simulateur. Pour améliorer ses connaissances de l'avion, le commandant de bord s'entretenait avec des techniciens du service de la maintenance au sujet de l'avion et de ses systèmes. Au cours des sessions d'entraînement « fumée dans le poste de pilotage », le commandant de bord demandait à ses stagiaires d'expliquer toutes les étapes et les conséquences de l'utilisation du sélecteur « isolement de fumée d'origine électrique ou du conditionnement d'air » (SMOKE ELEC/AIR)Note de bas de page 8 avant de procéder à l'exercice. Au cours de ces sessions, le commandant de bord avait l'habitude de s'assurer que le pilote qui lisait la liste de vérifications informait le ou la pilote aux commandes des services qu'il ou elle serait sur le point de perdre avant d'actionner le sélecteur.
Au cours du repêchage de l'épave, une ordonnance de verres correcteurs pour le commandant de bord a été retrouvée dans les effets personnels récupérés. La correction de l'ordonnance avait trait à la vision éloignée. Aucuns verres correcteurs identifiés comme appartenant au commandant de bord n'ont été récupérés. L'information disponible indique que le commandant de bord ne portait normalement pas de verres correcteurs, sauf parfois pour corriger sa vision éloignée. Le commandant de bord avait satisfait à la norme d'acuité visuelle sans verres correcteurs lors de son dernier examen médical aéronautique. La présence ou l'absence des verres correcteurs du commandant de bord n'aurait pas compromis sa capacité à faire face aux situations lors du présent accident.
Sur la foi d'une revue des dossiers médicaux du commandant de bord, rien n'indique que des troubles médicaux ou des facteurs physiologiques pré-existants auraient compromis son comportement pendant le vol. Son dernier examen médical avait eu lieu le 29 avril 1998, et aucune restriction médicale ne figurait sur sa licence de pilote.
1.5.2.2 Copilote
Le copilote a été décrit comme étant en bonne santé, et il ne prenait aucun médicament de prescription. Il était considéré comme expérimenté, bien qualifié, attentif et d'esprit ouvert lorsqu'il exécutait ses fonctions de copilote. Sa discipline dans le poste de pilotage était jugée idéale. Il était vu comme un partenaire dans le poste de pilotage, était d'une nature tranquille et calme, mais il était ferme lorsque la situation l'exigeait.
Le copilote avait commencé à voler en 1979; il était devenu pilote pour la Force aérienne suisse en 1982 et il avait terminé son service militaire à temps complet en 1990. Il s'était joint à Swissair en 1991 comme copilote sur MD-80 tout en continuant à voler à temps partiel comme pilote de chasse dans la force aérienne. En décembre 1995, il était passé sur Airbus A320 comme copilote. En mai 1998, il avait réussi son instruction comme copilote sur MD-11. Il était titulaire d'une licence suisse de pilote de ligne valide comme copilote sur MD-11, laquelle lui avait été accordée en août 1996.
Le copilote n'avait jamais fait l'objet d'une enquête réglementaire ou administrative. Il n'existe aucun dossier indiquant qu'il avait vécu une urgence réelle en vol à quelque moment que ce soit au cours de sa carrière. Il possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol conformément à la réglementation suisse. Sa dernière vérification de compétence avait eu lieu le 16 avril 1998.
Le copilote avait été instructeur sur MD-80 et sur A320 et, au moment de l'accident, il était instructeur sur MD-11, agissant comme instructeur en simulateur et instructeur de transition. Il totalisait 230 heures de vol sur le MD-11 et il était décrit comme ayant une bonne connaissance des systèmes de bord. Il avait effectué 2 739 heures de vol chez Swissair.
Sur la foi d'une revue des dossiers médicaux du copilote, rien n'indique que des troubles médicaux ou des facteurs physiologiques pré-existants auraient compromis son comportement pendant le vol. Son dernier examen médical remontait au 15 juin 1998, et aucune restriction médicale ne figurait sur sa licence.
1.5.3 Équipage de cabine
Le maître de cabine et les 11 autres agents de bord étaient qualifiés et formés conformément aux exigences réglementaires des Joint Aviation Authorities (JAA) en vigueur.
1.5.4 Emploi du temps des 72 dernières heures
Une revue des heures de vol et des heures de service pour les équipages de conduite et de cabine a révélé qu'elles étaient toutes conformes aux limites prescrites dans les politiques de Swissair et les règlements des JAA.
Le commandant de bord n'avait pas été de service du samedi 29 août jusqu'au lundi 31 août inclusivement, et selon l'information recueillie, il était bien reposé avant le départ pour le vol de liaison de Zurich à Genève à New York, le mardi 1er septembre. L'équipage avait pu se reposer normalement à New York.
Le copilote n'avait pas été de service les 30 et 31 août et, selon l'information recueillie, il était frais et dispos quand il s'est présenté au travail le mardi 1er septembre.
Le 1er septembre, les deux membres de l'équipage de conduite et 7 des 12 membres de l'équipage de cabine avaient effectué un vol de mise en placeNote de bas de page 9 de Zurich à Genève à bord du vol 920 de Swissair (SR 920). L'avion avait été refoulé à Zurich à 6 h 43 pour accoster à la porte de débarquement de Genève à 7 h 23. Les cinq autres agents de bord avaient rejoint le reste de l'équipage de l'avion à Genève. Les équipages de conduite et de cabine avaient pris leur service sur le vol 110 de Swissair (SR 110), de Genève à New York. SR 110 avait été refoulé à Genève à 10 h 18 et il était arrivé à New York à 18 h 35 le 1er septembre. L'avion assurant le vol SR 110 n'était pas l'avion en question.
Conformément aux procédures de Swissair, le 2 septembre 1998, le jour du vol de retour à Genève, les pilotes avaient reçu à leur hôtel une trousse d'information pré-vol du Centre des opérations aériennes de Swissair à l'aéroport JFK. La trousse comprenait l'itinéraire de vol, les conditions météorologiques et des données sur la masse de l'avion (c.-à-d. fondée sur des renseignements préliminaires).
L'équipage de l'avion avait quitté l'hôtel à New York à 17 h 50, heure locale (21 h 50 UTC) le 2 septembre 1998 et il était arrivé à l'aéroport une heure avant l'heure de départ prévue du vol SR 111, à 19 h 50, heure locale (23 h 50 UTC). À leur arrivée à l'aéroport, tous les membres d'équipage de l'avion avaient subi les formalités de sécurité à l'aérogare et enregistré leurs sacs et porte-documents au comptoir de Swissair. L'équipage de cabine s'était alors rendu directement à l'avion. Les pilotes s'étaient présentés au Centre des opérations aériennes où ils avaient complété leur planification de vol, puis ils s'étaient rendus à l'avion. L'avion avait été refoulé de la porte d'embarquement à New York à 19 h 53, heure locale (23 h 53 UTC).
L'horloge biologiqueNote de bas de page 10 des membres de l'équipage de l'avion suivait sans doute plus l'heure suisse (UTC plus deux heures) puisqu'ils n'avaient pas passé suffisamment de temps à New York pour que leur rythme circadien s'ajuste à l'heure locale (de New York). On n'a pas jugé que leur rythme circadien avait été un facteur dans l'accident.
1.5.5 Contrôleurs de la circulation aérienne
Tous les contrôleurs de la circulation aérienne de Nav Canada qui ont eu affaire avec le vol SR 111 possédaient des qualifications à jour et étaient qualifiés pour leur poste, conformément à la réglementation canadienne en vigueur. Les contrôleurs étaient convenablement expérimentés (voir le tableau 4) et ils étaient supervisés selon les exigences. Au moment de l'accident, la charge de travail des contrôleurs à l'ACC de Moncton était évaluée comme étant légère. Les premiers messages radio de SR 111 avec l'ACC de Moncton avaient été reçus par le contrôleur de l'espace aérien supérieur qui, à 1 h 18 min 11 s, avait transféré la fonction ATS au contrôleur radar terminal pour l'approche et l'atterrissage à Halifax.
Contrôleur de l'espace aérien supérieur | Contrôleur radar terminal | |
---|---|---|
Âge | 32 ans | 51 ans |
Licence | Contrôleur de la circulation aérienne | Contrôleur de la circulation aérienne |
Expérience comme contrôleur | 9 ans | 26 ans |
Expérience comme contrôleur IFR | 9 ans | 26 ans |
Expérience à l'unité | 3,5 ans | 26 ans |
Heures de service avant l'accident | 5 | 8 |
Heures libres avant la prise de service | 72 | 16,25 |
1.6 Renseignements sur l'aéronef
La présente section renferme les renseignements suivants :
- une description générale de l'avion en question;
- une description de l'utilisation, de la navigabilité aérienne et de l'entretien de systèmes de bord spécifiques (système de ventilation, système de vol automatique, avertissements, système de télécommunications, système électrique, système de protection incendie, etc.) et de l'équipement jugé pertinent pour l'enquête.
Les systèmes et les équipements décrits dans la présente section sont propres à la configuration du MD-11 de Swissair et ils pourraient ne pas être identiques pour d'autres configurations de MD-11.
1.6.1 Généralités
Constructeur | McDonnell Douglas Corporation |
---|---|
Type et modèle | MD-11 |
Année de construction | 1991 |
Numéro de série | 48448 |
Certificat de navigabilité | Délivré le 28 juillet 1991 |
Total des heures cellules | 36 041 |
Type de moteur (nombre) | Pratt & Whitney 4462 (3) |
Masse maximale au décollage | 285 990 kilogrammes (kg) |
Types de carburant recommandé | Jet A, Jet A-1, JP-5, JP-8, Jet B |
Type de carburant utilisé | Jet A |
1.6.1.1 Conception et configuration du MD-11
Le projet de conception du MD-11 de McDonnell Douglas a vu le jour en 1986. La conception du MD-11 se fonde structuralement sur la conception du DC-10 de McDonnell Douglas (voir Figure 1 et Figure 2). Le MD-11 a été conçu pour une exploitation plus économique et plus efficiente que celle du DC-10, grâce à l'intégration de systèmes automatisés modernes. La nouvelle conception a automatisé la plupart des fonctions qui étaient exécutées par le mécanicien de bord dans le DC-10, ce qui s'est traduit par un poste de pilotage à deux. Le premier vol du MD-11 a eu lieu le 10 janvier 1990, et l'avion a été livré à son premier client le 7 décembre 1990. L'avion en question avait été construit en 1991 et mis directement en service chez Swissair.
Comme le MD-11 a été construit et certifié aux États-Unis (É.-U.) conformément aux Federal Aviation Regulations (FAR) pertinents, la composante réglementaire du présent rapport vise la Federal Aviation Administration (FAA). Bien des autorités de l'aviation civile ont rédigé et harmonisé leurs propres règlements de certification et de maintien de la navigabilité aérienne en fonction du modèle de la FAA; par conséquent, les enjeux du présent rapport pourraient aussi s'appliquer à d'autres autorités réglementaires.
L'avion était configuré pour accueillir 241 passagers : 12 en première classe, 49 en classe affaires et 180 en classe économique. Les sièges de première classe et de la classe affaires étaient équipés d'un système de divertissement de bordNote de bas de page 11, certifié et installé conformément au certificat de type supplémentaire (STC) de la FAA des États-Unis.
1.6.1.2 Masse et centrage
Les calculs de masse et centrage après l'accident ont indiqué que la masse réelle au décollage de SR 111 était d'environ 241 100 kg. Le centrage (C de G) avait été calculé comme étant équivalent à 20 % de la corde aérodynamique moyenne (CAM). Outre de très petites différences, les calculs exécutés après l'accident ont confirmé que les calculs de masse et de centrage utilisés pour le départ étaient exacts. La masse de l'avion s'inscrivait dans les limites, et pendant tout le vol, le centrage s'est situé à l'intérieur de la plage normale (15 à 32 % de la CAM). La masse maximale autorisée à l'atterrissage pour l'avion était de 199 580 kg; la masse maximale en surcharge à l'atterrissage, autorisée à certaines conditions, était de 218 400 kg. Dans une situation d'urgence, du point de vue des limites structurales d'un avion, ce dernier peut se poser à n'importe quelle masse; toutefois, des aspects opérationnels, comme la distance d'arrêt nécessaire par rapport à la distance de piste disponible, doivent être pris en compte.
Consulter le document d'information technique sur ce sujet.
1.6.1.3 Système des coordonnées de l'avion
Le fuselage du MD-11 comprend six tronçons principaux et deux tronçons secondaires (voir Figure 2). Les tronçons principaux se prolongent à partir de la section B, soit le nez et le poste de pilotage de l'avion, jusqu'à la section G, soit le tronçon du fuselage arrière. Les deux tronçons secondaires, soit les tronçons 6 et 5, étaient insérés dans l'axe de la section E pour prolonger la longueur du fuselage d'origine du DC-10. Chaque tronçon de fuselage comprend le revêtement extérieur, les cadres périphériques intérieurs et les éléments de renfort longitudinaux (longerons et lisses). La figure 2 montre aussi l'emplacement des nombreuses références de construction, les tronçons de fuselage, les portes avant, les toilettes et les offices.
Un système de coordonnées cartésiennes X, Y, Z est utilisé pour localiser tout point à l'intérieur de l'avion.
- L'axe des X se prolonge latéralement sur toute la largeur de l'avion. Les coordonnées transversales sont mesurées en pouces à gauche ou à droite de l'axe longitudinal du fuselage. À partir de l'axe vers l'aile gauche, les emplacements sont des coordonnées positives (p. ex. X= 80); les emplacements situés vers l'aile droite sont des coordonnées négatives (p. ex. X= −80).
- L'axe des Y se prolonge longitudinalement du nez jusqu'à la queue, il s'exprime en références, et il se mesure en pouces derrière un point désigné devant l'avion. Pour le MD-11, l'extrémité du nez de l'avion se trouve à la référence 239, et la porte du poste de pilotage se trouve à la référence 383.
- L'axe des Z se prolonge verticalement à travers l'avion. Les coordonnées verticales sont mesurées en pouces au-dessus ou au-dessous de la référence verticale (Z= 0), qui, dans le MD-11, se trouve à 18 po au-dessus du plancher de la cabine. Le plancher de la cabine est par conséquent situé à Z= −18.
1.6.1.4 Espaces inoccupés du poste de pilotage et plafond suspendu de la partie avant de la cabine – Description
La rubrique suivante décrit les espaces inoccupés du poste de pilotage et le plafond suspendu de la partie avant de la cabine (voir Figure 2, Figure 3, Figure 4, Figure 5, Figure 6 et Figure 7); les dommages causés par l'incendieNote de bas de page 12 et la propagation de l'incendie à ces endroits sont abordés dans d'autres sections du présent rapport.
L'espace situé au-dessus du revêtement du plafond du poste de pilotage et du plafond de la cabine est un « espace inoccupé » (voir Figure 2). Dans l'avion MD-11 de Swissair, l'espace inoccupé était divisé au niveau de la paroi arrière du poste de pilotage. Sur le côté droit, la paroi en aluminium du poste de pilotage se prolongeait verticalement pour constituer la division. Sur le côté gauche, un seul rideau anti-fumée vertical était installé (voir Figure 3).
Le rideau anti-fumée situé au-dessus de la moitié gauche de la paroi arrière du poste de pilotage était un rideau fabriqué de tissu enduit d'un élastomère en nylon et qui était suspendu à une tringle de rideau incurvée en alliage d'aluminium. Des fermetures à bouclettes de nylonNote de bas de page 13 étaient utilisées sur presque toute la périphérie extérieure du tissu pour le fixer à la tringle du rideau, et pour le fixer à la structure voisine de l'avion le long du côté droit et du bas. Une bande adhésive isolante pour matelas d'isolation thermique et acoustique (matelas isolant) était posée sur tout le bord supérieur du rideau anti-fumée pour masquer les interstices entre la tringle et les matelas isolants voisins. Le rideau anti-fumée était conçu avec les ouvertures suivantes : trois près de l'extrémité supérieure du rideau pour permettre aux câbles des poignées coupe-feu des moteurs de traverser, et deux près du centre du rideau pour faciliter l'installation des gaines d'air dans le poste de pilotage.
La réglementation exige l'installation d'un rideau anti-fumée entre le poste de pilotage et l'arrière de l'avion dans les configurations avion cargo et avion de transport mixte fret-passagers. Toutefois, il n'y a aucune exigence réglementaire sur l'installation de rideaux anti-fumée dans les avions de transport de passagers, et rien n'exige qu'un rideau anti-fumée satisfasse à une norme de classification de feu ou de résistance au feu lorsqu'il est installé dans un avion de transport de passagers. Quoi qu'il en soit, le rideau anti-fumée était certifié comme satisfaisant aux exigences générales des matériaux d'aéronef et il avait été installé pendant la construction de l'avion.
L'examen d'autres avions MD-11 de la flotte de Swissair a permis de découvrir qu'il y avait des ouvertures dans les rideaux anti-fumée et dans les zones voisines de ce rideau. Certaines de ces ouvertures se trouvaient au niveau des guide-fils et des chemins de câbles qui traversent la paroi arrière du poste de pilotage ou passent au-dessus de celle-ci. Le bord supérieur de la paroi arrière droite du poste de pilotage, près de la référence 383, comprend une découpe pour permettre le passage des faisceaux de fils et des guide-fils. (Voir Figure 4 et Figure 5.)
Trois longs guide-filsNote de bas de page 14 de 102 centimètres (cm) (40 po) et cinq faisceaux de fils passaient par-dessus la paroi arrière du poste de pilotage à cet endroit et continuaient vers l'arrière par-dessus l'office 2, entre les références 383 et 420 (voir Figure 3, Figure 4, Figure 5, et Figure 7). Il n'était pas nécessaire que les extrémités des guide-fils soient scellées et elles ont été découvertes non scellées dans d'autres avions MD-11 qui ont été examinés. Ces guide-fils et faisceaux de fils sont fixés par des sangles à une série de supports de fils situés aux références 383, 392, 401, 410 et 420. Le support de fils situé à la référence 383 présente un léger angle par rapport à la paroi du poste de pilotage, située directement au-dessous. Le bord supérieur de ce support, et les faisceaux de fils qui y sont fixés, sont en contact avec le matelas isolant recouvert de poly(éthylène téréphtalate) (PET) métallisé. Chacun des guide-fils sort d'une distance différente vers l'avant de la paroi du poste de pilotage à cause de l'angle que fait le support par rapport à la paroi.
Habituellement, la partie en saillie vers l'avant du guide-fils extérieur est la plus courte des trois, tandis que celle du guide-fils intérieur est la plus longue. Ces longueurs, mesurées à partir du support, varient de 2,5 à 8 cm environ (de 1 à 3 po) pour les guide-fils extérieur et médian. Le guide-fils intérieur n'avait été utilisé dans aucune des installations de réseau de divertissement de bord (RDB). La découpe se prolongeait vers le bas sur environ 8 cm (3 po) à partir du dessus de la paroi et elle était d'une largeur d'environ 48 cm (19 po). Un morceau de mousse de polyéthylène alvéolaire renfermant des additifs ignifugeants (c.-à-d., numéro de pièce NBN6718-83, spécification de matériau de Douglas (DMS) 1954, classe 1, qualité 4101) est installé à cet endroit pour agir comme matériau de remplissage de la découpe.
Entre les références 366 et 383, un certain nombre de supports de fils sont installés longitudinalement. Ces supports servent à soutenir des faisceaux de fils qui sont acheminés à partir de l'arrière du poste de l'observateur et qui descendent dans le compartiment avionique; cette zone est couramment désignée « descente de câbles en échelle »Note de bas de page 15. L'arrière du support supérieur de l'« échelle » se trouve près du côté extérieur de la découpe dans la paroi du poste de pilotage (voir Figure 3 et Figure 5). Les supports et bon nombre des faisceaux de fils sont montés tout contre le contour incurvé des matelas isolants recouverts de PET métallisé qui sont posés sur les cadres du fuselage et qui en épousent étroitement le contour.
Tout juste derrière le côté droit de la paroi arrière du poste de pilotage, au-dessus de l'office 2, un atténuateur de bruit avait été installé autour de l'embranchement de la gaine verticale d'air conditionné (voir Figure 6). L'atténuateur de bruit utilise un matelas isolant recouvert de PET métallisé et fixé aux deux extrémités par des attaches à bouclettes de nylon.
Une deuxième type de mousse de polyéthylène alvéolaire (numéro de pièce ABE7049-41) avait été utilisé autour des borniers de désembuage du pare-brise, sur le côté gauche du poste de pilotage. Un échantillon du second type de mousse (numéro de pièce ABE7049-41) avait été retiré d'un avion MD-11 de Swissair et testé. Lorsque l'éprouvette de cet échantillon avait été exposée à une petite flamme, l'éprouvette s'était enflammée facilement et avait brûlé.
Les deux mousses étaient conformes à la spécification DMS 1954, classe 1, qualité 4101, qui stipule que la mousse doit contenir des additifs ignifugeants et être certifiée en fonction d'un essai de combustion verticale d'une durée de 12 secondes exigé par l'annexe F de la FAR 25.853. La documentation indique que les deux types de mousse étaient conformes à l'annexe F de la FAR 25.853 pour les composants de l'aménagement intérieur des avions commerciaux.
Le code de produit 37076 de la fiche signalétique de sécurité de produit du constructeur pour l'EthafoamMD 4101 de Dow Chemical, numéro de pièce NBN6718-83, datée du 23 août 1993, et les renseignements à jour sur le produit, indiquent que cette mousse de polyéthylène est combustibleNote de bas de page 16 et qu'elle ne devrait pas être exposée à la flamme ni à toute autre source d'inflammation.
Aucun morceau de mousse n'a été récupéré du poste de pilotage de l'avion en question.
Dans les avions MD-11 de Swissair, la partie avant de l'atténuateur se termine tout juste à côté du bord inférieur droit du rideau anti-fumée et de la gaine de ventilation de l'office 2. La gaine de ventilation de l'office, qui est conçue pour évacuer les odeurs et l'air chaud de l'office lorsqu'elle est utilisée, n'était pas raccordée à la partie supérieure de l'office 2, puisque l'office 2 n'était pas alimentée électriquement et qu'elle n'était pas en service. Un embout en élastomère de silicone recouvrait la gaine de ventilation pour la fermer. L'embout se trouvait entre le côté arrière de la paroi arrière du poste de pilotage et le côté avant d'une des trois gaines verticales (voir Figure 4 et Figure 6).
Cinq faisceaux de fils et trois guide-fils courent vers l'arrière à partir du poste de pilotage et passent sur le dessus des gaines verticales. La plupart des faisceaux de fils descendent du support de fils situé à la référence 420 pour passer sous le déflecteur de rampe de la porte à battant D1. Cette descente des faisceaux de fils s'appelle généralement la « descente de câbles en cascade » (voir Figure 7). Deux des chemins de câbles, soit FDC et FBC, sont réunis et fixés ensemble à un tube de soutien du plafond situé à peu près à la référence 427. Dans le présent rapport, on désigne la pièce de fixation de « collier jumelé ». Le déflecteur de rampe sert à réduire au minimum le risque que le battant de la porte des passagers avant droite endommage les fils voisins si son ressort se brisait. Le battant de la porte se déplace avec la porte de la cabine des passagers lorsque la porte est soulevée ou abaissée.
1.6.2 Système de ventilation
1.6.2.1 Généralités
L'air extérieur est pressurisé par chacun des trois moteurs. Cet air pressurisé est prélevé des moteurs pour fournir une source d'air chaud et sous pression servant à faire fonctionner les divers sous-systèmes de ventilation, y compris les groupes de conditionnement d'air et les circuits de pressurisation (voir Figure 8). Les trois groupes de conditionnement d'air se trouvent dans des compartiments situés à la gauche et à la droite du logement de l'atterrisseur avant. Chaque groupe de conditionnement d'air fournit de l'air conditionné à un collecteur commun situé sous le plancher de la cabine.
L'air venant du collecteur commun circule dans un réseau de distribution autonome de tuyaux et de gaines et il entre dans le poste de pilotage et la cabine par l'intermédiaire de buses situées dans tout l'avion. Des anomalies, comme des fuites de joint d'huile moteur, peuvent parfois laisser s'infiltrer des contaminants, comme l'huile moteur, dans le circuit de prélèvement d'air. La pyrolyse de ces contaminants peut engendrer de la fumée et des odeurs dans l'approvisionnement en air conditionné. Des incidents au cours desquels de la fumée ou des odeurs s'étaient infiltrées dans le poste de pilotage et la cabine par le circuit de prélèvement d'air à la suite d'une contamination ont souvent été signalés.
L'air provenant du poste de pilotage, de la cabine et du reste du fuselage sous pressionNote de bas de page 17 est évacué à l'extérieur par l'intermédiaire d'une vanne de régulation échappement cabine située sur le côté gauche de l'avion, légèrement en avant de la voilure.
Pour des opérations normales, le système de conditionnement d'air est commandé automatiquement par le contrôleur du système de ventilation (ESC). Le système de ventilation peut aussi être commandé manuellement par les pilotes au moyen du tableau de commande du système de ventilation (ASCP) situé sur le tableau de commutation supérieur dans le poste de pilotage (voir Figure 8 et Figure 11).
Des matelas isolants sont largement utilisés partout dans l'avion pour envelopper les gaines de distribution d'air afin d'offrir une isolation thermique. Ils sont aussi installés entre tous les cadres du fuselage et, à certains endroits, une deuxième couche de ces matériaux est posée par-dessus les cadres. Ces matelas isolants fournissent une barrière contre les températures extérieures chaudes ou froides et contre le bruit qui pourrait autrement entrer dans le poste de pilotage et dans la cabine.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
1.6.2.2 Système de distribution d'air – Poste de pilotage et cabine
Dans la configuration des MD-11 de Swissair, l'air conditionné provenant du collecteur d'air commun situé sous le plancher de la cabine est distribué à cinq zones par des tuyaux et des gaines; la zone 1 est le poste de pilotage, et les zones 2 à 5 sont des zones situées à l'intérieur de la cabine (voir Figure 8).
Les gaines et les tuyaux alimentent continuellement le poste de pilotage de 500 pieds cubes d'air conditionné frais par minute (pi3/min), quel que soit le réglage du débit sélectionné pour la cabine. L'air pénètre dans le poste de pilotage par de nombreux évents, y compris trois buses reliées aux diffuseurs de plafond, les diffuseurs de fenêtre, les buses d'air individuel supérieures et les buses des chauffe-pieds (voir Figure 8, Figure 9 et Figure 10). Tous ces évents du poste de pilotage peuvent être complètement fermés sauf le diffuseur supérieur central, dont l'ouverture minimale est fixe. Des commandes manuelles servent à régler l'écoulement d'air à partir du diffuseur de plafond et des diffuseurs de fenêtre. Trois commandes rotatives du diffuseur de plafond sont situées à l'arrière du revêtement du plafond suspendu. Le curseur de commande du diffuseur de la fenêtre droite se trouve dans le revêtement du plafond à droite, au-dessus du poste du copilote, derrière le pare-brise. Le curseur de commande du diffuseur de la fenêtre gauche se trouve dans le revêtement du plafond à gauche, derrière le poste du commandant de bord, tout juste à l'intérieur de la fenêtre arrière gauche.
L'air dans le poste de pilotage circule généralement à partir des diffuseurs, puis descend et passe autour des sièges des membres de l'équipage de conduite, et se déplace vers l'avant au-delà des pédales de direction pour arriver dans le compartiment avionique, situé sous le plancher du poste de pilotage. (Voir Figure 10.)
Bien que l'air conditionné arrivant des trois groupes de conditionnement d'air soit mélangé dans le collecteur commun avant de pénétrer dans les gaines de distribution, la proximité à l'intérieur du collecteur de l'entrée d'air du groupe de conditionnement d'air 1 et des sorties du poste de pilotage et de la zone 5 est telle qu'une odeur émanant du groupe de conditionnement d'air 1 pourrait atteindre le poste de pilotage et la zone 5 avant d'atteindre les autres zones.
L'air conditionné destiné aux différentes zones de la cabine est canalisé vers les chambres de tranquillisation de plafond et dirigé vers le bas en direction du plancher. Cet air circule autour des sièges des passagers, puis se déplace vers les boîtes de ventilation d'air situées le long des deux côtés du plancher de la cabine. L'air provenant de ces boîtes de ventilation est dirigé dans des tunnels sous le plancher vers la vanne de régulation échappement. Cette vanne comprend deux petites trappes situées sur le côté inférieur gauche du fuselage, à la référence 920. Ces trappes sont réglées en position ouverte ou fermée pour contrôler la pressurisation de la cabine.
1.6.2.3 Système de ventilation de la cabine
Le système de ventilation de la cabine à bord du MD-11 est pourvu d'un mode (ECON)Note de bas de page 18 qui mélange l'air conditionné frais avec l'air recirculé de la cabine pour le distribuer aux zones de la cabine (voir Figure 8). Le système de ventilation cabine comprend quatre ventilateurs de recirculation et un ventilateur d'air individuel, appelé ventilateur de buses d'air individuel, tous situés au-dessus du plafond dans les parties avant et centrale de la cabine. En mode ECON, les ventilateurs de recirculation aspirent l'air venant du dessus du plafond. Cet air est alors mélangé avec l'approvisionnement d'air conditionné frais avant d'être redistribué dans la cabine. Normalement, les quatre ventilateurs de recirculation fonctionnent continuellement, mais on peut les couper manuellement en sélectionnant dans le poste de pilotage l'interrupteur ECON, le commutateur CABIN BUS ou le sélecteur SMOKE ELEC/AIR. L'ESC arrête automatiquement les ventilateurs de recirculation lorsqu'il y a une demande de réduction de la température cabine ou lorsque se produit une surcharge d'alternateur.
Le ventilateur de buses d'air individuel fournit un approvisionnement constant d'air aux buses d'air individuel des passagers et il fonctionne indépendamment du mode ECON et de la sélection de température. Ce ventilateur est arrêté au moyen du commutateur CABIN BUS réglé sur la position OFF, ou au moyen du sélecteur SMOKE ELEC/AIR réglé à la position 3/1 OFF.
Il y a un sélecteur à molette PAX LOAD sur le tableau de commande du système de ventilation d'air qui permet aux pilotes d'entrer le nombre de passagers à bord à la dizaine près. Le contrôleur programme le débit d'air conditionné se rendant à la cabine en fonction de cette entrée. En configuration ECON ON, le programme de conditionnement d'air du MD-11 est déterminé en fonction d'une combinaison de 10 pieds cubes (pi3) d'air frais pour chaque passager et de 700 pi³ d'air provenant de chacun des quatre ventilateurs de recirculation. Swissair a choisi d'utiliser une valeur implicite de 260 passagers, les quatre ventilateurs de recirculation étant en circuit. Cette valeur par défaut donne un mélange d'air de 5 400 pi³/min d'air frais et recirculé à la cabine. En configuration ECON OFF, le programme de conditionnement d'air est réglé à 5 500 pi3/min pour la cabine.
Les ventilateurs de recirculation et le ventilateur de buses d'air individuel comprennent chacun un filtre à particules hautement efficace (numéro de pièce AB0467286 de la Donaldson Company), fabriqué au moyen d'un élément en microfibre de verre plissée et pourvu de séparateurs en aluminium pour conserver l'espacement des plis. Le filtre a fait l'objet d'un essai de durée de vie en fonction de la norme 52.1 de l'American Society of Heating, Refrigeration and Air Conditioning EngineersNote de bas de page 19, il satisfait à la norme militaire (MIL-STD)-282Note de bas de page 20, et sa finesse est fonction de sa capacité à piéger et à retenir des particules d'huile dont la taille est inférieure à 0,3 micromètre (micron)Note de bas de page 21.
La finesse du filtre lui permet de retirer 95 % de toutes les particules de 0,3 micron, et divers mécanismes de capture à l'intérieur du filtre sont encore plus efficaces à retenir des particules plus petites et plus grandes que 0,3 micron. Par exemple, la plupart des particules de fumée de tabac, dont la taille est habituellement comprise entre 0,01 et 1,0 micron, seraient retenues, comme le seraient des particules plus grosses, notamment celles qui sont produites lorsque le matériau de recouvrement de l'isolant thermique et acoustique brûle.
Au cours des premiers moments de l'incendie à bord de l'avion, l'efficacité du filtre aurait augmenté avec le temps à mesure que des particules auraient été piégées dans ce dernier. On s'attendrait à ce que les filtres retiennent la plupart des particules de fuméeNote de bas de page 22 de l'air recirculé au cours des premiers instants de l'incendie en vol. Bien que ce filtre ne soit pas classé comme étant d'un type qui élimine les odeurs, certaines odeurs associées à des contaminants particulaires seraient probablement éliminées ou réduites, tandis que les odeurs gazeuses traverseraient le filtre.
1.6.2.4 Conditionnement d'air – Système d'isolement de la fumée
Si de la fumée ou des émanations arrivent par le système de conditionnement d'air, l'équipage de conduite est formé pour utiliser la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air (voir l'Annexe B). La liste de vérifications amène l'équipage de conduite à isoler la source de la fumée en réglant l'interrupteur ECON sur OFF. Si la source de la fumée n'est pas isolée, la prochaine mesure sur la liste de vérifications, après qu'on a enfoncé le bouton-poussoir AIR SYSTEM sur MANUAL, est de régler de nouveau l'interrupteur ECON sur ON et de couper un des groupes de conditionnement d'air. Si cette mesure ne permet pas d'isoler la source de la fumée, on remet en circuit le groupe de conditionnement d'air et on en coupe un autre. Chacun des trois groupes de conditionnement d'air peut être arrêté individuellement afin qu'on puisse déterminer lequel des trois est à l'origine de la fumée. Pour arrêter les groupes de conditionnement d'air, on règle le système de ventilation sur MANUAL, puis on coupe le groupe de conditionnement d'air approprié sur le tableau de commande du système de ventilation. Il s'ensuit que la vanne de régulation de débit du groupe de conditionnement d'air en question se ferme. Si la fumée diminue, la source d'air de prélèvement du groupe de conditionnement d'air peut être coupée, et la vanne d'isolement respective peut être ouverte.
1.6.3 Mode amerrissage forcé
En cas d'amerrissage forcé, on peut configurer l'avion pour cet amerrissage en actionnant le bouton-poussoir DITCHING situé à la droite du tableau de commande de pressurisation cabine, sur le tableau de commutation supérieur. Lorsqu'il est enfoncé, ce bouton envoie un signal au contrôleur du système de ventilation, lequel commande alors les divers systèmes pour préparer l'avion à un amerrissage forcé. L'altitude cabine existante est maintenue au cours de la descente jusqu'à ce que la pressurisation de l'avion atteigne une différence de 0, ou jusqu'à ce que l'avion descende à 2 500 pi, altitude à laquelle les groupes de conditionnement d'air sont arrêtés. Pour maintenir l'étanchéité du fuselage, les portes d'air dynamique des groupes de conditionnement d'air, la vanne de régulation échappement et les clapets à venturi de l'avionique et du tunnel arrière sont fermés.
L'examen de l'épave de SR 111 a révélé qu'un groupe de conditionnement d'air avait été arrêté. Aucun des autres composants dont on s'attendait qu'ils soient fermés si le mode DITCHING avait été sélectionné n'a été découvert dans la configuration amerrissage forcé. Voilà qui indiquerait que le bouton-poussoir DITCHING n'avait pas été enfoncé; toutefois, il n'a pas été possible de déterminer quels effets l'incendie aurait pu avoir sur l'état de service du système associé.
1.6.4 Système de vol automatique
Le MD-11 est équipé d'un système de vol automatique (AFS) qui fait partie intégrante du système de pilotage automatique et manuel de l'avion. Le système AFS comprend deux calculateurs de commandes de vol (FCC) à deux voies, deux pilotes automatiques intégrés, des directeurs de vol (FD), une automanette et des commandes de réglage moteur. Il est toujours possible de contourner manuellement les commandes de vol automatique et l'automanette.
Le matériel du système AFS se compose de deux FCC, d'un panneau des commandes de vol (FCP) à deux voies, d'un tableau de commande du système AFS, d'une servocommande de limite de sortie des volets en duplex, d'une servocommande de sensation artificielle de la gouverne de profondeur en duplex, d'une servocommande de l'automanette en duplex et de deux transducteurs de restitution des efforts des volants de pilotage. Le système AFS assure un atterrissage automatique de catégorie IIIB opérationnel même en cas de panne ainsi que la course à l'atterrissage, un dispositif de détection et d'avertissement de cisaillement du vent intégré au pilote automatique (AP), un FD et un moyen d'annulation du guidage à l'automanette.
Le panneau des commandes de vol, situé sur le tableau de commande de l'auvent, assure l'interface entre l'équipage de conduite, le système AFS et le système de gestion de vol (FMS). Le système AFS intègre la vitesse et les caractéristiques de protection de la trajectoire de vol qui contournent automatiquement les commandes de vitesse ou de trajectoire de vol sélectionnées, ou les deux, pour éviter une survitesse ou une sous-vitesse.
Chaque FCC à deux voies possède justement deux voies qui fonctionnent de façon similaire. Chaque voie possède deux processeurs centraux qui surveillent continuellement l'état de l'autre voie. Une anomalie détectée dans la voie qui est en service débranche automatiquement la fonction en question. Par exemple, une anomalie du pilote automatique se traduira par le débrayage de ce dernier. Si cela devait arriver, le circuit d'avertissement de débrayage du pilote automatique ferait clignoter une alerte rouge « AP OFF » sur l'annonciateur de mode de vol et entendre un avertissement sonore cyclique (klaxon). On peut couper le klaxon, après au moins un cycle de fonctionnement de sa tonalité, en appuyant sur l'un ou l'autre des interrupteurs de débrayage du pilote automatique se trouvant sur la poignée extérieure des volants de pilotage ou en réembrayant le pilote automatique.
Chaque FCC reçoit ses entrées des sources suivantes :
- les centrales inertielles de référence 1, 2, 3 (IRU-1, -2, -3);
- les calculateurs de données aérodynamiques 1, 2 (ADC-1, -2);
- les radioaltimètres 1, 2 (RA-1, -2);
- les deux systèmes d'atterrissage aux instruments (ILS), les calculateurs de gestion de vol 1, 2 (FMC-1, -2);
- les trois modules de commande moteur des régulateurs automatiques à pleine autorité redondante (FADEC), les données des capteurs de commande de vol, les références sélectionnées à partir du panneau des commandes de vol;
- d'autres renseignements, comme le signal de référence air-sol, la position du train d'atterrissage et des volets.
Les FCC envoient des signaux numériques au système de visualisation électronique (EIS) pour affichage, et des signaux de commande aux actionneurs pour la commande en tangage, en roulis et en lacet ainsi que pour la commande de la poussée des moteurs.
1.6.5 Système de visualisation électronique
L'EIS du MD-11 comprend six écrans d'affichage (DU) montés sur le tableau de bord. Les écrans 1, 2 et 3 se trouvent sur le côté gauche; les écrans 4, 5 et 6 se trouvent sur le côté droit (voir Figure 11). Les écrans d'affichage du commandant de bord (écrans 1, 2 et 3) reçoivent les renseignements à afficher du module électronique d'affichage (DEU) 1, tandis que les écrans d'affichage du copilote (écrans 4, 5 et 6) reçoivent des renseignements du DEU 2. Le DEU 3 (auxiliaire) est continuellement disponible comme écran de relève et il peut être sélectionné par l'un ou l'autre des pilotes par l'intermédiaire du tableau de sélection d'entrée des sources du système EIS.
Les écrans d'affichage 1 et 6 affichent normalement les renseignements de vol primaires, comme le cap, l'assiette, la vitesse, la pression barométrique et la hauteur radioaltimétrique, la vitesse verticale, l'écart vertical et latéral, les limites d'utilisation de l'avion, les configurations et les modes de vol.
Les écrans d'affichage 2 et 5 sont normalement des écrans d'affichage de navigation. L'écran d'affichage de navigation présente les quatre modes d'utilisation suivants :
- Le mode MAP affiche le plan de vol actif par rapport à la position et au cap de l'avion sous la forme d'une représentation graphique; c'est le mode normalement utilisé pour la navigation avec le FMS.
- Le mode PLAN affiche le plan de vol seulement, la maquette de l'avion étant centrée sur le prochain point de cheminement.
- Le mode VOR affiche une rose des vents, deux aiguilles de relèvement (pour les radiophares non directionnels (NDB) et les radiophares omnidirectionnels à très haute fréquence (VOR), un indicateur d'écart de route (pour la navigation et les approches VOR), des caps, la vitesse-sol, la vitesse vraie (TAS), la distance déterminée par un équipement de mesure de distance et des renseignements météorologiques; ce mode sert habituellement à la navigation et aux approches classiques (NDB et VOR).
- Le mode APPR affiche la même information que le mode VOR, sauf que la source de la route est un récepteur ILS plutôt qu'un VOR; ce mode sert aux approches ILS sur faisceau avant et sur faisceau arrière.
Tous les modes affichent des renseignements sur le vent, l'heure et le prochain point de cheminement.
L'écran d'affichage 3 est normalement réservé à l'affichage des indications moteur et des alertes (EAD), lesquelles renferment des renseignements comme le rapport de pression (EPR), la température des gaz d'échappement, N1Note de bas de page 23, N2Note de bas de page 24, le débit de carburant et les messages d'alerte. L'écran d'affichage 4 sert à l'affichage du système, lequel montre normalement les données secondaires du moteur (c.-à-d., température, pression et quantité d'huile moteur), ou les pages synoptiques des systèmes de bordNote de bas de page 25. Les pages synoptiques affichent la configuration et l'état des systèmes hydraulique, électrique, de ventilation et de carburant. Elles comprennent aussi une page de configuration, une page d'indications diverses, une page d'état du système et une page conséquence (voir le tableau 6).
L'alimentation électrique est assurée par le bus de courant alternatif (c.a.) d'urgence de gauche de 115 volts (V) pour les écrans d'affichage 1 et 3, par le busNote de bas de page 26 c.a. d'urgence de droite de 115 V pour les écrans 4, 5 et 6, et par le bus 1 de 115 V c.a. pour l'écran 2. Si les trois alternateurs entraînés par moteur devaient tomber en panne, les écrans d'affichage 1 et 3 recevraient automatiquement leur alimentation électrique de la batterie de l'avion. Lorsque l'alternateur éolien est déployé et réglé au mode électrique, les écrans 1, 3, 4, 5 et 6 peuvent être alimentés, et la charge de la batterie de l'avion sera maintenue.
Si les données d'information de vol allant à l'écran d'affichage ne sont pas valides, ces données sont retirées de l'écran et remplacées par un « X » rouge ou jaune couvrant la zone des données supprimées. Un « X » rouge nécessite une mesure immédiate de l'équipage de conduite pour qu'il rétablisse les données perdues. Si le « X » est jaune, l'équipage de conduite peut décider de retarder le rétablissement des données. La panne d'un DEU est indiquée par un « X » rouge affiché sur toute la surface de l'écran. La perte de l'alimentation électrique à un écran d'affichage se traduit par un écran vide. La perte de tout écran d'affichage amène la reconfiguration automatique des écrans qui restent. Le circuit logique de priorité utilisé pour la reconfiguration consiste à maintenir un écran principal de vol (PFD) disponible en tout temps. En effet, si seulement un écran d'affichage fonctionnait, ce serait l'écran principal de vol. En cas de défaillance du circuit logique de priorité, l'avant-dernier écran d'affichage en service afficherait les indications moteur et les alertes.
1.6.6 Système de gestion de vol
Le FMS sert à la planification du vol, à la navigation, à la gestion des performances, au guidage de l'avion et au suivi de la progression du vol. Il fournit à l'équipage de conduite un moyen de sélectionner divers modes de commande de vol par l'intermédiaire du panneau des commandes de vol, et il permet d'entrer des plans de vol et d'autres données par l'intermédiaire du bloc de commande et d'affichage multifonctions (MCDU) (voir Figure 11). La progression du vol est suivie par l'intermédiaire du MCDU et du système EIS.
Après l'entrée des données par l'équipage de conduite, les FMC génèrent un profil de trajectoire de vol, par exemple, de l'aéroport d'origine à l'aéroport de destination. Le FMC guide alors l'avion le long de ce profil en fournissant des commandes en roulis, des demandes de mode, des vitesses et des altitudes cibles ainsi que des commandes en tangage (pendant que l'avion est « sur la trajectoire » pendant la descente) aux calculateurs de commande de vol.
La base des données de navigation du FMC comprend la plupart des renseignements disponibles aux pilotes à partir des cartes de navigation et des cartes d'approche. Le plan de vol qui avait été entré dans le FMS avant le départ de l'aéroport JFK, à New York, ne comprenait pas l'aéroport international de Halifax. Par conséquent, lorsque les pilotes ont décidé de se dérouter et d'atterrir à l'aéroport de Halifax, il aurait fallu reprogrammer quelque peu le FMS. Avant que les pilotes puissent sélectionner une approche aux instruments à partir de la base de données du FMC, il fallait programmer la nouvelle destination de Halifax dans le FMS.
Le MD-11 n'est pas certifié pour exécuter des approches sur faisceau arrière au moyen du FMS. Le FMS empêche l'affichage et la sélection d'approches sur faisceau arrière à partir de la base des données de navigation. Des moyens de navigation et d'approche sont à la disposition de l'équipage de conduite.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
1.6.7 Avertissements et alertes
Le système d'alerte du MD-11 comprend le voyant d'avertissement principal et le voyant de mise en garde principal sur l'auvent. Les alertes sont affichées dans le poste de pilotage sur l'écran EAD, sur l'écran d'affichage du système, ou les deux. Les alertes sont classées selon quatre niveaux (3, 2, 1 et 0) et elles sont présentées en trois colonnes dans le tiers inférieur de l'écran d'affichage des indications moteur et des alertes.
Les alertes de niveau 3 (rouge) indiquent des conditions opérationnelles d'urgence qui nécessitent l'attention immédiate de l'équipage de conduite et des mesures correctives ou compensatoires immédiates de la part des pilotes. Toutes les alertes de niveau 3 sont accompagnées d'un avertissement sonore. Les alertes de niveau 2 (jaune) indiquent des conditions anormales d'un système opérationnel qui nécessitent l'attention immédiate de l'équipage de conduite et une mesure corrective ou compensatoire subséquente de la part des pilotes. Les alertes de niveau 1 (jaune) peuvent nécessiter une mesure d'entretien avant le décollage, une inscription dans le carnet de bord, ou la confirmation de la configuration désirée d'un système. Une alerte jaune de niveau 1 en vol peut nécessiter une mesure de la part de l'équipage de conduite dès qu'elle se manifeste et elle nécessite une inscription dans le carnet de bord de l'avion. Les alertes de niveau 0 (cyan) indiquent habituellement de l'information sur l'état des systèmes de bord ou des systèmes opérationnels.
Si un système génère une alerte ou un avertissement, le bouton pertinent sur le tableau de commande d'affichage du système (SDCP) s'allume, ce qui permet aux pilotes d'identifier de quel système il s'agit. En appuyant sur le bouton lumineux du système en question sur le SDCP, on fait apparaître la page synoptique du système en question sur l'écran du système (SD), ce qui éteint le bouton lumineux, l'avertissement principal et les voyants de mise en garde, s'ils s'étaient allumés. Le tableau 6 montre les boutons lumineux disponibles et leur page synoptique connexe.
Bouton lumineux | Page synoptique des systèmes connexes |
---|---|
ENG | moteur |
HYD | système hydraulique |
ELEC | système électrique |
AIR | système de ventilation |
FUEL | système carburant |
CONFIG | commandes de vol et train d'atterrissage |
MISC | alertes et conséquences pour divers systèmes |
Le FDR a révélé que la page synoptique du système de ventilation (page Air) avait été sélectionnée par les pilotes entre 1 h 11 min 49 s et 1 h 12 min 52 s, peu après qu'une odeur inhabituelle eut été décelée pour la première fois dans le poste de pilotage. Cette page affiche le fonctionnement des collecteurs du système de ventilation, les températures des gaines, les températures de zone, les détecteurs de fumée et de chaleur dans les soutes, les affichages de pressurisation, l'affichage de l'air de prélèvement et les affichages des groupes de conditionnement d'air. Outre la sélection de la page Air de l'équipage de conduite, le FDR enregistre seulement les données suivantes qui sont potentiellement reliées : groupes de conditionnement d'air 1, 2 et 3 OFF, chaleur dans la soute avant et la soute arrière, air de prélèvement 1, 2 et 3 OFF, avertissement de la pressurisation cabine et avertissement sur l'altitude cabine. Le FDR n'enregistre pas les températures individuelles des gaines ou des zones, les signaux de fumée dans la cabine et dans les toilettes, ni aucun autre signal d'un système qui est affiché sur le SDCP.
1.6.8 Instruments de secours
Deux instruments de secours (un qui affiche l'assiette de l'avion et un autre qui affiche l'altitude et la vitesse de l'avion) sont situés au centre de la partie inférieure du tableau de bord, à la disposition du commandant de bord ou du copilote (voir Figure 11). Une alimentation électrique indépendante autonome n'avait pas été prévue pour les communications ou la navigation électronique de secours, et elle n'était pas exigée par la réglementation.
L'indicateur d'assiette de secours (SAI), parfois appelé horizon gyroscopique, fournit une référence verticale stabilisée qui rend possible la surveillance visuelle de l'assiette de l'avion en tangage et en roulis par rapport au plan horizontal. Le SAI de SR 111 était un instrument autonome, et l'alimentation électrique était assurée par le bus batterie de l'avion. Un drapeau d'avertissement s'affiche sur la face de l'instrument si l'alimentation électrique arrivant à ce dernier est interrompue ou supprimée, ou si la vitesse de rotation du gyroscope ralentit à une valeur prédéterminée sous laquelle le gyroscope ne tourne pas suffisamment vite pour fournir une information fiable.
L'altimètre et l'anémomètre de secours sont combinés en un seul instrument. Ils sont branchés au circuit de prise dynamique auxiliaire et de prise statique secondaire, et ils ne nécessitent aucune alimentation électrique pour remplir leur fonction; le vibreur a besoin de courant pour empêcher les aiguilles de coller.
L'alimentation principale de l'éclairage intégré des deux instruments de secours était fournie par le bus 1 de 115 V c.a. (phase B) par l'intermédiaire du disjoncteur B-523 (étiqueté MAIN & PED INSTR PNL LTG), situé à la position A-13 sur le tableau de distribution principal inférieur. Le câblage de l'éclairage intégré du circuit d'alimentation électrique principal court sous le plancher du poste de pilotage et ne traverse aucun endroit où des dommages causés par la chaleurNote de bas de page 27 avaient été observés; par conséquent, il n'y a aucune raison de soupçonner que l'éclairage avait cessé de fonctionner. L'alimentation électrique de secours pour l'éclairage intégré était fournie par le bus c.a. d'urgence de gauche.
Un compas magnétique de secours, à lecture directe (voir Figure 11) est installé dans le poste de pilotage devant le panneau supérieur, sur le montant central du pare-brise. L'instrument n'a besoin d'aucune alimentation électrique pour bien fonctionner. L'alimentation électrique destinée à l'éclairage du compas était fournie par le bus 1 de 28 V en courant continu (c.c.). L'interrupteur d'éclairage du compas se trouve sur le tableau de commutation supérieur, près du compas. Le compas de secours est normalement maintenu en position rangée, et l'éclairage, éteint. Comme c'est le cas pour tous les compas magnétiques à lecture directe, l'exactitude de l'instrument à bord du MD-11 se dégrade lorsque l'avion accélère ou décélère et qu'il ne se trouve pas en vol rectiligne en palier.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
1.6.9 Systèmes de télécommunication
1.6.9.1 Généralités
Pour les communications extérieures, les avions MD-11 de Swissair sont équipés de cinq radios distinctes en plus d'une radio à très haute fréquence (VHF) portative en cas d'urgence, qui est rangée dans un support monté sur la paroi arrière du poste de pilotage. Les cinq radios comprennent trois radios VHF et deux radios à haute fréquence (HF), toutes commandées par les panneaux radio montés sur le pylône arrière, entre les deux sièges des pilotes.
Les communications phoniques internes entre les pilotes se font directement de vive voix ou par les micros-rails fixés aux casques d'écoute. Chaque masque à oxygène d'équipage de conduite comprend un microphone intégré qui est actionné au moyen d'un commutateur d'émission à bascule. Une position du commutateur sert aux communications internes, et l'autre position sert à émettre sur les radios VHF et HF extérieures. Un autre moyen de communication interne est assuré par l'intermédiaire d'un interphone de vol qui relie tous les postes des agents de bord et le poste de pilotage ainsi qu'un système de sonorisation cabine (PA) qui permet aux pilotes et à l'équipage de cabine de s'adresser aux passagers se trouvant dans la cabine et dans les toilettes.
Le bruit ambiant à l'intérieur d'un MD-11 pendant le vol de croisière à haute altitude est suffisamment faible pour que les pilotes n'aient habituellement pas besoin de se servir des casques d'écoute et des micros-rails pour les communications internes. La politique de Swissair exige des équipages de conduite qu'ils utilisent cet équipement pour les vols se déroulant sous 15 000 pi. Dans certains pays, les exigences réglementaires imposent l'utilisation de cet équipement sous certaines altitudes. Par exemple, la FAR 121.359(g) des États-Unis impose leur utilisation sous 18 000 pi aux avions équipés pour enregistrer des signaux audio ininterrompus reçus d'un micro-rail ou d'un microphone de masque à oxygène, conformément à la FAR 25.1457(c)(5). Le Règlement de l'aviation canadien (RAC) (voir le RAC 625.33 II (5)) exige leur utilisation sous 10 000 pi.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
1.6.9.2 Système d'interphone
L'avion était équipé d'un système d'interphone pour faciliter la communication entre les membres d'équipage de l'avion. Dans les MD-11 de Swissair, les combinés téléphoniques, les boutons d'appel et les interrupteurs de réinitialisation sont installés à neuf postes dans tout l'avion : un dans le poste de pilotage et un à chaque poste d'agent de bord. Des appels peuvent être faits à partir de n'importe quel poste d'agent de bord vers le poste de pilotage, du poste de pilotage à n'importe quel poste d'agent de bord ou à tous ces postes, et de n'importe quel poste d'agent de bord à n'importe quel autre poste d'agent de bord ou à tous ceux-ci.
Le système d'interphone fournit des signaux visuels et sonores pour alerter les membres d'équipage lors d'un appel à poste. Une alerte visuelle est fournie par l'allumage des voyants d'indication sur les interrupteurs de réinitiatilisation. Dans la cabine, il y a une alerte visuelle additionnelle par l'intermédiaire de voyants d'appel roses. À l'écran d'affichage principal des appels de la zone connexe, ces voyants s'allumeraient pour indiquer le début d'un appel entre le pilote et l'agent de bord ou entre un agent de bord et un autre agent de bord. Lorsque le bouton d'appel est enfoncé, deux carillons électromécaniques, un au-dessus du poste de l'agent de bord de gauche et un au-dessus de celui de droite, font entendre un seul coup de carillon.
Toutes les conversations à l'interphone dans la cabine sont enregistrées sur une seule voie de l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR). L'enregistrement du CVR n'indique pas quel poste était utilisé.
1.6.9.3 Système d'échange de données techniques avion-sol en temps réel
L'avion était équipé d'un système d'échange de données techniques avion-sol en temps réel (ACARS), lequel est une liaison de communications numériques bidirectionnelles entre l'avion et les centres d'exploitation aérienne de l'exploitant. Habituellement, lorsqu'un avion se trouve à portée d'une radio VHF d'une station au sol, l'ACARS se sert de la radio VHF 3 de l'avion pour communiquer par l'intermédiaire d'un réseau.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
L'ACARS commute automatiquement pour communiquer par l'intermédiaire du système de communication par satellite (SATCOM) lorsque l'avion est hors de portée des stations VHF au sol, que la couverture VHF est interrompue à cause de la saturation du système, ou que la radio VHF 3 dans l'avion est commutée en mode phonique. Lorsque la couverture VHF est disponible, la voie VHF est le principal moyen de communication pour l'échange des données. Le système SATCOM fournit aussi un service téléphonique par satellite à tous les occupants de l'avion.
L'ACARS fournit un moyen de signaler automatiquement de l'information de vol, comme les paramètres moteurs et les données de chargement, et de suivre les mouvements de l'avion, comme les heures de décollage et d'atterrissage. Les pilotes peuvent aussi utiliser l'ACARS pour obtenir des renseignements, comme des rapports météorologiques, et pour échanger des messages à structure non imposée.
Le principal fournisseur de services de Swissair pour l'ACARS était la Société internationale de télécommunications aéronautiques (SITA). Toutes les communications à destination et en provenance de l'avion par l'intermédiaire de la SITA étaient acheminées par le système hôte Swissair de la SITA à Zurich. Lorsque la SITA n'était pas en mesure d'assurer la couverture, elle sous-traitait à la société Aeronautical Radio Inc. (ARINC), qui est le principal fournisseur de services aux États-Unis, ainsi qu'à l'Organisation internationale des télécommunications mobiles par satellites (INMARSAT) pour la couverture par satellite.
1.6.10 Système électrique
1.6.10.1 Généralités
L'alimentation électrique principale normale est produite par trois alternateurs à entraînement intégré (IDG) entraînés par moteur. Un alternateur de groupe auxiliaire de bord (APU) sert aussi de source d'alimentation électrique de relève pour certaines phases du vol ou au sol. Les trois IDG alimentent leurs bus d'alternateur respectifsNote de bas de page 28 qui, à leur tour, fournissent du courant électrique à plusieurs sous-bus situés dans tout l'avion. La distribution de l'alimentation électrique se fait normalement de façon automatique; toutefois, si c'est nécessaire, les pilotes peuvent commander le système électrique manuellement au moyen de commandes situées sur le panneau de commutation supérieur.
Les définitions suivantes sont utilisées dans tout le rapport. Elles sont fondées sur la norme aérospatiale AS50881, rév. A, intitulée Wiring, Aerospace Vehicle (câblage des véhicules aérospatiaux) de la Society of Automotive Engineers (SAE) :
- Fil : conducteur métallique unique, plein ou multibrins, conçu pour transporter le courant dans un circuit électrique, mais n'ayant aucun revêtement, aucune gaine ni aucun blindage métallique. Aux fins du présent rapport, « fil » renvoie à un « conducteur électrique isolé ».
- Câble : deux fils ou plus enfermés dans un revêtement commun, ou deux fils ou plus torsadés ou moulés ensemble sans un revêtement commun, ou un fil ayant un blindage métallique ou un conducteur extérieur.
- Faisceau de fils : n'importe quel nombre de fils ou de câbles acheminés et soutenus ensemble sur une certaine distance à l'intérieur de l'avion.
- American Wire Gauge (AWG) : calibre normalisé de taille de conducteurs à fil non ferreux. Le terme « Gauge » est fondé sur le diamètre. Plus le numéro de calibre est élevé, plus petit est le diamètre et plus mince est le fil.
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1.6.10.2 Alternateur éolien
L'alternateur éolien est une turbine mue par l'air dynamique et qui entraîne un alternateur. Cet alternateur est déployé manuellement au moyen d'un levier situé dans le poste de pilotage; une fois qu'il est déployé, il ne peut être rentré en vol. L'alternateur éolien est situé sur le côté inférieur droit du fuselage, à la droite des trappes de l'atterrisseur avant.
Lorsqu'il est déployé, l'alternateur éolien fournit automatiquement de l'énergie hydraulique aux gouvernes en alimentant en courant électrique la pompe hydraulique auxiliaire 1. Au moyen d'un commutateur situé sur le tableau de commande du système électrique, les pilotes peuvent faire passer l'alternateur éolien à un mode de fonctionnement électrique. Ce faisant, l'alternateur éolien fournit l'alimentation électrique de secours qui fait fonctionner les instruments et l'équipement de communication. Dans cette configuration, l'alimentation électrique n'est plus envoyée à la pompe hydraulique auxiliaire 1; en l'absence de l'alimentation principale, cette pompe cesse de fonctionner.
Sur l'avion en question, l'alternateur éolien était rangé au moment de l'impact. Il n'y aurait eu de raison de déployer l'alternateur éolien que si l'alimentation électrique ou hydraulique, ou les deux, n'étaient pas assurées par d'autres sources. L'information obtenue de l'examen des divers composants de système indique qu'au moment de l'impact une alimentation électrique et une énergie hydraulique étaient fournies par d'autres sources que l'alternateur éolien.
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1.6.10.3 Isolement de l'alimentation électrique de secours
Afin d'isoler la source de fumée, on peut délester à tour de rôle l'alimentation électrique des bus électriques au moyen d'un sélecteur SMOKE ELEC/AIR à quatre positions, situé sur le tableau de commutation électrique supérieur (voir Figure 11). Ce sélecteur permet d'isoler des systèmes électriques ou de conditionnement d'air qui pourraient être la source d'émanations ou de fumée.
Le sélecteur doit être enfoncé, puis tourné dans le sens horaire pour se déplacer à la position suivante. Le sélecteur ne peut être tourné dans le sens antihoraire. À mesure que le sélecteur est tourné, le courant électrique revient au système associé à la position précédente, avant que l'alimentation électrique associée à la nouvelle position du sélecteur soit coupée. Si le sélecteur est tourné jusqu'à la position NORM, toute l'alimentation électrique des trois systèmes d'alternateur revient, et les trois systèmes de conditionnement d'air sont rétablis.
1.6.10.4 Tableaux de distribution du poste de pilotage
Il y a neuf tableaux de distribution distincts dans le poste de pilotage; les cinq tableaux les plus pertinents dans le cadre de la présente enquête sont le tableau de distribution supérieur, les tableaux de distribution avioniques supérieur et inférieur et les tableaux de distribution principaux inférieur et supérieur (voir Figure 12). Les quatre autres tableaux sont les tableaux de distribution de la console du commandant de bord et du copilote, le tableau supérieur central de distribution de l'éclairage intégré et le tableau de distribution inférieur pour la maintenance.
Le tableau de distribution supérieur renferme le câblage pour les six bus suivants :
- bus batterie de 28 V c.c.;
- bus permanent de batterie de 28 V c.c.;
- bus d'urgence c.a. de gauche et de droite;
- bus d'urgence c.c. de gauche et de droiteNote de bas de page 29.
Le tableau de distribution avionique supérieur renferme le câblage des sept bus suivants :
- bus 1 et 3 de 115 V c.a.;
- bus 1 et 3 de 28 V c.c.;
- bus 1, 2 et 3 des instruments de 28 V c.a.
Le tableau de distribution avionique inférieur renferme le câblage des deux bus suivants :
- bus 2 de 28 V c.c.;
- bus de mise à la masse de 28 V c.c.
Les disjoncteurs du bus de mise à la masse de 28 V c.c., installés sur le tableau de distribution avionique inférieur, étaient tous des disjoncteurs de 0,5 ampère (A) utilisés pour l'indication et le contrôle de leurs disjoncteurs respectifs à distance. Le bus 2 de 28 V c.c. comprenait trois disjoncteurs de 3 A et un disjoncteur de 5 A. Un fil de raccordement provenant du côté secteur du disjoncteur « SLAT CONTROL PWR B », qui était un disjoncteur de 3 A, était utilisé pour fournir une tension de 28 V c.c. à des relais de commande RDB par l'intermédiaire d'un disjoncteur de 1 A. Les quatre disjoncteurs d'alimentation électrique triphasée de 115 V c.a., 15 A du RDB étaient installés dans le tableau de distribution avionique inférieur.
Les tableaux de distribution principaux supérieur et inférieur renferment le câblage des bus de 115 V c.a. et des bus 1, 2, 3 de 28 V c.c.
La norme utilisée par l'avionneur pour identifier les disjoncteurs consistait à donner une lettre à chaque rangée et un numéro à chaque colonne. Cette façon de faire permettait de localiser chaque disjoncteur sur le tableau.
1.6.10.5 Fils d'alimentation des bus du tableau de distribution supérieur
Ces fils d'alimentation étaient acheminés par cinq guide-fils installés le long du côté droit du fuselage à partir du compartiment avionique et ils remontaient à peu près à mi-hauteur le long de la paroi latérale du fuselage. Dans le poste de pilotage, à l'extérieur des guide-fils, les fils d'alimentation de bus étaient fixés individuellement à des supports de fils qui étaient attachés à la structure de l'avion par des entretoises en nylon. Les fils individuels étaient réunis ensemble tout juste avant d'entrer par le côté droit du tableau de distribution supérieur. Le tableau 7 décrit les fils d'alimentation de bus.
Alimentation de bus | Bus c.a. d'urgence de droite, phases A, B et C |
Bus batterie et bus permanent de batterie de 28 V c.c. |
Bus c.a. d'urgence de gauche | Bus c.c. d'urgence de droite | Bus c.c. d'urgence de gauche |
---|---|---|---|---|---|
Numéro de faisceau de fil |
ABS9208 | ABS9206 | ABS9205 | ABS9206 | ABS9205 |
Lettres des chemins de câble | ALB | ALN | ALC | ALP | ALE |
Calibre des fils | 3 - #8AWG | 1 - #8AWG 1 - #6AWG |
1 - #10AWG | 1 - #6AWG | 1 - #6AWG |
Fonction | Bus d'urgence de droite de 115 V c.a., phases A, B et C |
Bus batterie et bus permanent de batterie de 28 V c.c. |
Bus d'urgence de gauche de 115 V c.a. |
Bus d'urgence de droite de 28 V c.c. |
Bus d'urgence de gauche de 28 V c.c. |
1.6.10.6 Fils d'alimentation de bus du tableau de distribution avionique supérieur et inférieur
Les fils d'alimentation des bus de 115 V c.a. proviennent du compartiment central des accessoires, et les fils d'alimentation des bus de 28 V c.c. proviennent du compartiment avionique. Les trois fils d'alimentation de bus des instruments de 28 V c.a. proviennent des transformateurs des instruments qui sont montés sur la face arrière de la paroi du poste de pilotage. L'alimentation électrique principale de ces transformateurs est fournie par les bus 1, 2 et 3 de 115 V c.a. par l'intermédiaire du tableau de distribution principal inférieur.
Tous les fils d'alimentation de bus qui alimentent le tableau de distribution avionique sont acheminés vers l'avant par le côté arrière droit de la paroi du poste de pilotage et ils passent par un trou derrière l'office 2, puis à l'intérieur vers les barres bus de distribution de l'avionique.
La radio de communications HF 1 nécessite une source d'alimentation électrique triphasée pour pouvoir fonctionner. Il s'ensuit que deux fils d'alimentation supplémentaires du bus 1 de 115 V c.a. (phases B et C) sont acheminés au disjoncteur de la radio de communications HF 1. De même un fil d'alimentation additionnel du bus 2 c.c. est acheminé à deux disjoncteurs : le disjoncteur AFCS MISC PNL LIGHTS et le disjoncteur PRIMARY HOR STAB TRIM. Le tableau 8 décrit les fils d'alimentation principaux de bus et indique les lettres de leur chemin de câbles.
Fonction | Bus 1 de 115 V c.a. | Bus 3 de 115 V c.a. | Bus 1 de 28 V c.c. | Bus 3 de 28 V c.c. | Bus d'instrum. 1 de 28 V c.a. | Bus d'instrum. 2 de 28 V c.a. | Bus d'instrum. 3 de 28 V c.a. |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Numéro de fil | B110-7-8A | B110-22-8A | B117-3-8 | B117-1-8 | B108-5-16 | B108-7-16 | B107-9-16 |
Lettres de chemin de câbles | AEU | AEV | ASD | ASE | ASC | ASC | ASC |
1.6.10.7 Fils d'alimentation de bus des tableaux de distribution principaux supérieur et inférieur
Les tableaux de distribution principaux supérieur et inférieur reçoivent l'alimentation électrique des fils d'alimentation de bus qui sont acheminés à partir du compartiment avionique situé sous le plancher; ces fils d'alimentation de bus n'étaient pas acheminés dans un endroit où des dommages causés par la chaleur ont été observés.
1.6.10.8 Identification, emplacement et acheminement des fils
Tous les fils installés par McDonnell Douglas dans le MD-11 sont identifiés par un numéro de fil comprenant un caractère alphabétique suivi d'une chaîne numérique (p. ex., B203-974-24). Le caractère alphabétique désigne la partie de l'avion dans laquelle le fil est installé (voir la rubrique 1.6.1.3). Les six chiffres qui suivent constituent le numéro du fil; les deux derniers chiffres indiquent le calibre du fil. Par conséquent, le fil B203-974-24 indique que le fil est installé dans la partie B, que son numéro de fil est 203-974 et qu'il s'agit d'un fil de calibre 24 AWG. Un suffixe N indique un fil de mise à la masse.
Habituellement, les fils qui sont installés dans un avion sont attachés ensemble en faisceaux que l'on appelle chemins de câbles. Par conséquent, on peut identifier des fils individuels en repérant le chemin de câbles dans lequel ils se trouvent.
Dans le MD-11, chaque chemin de câbles est identifié par un code de trois lettres, comme « FBC », qui donne de l'information sur l'endroit où le chemin de câbles est acheminé dans l'avion et de quelle façon.
- La première lettre indique l'emplacement du chemin de câbles dans l'avion. Les lettres A, B, C, R, Q et S sont utilisées pour le poste de pilotage et le nez de l'avion. Les lettres D, E et H renvoient à la partie du fuselage située sous le plancher. Les lettres F, G et J renvoient à la cabine au-dessus du plancher. La lettre K identifie l'aile droite. La lettre L identifie l'aile gauche. Les lettres T et V renvoient à l'empennage.
- La deuxième lettre indique si le chemin de câbles est enfermé dans un guide-fils ou s'il s'agit d'un faisceau de fils ouvert. Les lettres V, W, Y et Z sont utilisées si le chemin de câbles est dans un guide-fils; toutes les autres lettres indiquent un faisceau de fils ouvert. La deuxième lettre indique aussi la catégorie de brouillage pertinente des fils dans le faisceau.
- La troisième lettre identifie le chemin de câbles comme tel.
Si c'est possible, le numéro de fil est marqué directement sur l'isolant extérieur de chaque fil; autrement, le numéro de fil est apposé sur le fil au moyen d'étiquettes aux points de départ et d'arrivée. Un fil pourrait avoir besoin de plusieurs lettres de chemin de câbles pour que soit décrit complètement son acheminement dans l'avion.
Une fois que le numéro de fil est connu, il est possible d'utiliser la liste des fils du fabricant pour déterminer où le fil est installé dans l'avion. La liste des fils fournit aussi des renseignements sur la composition du fil, sa longueur, ses points de départ et d'arrivée, la fonction du circuit et son appartenance à un chemin de câbles donné.
1.6.10.9 Description des fils – Avion MD-11
1.6.10.9.1 Critères de sélection des fils – Douglas Aircraft Company
Conformément à la FAR 25.869, le seul essai de certification requis pour les fils d’avion est l’essai de combustion à 60° au bec Bunsen (voir la rubrique 1.14.1.2). Les constructeurs d’avions exécutent habituellement des essais additionnels sur les fils pour satisfaire aux exigences de fabrication et de la clientèle, et ils choisissent les types de fil en fonction d’un équilibre entre les caractéristiques des types de fil disponibles et l’application requise.
En 1976, Douglas Aircraft Company (Douglas) avait été informée par son fournisseur de fils que le fil polyvalent qu’il fournissait pour le programme des gros-porteurs n’allait plus être produit. Douglas a alors lancé un programme d’évaluation des fils pour sélectionner un nouveau fil polyvalent. L’examen comprenait une évaluation des divers types d’isolant de fil en ce qui avait trait à leurs propriétés électriques, mécaniques, chimiques et thermiques, ainsi qu’à leurs caractéristiques de résistance inhérente à la flamme et de production de fumée. L’évaluation a débouché sur la sélection de deux types d’isolant : un isolant à l’éthylène-tétrafluoroéthylène réticulé (XL-ETFE) modifiéNote de bas de page 30, conformément à la spécification BXS7008 de Douglas et un isolant à base de polyimide aromatiqueNote de bas de page 31, désigné polyimide dans le présent rapport, conformément à la spécification BXS7007 de Douglas.
L’isolant en polyimide avait pour lui des caractéristiques de poids et de volume avantageuses. Aussi, il offrait une meilleure résistance à l’abrasion, aux coupures et au feu. Le polyimide ne s’enflamme pas ni n’alimente la combustion. Les limites du polyimide, par contre, comprenaient moins de résistance au cheminement d’arcNote de bas de page 32 et moins de flexibilité que d’autres types d’isolant. L’isolant en polyimide est une pellicule de couleur jaune qui est enveloppée sur le fil. Dans certains cas, un revêtement de résine polyimide aromatique modifiée avait été appliqué sur la pellicule de polyimide pour constituer une couche de finition appropriée permettant de marquer directement le numéro d’identification du fil sur ce dernier. Cette couche de finition est d’une couleur jaune mat.
En 1975, la FAA avait publié un Notice of Proposed Rulemaking (NPRM)Note de bas de page 33 (avis de projet de réglementation) indiquant que la densité optiqueNote de bas de page 34 spécifique d’un fil pour l’émission de fumée serait une valeur de 15 (maximum) dans les 20 minutes suivant le début de l’essai. On s’attendait à ce que cet avis de projet de réglementation soit adopté, mais on y a mis fin sans qu’il ne modifie la réglementation existante. Toutefois, avant que l’on ne mette fin à cet avis, les essais de Douglas avaient montré que l’isolant en polyimide satisferait aux exigences de l’essai de densité optique spécifique et que le XL-ETFE n’y satisferait pas.
Compte tenu des coûts et d’autres considérations, Douglas a choisi le XL-ETFE comme isolant de fil polyvalent BXS7008 et s’est servi du XL-ETFE dans le DC-10. Au même moment, l’isolant en polyimide conforme à la spécification BXS7007 était sélectionné pour la cabine pressurisée, principalement parce qu’il produisait moins de fumée lorsqu’il était exposé à la chaleur ou à la flamme que le XL-ETFE. Le polyimide pouvait aussi être utilisé dans des applications spéciales, par exemple dans des endroits où la température dépassait 150 °C (302 °F), tandis que le XL-ETFE n’était pas coté pour ces températures.
Au début des années 1980, un problème de sertissage a été découvert sur des fils isolés au XL-ETFE et dont les conducteurs en cuivre étaient étamés. À cause de cette découverte, Douglas a décidé d’utiliser des conducteurs recouverts de nickel, même s’ils coûtaient plus cher. Par la suite, le XL-ETFE n’était plus économique, et Douglas est passé aux conducteurs recouverts de nickel et isolés au polyimide pour tous ses fils polyvalents.
En 1991, un programme d’évaluation des fils de la US Air Force a identifié un fil polyvalent acceptable comme solution de rechange. Il s’agissait d’un isolant composite fait de polytétrafluoroéthylène-polyimide-polytétrafuoroéthylène (PTFE-PI-PTFE). La même année, Douglas a lancé un autre programme d’évaluation des fils, utilisant le fil polyvalent en polyimide comme base de comparaison pour les essais d’autres types d’isolant de fil. Les essais ont montré que l’isolant PTFE-PI-PTFE se comportait aussi bien ou mieux que l’isolant en polyimide. Douglas a alors sélectionné l’isolant PTFE-PI-PTFE, conformément à la spécification DMS 2426, comme son fil polyvalent en 1995.
Le tableau 9 montre les propriétés comparatives de quatre isolants de fil.
Classement relatif | Plus désirable ---------------------- à moins désirable | |||
---|---|---|---|---|
1 | 2 | 3 | 4 | |
Poids | PIa | ETFEb | COMPc | PTFEd |
Température | PTFE | COMP | PI | ETFE |
Résistance à l'abrasion | PI | ETFE | COMP | PTFE |
Résistance aux coupures | PI | COMP | ETFE | PTFE |
Résistance aux produits chimiques | PTFE | ETFE | COMP | PI |
Inflammabilité | PTFE | COMP | PI | ETFE |
Production de fumée | PI | COMP | PTFE | ETFE |
Flexibilité | PTFE | ETFE | COMP | PI |
FluageNote de bas de page 36 (en température) | PI | COMP | PTFE | ETFE |
Résistance à la propagation des arcs (cheminement d'arc) | PTFE | ETFE | COMP | PI |
- PI - polyimide aromatique MIL-W-81381/7
- ETFE - MIL-W-22759/16
- COMP - MIL-W-22759/80-92 (PTFE-PI-PTFE)
- PTFE - MIL-W-22759/80-92
1.6.10.9.2 Spécifications des fils du MD-11
Douglas a identifié les deux spécifications de fil polyvalent suivantes pour le MD-11 : BXS7007 et BXS7008 (voir Figure 13). Ces spécifications de fil adoptent par référence, à moins d’indication contraire, certains documents fournis par le gouvernement, y compris les spécifications et les normes militaires, les normes fédérales et de l’industrie, et certaines spécifications de procédés et de matériaux de Douglas. Les spécifications BXS7007 et BXS7008 renferment aussi les exigences relatives au comportement et aux essais que les fils doivent respecter, en plus de celles qui sont adoptées des documents référencés, y compris, par exemple, l’essai de combustion à 60°, exigé par la FAR 25.869.
La spécification BXS7007 est intitulée « Wire, Electric, Copper & Copper Alloy, Polyimide Tape Insulated, 600 volt » (fil, électrique, en cuivre et alliage de cuivre, isolé par un ruban en polyimide, 600 V). Cette spécification couvre les fils et les câbles qui doivent répondre à toutes les exigences pertinentes relatives au comportement et aux essais pour les calibres indiqués, comme le définissent les normes MIL-W-81381, MIL-W-81381/12 et MIL-W-81381/14, ainsi que la norme MIL-W-27500 et d’autres documents référencés, à moins d’indication contraire dans la spécification. Douglas a commencé à utiliser les fils BXS7007 sur des avions de série en 1980.
Les fils qui sont conformes à la spécification BXS7007Note de bas de page 37 sont isolés en polyimide et ils comprennent des conducteurs nickelés. Tout fil BXS7007 est conforme aux exigences de la norme MIL-W-81381/12 (en plus des autres exigences pertinentes), sauf pour le fil de calibre 24 AWG, qui est un alliage haute résistance qui est conforme aux exigences de la norme MIL-W-81381/14 (en plus des autres exigences pertinentes). Tout fil BXS7007 est coté à 200 °C, 600 V. La cote de température renvoie à la température maximale à laquelle le fil peut être utilisé, et elle est obtenue par la combinaison de la chaleur ambiante et de celle qui est produite par le fil.
La spécification BXS7008 est intitulée « Wire, Electric, General Purpose, Copper & Copper Alloy, Fluoropolymer Insulated »Note de bas de page 38 (Fil, électrique, polyvalent, en cuivre et en alliage de cuivre, isolé au polymère fluoré). Cette spécification couvre les fils et les câbles qui doivent répondre à toutes les exigences pertinentes relatives au comportement et aux essais pour les calibres indiqués, comme le définissent les normes MIL-W-22759, MIL-W-22759/34 et MIL-W-22759/42, ainsi que la norme MIL-W-27500 et d’autres documents référencés, à moins d’indication contraire dans la spécification (voir Figure 13). Douglas a commencé à utiliser les fils BXS7008 dans les avions de série en 1977.
Les fils qui sont conformes à la spécification BXS7008 sont isolés au XL-ETFE modifié. La spécification BXS7008 exige que l’isolant soit appliqué ou extrudé sur le conducteur en deux couches de couleur contrastante pour faciliter l’identification des dommages sur l’isolant. Les fils des calibres 22 à 00 sont en cuivre étamé. Ces fils doivent être conformes à la norme MIL-W-22759/34 et ils sont cotés à 150 °C, 60 V. Le fil BXS7008 de calibre 24 est un alliage de cuivre haute résistance nickelé. Ce fil doit être conforme à la norme MIL-W-22759/42 et il est coté à 200 °C, 600 V.
La norme MIL-W-27500, qui est un des documents adoptés pour les spécifications BXS7007 et BXS7008, à moins d’indication contraire, couvre les exigences pour les câbles à usage spécial et les câbles d’alimentation électrique, y compris la taille et le type de fil, le nombre de fils et les types de chemise et de blindage. Les spécifications BXS7007 et BXS7008 adoptent aussi les documents exigeant l’identification des fils par codage.
1.6.11 Réseau de divertissement
1.6.11.1 Description
Le RDB combinait des techniques alliant l'informatique, la vidéo et l'audio pour permettre aux passagers de sélectionner des films, des signaux audio, des jeux, des nouvelles, des jeux de hasard et un affichage cartographique dynamique par l'intermédiaire d'un écran d'affichage vidéo de siège interactif. Le RDB était aussi configuré pour donner accès à tous les passagers à une variété de renseignements et de divertissements « sur demande » au moyen d'une commande tactile. La conception d'origine, pour les MD-11 de Swissair, offrait un accès complet au RDB aux 257 passagers, soit à toutes les classes de la cabine. Toutefois, seulement les deux premiers avions avaient été configurés pour que le RDB soit installé sur les 257 sièges. Pour des raisons économiques, en avril 1997, Swissair a décidé de réduire la configuration RDB pour ne l'offrir qu'aux sièges de première classe et de la classe affaires.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
Le système RDB avait été installé dans les sections de la cabine réservées à la première classe et à la classe affaires de l'avion HB-IWF entre le 21 août et le 9 septembre 1997 (voir Figure 14). Les 49 sièges de la classe affaires avaient été installés à ce moment, à cause de retards de livraison, les 12 sièges de la première classe équipés du RDB n'avaient pas été installés avant février 1998. Les sièges des passagers de la classe économique n'avaient pas été équipés du RDB, même si le câblage électrique et les supports des baies d'équipement avaient été installés pour cette section. L'avion HB-IWF était le huitième MD-11 de Swissair à être équipé du système RDB.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
1.6.11.2 Installation des câbles
Le système RDB configuré dans l'avion HB-IWF nécessitait une alimentation de bord de 4,4 kilovoltampères, 115 V c.a. triphasée, 400 hertz selon l'analyse des charges électriques 20032, révision (rév.) B de Hollingsead International (HI). Le câble d'alimentation principal pour le système RDB comprenait trois fils MIL-DTL-16878/5-BNL de calibre 8 AWG torsadés ensemble. Ce câble partait d'un bornier situé dans le compartiment avionique et se terminait à un disjoncteur triphasé de 15 A situé sur le tableau de distribution avionique inférieur (voir Figure 14 et Figure 15). Ce disjoncteur de 15 A, identifié « RACK1 PS1 », fournissait, au moyen de fils de raccordementNote de bas de page 39, du courant électrique de l'avion à trois disjoncteurs triphasés de 15 A voisins, situés sur le tableau de distribution avionique inférieur. Chacun de ces quatre disjoncteurs de 15 A fournissait le courant de l'avion à un des quatre blocs d'alimentation électrique (PSU) du RDB. Les blocs d'alimentation électrique utilisaient une série de condensateurs et de circuits éélectroniques internes pour convertir l'alimentation de 115 V c.a. de l'avion en une alimentation de sortie de 48 V c.c., utilisée par les composants du système RDB.
Chacun des quatre disjoncteurs de 15 A du RDB était relié à son bloc d'alimentation électrique au moyen d'un des quatre câbles de bloc d'alimentation, ici appelé câble PSU. Chaque câble PSU comprenait trois fils MIL-W-22759/16/12 de calibre 12 AWG torsadés ensemble.
En outre, un disjoncteur de 1 A était installé sur le tableau de distribution avionique inférieur. Ce disjoncteur fournissait une alimentation de 28 V c.c. au moyen d'un fil de calibre de 16 AWG (ci-après appelé fil de commande de calibre 16 AWG) au relais RDB situé dans le plafond, au-dessus de l'office 8. Ce disjoncteur de 1 A, identifié « IFT/VES 28V », recevait du courant de 28 V c.c. de l'avion au moyen d'un fil de raccordement venant du côté secteur du disjoncteur voisin, « SLAT CONTROL PWR B », et il était utilisé pour contrôler la sortie de 48 V c.c. des quatre blocs d'alimentation électrique par l'intermédiaire des relais RDB. Le déclenchement de ce disjoncteur coupait l'alimentation de sortie de 48 V c.c. venant des blocs d'alimentation; cependant, le déclenchement du disjoncteur ne coupait pas l'alimentation d'entrée de 115 V c.a. allant à ces blocs.
Les quatre câbles PSU du RDB (PSU 1, 2, 3 et 4) et le fil de commande de calibre 16 AWG étaient acheminés vers l'arrière le long du tableau de distribution avionique inférieur. Dans cette zone, ils étaient fixés au câble d'alimentation principal du RDB au moyen d'attaches de câble autobloquantes en nylon. Ce faisceau de fils RDB était alors attaché à la barre bus de mise à la masse des disjoncteurs c.c., sur le tableau de distribution avionique inférieur et, dans certains cas, maintenu en place près de l'arrière du tableau au moyen d'un collier. Le faisceau de fils était alors dirigé vers le haut jusqu'à ce qu'il se sépare en deux directions. Le câble d'alimentation électrique principal faisait une boucle vers le bas, traversant un guide-fils le long du côté droit du fuselage jusqu'au compartiment avionique. Les quatre câbles PSU et le fil de commande de calibre 16 AWG, constituant maintenant leur propre faisceau, continuaient vers le haut en un seul faisceau près du panneau de coupure de l'alimentation de l'avionique.
À la suite de l'accident de SR 111, on a examiné l'installation du RDB dans 15 MD-11 de Swissair. On a remarqué que l'acheminement du faisceau de fils contenant les câbles PSU et le fil de commande de calibre 16 AWG variait d'un avion à l'autre derrière le tableau de distribution avionique. Aucune de ces variations n'avait été jugée comme menaçant la sécurité immédiate des vols. Il y avait des différences dans la fréquence avec laquelle le faisceau de fils était supporté par l'un ou l'autre des trois supports de fils montés horizontalement et dans les façons de les fixer à ces supports. Aussi, dans certains cas, on remarquait un manchon protecteur monté près des supports, alors que dans d'autres, il n'y en n'avait pas.
Près du panneau de coupure de l'alimentation de l'avionique, le faisceau de fils RDB était acheminé vers l'arrière dans un des guide-fils d'une longueur de 102 cm (40 po) qui était installé au-dessus de l'office 2 (voir Figure 4 et Figure 5). Dans 11 des avions MD-11 de Swissair qui ont été examinés, le faisceau de fils était acheminé de façon à passer devant le panneau de coupure de l'alimentation de l'avionique, et dans trois de ces 11 avions, les faisceaux de fils étaient alors acheminés par le guide-fils extérieur. Dans quatre des avions examinés, le faisceau de fils n'était pas acheminé devant le panneau de coupure de l'alimentation de l'avionique; il était plutôt acheminé près de la paroi du poste de pilotage. Dans deux des quatre avions, le faisceau de fils était alors acheminé par le guide-fils extérieur. En tout, cinq des avions présentaient un faisceau de fils RDB qui était acheminé par le guide-fils extérieur, et dix présentaient un faisceau de fils acheminé par le guide-fils médian.
Sur l'avion en question, il n'a pas été possible de déterminer, à partir des documents d'installation du RDB, comment le faisceau de fils RDB avait été acheminé dans la zone du panneau de coupure de l'alimentation, ou quel guide-fils avait été utilisé dans la zone située au-dessus de l'office 2. Les installateurs du RDB préféraient utiliser le guide-fils médian lorsque c'était possible, mais dans les cinq cas observés ci-dessus, le guide-fils médian n'était pas disponible puisqu'il avait été utilisé pour le câblage de l'avion. Dans la série des installations de RDB, le guide-fils médian avait été utilisé dans trois avions avant l'avion HB-IWF, et aussi dans sept avions après celui-ci.
L'enquête n'a pas été en mesure d'établir à partir des dossiers du constructeur quel guide-fils avait pu être inutilisé dans l'avion HB-IWF (numéro de série 48448). Dans l'avion construit immédiatement avant HB-IWF (HB-IWE – numéro de série 48477), le guide-fils médian avait été utilisé pour recevoir le faisceau de fils du RDB. Sur l'avion suivant de Swissair construit après HB-IWF (HB-IWG – numéro de série 48452), le guide-fils extérieur avait été utilisé pour recevoir le faisceau de fils du RDB.
Le matériau du guide-fils, selon le document DMS 2024, révision B, était de l'éthylène-propylène fluoré (FEP), à paroi mince, vrillé, de type 1. L'installation du faisceau de fils, à partir de l'endroit où il quittait l'extrémité arrière du guide-fils à peu près à la référence 515, variait également entre les avions. Le faisceau de fils était acheminé soit au-dessus, soit au-dessous du support angulaire horizontal supérieur du déflecteur de rampe de la porte D1, au-dessus ou au-dessous des supports de fils, et il était fixé par un collier soit au dessus, soit au dessous de ces supports ou au câblage existant de l'avion. Dans les cas où les câbles RDB étaient attachés à des faisceaux de fils existants, des entretoises étaient installées pour assurer un espacement entre les faisceaux de fils. De plus, certains avions étaient munis d'un manchon protecteur qui recouvrait le faisceau de fils dans la zone proche du support supérieur du déflecteur de rampe de la porte D1.
Le faisceau de fils continuait vers l'arrière jusqu'à ce que les câbles PSU 1 et 2 se séparent du faisceau et se terminent à un bâti d'équipement électronique (bâti élec) de RDB. Le bâti élec 1 était situé dans la première classe, au-dessus de l'allée droite, et son support avant était situé à la référence 647.
Le fil de commande de calibre 16 AWG continuait vers l'arrière, puis traversait le sommet de l'avion à peu près à la référence 750, et il se terminait au relais monté au-dessus de l'office 8. Ce relais recevait toutes les interfaces externes allant au système de bord, y compris les suivantes : le signal de décompression, qui coupait l'alimentation du RDB si l'avion se dépressurisait, le signal de contournement du système de sonorisation cabine, qui était conçu pour couper tous les signaux audio et vidéo du système RDB chaque fois que le système de sonorisation était utilisé, et l'entrée de 28 V c.c. fournie par l'intermédiaire du disjoncteur « IFT/VES 28V » de 1 A.
La coupure ou l'interruption de cette tension de 28 V c.c. amenait un relais tout-ou-rien, situé à l'intérieur de l'ensemble des relais, à invalider la sortie de tous les blocs d'alimentation électrique.
Les câbles PSU 3 et 4 continuaient vers l'arrière et traversaient le sommet de l'avion à la référence 1239. Ils étaient alors acheminés vers l'arrière le long du côté gauche du fuselage et se terminaient au bâti élec 2. Ce bâti était situé dans la classe économique, au-dessus de l'allée gauche, son support avant se trouvant à la référence 1429.
1.6.11.2.1 Description des fils
Le principal type de fil sélectionné lors de l'installation du RDB était le fil MIL-W-22759/16, un conducteur en cuivre étamé, de poids moyen, isolé au moyen d'un copolymère ETFE extrudé, coté à 150 °C, 600 V. (Voir Figure 13.) De plus, les fils du câble d'alimentation principale étaient des conducteurs en cuivre recouverts de cuivre, isolés au PTFE extrudé et conformes à la norme MIL-DTL-16878 qui étaient cotés à 200 °C, 1 000 V. Le fil MIL-W-22759/16 présentait une caractéristique nominale maximale en température de 150 °C.
Le fil de 28 V c.c. partant du disjoncteur de 1 A situé sur le tableau de distribution avionique inférieur pour se rendre à l'ensemble des relais du RDB devait être, selon les spécifications, un fil MIL-W-22759/16 de calibre de 16 AWG.
Chaque câble d'alimentation du bloc d'alimentation RDB consistait en trois fils MIL-W-22759/16 de calibre 12 AWG torsadés ensemble. Aux fins d'identification de circuit, la norme MIL-C-27500 exigeait que les fils de chaque câble soient colorés en blanc, bleu et orange. Le câble devait être étiqueté au moyen des marques d'identification exigées dans un dessin de HI.
Le câble principal d'alimentation électrique du RDB comprenait trois fils MIL-DTL-16878/5-BNL de calibre 8 AWG, torsadés ensemble comme l'exigeait un dessin de HI. Ce dessin précisait aussi que le fil ne devait pas être identifié par une marque imprimée à l'extérieur du fil. La norme MIL-DTL-16878/5-BNL spécifie un revêtement de PTFE extrudé, d'une capacité maximale de 200 °C, 1 000 V. Aux fins d'identification de circuit, la norme MIL-C-27500 exigeait que les fils de chaque câble soient colorés en blanc, bleu et orange. Toutefois, un fil rouge avait été substitué au fil bleu dans l'installation, ce qui n'a eu aucun effet sur le comportement du fil. Des échantillons de chaque fil coloré de calibre 8 AWG avaient été analysés par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier et ils avaient été identifiés comme ayant un isolant au PTFE dont le point de fusion était de 323 °C; ces données avaient été obtenues par analyse calorimétrique à compensation de puissance.
Le bâti élec 1 contenait les éléments suivants (voir Figure 14) :
- les PSU 1 et 2 qui fournissaient une alimentation de 48 V c.c. au tableau de distribution 1, lequel distribuait cette alimentation de 48 V c.c. aux composants montés dans le bâti élec 1;
- deux boîtes de filtres antibrouillage électromagnétiques (EMI), une fixée à chaque PSU. Les filtres étaient branchés entre l'entrée de l'alimentation électrique et le PSU et ils étaient conçus pour filtrer les parasites électromagnétiques venant de l'alimentation électrique de l'avion;
- deux modulateurs de 32 canaux, qui convertissaient les signaux d'entrée audio et vidéo en bande de base en des signaux de sortie RF à large bande;
- un module de traitement de vidéo sur demande (VOD), qui extrayait, sélectionnait et distribuait les films et la musique;
- un module multidisque, qui stockait la programmation codée numériquement; un modulateur à 13 canaux, qui effectuait la même fonction que le modulateur à 32 canaux, et qui distribuait aussi les données audio et vidéo courantes, comme l'affichage cartographique dynamique, à tout l'avion;
- deux modules de distribution de tête de ligne, qui combinaient les sorties distinctes des modulateurs, puis qui divisaient la sortie en quatre voies;
- six contrôleurs de groupe, qui coordonnaient toutes les tâches administratives du réseau informatique.
Le module de traitement de la vidéo sur demande était aussi équipé d'un chargeur de disques amovible pour permettre au personnel de maintenance de télécharger des films.
Le bâti élec 2 renfermait les éléments suivants :
- les PSU 3 et 4 qui fournissaient une alimentation de 48 V c.c. au tableau de distribution 2, lequel à son tour distribuait cette alimentation de 48 V c.c. aux composants se trouvant à l'intérieur du bâti élec 2;
- les filtres antibrouillage électromagnétiques 3 et 4;
- un commutateur réseau, lequel assurait les liaisons réseau pour le réseau administratif du RDB.
Chaque siège de la première classe et de la classe affaires était équipé d'un écran d'affichage vidéo interactif qui comprenait un écran tactile et un lecteur de carte magnétique, une boîte électronique de siège, qui traitait toute l'information pour l'interface avec le passager, et un port double audio-jeu, qui commandait les jeux et les signaux audio. De plus, chaque ensemble de sièges de la première classe et de la classe affaires était équipé d'un module entrée-sortie de siège, qui contenait le syntonisateur et le répéteur de réseau.
Un serveur de fichiers cabine, situé sur une baie dans l'office 8, commandait le téléchargement des films, emmagasinait l'information relative au vol et au casino et recueillait les données des cartes de crédit transmises à partir de chaque siège. Les offices 1 et 8 étaient équipées d'un écran d'affichage vidéo de gestion (MVD). Cet écran offrait une interface à l'équipage de cabine et au personnel de maintenance et servait de point de contrôle pour la configuration, l'entretien et la surveillance du RDB. Chaque écran d'affichage était équipé d'une boîte électronique de terminal de gestion, la principale interface fonctionnelle de composant pour le RDB destinée à l'équipage de conduite et au personnel de maintenance. Une imprimante était aussi située dans l'office 8.
1.6.11.3 Composants
Le bâti élec 1 contenait les éléments suivants (voir Figure 14) :
- les PSU 1 et 2 qui fournissaient une alimentation de 48 V c.c. au tableau de distribution 1, lequel distribuait cette alimentation de 48 V c.c. aux composants montés dans le bâti élec 1;
- deux boîtes de filtres antibrouillage électromagnétiques (EMI), une fixée à chaque PSU. Les filtres étaient branchés entre l'entrée de l'alimentation électrique et le PSU et ils étaient conçus pour filtrer les parasites électromagnétiques venant de l'alimentation électrique de l'avion;
- deux modulateurs de 32 canaux, qui convertissaient les signaux d'entrée audio et vidéo en bande de base en des signaux de sortie RF à large bande;
- un module de traitement de vidéo sur demande (VOD), qui extrayait, sélectionnait et distribuait les films et la musique;
- un module multidisque, qui stockait la programmation codée numériquement; un modulateur à 13 canaux, qui effectuait la même fonction que le modulateur à 32 canaux, et qui distribuait aussi les données audio et vidéo courantes, comme l'affichage cartographique dynamique, à tout l'avion;
- deux modules de distribution de tête de ligne, qui combinaient les sorties distinctes des modulateurs, puis qui divisaient la sortie en quatre voies;
- six contrôleurs de groupe, qui coordonnaient toutes les tâches administratives du réseau informatique.
Le module de traitement de la vidéo sur demande était aussi équipé d'un chargeur de disques amovible pour permettre au personnel de maintenance de télécharger des films.
Le bâti élec 2 renfermait les éléments suivants :
- les PSU 3 et 4 qui fournissaient une alimentation de 48 V c.c. au tableau de distribution 2, lequel à son tour distribuait cette alimentation de 48 V c.c. aux composants se trouvant à l'intérieur du bâti élec 2;
- les filtres antibrouillage électromagnétiques 3 et 4;
- un commutateur réseau, lequel assurait les liaisons réseau pour le réseau administratif du RDB.
Chaque siège de la première classe et de la classe affaires était équipé d'un écran d'affichage vidéo interactif qui comprenait un écran tactile et un lecteur de carte magnétique, une boîte électronique de siège, qui traitait toute l'information pour l'interface avec le passager, et un port double audio-jeu, qui commandait les jeux et les signaux audio. De plus, chaque ensemble de sièges de la première classe et de la classe affaires était équipé d'un module entrée-sortie de siège, qui contenait le syntonisateur et le répéteur de réseau.
Un serveur de fichiers cabine, situé sur une baie dans l'office 8, commandait le téléchargement des films, emmagasinait l'information relative au vol et au casino et recueillait les données des cartes de crédit transmises à partir de chaque siège. Les offices 1 et 8 étaient équipées d'un écran d'affichage vidéo de gestion (MVD). Cet écran offrait une interface à l'équipage de cabine et au personnel de maintenance et servait de point de contrôle pour la configuration, l'entretien et la surveillance du RDB. Chaque écran d'affichage était équipé d'une boîte électronique de terminal de gestion, la principale interface fonctionnelle de composant pour le RDB destinée à l'équipage de conduite et au personnel de maintenance. Une imprimante était aussi située dans l'office 8.
1.6.12 Système de protection incendie de l'avion
1.6.12.1 Généralités
Aucune zone dans un avion n'est à l'abri des incendies en vol, mais les systèmes de protection incendie utilisés dans les avions de transport ont évolué en fonction de la probabilité qu'un incendie se déclare à l'intérieur de zones particulières de l'avion. Ces avions sont équipés d'une variété de détecteurs intégrés et, dans certains cas, de circuits extincteurs connexes destinés à aider l'équipage de l'avion à identifier et à éteindre un incendie en vol. Conformément aux exigences de certification de navigabilité aérienne de la FAA, l'avion en question était équipé de moyens de détection et d'extinction incendie intégrés dans les zones désignées comme zones de feu de l'avion (voir Figure 2). La FAR 25.1181 stipule qu'une zone désignée comme zone de feu comprend les moteurs, les groupes auxiliaires de bord, et tout réchauffeur à combustion ou équipement de combustion. De plus, des zones spécifiques de l'avion, comme les soutes et les toilettes, ont été identifiées comme étant « des zones de feu potentielles »Note de bas de page 40 qui nécessitent divers moyens intégrés de détection et d'extinction incendie.
Le risque d'incendie dans le reste du fuselage pressurisé était tel qu'il n'y avait pas d'équipement intégré de détection et d'extinction incendie, et il n'était pas obligatoire qu'il y en ait. Par conséquent, la détection et l'extinction d'un incendie en vol dans les autres zones de l'avion dépendaient uniquement d'une intervention humaine. Aux fins du présent rapport, ces autres zones de l'avion pour lesquelles des moyens de détection et d'extinction ne sont pas précisés sont appelées « zones de feu non spécifiées ».
1.6.12.2 Extincteurs portatifs
L'avion était équipé de huit extincteurs portatifs, lesquels étaient maintenus par des supports montés à des endroits désignés et répartis dans tout l'avion. Dans la cabine, il y avait cinq extincteurs au bromochlorodifluoroéthane (Halon 1211) de 2,5 livres et deux extincteurs au phosphate d'ammonium diacide (poudre chimique) de 5 livres. Le poste de pilotage contenait un extincteur au Halon 1211 de 2,5 livres maintenu par un support monté sur la paroi arrière du poste de pilotage (voir Figure 17).
Cinq des six extincteurs au Halon 1211 et les deux extincteurs à poudre chimique ont été récupérés. Il n'a pas été possible de déterminer où ces extincteurs étaient situés à l'origine dans l'avion, principalement parce que chaque extincteur était identique et qu'il n'y avait aucune caractéristique additionnelle d'identification. Trois extincteurs au halon présentaient des marques indiquant qu'ils se trouvaient toujours dans leur support de montage au moment de l'impact. Deux des trois extincteurs contenaient toujours une charge d'agent extincteur. La charge avant impact des extincteurs au Halon 1211 qui restaient n'a pu être déterminée à cause de perforations et d'autres dommages subis au moment de l'impact.
Un des deux extincteurs à poudre chimique montrait des marques indiquant qu'il se trouvait dans son support de montage au moment de l'impact. Sa charge à ce moment n'a pu être déterminée. L'autre extincteur à poudre chimique était chargé au moment de l'impact, sa goupille de sûreté étant intacte; il n'a pas été possible de déterminer si cet extincteur se trouvait dans son support de montage au moment de l'impact.
1.6.13 Système de commandes de vol
1.6.13.1 Généralités
Le MD-11 est équipé d'un manche pilote et d'un palonnier classiques pour le commandant de bord et le copilote. Les gouvernes principales comprennent les gouvernes de profondeur intérieure et extérieure, les ailerons intérieur et extérieur et un gouvernail de direction supérieur et inférieur. Les gouvernes secondaires comprennent les volets de courbure intérieur et extérieur ainsi que les becs de bord d'attaque, les déporteurs, les aérofreins et un stabilisateur manœuvrable.
Toutes les gouvernes principales et secondaires sont alimentées en énergie hydraulique par deux circuits hydrauliques de l'avion. La position des gouvernes est affichée, normalement par l'écran d'affichage 4, sur l'écran d'affichage du système, lorsqu'on sélectionne la page de configuration au moyen du bouton CONFIG situé sur le tableau de commande d'affichage du système. En plus de l'écran du système, la position des volets et des becs de bord d'attaque est également affichée sur l'écran principal de vol. Les alertes sont affichées sur l'écran d'affichage des indications moteur et des alertes et sur l'écran du système.
Outre les becs de bord d'attaque à commande électrique et à manœuvre hydraulique, le système de commande de vol est conçu avec une interface mécanique-hydraulique directe comprenant des câbles qui vont des commandes dans le poste de pilotage aux divers vérins hydrauliques qui déplacent les gouvernes. Par conséquent, à l'exception des becs de bord d'attaque, le déplacement des gouvernes ne dépend pas de la disponibilité de l'alimentation électrique.
1.6.13.2 Système d'augmentation de la stabilité longitudinale
Les MD-11 comprennent un système d'augmentation de la stabilité longitudinale (LSAS) qui améliore la stabilité longitudinale par des commandes envoyées aux gouvernes de profondeur en mode série. Le LSAS maintient l'assiette en tangage actuelle de l'avion chaque fois que la somme des forces exercées au manche pilote du commandant de bord et du copilote est inférieure à deux livres. Dans la version logicielle qui avait été installée dans l'avion en question, sous 15 000 pi, il n'y a aucune entrée LSAS lorsque la force exercée sur le manche pilote est supérieure à deux livres. Au-dessus de 15 000 pi, le LSAS assure un amortissement additionnel en tangage lorsque la force exercée sur le manche pilote dépasse deux livres. La compensation automatique en tangage du stabilisateur fonctionne aussi en mode LSAS.
Le LSAS est inopérant chaque fois que le pilote automatique est embrayé ou que l'avion se trouve au-dessous de 100 pi au-dessus du sol (AGL). Lorsque le LSAS est inopérant et que la compensation automatique en tangage n'est pas disponible, il est toujours possible de compenser manuellement en tangage.
Dans le cadre de l'enquête, des vols en simulateur ont été exécutés sous 15 000 pi pour permettre d'apprécier la pilotabilité du MD-11 lorsque le LSAS est inopérant. Il n'y avait aucun changement notable dans la maniabilité en tangage ni dans la pilotabilité de l'avion lorsque le LSAS était inopérant.
1.6.13.3 Volets et becs de bord d’attaque
Les volets et les becs de bord d’attaque sont commandés par le levier FLAP/SLAT situé sur le côté droit du pylône central du poste de pilotage. En fonctionnement normal, dans le cadre de la vérification de la montée initiale, les pilotes présélectionnent les volets à 15° sur le volant DIAL-A-FLAP situé à la droite du levier FLAP/SLAT. Lorsque les volets sont sortis, ils adoptent la valeur présélectionnée (dans le cas de SR 111, 15°); normalement, les becs de bord d’attaque se déploient lorsque les volets sont sortis.
Au moment de l’impact, les volets étaient sortis d’environ 15°, et les becs de bord d’attaque étaient rentrés. Le circuit des becs comprend une protection en cas de survitesse, laquelle empêche les becs de se déployer chaque fois que la vitesse de l’avion est supérieure à 280 nœuds et que les volets sont sortis de moins de 10°. On peut aussi contourner la protection de survitesse des becs en sélectionnant 10° de volets ou plus. La fonction de déploiement des volets peut aussi être contournée si l’on appuie sur le bouton SLAT STOW, qui est utilisé au cas où il y aurait une alerte de désaccord bec ou que les circuits hydrauliques 1 et 3 seraient perdus. Rien n’indique que l’un ou l’autre de ces événements se soient produits sur le vol en question.
Le fait que les becs de bord d’attaque ne se soient pas déployés est fort probablement attribuable aux conséquences des dommages causés par l’incendie, lesquels avaient mené à une interruption de l’alimentation électrique aux robinets de commande des becs de bord d’attaque.
1.6.14 Circuit carburant
1.6.14.1 Généralités
Le carburant est logé dans trois réservoirs principaux et dans deux réservoirs auxiliaires centraux (supérieur et inférieur). Les trois réservoirs principaux se trouvent dans les ailes. Le réservoir 1 (dans l'aile gauche) et le réservoir 3 (dans l'aile droite) sont identiques, chacun ayant un compartiment principal et un compartiment extérieur appelé réservoir d'extrémité. Le réservoir 2 est situé dans la partie intérieure de chaque aile, et les deux parties du réservoir sont reliées ensemble par une conduite de carburant de grand diamètre aux réservoirs 1 et 3. Les deux réservoirs auxiliaires centraux sont situés dans la partie interlongerons du fuselage et ils sont interreliés aux réservoirs principaux par une tubulure d'alimentation en carburant. Les moteurs reçoivent normalement du carburant, sous pression, à partir de leur réservoir principal respectif; l'APU reçoit du carburant du réservoir 2. Comme les moteurs 1 et 3 sont situés sous les ailes, ils peuvent aspirer du carburant des réservoirs même si les pompes à carburant électriques deviennent inopérantes. Le moteur 2 étant monté dans l'empennage et se trouvant plus haut que les réservoirs de carburant principaux, son carburant doit être pompé vers le moteur pour maintenir le fonctionnement normal de ce dernier. En cas de panne électrique totale, la pression du carburant allant au moteur 2 peut être maintenue par la pompe arrière gauche du réservoir 2 et la pompe auxiliaire du réservoir d'empennage, les deux étant alimentées par le bus c.a. d'urgence droit à la suite du déploiement de l'alternateur éolien. Le MD-11 est également équipé d'un réservoir d'empennage, situé dans le stabilisateur. Pendant le vol, le carburant est automatiquement transféré à l'intérieur et à l'extérieur de ce réservoir selon les besoins pour maintenir un centrage qui offre la consommation la plus économique sur le plan aérodynamique. Toutes les 30 minutes pendant que la température du réservoir d'empennage est supérieure à 2 °C, du carburant est automatiquement transféré du réservoir d'empennage au réservoir 2 ou au réservoir auxiliaire supérieur. Sur le vol en question, le réservoir 2 aurait été le réservoir qui aurait reçu le carburant venant de l'empennage.
Il y a 17 pompes d'appoint ou de transfert de carburant entraînées par moteur électrique de 115 V c.a. réparties dans les divers réservoirs. Toutes ces pompes sont alimentées en courant électrique par un des trois bus d'alternateur; les pompes complémentaires arrière gauche du réservoir 2 et de l'empennage sont alimentées à partir du bus c.a. d'urgence droit, qui reçoit son alimentation de l'alternateur éolien en cas de panne de l'alternateur normal. Toutes les pompes sont commandées automatiquement pendant tout le vol par le contrôleur du système carburant (FSC) selon la programmation de carburant requise, laquelle comprend la charge de carburant, sa répartition, la phase de vol, le largage du carburant, la purge d'eau, le contrôle de la masse et du centrage et les besoins relatifs à l'intercommunication du carburant entre les moteurs. Le FSC vérifie et tient à jour le programme de carburant pour répondre aux exigences relatives à la charge structurale et il transfère le carburant au réservoir approprié pour en assurer une distribution appropriée. Les pompes peuvent aussi être utilisées en mode MANUAL ou, lors de certaines pannes, le FSC peut basculer automatiquement en mode MANUAL. Dans le mode MANUAL, un ensemble choisi de pompes à carburant va se mettre en marche automatiquement, et chaque pompe peut être commandée individuellement au moyen d'un bouton-poussoir situé sur le tableau de commande du circuit carburant.
Trois robinets d'intercommunication peuvent être utilisés en cas de défaillance dans l'alimentation du circuit carburant. En cas de défaillance d'une pompe d'alimentation de moteur, le robinet d'intercommunication associé peut être ouvert pour diriger du carburant vers ce moteur. En cas de panne de la pompe de transfert principale, on peut transférer du carburant au moyen des pompes d'appoint d'alimentation des moteurs en ouvrant le robinet d'intercommunication approprié.
Le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir auxiliaire fonctionne avec le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir d'empennage lorsque le carburant est transféré automatiquement en provenance ou à destination du réservoir d'empennage pour le contrôle du centrage. Les deux robinets sont ouverts lorsque le carburant est transféré dans le réservoir d'empennage. Lors du transfert du carburant hors du réservoir d'empennage, le robinet d'isolement/de remplissage de ce dernier est fermé. Selon les conditions de vol et la quantité de carburant présente dans le réservoir auxiliaire supérieur, le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir auxiliaire est ouvert ou fermé. Un robinet ouvert dirige le carburant vers les trois réservoirs principaux; un robinet fermé dirige le carburant vers le réservoir auxiliaire supérieur.
1.6.14.2 État du carburant au départ
Après le ravitaillement à l'aéroport JFK, l'avion avait une charge en carburant de 65 300 kg de Jet A. Le plan de vol indiquait que SR 111 utiliserait 1 000 kg pour le roulage, ce qui laissait une charge de carburant de 64 300 kg au décollage.
1.6.14.3 Système de largage de carburant du MD-11
Le MD-11 dispose de deux robinets vide-vite pour larguer du carburant. Il y a un robinet vide-vite sur le bord de fuite de chaque aile, entre l'aileron extérieur et le volet extérieur. On amorce le largage du carburant en sélectionnant l'interrupteur DUMP sur le tableau de commande du circuit carburant dans le poste de pilotage. Le fait de sélectionner l'interrupteur DUMP met en marche les pompes d'appoint, les pompes de transfert et les robinets d'intercommunication. Le débit de largage du carburant est d'environ 2 600 kg par minute, pourvu que toutes les pompes à carburant et les deux robinets vide-vite fonctionnent normalement.
Le largage de carburant cesse lorsque l'interrupteur DUMP est sélectionné de nouveau, lorsque la masse brute de l'avion atteint une masse qui était présélectionnée par les pilotes par l'intermédiaire du FMS ou n'importe quand lorsque le bouton FUEL DUMP EMERGENCY STOP est enfoncé. La valeur par défaut de largage de carburant du FMS est réglée pour une masse maximale à l'atterrissage de 199 580 kg. Si une masse prédéterminée n'est pas réglée par l'équipage, le carburant sera largué jusqu'à ce que la masse de l'avion atteigne la masse par défaut. Les pilotes ne présélectionnent pas normalement une masse; ils se servent de la valeur par défaut comme étant la masse désirée en fonction du largage. En relève, chaque réservoir principal possède des flotteurs de coupure de bas niveau qui arrêtent le largage du carburant du réservoir lorsque la charge de carburant dans ce dernier atteint 5 200 kg.
Les débits de largage du carburant sont réduits si le sélecteur SMOKE ELEC/AIR est sélectionné pendant le largage du carburant. Le largage du carburant n'avait pas commencé avant que le FDR cesse de fonctionner, et il n'y avait pas de largage de carburant en cours au moment de l'impact. Si le sélecteur SMOKE ELEC/AIR avait été sélectionné au cours des dernières minutes de vol, aucune réduction du débit de largage du carburant qui pourrait y être associée n'aurait été un facteur dans l'accident.
1.6.15 Système hydraulique
L'énergie hydraulique du MD-11 provient de trois circuits parallèles continuellement sous pression. Chaque circuit est alimenté par deux pompes hydrauliques entraînées par moteur. Différentes combinaisons de deux des trois circuits offrent une redondance à chacun des actionneurs de gouverne principale. Deux pompes hydrauliques à commande électrique de relève sont également disponibles. Au besoin, une de ces pompes peut être entraînée par l'alimentation électrique de l'alternateur éolien.
En cas d'arrêt de moteur en vol, si l'avion se trouve en configuration de décollage ou d'atterrissage, les volets, les becs de bord d'attaque ou le train d'atterrissage sont sortis, l'énergie hydraulique est transférée automatiquement d'un circuit qui fonctionne à un circuit qui ne fonctionne pas au moyen des motopompes réversibles. En configuration de croisière, l'énergie hydraulique n'est pas transférée.
Au cours de l'enquête, divers composants du système hydraulique ont été examinés afin qu'on puisse déterminer si des anomalies de ce système auraient pu compromettre la pilotabilité de l'avion. Les robinets d'arrêt associés aux motopompes réversibles ont été retrouvés fermés au moment de l'impact alors qu'on s'attendait, compte tenu de la configuration de l'avion, à ce qu'au moins un ensemble de robinets soit ouvert pour permettre à une des motopompes réversibles de fonctionner. Bien que l'on n'ait pu déterminer la raison pour laquelle les robinets se trouvaient en position fermée, cette constatation peut être attribuée à plusieurs scénarios associés à des anomalies électriques liées à l'incendie.
Le moteur 2 avait été arrêté par les pilotes une minute environ avant le moment de l'impact (voir la rubrique 1.12.9). L'arrêt du moteur 2 et la perte du transfert automatique d'énergie hydraulique par l'intermédiaire d'une motopompe réversible se seraient traduits par une perte éventuelle ou la réduction de la pression de service du circuit hydraulique 2. Toutefois, les fonctions des gouvernes principales actionnées par le circuit hydraulique 2 auraient été prises en charge par un autre circuit hydraulique en bon état de service. Par conséquent, cette anomalie aurait eu peu ou pas d'effet sur la pilotabilité de l'avion.
1.6.16 Fenêtres du poste de pilotage
Le poste de pilotage de l'avion compte six fenêtres, à raison de trois sur chaque côté. Les deux fenêtres à l'avant sont désignées pare-brise gauche et pare-brise droit. Les fenêtres immédiatement derrière les pare-brise sont les fenêtres coulissantes gauche et droite. Ces fenêtres peuvent être ouvertes manuellement dans certaines conditions. Les deux fenêtres derrière les fenêtres coulissantes sont les fenêtres arrière droite et arrière gauche.
Des éléments chauffants électriques sont intégrés dans toutes les fenêtres et ils sont conçus pour éviter l'embuage à l'intérieur de la fenêtre. Les deux pare-brise ont des éléments chauffants électriques supplémentaires pour éviter la formation de givre à l'extérieur. Toutes les fenêtres ont des capteurs de température qui permettent aux éléments chauffants d'être commandés à partir du tableau d'antigivrage des pare-brise situés sur le panneau supérieur.
Les contrôleurs et les capteurs maintiennent une température acceptable pour l'antigivrage et le désembuage. Les contrôleurs fournissent automatiquement une augmentation graduelle du chauffage pour éviter tout choc thermique et ils coupent l'alimentation électrique s'il se produit une surchauffe. Une alerte s'affiche sur l'écran d'affichage des indications moteur et des alertes si une partie du circuit ne fonctionne pas ou s'il se produit une surchauffe.
1.6.17 Train d'atterrissage
Le MD-11 compte quatre atterrisseurs : deux atterrisseurs principaux, un atterrisseur central et un atterrisseur avant. Les deux atterrisseurs principaux rentrent vers l'intérieur; l'atterrisseur central et l'atterrisseur avant rentrent vers l'avant. Le train d'atterrissage est actionné au moyen de l'énergie hydraulique. La sortie et la rentrée normales du train sont assurées par le circuit hydraulique 3.
Les quatre atterrisseurs étaient en position rentrée au moment de l'impact. L'atterrisseur principal droit était dans l'ensemble plus endommagé que l'atterrisseur principal gauche.
1.6.18 Éclairage intérieur de l'avion
1.6.18.1 Éclairage normal du poste de pilotage et de la cabine
L'éclairage du poste de pilotage du MD-11 comprend des lampes fluorescentes de plafond pour l'éclairage du poste, des projecteurs pour éclairer les tableaux de bord et des tableaux à éclairage intégral. Le poste de pilotage compte aussi un éclairage supplémentaire qui comprend les lampes de lecture de l'équipage de conduite (liseuses de carte), l'éclairage de plancher et l'éclairage sacoche. L'intensité de la plupart des lumières peut être réglée au moyen de gradateurs rotatifs.
L'éclairage dans la cabine comprend l'éclairage fluorescent de plafond et de parois latérales ainsi que des lampes incandescentes qui fournissent l'éclairage des allées par le plafond et les lampes d'entrée situées aux portes. Les lumières de la cabine peuvent être commandées à partir des postes des agents de bord.
1.6.18.2 Éclairage d'urgence, batteries et circuit de charge des batteries
Le MD-11 dispose d'un système d'éclairage d'urgence qui peut éclairer le poste de pilotage et la cabine. Le système comprend des plafonniers dans le poste de pilotage ainsi que des lumières au-dessus des allées, des lumières aux poignées de porte de la cabine, des enseignes lumineuses d'issues de secours et des lumières d'évacuation au plancher situé dans la cabine.
Le système d'éclairage d'urgence comprend un réseau d'éclairage et six batteries, chacune munie d'un chargeur de batterie et d'un circuit logique de commande qui détermine la source d'alimentation. Le circuit, y compris la charge des batteries, est normalement alimenté par le bus c.a. d'urgence droit. Si l'alimentation normale est interrompue, le circuit logique de commande est conçu pour passer d'abord au bus c.c. d'urgence gauche puis, si c'est nécessaire, aux batteries.
Les batteries sont continuellement chargées chaque fois que le commutateur EMER LT situé dans le poste de pilotage est sur la position ARMED et que le commutateur EMER LT situé au poste de l'agent de bord situé dans la partie centrale de la cabine est sur la position OFF. C'est la position normale en vol de ces commutateurs. Des batteries à pleine charge donneront environ 15 minutes d'éclairage d'urgence.
On peut allumer les lumières d'urgence en utilisant le commutateur EMER LT dans le poste de pilotage, ou le commutateur situé au poste de l'agent de bord. Les lumières s'allument automatiquement s'il y a perte d'alimentation au bus service de 115 V c.a.
Le premier élément de la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue (voir l'Annexe C) demande de régler le commutateur CABIN BUS sur la position OFF. Ce faisant, on coupe l'alimentation électrique du bus cabine qui alimente la plupart des services électriques de cette dernière. Si le commutateur EMER LT situé sur le tableau supérieur du poste de pilotage n'est pas réglé sur la position ON avant qu'on déplace le commutateur CABIN BUS sur OFF, l'éclairage d'urgence de la cabine ne s'allumera pas automatiquement. Dans un tel cas, l'un ou l'autre des pilotes ou un agent de bord devrait régler le commutateur EMER LT sur ON pour allumer l'éclairage d'urgence.
1.6.18.3 Lampes de lecture (liseuses de carte) de l'équipage de conduite
Le poste de pilotage du MD-11 comprend quatre liseuses de carte installées au plafond (voir Figure 16). Ces lampes offrent un éclairage additionnel au pilote et au copilote et aux postes des observateurs de droite et de gauche. Sur l'avion en question, les lampes, numéro de pièce 2LA005916-00, du commandant de bord, du copilote et de l'observateur de droite avaient été fabriquées par Hella KG Hueck & Co. (Hella). La lampe, numéro de pièce 10-0113-3, de l'observateur de gauche avait été fabriquée par Grimes Aerospace Co. et elle était différente de la lampe Hella.
La liseuse de carte Hella est conçue pour pivoter de 35° par rapport à son axe vertical et sur 360° en rotation. On règle l'intensité de la liseuse en tournant une petite bague sur la tête de celle-ci, laquelle sert aussi d'interrupteur MARCHE-ARRÊT. On peut régler aussi la taille du faisceau lumineux ou la zone d'éclairement en tournant une bague plus grande sur la tête de la liseuse. La liseuse était équipée d'une lampe tungstène-halogène de 11,5 watts (W), 28 V c.c.
Le devant de la liseuse est recouvert d'une coupelle sphérique en plastique; un capuchon protecteur isolant est fixé à l'arrière de l'appareil d'éclairage. Le capuchon protecteur est conçu pour isoler et protéger le contact ressort métallique, lequel sert de borne positive qui transmet l'alimentation électrique de 28 V c.c. au culot de la lampe.
Les lampes modulaires, numéro de pièce 2LA 005 916-00 SWRA, des couchettes de l'équipage de conduite du MD-11 de Swissair, étaient aussi fabriquées par Hella. La lampe de couchette était une liseuse de carte qui avait été modifiée par la suppression de la fonction de l'interrupteur MARCHE-ARRÊT pour satisfaire à une exigence de certification de la FAA. Si la lampe de couchette utilisait un boîtier extérieur différent de celui de la liseuse de carte, les composants internes étaient par contre identiques.
1.6.19 Équipement d'urgence
1.6.19.1 Équipement d'urgence du poste de pilotage
Il y a quatre sièges dans le poste de pilotage des MD-11 de Swissair, et un masque à oxygène est réservé à chaque siège (voir Figure 17). Une lampe de poche rechargeable pour chaque pilote est facilement accessible à partir de la position assise. L'équipement d'urgence additionnel est rangé sur la paroi arrière du poste de pilotage, derrière le siège du commandant de bord; pour récupérer cet équipement, les pilotes doivent quitter leur siège. L'équipement additionnel comprend un extincteur au Halon 1211, des gants à l'épreuve du feu, deux ensembles d'inhalateur protecteur portatif, deux lampes de poche additionnelles, une hache, quatre gilets de sauvetage et un émetteur-récepteur VHF de secours. L'émetteur-récepteur de secours, qui est normalement rangé en position OFF, est autonome, alimenté par batterie et préréglé sur la fréquence d'urgence internationale de 121,5 MHz.
1.6.19.2 Équipement d'urgence de la cabine
L'équipement d'urgence suivant se trouve dans la cabine : sept extincteurs (cinq au Halon 1211 et deux à poudre chimique), ainsi que des jeux de gants à l'épreuve du feu, huit bouteilles d'oxygène portatives de 310 litres (L) pour les premiers soins et deux de 120 L avec masques, une hache, 14 lampes de poche, 11 inhalateurs protecteurs, des gilets de sauvetage pour chaque passager et agent de bord, des trousses médicales, un mégaphone ainsi que d'autres articles divers. Dans les couchettes de l'équipage de conduite, il y a deux autres bouteilles d'oxygène de premiers soins de 120 L et deux lampes de poche. Dans l'aire de repos de l'équipage de cabine, il y a quatre autres bouteilles d'oxygène de 310 L, un inhalateur protecteur, un extincteur au Halon 1211, des gants et une lampe de poche. (Voir la rubrique 1.6.12.2.)
1.6.19.3 Oxygène destiné à l'équipage de conduite
L'oxygène destiné à l'équipage de conduite des MD-11 de Swissair est fourni à partir d'une bouteille d'oxygène haute pression en aluminium enveloppée d'une fibre para-aramide. Le système fournit de l'oxygène régulé par l'intermédiaire de conduites en acier inoxydable jusqu'aux détendeurs montés sur les masques, et il alimente les postes du commandant de bord, du copilote et des deux observateurs. Un raccord en T est installé dans la conduite d'alimentation en acier inoxydable près du sommet de l'avion, entre les références 383 et 374 pour recevoir un masque de membre d'équipage additionnel dans la configuration avion cargo. Le raccord en T est fermé par un capuchon en aluminium AN929-6 qui, une fois installé, dépasse des matelas isolants situés entre les cadres pour arriver dans l'espace inoccupé du poste de pilotage (voir Figure 5).
Chaque masque intégral est rangé dans une boîte de rangement facilement accessible à chaque poste d'équipage de conduite, les conduites d'alimentation en oxygène et les connexions du microphone se trouvant à la base de chacune des boîtes de rangement (voir Figure 11). Lorsque la porte de la boîte de rangement des masques à oxygène est ouverte, le microphone du masque est automatiquement en circuit, et le micro-rail est désactivé.
Les masques à oxygène de l'équipage sont munis d'un cordon de fixation d'une longueur de six pieds. Par conséquent, lorsqu'il porte son masque, le commandant de bord peut atteindre tout l'équipement d'urgence, la porte du poste de pilotage et les tableaux de distribution supérieurs. Le copilote ne serait pas en mesure d'atteindre l'équipement d'urgence, mais il pourrait atteindre la porte du poste de pilotage et les tableaux de distribution supérieurs. Si les conditions le permettent, le copilote pourrait toujours enfiler le masque à oxygène d'un observateur; la longueur du tuyau de l'un ou l'autre de ces masques à oxygène lui laisserait suffisamment de liberté de mouvement pour atteindre les inhalateurs protecteurs et les lampes de poche. Les deux inhalateurs protecteurs portables ont chacun une alimentation de 15 minutes en oxygène.
Chaque masque à oxygène de l'équipage de conduite est muni d'un harnais pneumatique, qui se gonfle d'oxygène sous pression lorsqu'on actionne un levier sur le détendeur. Lorsqu'il est gonflé, le harnais permet d'enfiler et d'enlever facilement le masque, et ce dernier s'ajuste facilement par-dessus des lunettes et un casque d'écoute. Le harnais se dégonfle lorsqu'on dégage le levier, pour serrer le masque sur la figure de celui qui le porte. Le masque est équipé d'une soupape d'évacuation pour purger toute fumée se trouvant au niveau des lunettes.
Les détendeurs montés sur le masque peuvent fonctionner à l'une des trois positions suivantes : dilution-demande normale, oxygène à 100 % ou alimentation sous pression. La position par défaut est la position dilution-demande normale; les positions oxygène à 100 % ou alimentation sous pression doivent être sélectionnées par les pilotes. Une telle sélection serait faite en fonction des circonstances.
Les pilotes de SR 111 respiraient de l'oxygène depuis environ 15 minutes. L'état de la charge de la bouteille au décollage n'a pas été déterminé; toutefois, si les deux pilotes avaient utilisé de l'oxygène à 100 %, la durée de la réserve pour une pression d'alimentation minimale de 1 000 livres par pouce carré (lb/po2) aurait été d'au moins 64 minutes. À 1 850 lb/po², qui correspond à une bouteille à pleine charge, la durée serait passée à environ 119 minutes.
La pression de la bouteille d'oxygène de l'équipage avait été vérifiée la dernière fois le 9 août 1998, et la bouteille avait été remplie lors d'une visite A. La bouteille avait subi un essai hydrostatique pour la dernière fois le 17 mars 1997. Un examen de la bouteille d'oxygène de l'équipage a montré qu'elle était sous pression au moment de l'impact. Le CVR révèle que les pilotes n'ont pas indiqué éprouver de problèmes avec le circuit à oxygène.
1.6.19.4 Oxygène destiné aux passagers
Le MD-11 est équipé de générateurs d'oxygène montés de façon indépendante l'un par rapport à l'autre dans toute la cabine et les zones réservées à l'équipage de cabine. Ces générateurs alimentent les masques à oxygène qui tombent des compartiments se trouvant dans les panneaux supérieurs. Les masques sont conçus pour recouvrir le nez et la bouche. Une fois qu'ils sont déclenchés, chaque générateur est en mesure de fournir un débit d'oxygène aux masques qu'il dessert pendant un minimum de 15 minutes.
Les masques de la cabine sont rangés derrière des panneaux modulaires situés au-dessus des sièges. Ces panneaux sont tenus fermés par des verrous électriques. Les verrous sont alimentés par les bus 1, 2 et 3 de 115 V c.a. Si la pressurisation de la cabine diminue sous une valeur équivalant à la pression standard à 14 400 pi, les verrous se débloquent et les panneaux s'ouvrent en basculant vers le bas, ce qui permet aux masques de tomber. Ces panneaux peuvent également être ouverts par les pilotes au moyen d'un interrupteur dans le poste de pilotage.
L'avion était équipé de 148 générateurs d'oxygène. Trois tailles de générateurs d'oxygène étaient installées; chaque générateur alimentait deux, trois ou quatre masques. Cent dix-huit générateurs d'oxygène ont été récupérés en tout. Des 83 qui ont été examinés en détail , on a déterminé que 53 avaient été activés à cause de l'impact. On a déterminé qu'aucun des générateurs d'oxygène examinés n'avait contribué à l'incendie, et que les masques à oxygène des passagers n'avaient pas été utilisés pendant le vol.
Le Manuel d'exploitation du MD-11 de Swissair stipule que les masques à oxygène des passagers ne doivent pas être sortis si l'altitude cabine est inférieure à 14 000 pi et qu'il y a présence de fumée ou d'une chaleur anormale, puisque l'oxygène pourrait augmenter les risques ou la gravité d'un incendie en cabine. Comme c'est habituellement le cas pour les masques à oxygène de passagers utilisés en général dans les avions de transport, les masques des passagers à bord du MD-11 étaient conçus pour fournir un mélange d'oxygène et d'air ambiant. Par conséquent, l'usage des masques n'aurait pas empêché les passagers de respirer de la fumée si elle avait été présente.
1.6.20 Groupes motopropulseurs
1.6.20.1 Généralités
L'avion était équipé de trois moteurs Pratt & Whitney, modèle 4462. Les moteurs sont désignés par numéro : le moteur 1 se trouve sous l'aile gauche, le moteur 2 est monté dans la dérive (empennage) et le moteur 3 se trouve sous l'aile droite.
L'avion est aussi équipé d'un APU monté dans l'empennage. Le groupe auxiliaire de bord de l'avion n'était pas utilisé par les pilotes avant que le FDR ne cesse de fonctionner, et il ne fonctionnait pas au moment de l'impact.
1.6.20.2 Régulateurs automatiques à pleine autorité redondante
La poussée de chaque moteur est commandée par un FADEC à double voie (chaînes A et B) qui assure l’interface avec les systèmes de commande de l’avion et des moteurs. Chaque chaîne est en mesure de commander le fonctionnement du moteur de façon indépendante. L’alimentation électrique de chaque FADEC est fournie principalement par un alternateur à aimant permanent entraîné par moteur. Chaque FADEC peut aussi être alimenté, si c’est nécessaire, par le système électrique de l’avion au moyen d’un module d’alimentation supplémentaire (SCU); c’était un équipement facultatif qui était monté sur l’avion. L’alimentation du FADEC au moyen du SCU s’appelle alimentation d’appoint. Le FADEC reçoit aussi des signaux d’entrée des résolveurs des manettes des gaz, situés sous le pylône central et reliés aux manettes des gaz. Il y a deux résolveurs de manettes par manette. Un résolveur fournit le signal de position de la manette des gaz (TRA) à la chaîne A et le second à la chaîne B. L’excitation électrique des résolveurs est fournie par le FADEC.
Chaque chaîne du FADEC (A et B) reçoit aussi des données des trois bus de données numériques. Deux de ces bus fournissent des données provenant des ADC, et l’autre fournit les données arrivant des FCC. Le FCC-1 fournit des données à la chaîne A, et le FCC-2 fournit les données à la chaîne B. Les ADC fournissent l’altitude-pression, la pression totale à l’entrée de la soufflante (Pt2)Note de bas de page 41 et la température totale (Tt2)Note de bas de page 42 aux chaînes A et B. Les FCC fournissent le signal de plafonnement EPR, les données sur les vannes de décharge, le signal de référence air-sol (atterrisseur avant comprimé) et les données « volets/becs de bord d’attaque rentrés ».
Chaque chaîne du FADEC comprend une mémoire permanente qui enregistre les données d’anomalies utilisées pour le dépannage et la programmation de la maintenance. Il y a 192 cellules d’anomalies continuellement disponibles dans la mémoire permanente. Chaque RENSEIGNEMENTS DE BASE 43 Les 40 % de la longueur de piste qui restent s’appellent réserve opérationnelle ou marge de sécurité. BUREAU DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS 69 anomalie n’est enregistrée qu’une seule fois par étape de vol, mais elle est récrite en mémoire lorsque le moteur est arrêté au moyen du commutateur FUEL. Le contenu de la mémoire d’anomalies s’étend habituellement sur de nombreux vols. L’information contenue dans les cellules de la mémoire est retenue jusqu’à ce que les 192 cellules aient été remplies de données, et à ce moment-là, l’information commence à être oblitérée à partir du début.
Certaines anomalies feront basculer le moteur du mode EPR normal au mode de repli automatique N1. Ce repli cause aussi le débrayage des automanettes. Les automanettes ne peuvent pas être embrayées de nouveau si un moteur se trouve en mode N1. La perte du signal d’entrée TRA amènera le moteur à adopter une poussée fixe qui ne peut être modifiée par l’intermédiaire des manettes des gaz.
1.6.21 Performances d'atterrissage
Les distances d'atterrissage pour diverses masses de l'avion ont été calculées pour qu'on puisse déterminer si celui-ci aurait pu s'immobiliser en toute sécurité sur la piste 06 de l'aéroport international de Halifax. Les calculs ont été exécutés pour l'avion en question, tous les systèmes fonctionnant normalement et avec certaines défectuosités techniques.
La distance horizontale nécessaire à l'atterrissage d'un avion jusqu'à son arrêt complet sur une surface en dur, plane, lisse et sèche est appelée distance d'atterrissage. Cette distance se fonde sur le fait que l'avion se trouve en configuration d'atterrissage en approche stabilisée à une hauteur de 50 pi (15 m) au-dessus de la surface d'atterrissage (habituellement le seuil de la piste). Pour des opérations normales aux aéroports de destination et de dégagement, la réglementation exige que cet atterrissage avec arrêt complet se fasse sur 60 % de la longueur de piste disponibleNote de bas de page 43, déporteurs déployés et l'antidérapage étant en service, mais sans l'utilisation des inverseurs de poussée.
Le manuel d'exploitation du MD-11 de Swissair renferme des graphiques d'atterrissage que l'équipage de conduite peut utiliser pour calculer les distances d'atterrissage anticipées. Ces graphiques donnent des renseignements pour un réglage des volets à 35 et à 50°, fondé sur la masse à l'atterrissage de l'avion, l'altitude de l'aéroport, la composante vent et les conditions à la surface de la piste. Pour les atterrissages imprévus, la réglementation n'exige aucune réserve opérationnelle ou marge de sécurité qui feraient partie des calculs de la longueur de piste pour les opérations normales (1,67 multiplié par la distance d'atterrissage).
Les conditions atmosphériques qui existaient au moment de l'accident pour un atterrissage sur la piste 06 à l'aéroport international de Halifax ont été prises en compte. Dans les situations où tous les systèmes de bord fonctionnent normalement, les distances d'atterrissage calculées pour diverses masses sont indiquées dans le tableau 10.
Masse de l'avion | Atterrissage volets sortis à 35° | Atterrissage volets sortis à 50° |
---|---|---|
199 580 kg | 4 725 pi | 4 236 pi |
218 400 kg | 5 118 pi | 4 725 pi |
230 000 kg | 5 316 pi | 4 920 pi |
S'il se produit certaines défectuosités techniques, une distance d'arrêt additionnelle sera utilisée par l'avion; par conséquent, il faudrait appliquer un facteur de correction pour l'estimation de ces distances d'atterrissage accrues. Le manuel d'exploitation de Swissair donne la liste des facteurs de correction qui doivent être ajoutés à la distance d'atterrissage pour diverses défectuosités possibles. Comme l'indique la rubrique 1.6.13.3, l'épave a révélé que les becs de bord d'attaque étaient rentrés. Si les pilotes étaient au courant de cette anomalie, ils auraient été tenus de poser l'avion volets sortis à 28°, ce qui correspond à la configuration d'atterrissage homologuée becs de bord d'attaque rentrés. Aussi, des dommages causés par l'incendie au tableau de distribution avionique supérieur s'étaient traduits par plusieurs défaillances de système qui ont été enregistrées avant que les enregistreurs de bord ne cessent de fonctionner. Le disjoncteur de référence air-sol est situé dans un endroit voisin des systèmes pour lesquels des défectuosités ont été enregistrées. Si le circuit de référence air-sol avait été compromis à cause de l'incendie, l'avion, une fois sur la piste, n'aurait pu bénéficier du déploiement automatique des déporteurs-sol ni de l'antidérapage des freins. Ces facteurs additionnels devraient alors être ajoutés à la distance d'atterrissage calculée. La distance minimale d'atterrissage dont aurait eu besoin SR 111 si les becs de bord d'attaque n'étaient pas déployés, les déporteurs et l'antidérapage des freins étant inopérants, est indiquée au tableau 11.
Si l'équipage de conduite n'était pas en mesure de sélectionner les volets à 28° et qu'il s'était posé volets sortis à 15°, les distances d'atterrissage augmenteraient d'environ 12 %, comme le montre le tableau 11. Si l'équipage de conduite avait été en mesure de sortir les volets à 50° et qu'il avait décidé d'effectuer un atterrissage dans cette configuration peu classique, alors les distances d'atterrissage ci-dessus seraient réduites d'environ 10 %.
Masse de l'avion | Volets à 15°, becs rentrés, système antidérapage inopérant, déporteurs-sol automatiques inutilisables | Volets à 28°, becs rentrés, système antidérapage inopérant, déporteurs-sol automatiques inutilisables | Volets à 50°, becs rentrés, système antidérapage inopérant, déporteurs-sol automatiques inutilisables |
---|---|---|---|
199 580 kg | 10 700 pi | 9 600 pi | 8 700 pi |
218 400 kg | 11 800 pi | 10 600 pi | 9 500 pi |
230 000 kg | 12 400 pi | 11 100 pi | 10 000 pi |
Une mise en garde dans les graphiques d'atterrissage du manuel d'exploitation indique que pour chaque tranche de 5 nœuds au-dessus de la vitesse d'approche idéale, la distance d'atterrissage augmente de 1 000 pi. L'équipage de conduite de SR 111 devait faire face à de la fumée et à un incendie dans le poste de pilotage ainsi qu'à des défaillances d'affichage et de systèmes de bord, et à un moment donné il volait au moyen des instruments de secours. Par conséquent, il est probable que l'avion ne se serait pas trouvé en position et en vitesse idéales pour l'atterrissage au moment de franchir le seuil, ce qui aurait augmenté encore plus la distance d'arrêt à l'atterrissage. Si les inverseurs de poussée avaient été utilisés, ils auraient permis de réduire légèrement cette distance.
Compte tenu de tous les facteurs, l'atterrissage de SR 111 aurait nécessité plus de piste que les 8 800 pi disponibles sur la piste 06 de l'aéroport international de Halifax.
1.6.22 Inspection et dossiers de maintenance de l'avion
1.6.22.1 Généralités
La déclaration d'agrément du système de maintenance figurant sur le certificat d'exploitant aérien 1017 de Swissair indiquait que Swissair était homologuée en vertu des Joint Aviation Requirements (JAR)-OPS 1, sous-partie M, pour gérer la maintenance de ses avions MD-11. Au moment de l'accident, Swissair avait confié par contrat toute la maintenance de ses avions à SR Technics, et Swissair ne disposait d'aucune capacité de maintenance à l'interne. À titre d'atelier de réparations agréé JAR/FAR 145, SR Technics s'était vu confier par contrat l'exécution de toutes les corrections de défauts, les vérifications de maintenance au-delà des vérifications avant le vol, les activités techniques de maintenance ainsi que la planification de la maintenance et le traitement des pièces de rechange pour appuyer les opérations de Swissair.
1.6.22.2 Dossiers de maintenance
Au cours de l'enquête, on a effectué un examen du programme de maintenance Swissair/SR Technics, des procédures de tenue de livres et des dossiers de maintenance de l'avion en question. Un petit nombre d'écarts ont été découverts en ce qui a trait aux instructions techniques et aux inscriptions dans les livrets techniques. Les écarts ont été jugés mineurs, et la tenue générale des livres a été jugée correcte. Les dossiers de maintenance tenus pour l'avion HB-IWF indiquent que ce dernier était entretenu d'une façon qui était en accord avec les pratiques de l'industrie.
La revue des dossiers de maintenance de l'avion, qui comprenait les inscriptions dans les livrets techniques du 10 septembre 1997 au 2 septembre 1998, les trois dernières visites A et la revue des activités de maintenance du RDB, n'ont pas permis de cerner des événements qui auraient été jugés pertinents pour l'enquête.
1.6.22.3 Inspections de maintenance
En plus des vérifications de maintenance effectuées avant chaque départ, les MD-11 de Swissair faisaient l'objet d'une série d'activités de maintenance programmées. Celles-ci étaient exécutées après un certain nombre d'heures de vol de la façon suivante : visite A toutes les 700 heures de vol; visite C toutes les 6 000 heures de vol et première visite D à 30 000 heures de vol ou 72 mois, selon le premier terme atteint. La dernière activité de maintenance programmée effectuée sur l'avion en question était une visite A, exécutée le 10 août 1998.
Un examen des antécédents de maintenance de l'avion HB-IWF a confirmé que toutes les exigences du programme de maintenance agréé avaient été remplies dans les délais, ou selon la tolérance accordée à Swissair par l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) suisse.
1.6.22.4 Information de service du MD-11
1.6.22.4.1 Bulletins de service
Les constructeurs d'avions et les vendeurs de produits publient à l'intention des utilisateurs de leurs produits des documents qui sont conçus pour améliorer la sécurité aérienne, fournir des avis ou des instructions spécifiques, ou les deux. Ces documents comprennent, mais sans s'y limiter, les bulletins de service (SB), les bulletins de service alerte (ASB), les lettres de service (SL) et les lettres aux exploitants (AOL). Le type de document publié dépend de l'évaluation, par l'expéditeur, de l'urgence ou de la gravité de l'information présentée; les bulletins de service alerte ont la plus haute priorité. La conformité à ces documents est à la discrétion du propriétaire ou de l'exploitant, puisqu'elle n'est pas obligatoire à moins qu'une consigne de navigabilité connexe soit promulguée par l'autorité de réglementation pertinente.
Au moment de l'accident, il y avait 822 bulletins de service de MD-11 applicables en fonction du numéro de fuselage à l'avion HB-IWF, et 51 étaient des bulletins de service alerte. De ces 51 bulletins de service alerte, 47 avaient été exécutés, 2 avaient trait à la consigne de navigabilité 94-10-03 pour laquelle une exemption avait été accordée (voir la rubrique 1.6.22.4.2), 1 était en cours et 1 était propre à l'installation d'un chauffe-eau qui n'était pas installé dans la flotte des MD-11 de Swissair. Le service technique de SR Technics passait en revue chaque bulletin de service. S'il déterminait que le bulletin devait être incorporé, il produisait une instruction technique. La décision d'accepter ou de rejeter un bulletin de service applicable était prise par l'ingénieur compétent, puis revue et approuvée par le supérieur de l'ingénieur compétent.
Un examen des bulletins de service sur le MD-11 publiés par le constructeur de l'avion jusqu'au moment de l'accident a permis d'en isoler 16 qui ont été jugés dignes d'intérêt pour l'enquête. Parmi eux, il y avait des bulletins de service relatifs à des événements qui pouvaient causer du frottement, un amorçage d'arc, la production d'étincelles ou de la fumée dans la cabine ou le poste de pilotage.
1.6.22.4.2 Consignes de navigabilité
Une consigne de navigabilité, habituellement fondée sur le bulletin de service d'un vendeur ou d'un constructeur, est publiée lorsqu'une situation dangereuse existe et qu'elle pourrait exister ou se développer dans d'autres produits de même définition de type. Il s'agit d'une directive réglementaire exigeant une inspection, une réparation, une modification ou une procédure, et elle est publiée par l'état de construction ou par l'autorité de l'aviation civile du pays dans lequel l'aéronef est immatriculé.
L'OFAC adopte et publie de nouveau chaque consigne publiée par un état de construction qui a trait aux aéronefs immatriculés en Suisse ou aux produits qui pourraient être installés sur des aéronefs immatriculés en Suisse. Au sein de SR Technics, la consigne de l'OFAC n'est distribuée que si elle n'est pas couverte par une consigne publiée par l'état de construction, ou s'il y a des écarts par rapport au contenu. Swissair s'était conformée à toutes les consignes de navigabilité publiées par l'état de construction, même si ces dernières n'étaient pas obligatoires en droit pour les aéronefs immatriculés en Suisse et assujettis à la réglementation suisse.
Au moment de l'accident, 57 consignes de navigabilité (AD) de MD-11 publiées par la FAA s'appliquaient à l'avion en question. La « Liste d'état des instructions techniques » de SR Technics confirmait que toutes les consignes de navigabilité pertinentes avaient été exécutées, à l'exception de l'AD 94-10-03, pour laquelle une exemption avait été accordée à Swissair par l'OFAC. L'AD 94-10-03 portait sur une anomalie potentielle de logiciel ayant trait aux signaux d'entrée de l'équipement de navigation parvenant aux FMC/FCC, et elle a par conséquent été jugée non pertinente pour les circonstances du présent accident. Un examen des consignes de navigabilité sur les MD-11 publiées par la FAA jusqu'au moment de l'accident a permis d'isoler les deux consignes suivantes qui pouvaient être liées à la zone des dommages causés par l'incendie dans SR 111 (AD 93-04-01), ou à d'autres événements relatifs à de la fumée dans le poste de pilotage (AD 97-10-12).
L'objet de l'AD 93-04-01 consistait à « prévenir l'effacement des écrans d'affichage, qui risquait de mener à une perte momentanée de données essentielles au vol sur l'écran d'affichage ». Cette consigne était entrée en vigueur le 2 avril 1993 et elle renvoyait au bulletin de service alerte de MD-11 A24-51, qui était entré en vigueur le 11 septembre 1992. SR Technics avait exécuté la consigne le 14 janvier 1993, une fois que le bulletin de service alerte avait été complété.
L'objet de l'AD 97-10-12 consistait à « déceler et à corriger le frottement de faisceaux de fils situés près du support du panneau de coupure de l'alimentation de l'avionique et tout amorçage d'arc consécutif en vol se produisant derrière le tableau de distribution avionique, ce qui risquait de causer un incendie dans les faisceaux de fils et de la fumée dans le poste de pilotage ». Cette consigne était entrée en vigueur le 16 juin 1997 et elle renvoyait au bulletin de service MD11-24-111, qui était entré en vigueur le 3 décembre 1996. SR Technics avait exécuté cette consigne sur l'avion HB-IWF le 6 mars 1997.
1.6.22.5 Rapports de difficultés en service des MD-11
Une recherche dans la base de données des rapports de difficultés en service (SDR) de la FAA pour les inscriptions relatives au MD-11/11F jusqu'en septembre 1998, a révélé en tout 970 rapportsNote de bas de page 45. À ce moment-là, les SDR relatifs au MD-11/11F avaient été passés en revue au moyen de mots clés comme feu, fumée et odeur. De plus, les mêmes données avaient fait l'objet d'une recherche au moyen des codes de la Air Transport Association (ATA) pour les systèmes de télécommunications (2300), de distribution de l'alimentation électrique (2400) et de protection incendie (2600). Cet examen a permis d'obtenir des renseignements statistiques généraux qui se trouvent à la rubrique 1.18.10, mais il n'a pas permis de cerner des écarts spécifiques dignes d'intérêt pour les circonstances de la présente enquête. Des renseignements détaillés et spécifiques relatifs à des écarts relevés au sujet du câblage n'étaient pas systématiquement disponibles puisqu'il n'était pas exigé qu'ils soient notés à l'intérieur de la base de données des SDR. Il n'y avait pas de codes d'inspection de composants ou de systèmes de bord conjoints (codes ATA améliorés) utilisés pour recueillir, compiler et contrôler les données relatives à ces écarts. Toutefois, au cours de la présente enquête, compte tenu des questions relatives aux données sur le câblage mises en relief par des enquêtes du National Transportation Safety Board (NTSB) comme celle sur le vol Trans World Airlines 800Note de bas de page 46 et selon des délibérations de groupes de l'industrie, la FAA a demandé que l'ATA présente un nouveau code de sous-chapitre pour les comptes rendus (97) afin d'aider à retracer plus précisément les problèmes et les anomalies propres aux fils.
1.6.22.6 Gestion de la maintenance des MD-11
Comme pour tout appareil commercial, la gestion de la maintenance des MD-11 faisait intervenir diverses sociétés et divers organismes de réglementation. En dehors des obligations de maintenance de Swissair, comme le mentionne son certificat d’exploitant aérien, SR Technics, l’OFAC, la FAA et Boeing participaient directement ou indirectement à la gestion de la maintenance de la flotte des MD-11 de Swissair (voir la section 1.17).
1.7 Renseignements météorologiques
1.7.1 Généralités
Deux systèmes météorologiques actifs se trouvaient dans la zone de l'itinéraire de vol de SR 111 entre New York et Halifax : une ligne d'orages se déplaçant dans la région de New York, et l'ouragan Danielle, qui était situé à peu près à 300 nm au sud-est de Halifax. Les effets prévus des deux systèmes se déplaçaient de façon prévisible. La Nouvelle-Écosse était sous l'influence d'une faible crête de haute pression et des effets distants de l'ouragan.
1.7.2 Prévisions météorologiques
Les prévisions de zone pour l'aviation pour la région comprenant Peggy's Cove étaient les suivantes : nuages épars entre 2 000 et 3 000 pi, nuages fragmentés occasionnels culminant à 8 000 pi; ciel couvert avec nuages fragmentés occasionnels à 10 000 pi culminant à 16 000 pi, nuages fragmentés en altitude, visibilité supérieure à 6 milles terrestres (sm).
Les prévisions d'aérodrome (TAF) pour l'aéroport de Halifax Shearwater, situé entre l'aéroport international de Halifax et le lieu de l'accident, près de Peggy's Cove, étaient les suivantes : vent de surface du 070°V à 10 nœuds, soufflant en rafales à 20 nœuds; visibilité supérieure à 6 sm; quelques nuages à 500 pi AGL; nuages épars à 2 000 pi AGL, nuages fragmentés à 24 000 pi AGL; temporairement de 23 h à 2 h, visibilité de 5 sm dans des averses de pluie légère et de la brume; nuages épars à 500 pi AGL, nuages fragmentés à 2 000 pi AGL et ciel couvert à 10 000 pi AGL.
Les prévisions d'aérodrome pour l'aéroport international de Halifax étaient les suivantes : vent de surface du 090°V à 10 nœuds; visibilité supérieure à 6 sm; couches de nuages épars à 3 000 pi AGL, nuages fragmentés à 8 000 pi AGL et nuages fragmentés à 25 000 pi AGL.
1.7.3 Conditions météorologiques réelles
Les conditions météorologiques réelles à l'aéroport JFK tout juste avant le départ de SR 111 étaient les suivantes : vents de surface du 170°V à 12 nœuds; visibilité de 10 sm dans des orages et une pluie légère; nuages fragmentés à 2 200 pi AGL, nuages fragmentés à 4 000 pi AGL comprenant des cumulonimbus, ciel couvert à 9 000 pi AGL; température de 23 °C; point de rosée à 21 °C; calage altimétrique de 29,73 pouces de mercure (po Hg). Remarques : orages dans le voisinage, de l'ouest au nord-ouest de l'aéroport se déplaçant vers l'est; l'orage avait commencé à 0 h 10, la pluie avait commencé à 0 h 3.
Les conditions météorologiques à l'aéroport de Halifax Shearwater à 1 h étaient les suivantes : vents de surface du 060°V à 9 nœuds; visibilité de 15 sm; quelques nuages à 1 200 pi AGL, nuages fragmentés à 7 000 pi AGL, ciel couvert à 25 000 pi AGL; température de 18 °C; point de rosée à 15 °C; calage altimétrique de 29,78 po Hg; couverture nuageuse : stratus fractus 1/8, altocumulus 5/8, cirrus 3/8.
Les conditions météorologiques à l'aéroport international de Halifax à 1 h étaient les suivantes : vents de surface du 100°V à 10 nœuds; visibilité de 15 sm; nuages fragmentés à 13 000 pi AGL, ciel couvert à 24 000 pi AGL; température de 17 °C; point de rosée à 13 °C; calage altimétrique de 29,80 po Hg; couverture nuageuse : altocumulus 6/8, cirrostratus 2/8.
Entre 1 h et 2 h, le ciel de la région de Peggy's Cove était partiellement couvert de nuages, et il y avait des averses de pluie dans la région. La visibilité avait été consignée comme étant « bonne » aux stations météorologiques au sol; toutefois, elle était quelque peu réduite dans la brume au-dessus de l'océan. Les vents soufflaient à environ 10 nœuds. La température de l'air était d'environ 16 °C.
1.7.4 Vent en altitude
Le vent au FL330 soufflait du 210°V à 65 nœuds, ce qui permettait à SR 111 de voler à une vitesse-sol d'environ 530 nœuds, soit près de 9 nm par minute. Le vent arrière a diminué pendant la descente pour atteindre environ 13 nœuds du 200°V à 10 000 pi.
1.7.5 Exposé météorologique
Les agents techniques d'exploitation de Swissair à New York avaient breffé les pilotes, et la planification du vol avait été ordinaire, à ceci près qu'un itinéraire passant plus au nord que d'habitude avait été sélectionné. Cette route avait été choisie pour permettre d'éviter le mauvais temps causé par l'ouragan Danielle. L'exposé météorologique reçu par l'équipage comprenait, en partie, les prévisions pour Boston, Bangor et Halifax.
1.7.6 Conditions météorologiques au départ de JFK
Au moment du départ de SR 111 de l'aéroport JFK, il y avait de la foudre et des cumulonimbus dans la région, au nord-ouest et au sud de l'aéroport. Dans les deux minutes qui ont suivi le décollage, l'équipage de conduite a demandé un changement de cap de la trajectoire autorisée pour éviter des orages isolés dans cette région. Les données de coups de foudre entre les nuages et le sol indiquaient que l'avion se trouvait à plus de 23 nm du point de coup de foudre le plus proche et bien plus loin encore de l'endroit où les coups de foudre étaient les plus nombreux. Par conséquent, il est peu probable que l'avion ait été frappé directement par un coup de foudre nuage-sol.
Le rapport météorologique à l'aéroport JFK comprenait des coups de foudre occasionnels dans les nuages au moment du départ de SR 111, des orages isolés et des cumulonimbus dans le voisinage. On n'a signalé aucun coup de foudre entre les nuages, seulement à l'intérieur d'un nuage. Les orages étaient distants de plusieurs milles; par conséquent, il est peu probable que l'avion ait intercepté un coup de foudre entre des nuages.
Le FDR n'a montré aucune anomalie qui aurait pu indiquer une perturbation électrique inhabituelle à l'intérieur de l'avion pendant cette période, et il n'y avait aucun enregistrement de communications ATS indiquant que des coups de foudre avaient frappé l'avion. Les renseignements disponibles indiquent que l'avion n'avait pas été frappé par la foudre.
1.7.7 Conditions météorologiques pendant la descente
SR 111 aurait traversé plusieurs couches de nuages pendant sa descente, et l'avion se serait retrouvé en conditions météorologiques de vol aux instruments. La première couche nuageuse allait de nuages fragmentés à un ciel couvert dont la base se situait entre 24 000 et 25 000 pi. L'avion serait selon toute vraisemblance entré dans une deuxième couche nuageuse vers 16 000 pi. La base de cette couche se situait à peu près à 12 000 pi au-dessus de l'aéroport international de Halifax, s'inclinant vers le bas à 7 000 pi au-dessus de l'aéroport de Halifax Shearwater.
Alors que SR 111 se dirigeait au nord de la région de Peggy's Cove à 10 000 pi, il est probable que l'avion se trouvait près de la base d'une couche nuageuse et qu'il aurait été temporairement à l'écart des nuages profitant d'une bonne visibilité de vol la nuit. Alors que SR 111 se dirigeait au sud vers l'océan et qu'il commençait à descendre, il est probable qu'il serait entré dans une deuxième couche nuageuse. Il serait entré dans une troisième couche nuageuse à environ 5 000 pi et en serait sorti à au moins 1 500 pi. Sous 1 500 pi, on avait rapporté que la visibilité en vol était bonne et qu'elle n'était sans doute pas réduite par les nuages, avec une possibilité de précipitations légères et de brume au-dessus de l'eau. Lorsque SR 111 se dirigeait vers l'océan, il faisait probablement noir au-dessus de la mer en raison de la couverture nuageuse, de la brume et de l'absence de lumière en surface.
1.8 Aides à la navigation
Toutes les aides à la navigation au sol dans la région de Halifax étaient en bon état de service au moment de l'accident.
1.9 Télécommunications
La présente section donne des renseignements sur les communications sol-air et air-sol de service aéronautique fixe et mobile, et sur leur efficacité au moment de l'accident.
1.9.1 Généralités
Toutes les communications enregistrées entre SR 111 et les différentes unités de contrôle de la circulation aérienne (ATC) associées au vol étaient de bonne qualité technique; en effet, tout le matériel d'enregistrement avait fonctionné normalement, et la qualité du son était normale. Toutes les installations de radiocommunications au sol en relation avec le vol SR 111 étaient en bon état de service. Le centre de contrôle de la circulation aérienne en route (ARTCC) de Boston avait subi une interruption des communications d'une durée de 13 minutes avec SR 111, commençant à 0 h 33 et se terminant vers 0 h 46. Les renseignements relatifs à cette interruption des communications de 13 minutes figurent à la rubrique 1.18.8.2.2 et à la section 2.11 du présent rapport. Outre cette anomalie, aucune interruption ni anomalie de communication n'avait été signalée par les ATS ou par un autre avion le long de la route suivie par SR 111 pendant la durée du vol.
1.9.2 Formation des contrôleurs
Nav Canada offre des stages de recyclage annuels sur des sujets pertinents à l'intention des contrôleurs au moyen de plans de leçon élémentaires fondés sur la matière figurant dans le Manuel d'exploitation du contrôle de la circulation aérienne (MANOPS ATC) et dans d'autres sources. Les stages mettent l'accent sur les responsabilités en matière d'espacement du trafic aérien et les tâches administratives des contrôleurs. Au cours de la formation sur les situations d'urgence à bord des aéronefs, on s'attend des contrôleurs qu'ils fassent preuve de jugement dans le traitement de situations qui ne sont pas spécifiquement abordées, parce qu'il est impossible de prévoir des procédures pour tous les cas. L'information fournie rappelle aux contrôleurs que « lorsque se produit une situation d'urgence, le temps est primordial, donc, toutes les questions doivent être claires et concises. Pour réagir de façon efficace, le contrôleur doit se fier à l'information fournie par le pilote. » Pendant toute la séquence menant à l'accident, le contrôleur s'est fié au pilote, étant d'avis que celui-ci était le mieux placé pour déterminer la nature de la situation dans l'avion, la nature de ses besoins et ce qu'il voulait que le contrôleur fasse. Avant cet accident, les contrôleurs recevaient une formation élémentaire sur la façon de réagir aux urgences à bord, mais ils ne recevaient aucune formation élémentaire ni aucun suivi sur le vol et les exigences d'exploitation générales des avions en situations anormales ou d'urgence. Notamment, les contrôleurs n'avaient reçu aucune formation sur les procédures d'exploitation générales relatives au largage du carburant ni sur les indications de base qu'ils devraient s'attendre d'obtenir de l'avion.
1.9.3 Procédures de transition et communications avec les contrôleurs
La procédure de transition habituelle pour un avion se trouvant dans l'espace aérien supérieur et en rapprochement de Halifax consiste à passer d'un contrôleur aérien en route de l'espace aérien supérieur à un contrôleur de l'espace aérien inférieur, puis à un troisième contrôleur responsable de la circulation à l'intérieur de la région de contrôle terminal de Halifax. L'espace aérien est contrôlé par l'ACC de Moncton, situé à Riverview (Nouveau-Brunswick). Dans ce cas, le contrôleur en route de l'espace aérien supérieur avait assuré la coordination entre le contrôleur de l'espace aérien inférieur et le contrôleur terminal de Halifax pour réduire le nombre de changements de fréquences nécessaires et aider à accélérer la descente. À 1 h 18 min 16 s, le contrôle en route de l'espace aérien supérieur avait donné instruction à SR 111 de communiquer avec le contrôleur de région terminale de Halifax sur la fréquence de 119,2 MHz. L'ACC de Moncton avait assigné un contrôleur, ayant l'utilisation exclusive de la fréquence de 119,2 MHz, pour répondre aux besoins en communication de SR 111 à l'approche sur Halifax.
On a comparé soigneusement la transcription des messages de l'ATC à la phraséologie recommandée dans le MANOPS ATC de Nav Canada. Bien qu'il y ait eu de légers cas de substitution ou d'omission, rien n'indique que les avis, les autorisations ou les demandes de l'ATC aient été mal compris ni qu'ils ne soient pas parvenus à l'équipage de SR 111. De même, les messages des pilotes de SR 111 étaient conformes aux normes et pratiques acceptées dans l'industrie.
1.9.4 Communications d'urgence
Lorsque les pilotes envoient un message pour indiquer une situation ou une condition anormale, le niveau de danger ou de risque détermine la terminologie à utiliser. Une situation dans laquelle la sécurité de l'avion ou d'une personne à bord est menacée, mais qui ne nécessite pas une mesure immédiate, est une urgence. L'expression reconnue internationalement en cas d'urgence est « Pan Pan », prononcée trois fois de suite. Une situation dans laquelle la sécurité de l'avion ou d'une personne à bord est menacée par un grave danger imminent et qui nécessite une intervention immédiate est une situation de détresse. L'expression reconnue internationalement en cas de détresse est « Mayday », prononcée trois fois de suite. Si les pilotes ont déjà l'attention du contrôleur, il est devenu pratique courante pour eux de déclarer une « urgence », plutôt que d'utiliser le terme « Mayday ». Cette pratique est acceptée au sein de la communauté aéronautique.
Nav Canada exige que les contrôleurs respectent les directives relatives aux communications d'urgence figurant dans le MANOPS ATC, Partie 6, « Urgences ». La sous-partie 601 indique aux contrôleurs d'aider l'aéronef en détresse, d'utiliser toutes les installations et tous les services disponibles et d'assurer la coordination avec tous les organismes concernés. Aussi, le MANOPS ATC précise que les contrôleurs doivent tenir les équipages de conduite bien informés et faire preuve de jugement dans les situations difficiles.
Les pilotes de SR 111 et les contrôleurs ont communiqué d'une voix normale dans toutes les communications précédant la déclaration de la situation « d'urgence » de la part des pilotes. Lorsque les pilotes ont déclaré une situation d'urgence à 1 h 24 min 42 s, le ton de leur voix a monté quelque peu, ce qui traduisait un sentiment d'urgence. À partir du moment de l'appel Pan Pan, à 1 h 14 min 15 s, les contrôleurs de l'ACC de Moncton ont traité la situation comme s'il s'agissait d'une urgence, c'est-à-dire qu'ils ont réagi de la même façon que si les pilotes avaient lancé un « Mayday ». L'ACC de Moncton a répondu au déroutement, et ses mesures étaient en accord avec ses pratiques normalisées.
1.9.5 Communication des Services de la circulation aérienne relativement au largage de carburant
Les renseignements relatifs au largage du carburant à l'intention des contrôleurs de Nav Canada figurent dans la Partie 7 du MANOPS ATC. La section 701, « Largage de carburant », demande aux contrôleurs d'obtenir des renseignements sur la route, le moment pendant lequel se fera le largage et les conditions météorologiques en vol. Aussi, on recommande aux contrôleurs d'encourager un avion à larguer le carburant en maintenant un cap constant au-dessus de zones non habitées et à l'écart des zones de fort trafic. On leur recommande aussi de limiter l'altitude à un minimum de 2 000 pi au-dessus de l'obstacle le plus élevé dans un rayon de 5 nm de la route suivie, et de prendre des dispositions pour diffuser fréquemment un avertissement sur les fréquences ATC pendant la période de largage du carburant.
D'autres renseignements sur le largage du carburant à l'intention des contrôleurs de l'ACC de Moncton figurent dans le Moncton ACC Operations Manual (manuel d'exploitation de l'ACC de Moncton), 07-98. La section 3.20 indique la zone de largage privilégiée pour la région de Halifax et donne des instructions aux contrôleurs pour qu'ils avisent la ou les stations d'information de vol (FSS) appropriées.
Après avoir vérifié avec les pilotes qu'un virage vers le sud était acceptable pour l'équipage, le contrôleur a choisi un endroit prévu pour le largage du carburant de SR 111, lequel se trouvait au-dessus de la baie St. Margaret, à une altitude supérieure à 3 000 pi. Cet endroit était conforme aux directives des ATS et placerait l'avion pour un virage d'alignement en vue d'une approche sur faisceau arrière de la piste 06.
Lorsque SR 111 a avisé le contrôleur qu'il devait piloter manuellement sans donner plus d'explications, le contrôleur a supposé que le pilotage manuel était une procédure de Swissair à suivre pour le largage du carburant. Lorsque les pilotes n'ont pas accusé réception de l'autorisation du contrôleur de commencer le largage du carburant, et lorsque, immédiatement après, le transpondeur en mode C a cessé d'envoyer des données au radar des ATS, le contrôleur a interprété cette interruption de données de la part de SR 111 comme étant le résultat d'une procédure de délestage de charges électriques utilisée par Swissair durant les opérations de largage de carburant. Cette interprétation se fondait sur l'expérience du contrôleur relativement aux exercices de ravitaillement des avions militaires au-dessus de la Nouvelle-Écosse, pendant lesquels les chasseurs militaires ravitaillés coupaient généralement tout appareil électronique inutile, y compris le transpondeur.
1.10 Renseignements sur l'aérodrome
L'aéroport international de Halifax se trouve à 14 nm au nord-nord-est de Halifax, à une altitude de 477 pi ASL. Les services ATC sont assurés par les contrôleurs radar de l'ACC de Moncton et par les contrôleurs d'aéroport de la tour de contrôle de Halifax. Les pistes de l'aéroport sont orientées dans deux directions : il y a la piste 15-33, d'une longueur de 7 700 pi, et la piste 06-24, d'une longueur de 8 800 pi. Les pistes ont une largeur de 200 pi et elles sont asphaltées. La distance d'atterrissage utilisable pour toutes les pistes équivaut à leur longueur totale.
Les pistes 15 et 24 sont chacune desservies par une approche aux instruments, tandis que les pistes 06 et 33 sont desservies par une approche sur faisceau arrière de radiophare. Les pistes 06 et 24 peuvent aussi permettre des approches au NDB. Le NDB pour la piste 06 est le radiophare Golf, lequel se trouve sur le prolongement d'axe de piste, à 4,9 nm du seuil de la piste 06.
Les services de lutte contre les incendies d'aéronef à l'aéroport international de Halifax respectaient les exigences en matière de matériel et de disponibilité figurant dans le RAC. Les services de lutte contre les incendies d'aéronef ont été avisés à 1 h 20 min, et en moins d'une minute les véhicules d'intervention étaient en position, près de la piste où l'atterrissage devait avoir lieu.
1.11 Enregistreurs de bord
La présente section porte sur les performances des enregistreurs de bord de SR 111 ainsi que sur la valeur générale des appareils d'enregistrement pour les enquêtes de sécurité.
1.11.1 Généralités
L'avion en question était équipé d'un enregistreur numérique de données de vol et d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage. Le FDR était un appareil de L3 Communications (Loral/Fairchild), modèle F-1000, qui enregistre environ 250 paramètres dans une mémoire à semi-conducteurs. L'enregistreur contenait environ 70 heures de données de vol continues, lesquelles comprenaient celles du vol ayant mené à l'accident et des six vols précédents. Le FDR, tel qu'il était configuré, n'enregistrait pas les paramètres « Fumée dans les toilettes » et « Fumée dans la cabine (soute) ». Il n'a pas non plus enregistré aucun paramètre lié u RDB. Les données enregistrées sur le FDR étaient de bonne qualité technique.
Le CVR était un enregistreur de L3 Communications (Loral/Fairchild), modèle 93-A100-81. Le support d'enregistrement était un ruban de 1/4 pouce monté en boucle sans fin. La durée ominale d'enregistrement était de 30 minutes. La durée réelle de l'enregistrement du CVR était de 32 minutes 24 secondes, commençant à 0 h 53 min 17 s et s'arrêtant à 1 h 25 min 41 s. Le CVR enregistrait sur quatre pistes distinctes : la sortie de chacun des modules de gestion des signaux audio des deux pilotes, les signaux audio de l'interphone cabine ou du système de sonorisation cabine, selon ce qui était sélectionné, et le microphone d'ambiance du poste de pilotage (CAM).
Les signaux audio enregistrés sur le CVR étaient d'une qualité moyenne en général. Avant que les pilotes n'enfilent leur masque à oxygène, dont le microphone « actif »Note de bas de page 47 constitue une entrée pour les canaux du pilote et du copilote sur le CVR, les conversations dans le poste de pilotage n'ont été enregistrées que sur le canal du CAM. En vol de croisière, les pilotes ne portaient pas leur casque d'écoute à micro-rail intégré, lequel fournit un enregistrement de meilleure qualité sur le CVR que le microphone d'ambiance. C'est la norme dans l'industrie de ne pas utiliser de casque d'écoute en croisière à haute altitude, et il n'y avait aucun règlement ni aucune politique de la compagnie exigeant qu'il en soit autrement. Malgré des tentatives de filtrage poussé, une partie de l'information audio enregistrée par le CAM sur le CVR était difficile ou impossible à déchiffrer à cause de l'effet de masque créé par le bruit ambiant dans le poste de pilotage ou par les communications radio des ATS en arrière-plan provenant du haut-parleur du poste de pilotage. Les communications verbales internes des pilotes se sont principalement déroulées en alémanique.
1.11.2 Alimentation électrique des enregistreurs
Le CVR était alimenté par le bus d'urgence droit de 115 V c.a., et le FDR était alimenté par le bus 3 de 115 V c.a. Les deux bus faisaient partie du circuit de distribution du bus 3 de l'alternateur de 115 V c.a.
La FAR 25.1457 (CVR), la FAR 25.1459 (FDR) et les JAR équivalentes exigent que les enregistreurs soient installés de manière à recevoir du courant dubus électrique qui offre une fiabilité maximale pour leur fonctionnement sans pour autant compromettre l'alimentation des services essentiels ou des charges utilisées en cas d'urgence. Les articles 551.100 et 551.101 du chapitre 551 du Règlement de l'aviation canadien, Partie V – Manuel de navigabilité aérienne de Transports Canada stipulent que les FDR et les CVR doivent être installés conformément aux documents ED-55 et ED-56A respectivement de l'Organisation européenne pour l'équipement électronique de l'aviation civile (EUROCAE). De plus, les documents EUROCAENote de bas de page 48 suggèrent que le FDR et le CVR soient alimentés par des sources distinctes.
À l'origine sur le DC-10, le FDR recevait son alimentation électrique du bus 3 de 115 V c.a., et le CVR, du bus 1 de 115 V c.a. Toutefois, pour l'homologation par les JAA, le CVR devait être alimenté par le bus d'urgence droit de 115 V c.a., lequel était à son tour alimenté par le bus 3 d'alternateur. Par conséquent, les deux enregistreurs étaient alimentés par la même source : le bus 3 d'alternateur. La liste des vérifications en cas d'urgence du MD-11 traitant de la fumée ou des émanations d'origine inconnue prévoit l'utilisation du sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Ce sélecteur sert à couper à tour de rôle l'alimentation de chacun des trois bus électriques en vue d'isoler la source de la fumée ou des émanations. La nature de cette procédure de dépannage exige que le sélecteur demeure dans chaque position pendant une durée indéterminée, habituellement au moins quelques minutes. Lorsque le sélecteur SMOKE ELEC/AIR est placé dans la première position (3/1 OFF), le bus 3 de l'alternateur est coupé, ce qui coupe simultanément l'alimentation au FDR et au CVR. Le CVR et le FDR étant alimentés par le même bus d'alternateur, une défaillance de ce bus ou la mise hors service intentionnelle de celui-ci (p. ex., à la suite de mesures imposées par la liste de vérifications en cas de fumée) coupera simultanément l'alimentation électrique aux deux enregistreurs.
1.11.3 Arrêt des enregistreurs
L'examen des divers composants de systèmes de bord récupérés montre que le bus 3 d'alternateur de 115 V c.a. était sous tension au moment de l'impact. Sur la partie de base du sélecteur SMOKE ELEC/AIR qui a été récupérée, il y avait des signes montrant que le sélecteur se trouvait sur la position NORMAL au moment de l'impact.
Le CDR et le FDR ont cessé de fonctionner à la suite d'une interruption de l'alimentation électrique d'une seconde à partir de 1 h 25 min 41 s, laquelle s'est produite 5 minutes 37 secondes avant que l'avion ne percute le plan d'eau. On a examiné deux possibilités pour déterminer pourquoi les enregistreurs avaient cessé de fonctionner. La première était que les pilotes avaient réglé le sélecteur SMOKE ELEC/AIR sur la position 3/1 OFF. La deuxième était qu'une ou des défaillances liées à l'incendie avaient causé la perte de l'alimentation électrique aux deux enregistreurs.
Le réglage du sélecteur SMOKE ELEC/AIR à la première position (3/1 OFF) entraîne l'arrêt des deux enregistreurs de bord exactement en même temps, car le bus 3 de l'alternateur est mis hors tension.
Les données du FDR indiquent qu'une brève interruption de l'alimentation électrique au bloc d'acquisition numérique des données de vol (DFDAU) s'était produite moins de deux secondes avant l'arrêt du FDR. Cette interruption n'aurait pu avoir été causée par l'utilisation du sélecteur SMOKE ELEC/AIR, puisque alors le FDR et le CVR auraient immédiatement cessé de fonctionner. Une remise en marche automatique du DFDAU s'est produite après l'interruption de l'alimentation électrique. Il y a aussi eu une interruption de l'enregistrement par le CVR dans les deux secondes précédant l'arrêt complet de ce dernier. Ces interruptions de l'alimentation et de l'enregistrement ont fait varier la synchronisation relative entre les deux enregistrements et, par conséquent, les moments d'arrêt précis des enregistreurs l'un par rapport à l'autre. Il a néanmoins été possible d'obtenir une certaine synchronisation (moins d'une seconde entre le CVR et le FDR). Sur la foi de la synchronisation des minutages seulement, il n'a pas été possible de déterminer si les enregistreurs s'étaient arrêtés à la suite du réglage du sélecteur SMOKE ELEC/AIR sur la position 3/1 OFF; d'autres renseignements ont été utilisés pour en arriver à cette conclusion.
On sait que les pilotes avaient commencé à exécuter la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue en réglant le commutateur CABIN BUS sur OFF. Avant d'agir sur ce commutateur, le commandant de bord avait averti le copilote de cette mesure, et ce dernier avait acquiescé. La mesure suivante de la liste de vérifications était l'utilisation du sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Plusieurs indications montrent que les enregistreurs de bord ne se sont pas arrêtés parce que le sélecteur SMOKE ELEC/AIR a été utilisé. Tout d'abord, avant l'arrêt complet des enregistreurs, les pilotes n'avaient fait aucune mention du sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Comme le commandant de bord avait averti le copilote avant le réglage du commutateur CABIN BUS sur la position OFF, il aurait selon toute vraisemblance averti le copilote de son intention d'utiliser le sélecteur SMOKE ELEC/AIR, puisque le copilote était le pilote aux commandes et que l'utilisation du sélecteur aurait eu une incidence sur les systèmes qu'il utilisait. De plus, environ 9 secondes après que les enregistreurs de bord eurent cessé de fonctionner, l'ATC a commencé à recevoir des données d'altitude (voir la rubrique 1.18.8.26) en mode C de SR 111 pendant environ 20 secondes. Pour que cette situation se produise, il fallait que le calculateur des données aérodynamiques ADC-2, qui est alimenté par le bus d'urgence de droite de 115 V c.a., fonctionne. Ce bus n'aurait pas été sous tension si le sélecteur SMOKE ELEC/AIR avait été réglé sur la première position (3/1 OFF); par conséquent, il est très probable que ce sélecteur se trouvait sur la position NORM lorsque les enregistreurs ont cessé de fonctionner.
1.11.4 Manque de données du CVR
Le CVR de l'avion en question avait une capacité d'enregistrement de 30 minutes, ce qui était conforme aux exigences réglementaires en vigueur. Ces exigences étaient fonction de la technologie existant au début des années 1960, et un enregistrement de 30 minutes représentait ce qu'on pouvait raisonnablement protéger en cas d'écrasement. La technologie actuelle offre facilement des capacités d'enregistrement supérieures pour les CVR. La plupart des nouveaux CVR à mémoire à semi-conducteurs offrent une capacité d'enregistrement de deux heures; par contre, la réglementation s'appliquant à l'avion HB-IWF au moment de l'accident n'exigeait pas une capacité d'enregistrement supérieure à 30 minutes.
Les premières données enregistrées sur le CVR de SR 111 l'avaient été environ 17 minutes avant qu'une odeur inhabituelle soit décelée par les pilotes. Les conversations et le bruit dans le poste de pilotage avant le début de l'enregistrement du CVR auraient été utiles à la recherche d'événements précurseurs de l'incendie en vol.
L'alimentation électrique de l'avion aux enregistreurs de bord de SR 111 avait été interrompue à environ 10 000 pi, ce qui a par le fait même interrompu l'enregistrement par le CVR et le FDR. L'avion avait poursuivi son vol pendant 5,5 minutes sans qu'aucune donnée ne soit enregistrée.
Des sources d'alimentation électrique modernes, sans entretien et indépendantes alliées à des CVR à la fine pointe de la technologie, permettent d'alimenter de façon indépendante le CVR et le CAM pendant au moins plusieurs minutes. De cette façon, il serait possible d'enregistrer l'environnement acoustique du poste de pilotage, soit les conversations et les bruits ambiants, en cas de perte des sources d'alimentation électrique de l'avion.
La technologie actuelle dans le domaine des batteries n'offre pas une alimentation électrique indépendante suffisante pour qu'on puisse appliquer la même solution aux données du FDR. En effet, les capteurs multiples et le câblage qui envoient des données au DFDAU ont besoin de l'alimentation électrique de l'avion.
1.11.5 Enregistreur de données de vol d'accès facile
Des initiatives entreprises par les lignes aériennes, comme l'élaboration et la mise en oeuvre de programmes d'assurance qualité opérationnels en vol de plus en plus complexes nécessitent l'enregistrement de données de plus en plus nombreuses. Des enregistreurs de données d'accès facile (QAR) ont été mis au point parce que l'information des FDR n'était pas facilement accessible pour l'entretien périodique et pour le contrôle des systèmes de bord. Ce type d'enregistrement a été fait sur des QAR, lesquels ne sont pas exigés par la réglementation. La plupart des QAR en service enregistrent bien plus de données, selon une meilleure résolution et à des taux d'échantillonnage plus élevés, que les FDR.
Contrairement aux FDR, les QAR ne sont pas conçus pour résister à un écrasement. À partir des nombreux morceaux de ruban magnétique récupérés de l'épave de l'avion, 21 segments ont été identifiés comme provenant probablement du QAR de l'avion. On a tenté d'extraire l'information de ces morceaux de ruban, mais en vain.
Le QAR installé à bord de SR 111 avait une cartouche à ruban qui pouvait enregistrer environ 1 400 paramètres, soit environ six fois le nombre de paramètres enregistrés sur le FDR. Les données additionnelles enregistrées sur le QAR comprenaient de nombreuses entrées qui auraient pu être utiles à l'enquête. Ces données auraient pu aider à déterminer l'état de service des systèmes de bord avant, pendant et après qu'on eut décelé une odeur inhabituelle et, par la suite, de la fumée dans le poste de pilotage.
Les organismes d'enquête ont toujours milité en faveur de l'ajout d'autres paramètres à ceux qui sont déjà enregistrés sur les FDR. En fait, ce n'est pas la capacité d'enregistrement des FDR qui est un facteur limitatif, mais les initiatives en ce sens ont toujours été tempérées par les coûts d'installation élevés de l'équipement nécessaire dans les avions, notamment des capteurs de données additionnels et du câblage connexe. Un autre facteur limitatif est le coût de l'obtention de l'homologation du jeu de données obligatoire modifié pour les FDR.
Les FDR modernes, qui utilisent les mêmes mémoires à semi-conducteurs que les QAR, rendent techniquement faisable la capture de l'information des QAR par les FDR protégés en cas d'écrasement. Cependant, la réglementation actuelle ne l'exige pas.
1.11.6 Manque d'enregistrement d'images
Le poste de pilotage de SR 111 n'était pas équipé d'un appareil d'enregistrement des images, et ce type d'appareil n'était pas exigé par la réglementation.
Récemment, il est devenu réaliste sur le plan économique d'enregistrer les images du poste de pilotage dans un dispositif à mémoire protégé en cas d'accident. Les nouvelles technologies d'« immersion » offrent des systèmes à caméra unique qui peuvent capter une vue panoramique sur 360° de l'environnement du poste de pilotage. Un logiciel de visionnement spécial permet aux enquêteurs de se retrouver dans le poste de pilotage et de voir de façon virtuelle tout le poste de pilotage.
Une telle innovation aurait été utile pour l'enquête sur le vol SR 111; l'enquête aurait progressé plus rapidement, et les mesures de sécurité possibles auraient été déterminées plus facilement.
1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact
La présente section décrit le processus et les méthodes de repêchage de l'épave, de même que l'état des pièces repêchées. Dans certains cas, on donne une interprétation de la signification de l'état des pièces repêchées.
1.12.1 Repêchage de l'épave
1.12.1.1 Généralités
Les opérations de recherches et sauvetage ont commencé immédiatement après l'accident et elles ont mis à contribution des ressources en provenance des Forces canadiennes (ministère de la Défense nationale [MDN]), de la Garde côtière canadienne (ministère des Pêches et des Océans), de la Gendarmerie royale du Canada (ministère du Solliciteur général du Canada) et de la communauté locale qui a fourni de nombreux bateaux privés. On a mis en place une zone d'exclusion afin d'assurer la protection et la sécurité des lieux au cours des opérations de repêchage. La zone d'exclusion est demeurée en vigueur jusqu'au 1er novembre 1999. La sécurité a été assurée en permanence pendant cette période, et aucune infraction connue à la sécurité n'a été rapportée. Les opérations de repêchage et de triage des débris ont nécessité environ 15 mois de travail.
On a repéré l'emplacement de l'épave principale lorsque le sous-marin NCSM Okanagan est parvenu à capter les signaux de radioralliement en provenance des radiobalises sous-marines de détresse (ULB) fixées aux enregistreurs de vol. On a recueilli des renseignements sur l'état de l'épave et la répartition des débris à l'aide de divers appareils d'imagerie sous-marine embarqués, de plongeurs et de caméras vidéo montées sur des engins télécommandés (ROV). La zone de débris principale mesurait quelque 125 m de longueur sur 95 m de largeur (411 pi sur 312 pi), et la profondeur de l'eau à cet endroit était de quelque 55 m (180 pi).
La première phase du repêchage a porté sur la recherche et le repêchage des restes humains ainsi que sur la localisation du CVR et du FDR. On a exercé une surveillance étendue de la zone des débris et des environs afin d'évaluer diverses possibilités de repêchage. Les débris flottants avaient été éparpillés par le vent et les courants marins, mais aucun morceau important de l'épave n'a été retrouvé à l'extérieur des limites de la zone de débris principale unique sur le fond de l'océan. Certaines des méthodes utilisées, qui sont décrites dans les rubriques suivantes, ont éparpillé les débris sur une plus grande superficie.
Les opérations de repêchage de l'épave ont permis de récupérer plus de 126 554 kg (279 000 lb) de débris de l'avion, ce qui représentait environ 98 % de la masse structurale de l'avion. On a également repêché plus de 18 144 kg (40 000 lb) de fret.
1.12.1.2 Méthodes de repêchage de l’épave
1.12.1.2.1 Méthodes initiales de repêchage de l’épave
Les activités initiales de repêchage ont consisté à récupérer les débris qui flottaient à la surface de l’eau, à fouiller le rivage, et à effectuer des opérations de plongée par petits fonds près du rivage et par grands fonds dans la zone de débris.
Les plongeurs de la Marine canadienne ont retrouvé le FDR le 6 septembre 1998 et le CVR le 11 septembre 1998. Il a fallu un certain temps pour repêcher le premier enregistreur de bord parce que les deux enregistreurs étaient équipés d’ULB actionnées par l’eau qui émettaient toutes deux sur la même fréquence. Après avoir repéré la zone générale d’où provenaient les signaux des radiobalises, il a été difficile de localiser avec précision l’emplacement exact de chacun des enregistreurs. Les fixations des ULB étaient endommagées au point où ces dernières s’étaient presque détachées des enregistreurs. Aucune exigence réglementaire n’oblige que l’ULB soit fixée à l’enregistreur pour les essais et la certification.
À partir du 12 septembre 1998, l’USS Grapple, un navire de repêchage de la marine américaine (USN), a été sur les lieux pendant une période d’environ trois semaines, ce qui a permis d’accroître les capacités de levage et de plongée ainsi que le nombre de ROV déjà sur place.
Après un certain temps, on a jugé qu’il serait dangereux de poursuivre les opérations de repêchage avec des plongeurs, en raison des conditions météorologiques et de l’état de la mer qui se détérioraient de plus en plus, et à cause de la profondeur de l’eau et de la nature des débris d’épave qui présentaient souvent des arêtes vives et anguleuses. On a également constaté qu’au rythme de récupération de l’épave à l’aide de cette méthode, il serait impossible de repêcher la plus grande partie de l’épave en temps opportun. On a donc décidé de recourir à des méthodes offrant une plus grande capacité de récupération.
Les opérations initiales de repêchage ont permis de récupérer entre 6 804 et 9 072 kg (15 000 et 20 000 lb) de débris.
1.12.1.2.2Opérations de repêchage de charges lourdes
Entre le 13 octobre et le 24 octobre 1998, on a loué deux barges, qu’on a amarrées ensemble, afin de repêcher les débris de la zone de débris (voir Figure 18). Une grue à forte capacité de levage, montée sur le pont d’une des barges, soulevait les débris d’épave du fond de l’océan et les déposait sur le pont de la deuxième barge, où ils étaient triés et lavés. Les matériaux ainsi repêchés étaient ensuite transportés par des navires de la Garde côtière canadienne (GCC) jusqu’au rivage où ils étaient traités de nouveau.
Cette méthode a permis de repêcher quelque 68 040 kg (150 000 lb) de débris d’épave.
1.12.1.2.3 Utilisation d’un dragueur à pétoncles
Un dragueur à pétoncles a été utilisé à partir de la fin d’octobre 1998 jusqu’au milieu de janvier 1999. Le bateau de pêche tirait un râteau sur le fond de l’eau, et les débris étaient recueillis dans un filet à pétoncles à mailles de chaîne. Lorsque la mer était favorable, le dragueur à pétoncles travaillait 24 heures sur 24, ce qui lui a permis d’effectuer 1 839 passages de raclage au total.
Cette méthode a permis de repêcher quelque 34 020 kg (75 000 lb) de débris d’épave.
1.12.1.2.4 Utilisation d’engins télécommandés
Divers engins télécommandés (ROV) ont été utilisés tout au long des opérations de repêchage à des fins de reconnaissance et de récupération. On a effectué un relevé à l’aide d’un dispositif de balayage linéaire par laser et d’un sonar à balayage latéral afin de déterminer la superficie de la zone de débris, et afin d’obtenir des renseignements détaillés sur le fond marin. Après le passage du dragueur à pétoncles, on a préparé la phase suivante des opérations de repêchage en se servant de ROV pour tourner un enregistrement vidéo de la zone de débris et des zones voisines. Un ROV des Forces canadiennes, appelé système d’intervention sur grands fonds marins, a été utilisé du 26 avril 1999 au 14 juillet 1999 afin de repêcher les morceaux d’épave qui ne pourraient être récupérés par la méthode de repêchage de la phase suivante à l’aide d’une dragueuse à succion.
Cette méthode a permis de repêcher quelque 2 268 kg (5 000 lb) de débris d’épave et de recueillir beaucoup de renseignements sur la nature et l’emplacement des débris restants.
1.12.1.2.5 Utilisation d’une dragueuse à succion
La phase finale des opérations de repêchage de l’épave s’est déroulée à l’automne 1999. Elle consistait à draguer la zone de débris jusqu’à une profondeur de 1,5 m (5 pi) afin de récupérer les débris restants. Les matériaux de dragage étaient pompés dans la soute du navire et transportés jusqu’au port industriel de Sheet Harbour (Nouvelle-Écosse), où ils étaient déchargés dans une zone de confinement spécialement aménagée.
Les matériaux de dragage étaient traités par la suite à l’aide d’un dispositif de tamisage mécanique qui permettait de trier les débris selon leur taille et de les déposer sur des transporteurs à courroie à partir desquels on pouvait séparer manuellement les débris de l’avion des autres sédiments ou rebuts. Cette méthode a permis de récupérer quelque 12 701 kg (28 000 lb) de débris d’épave.
Les opérations de tamisage et d’extraction des débris de l’avion à Sheet Harbour ont pris fin le 3 novembre 1999, et les opérations de triage des débris récupérés ont pris fin le 4 décembre 1999, soit 15 mois après l’accident.
1.12.2 Examen de l'épave
1.12.2.1 Généralités
On a transporté les débris d'avion repêchés jusqu'aux installations des Forces canadiennes à Shearwater (Nouvelle-Écosse) où on les a nettoyés et triés. Chaque élément a été examiné par le personnel du BST et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), avec l'aide d'une importante équipe de soutien formée de spécialistes fournis par Boeing (le constructeur de l'avion), Swissair (l'exploitant de l'avion) et SR Technics (l'organisme de maintenance de l'avion). À la demande du BST, des organismes d'enquête, des compagnies et d'autres organisations ont également prêté les services de leurs spécialistes; notamment le NTSB, la FAA, le service d'enquête sur les accidents aériens du Royaume-Uni, le Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation de la Suisse, le Bureau d'enquêtes et d'analyses de France, la Airline Pilots Association, Pratt & Whitney ainsi que d'autres entreprises. Au total, plus de 350 personnes ont participé aux activités de triage, d'examen et d'étude des débris d'épave à Shearwater.
Les articles repêchés ont été triés et classés selon la position qu'ils occupaient dans l'avion et selon leur intérêt potentiel pour les besoins de l'enquête. On a porté une attention particulière à tous les débris qui présentaient des dommages causés par la chaleur, des résidus de combustion ou des marques inhabituelles.
Le personnel de la GRC a procédé à des inspections visuelles minutieuses et à des analyses judiciaires pour déterminer si des engins explosifs ou incendiaires auraient pu contribuer aux dommages observés. Aucun indice n'a été découvert dans les débris de l'avion permettant de penser que l'accident serait le résultat d'un acte criminel.
1.12.2.2 Reconstruction de l’avion
On a construit une structure de reconstruction grandeur nature sur laquelle on a attaché les parties repêchées de la partie avant de l’avion (voir Figure 19). La structure originale comprenait la partie de l’avion située au-dessus des planchers du poste de pilotage et de la cabine, entre l’avant du poste de pilotage (référence 275) et la référence 595, située dans la cabine des passagers de première classe. On a redressé, apparié suivant les faciès de rupture et installé sur la structure de reconstruction les parties repêchées de la structure primaire de la cellule ainsi que les panneaux de revêtement dont on avait déterminé la position d’origine entre l’enceinte du poste de pilotage et vers l’arrière jusqu’aux environs de la référence 595. On a par la suite rallongé la structure de reconstruction vers l’arrière jusqu’à la référence 669; on a ajouté une autre rallonge jusqu’à la référence 741, du côté gauche de la structure de reconstruction, afin de supporter les morceaux repêchés des deux ventilateurs de recirculation d’air avant.
1.12.3 Examen des fils et des composants électriques repêchés
1.12.3.1 Généralités
Les forces d'impact ont lourdement endommagé le câblage de l'avion. En outre, certains fils ont pu subir des dommages mécaniques supplémentaires au cours des opérations de repêchage. De nombreux fils s'étaient rompus en segments d'une longueur comprise entre 10 et 100 cm (4 et 39 po).
Tous les fils repêchés ont fait l'objet d'un examen à la recherche de cuivre fondu. En effet, comme la chaleur engendrée par l'incendie n'avait pas été suffisante pour faire fondre le cuivreNote de bas de page 49, toute zone de cuivre fondu aurait signalé qu'un arc électriqueNote de bas de page 50 s'était produit à cet endroit.
On a mis à part les segments de fils qui présentaient des dépôts de suie ou des signes de dommages causés par la chaleur, ainsi que les fils dont on a déterminé qu'ils auraient pu provenir du tronçon B de l'avion. L'examen de l'état des fils, endommagés ou non par la chaleur, a aidé à définir les limites et le profil de l'incendie, de même que son mode de propagation et sa relation avec la perte de divers systèmes de bord.
On a examiné les composants électriques repêchés qui provenaient de la zone touchée par l'incendie à la recherche de défaillances internes; de telles défaillances sont susceptibles d'engendrer de la chaleur et, par conséquent, de devenir une source d'inflammation potentielle. L'examen de ces composants n'a fourni aucun indice selon lequel ils auraient participé à la naissance de l'incendie.
1.12.3.2 Contrôle et suivi des fils électriques
Mis bout-à-bout, les fils électriques de l'avion auraient mesuré environ 250 km (155 mi) de longueur. Même si les opérations de repêchage ont permis de récupérer quelque 98 % de la masse structurale de l'avion, on estime que ce pourcentage est légèrement inférieur en ce qui concerne le câblage. L'examen des fils récupérés a néanmoins révélé plusieurs segments de fils où l'on pouvait voir du cuivre fondu, lequel correspondait à des dommages causés par un arc électrique. Certains de ces dommages étaient trop petits pour être visibles à l'oeil nu. On ne peut affirmer que tous les fils endommagés par un arc électrique ont été récupérés.
En cours d'examen, un numéro de pièce produite a été attribué à chaque fil jugé intéressant aux fins de l'enquête, et on a versé les renseignements pertinents dans la base de données sur le câblage qui, à la fin de l'examen, contenait des renseignements sur quelque 3 000 segments de fil individuels. Les segments qui montraient du cuivre fondu ou des signes significatifs de surchauffe ont fait l'objet d'un suivi à l'aide du même système de numérotation des pièces produites qui a été adopté pour le suivi des morceaux d'épave. Les segments de fil qui montraient du cuivre fondu ont fait l'objet d'une analyse plus poussée qui nécessitait que l'on coupe les sections fondues du segment original. On a attribué à chacune de ces sections de fil présentant du cuivre fondu un nouveau numéro de pièce produite et on a établi le suivi dans la base de données. Lorsque c'était faisable, les segments de fil en provenance de la zone endommagée par l'incendie dont on a pu déterminer la provenance ont été placés à leur emplacement respectif dans la structure de reconstruction (voir la rubrique 1.19.3).
1.12.3.3 Fils et câbles endommagés par un arc électrique
Lorsqu'un contact métal sur métal se produit entre un conducteur sous tension et une prise de terre, ou entre un conducteur sous tension et un autre conducteur de potentiel différent, il se produit un court-circuit. Habituellement, un court-circuit se traduit par un amorçage d'arc. On peut généralement identifier les fils en cuivre ou en aluminium qui ont subi un arc électrique par la présence d'une zone de métal resolidifié (voir Figure 20). Après un arc électrique, lorsque le métal se solidifie de nouveau après avoir fondu, il forme souvent une perle d'un aspect caractéristiqueNote de bas de page 51. Les arcs électriques produits par un court-circuit déclenchent normalement le disjoncteur en question, et il en résulte habituellement la fusion d'une quantité relativement petite du conducteur.
Lors d'un amorçage d'arc, le cuivre se vaporise et son volume grossit de plusieurs milliers de fois par rapport à son état solide. De hautes températures et pressions sont générées dans le voisinage immédiat de cette vaporisation et par la décharge électrique (arc) qui se produit dans l'air environnant. Si des matières inflammables se trouvent à proximité, elles peuvent être enflammées par la chaleur de la décharge électrique, par la chaleur des gaz dégagés de cet endroit ou par les globules de cuivre fondu qui sont habituellement éjectés du lieu de l'amorçage d'arc.
Pour des tensions de 115 V c.a. à bord de l'avion, un amorçage d'arc sans contact physique est très difficile à réaliser ou à entretenir. Par contre, aux endroits où l'isolant des fils est détruit par un incendie, les probabilités augmentent qu'un tel arc puisse être amorcé et entretenu et que le conducteur fondra sur une certaine partie de sa longueur. Ce phénomène d'amorçage d'arc rapide et progressif, connu sous le nom de cheminement d'arc, dépend de nombreuses variables, la plus importante étant le type d'isolant utilisé sur le conducteur.
Parmi les milliers de segments de fil examinés de SR 111, on a découvert des zones de cuivre fondu sur 21 pièces produites qui représentaient 17 segments de fil individuels, et quatre segments de câble dont chacun comprenait trois fils torsadés distincts (trois fils individuels torsadés ensemble pour former un seul câble). Tous les conducteurs qui présentaient des traces d'arc électrique sauf un étaient revêtus d'un isolant en polyimide ou en ETFE. La seule exception était un conducteur isolé au XL-ETFE modifié (voir la pièce produite 1-3029 à la rubrique 1.12.3.7).
L'isolant en polyimide ne fond pas lorsqu'il est exposé à des températures élevées; il subit plutôt une pyrolyseNote de bas de page 52, ou dégradation thermique. Une analyse thermogravimétriqueNote de bas de page 53 de l'isolant en polyimide dans l'air montre qu'il commence à se dissocierNote de bas de page 54 à environ 500 °C (932 °F) et qu'il sera complètement dissocié à 650 °C (1 202 °F).
Une des caractéristiques de l'isolant en polyimide est que dans des conditions propices il peut subir un cheminement d'arc, sec ou humide. Un cheminement d'arc peut se produire lorsque l'isolant en polyimide se décompose sous l'effet de la chaleur produite par un arc électrique ou un incendie. L'exposition à la chaleur génère un produit de carbonisationNote de bas de page 55 thermiquement stable et conducteur d'électricité. Le dépôt de carbone qui en résulte fournit un trajet au courant qui perpétue l'arc. Cet amorçage d'arc peut entraîner la décomposition de l'isolant voisin, ce qui permet à la décharge électrique de se propager, ou de cheminer, le long du fil. Dans certains cas, le courant nécessaire à la formation d'une décharge électrique intermittente ou soutenue (cheminement d'arc) est inférieur au seuil du courant causant le déclenchement du disjoncteur en question au bout d'un certain temps. Dans ces cas, il se produit une anomalie non détectée qui génère une chaleur intense.
Il arrive souvent dans un cheminement d'arc que la chaleur de la décharge électrique initiale localisée va endommager l'isolant des fils voisins, causant ainsi une cascade d'amorçages d'arc et de la combustion entre les multiples fils revêtus de polyimide qui sont réunis en faisceau. C'est ce qu'on appelle un embrasement général. Ces embrasements peuvent entraîner la défaillance catastrophique de faisceaux de fils complets et priver de courant ou de signaux tous les équipements alimentés par les fils touchés.
Contrairement à l'isolant en polyimide, l'isolant en ETFE va fondre et brûler. Il fond à une température comprise entre 260 et 270 °C (500 à 518 °F) et brûlera en produisant une flamme lorsqu'il est exposé à un incendie d'une température supérieure à 500 °C (932 °F). Lorsque la source de la flamme est supprimée, l'isolant en ETFE est autoextinguible. Les essais de la FAA sur l'ETFE ont montré que ce dernier n'entretient pas les cheminements d'arc secs ou humides. La décomposition thermique de l'ETFE ne se traduit pas par la formation d'un produit de carbonisation conducteur.
Des essais ont montré que même si l'isolant en ETFE fond et se volatilise assez rapidement dans un incendie, il peut difficilement amorcer un arc résultant d'un contact conducteur sur conducteur ou conducteur sur prise de masse dans un incendie. L'essai, au moyen d'une flamme de butane pour faire fondre l'isolant, a montré qu'il pouvait s'écouler de 20 à 30 minutes avant qu'un arc électrique se produise entre des conducteurs voisins. Ce résultat laisse croire qu'une petite flamme rampante sur un matelas isolant n'endommagerait probablement pas un insolant en ETFE au point de produire un arc électrique pendant le temps nécessaire à la flamme pour consumer le matériau du matelas isolant et se propager ailleurs.
Cet essai a aussi montré que dans certains cas le disjoncteur en question se déclencherait immédiatement dès le premier amorçage d'arc; toutefois, dans d'autres cas, il se produirait plusieurs amorçages d'arc avant que le disjoncteur se déclenche. Ni le temps nécessaire à un amorçage d'arc, ni le déclenchement du disjoncteur ne sont prévisibles dans un incendie. Si l'amorçage d'arc initial ne déclenche pas le disjoncteur, un amorçage d'arc peut se produire un peu plus loin sur le même conducteur à mesure que l'incendie se propage et touche d'autres endroits sur le fil.
En plus des 21 pièces produites qui présentaient du cuivre fondu, on a récupéré une seule perle de cuivre fondu d'un diamètre de 2 mm (0,08 po). Cette perle avait été retrouvée coincée dans les ailettes de refroidissement endommagées sur le dessus d'une batterie d'éclairage d'urgence qui, selon les dommages causés par la chaleur, devait se trouver au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine, tout juste derrière la porte du poste de pilotage. (Voir Figure 27.) Cette perle s'est sans doute détachée, fort probablement lors de la séquence d'impact, de l'extrémité d'un fil endommagé par un amorçage d'arc se trouvant dans le voisinage de la batterie. Aucune autre conclusion n'a pu être tirée de cette perle.
Un des points de fusion du cuivre n'a pas été causé par un amorçage d'arc, mais on a déterminé qu'il résultait directement d'une opération de soudage lors de la fabrication du fil (voir la rubrique 1.12.3.7).
1.12.3.4 Positionnement des fils et des faisceaux de la pièce produite 1-4372
Au cours des opérations de repêchage de l'épave, on a retrouvé un paquet de fils enchevêtrés qui contenait 9 des 20 segments de fil qui présentaient des dommages causés par un arc électrique. On a désigné collectivement ce paquet de fils sous le numéro de pièce produite 1-4372 (voir Figure 21).
Certains des segments de fil avaient perdu leur isolant, soit que ce dernier avait été brûlé par l'incendie, soit que le feu l'avait endommagé et qu'il avait par la suite été arraché au moment de l'impact. Il est aussi possible que d'autres dommages à l'isolant des fils se soient produits lors du repêchage de l'épave.
On a identifié plusieurs segments de fil de la pièce produite 1-4372 comme étant des éléments de l'un des chemins de câbles (FAC, FBC et FDC) de l'avion (voir Figure 7). Lorsqu'ils sont installés dans l'avion, ces trois chemins de câbles, de même que les chemins de câbles AAG et ABG, ainsi que le faisceau de fils du RDB, sont disposés parallèlement les uns par rapport aux autres, du côté droit du fuselage, par-dessus le plafond de l'office 2, entre la paroi arrière du poste de pilotage à la référence 383 et l'extrémité arrière de l'office 2, aux environs de la référence 420. Juste devant la paroi arrière du poste de pilotage, le faisceau de fils du RDB pénétrait dans l'un des deux guide-fils libres d'une longueur de 102 cm (40 po) installés entre les références 383 et 420 (voir Figure 5).
À la référence 420, les chemins de câbles FAA, FBA et FDA s'étaient séparés des chemins de câbles FAC et FBC et FDC respectivement. À la référence 420, les chemins de câbles FAA, FBA et FDA, de même que les chemins de câbles AAG et ABG, étaient acheminés par le sommet de l'avion, du côté gauche du fuselage. À la référence 420, les chemins de câbles FAC, FBC et FDC descendaient pour courir en diagonale sur la partie supérieure du plafond de la partie avant de la cabine. Ce dernier trajet d'acheminement des fils avait été choisi dans le but d'éviter tout contact entre les faisceaux et la porte D1 en position ouverte.
Les segments repêchés des chemins de câbles FBC et FDC mesuraient approximativement 2,54 m (100 po) de longueur et ils étaient munis de deux colliers de fils, appelés collier jumelé, qui les retenaient encore ensemble. On a repositionné avec précision les deux chemins de câbles sur la structure de reconstruction en se basant sur l'identification certaine de fils individuels, et en déterminant la position d'installation du collier jumelé à peu près à la référence 427. Une fois les segments de câble positionnés dans la maquette de reconstruction, l'extrémité avant se trouvait près de la paroi arrière du poste de pilotage, tandis que l'extrémité arrière était située près de la référence 475. Le positionnement précis des segments en provenance des chemins de câbles FDC et FBC, en fonction de l'emplacement connu du collier jumelé, a permis d'améliorer la précision du positionnement des autres fils en provenance de la même zone. On s'est également servi des profils de dommages causés par la chaleur pour positionner d'autres fils provenant de la même zone.
1.12.3.5 Identification et description des fils de la pièce produite 1-4372 endommagés par un arc électrique
Des neuf segments de fil ou de câble affichant des zones de cuivre fondu et qui ont été récupérés de la pièce produite 1-4372, on a déterminé avec certitude que quatre d'entre eux étaient des segments des câbles PSU du RDB (1-3790, 1-3791, 1-3792 et 1-3793) (voir Figure 22). Cette identification reposait sur les restes de matériau isolant coloré en ETFE qui étaient encore attachés aux fils. Sur chacun de ces quatre segments, une extrémité était lourdement emmêlée ou écrasée avec d'autres fils, tandis que l'autre extrémité était rompue et effilochée. Les pièces produites 1-3790 et 1-3792 présentaient toutes deux des zones particulières où le revêtement en étain était absent des torons de fil des trois fils. Les pièces produites 1-3791 et 1-3793 ne présentaient pas de zones semblables où l'étamage avait disparu.
Des cinq segments de fil restants, compte tenu des fragments d'isolant en ETFE restants, on est parvenu à déterminer que quatre d'entre eux (1-3794, 1-3795, 1-3788 et 1-10503) étaient des segments du fil de commande de calibre 16 AWG destiné à l'alimentation en 28 V c.c. du RDB utilisé pour commander les sorties du PSU. Au total, ces quatre segments mesuraient 97 cm (38 po) de longueur. Le cinquième fil (1-3796) était un segment de fil de calibre 16 AWG nickelé et isolé à l'aide d'une pellicule polyimide. Il a été impossible de déterminer à quel circuit précis ce segment de fil était associé, mais puisqu'il était nickelé, on sait qu'il ne faisait pas partie du RDB.
Le cuivre fondu découvert sur la pièce produite 1-3796 était unique en ce qu'il présentait une zone de cuivre fondu qui recouvrait tous les torons de fils extérieurs sur une distance de 2 cm (0,79 po); toutefois, le fil de cuivre fondu présentait encore des torons nickelés qui dépassaient aux deux extrémités, ce qui indiquait que la chaleur avait été très localisée et confirmait que le cuivre avait fondu sous l'effet d'un arc électrique.
Lorsqu'on a démêlé la pièce produite 1-4372, on a retiré la pièce produite 1-3796 du chemin de câbles FBC à une position qui correspondait à environ 79 cm (31 po) à l'avant de l'emplacement connu du collier jumelé. Même si cet emplacement correspond à un endroit situé à l'arrière de la paroi du poste de pilotage, il a été impossible de confirmer que ce segment de fil provenait bien de cet endroit.
Le chemin de câbles FBC ne contenait aucun fil de calibre 16 AWG; cependant, il y avait des fils de calibre 16 AWG dans les chemins de câbles voisins. Il y en avait 25 dans le chemin de câbles FAC, 2 dans le chemin de câbles FDC, et 1 dans le chemin de câbles ABG. Au total, il y avait 28 fils de calibre 16 AWG acheminés à l'intérieur de ces divers chemins de câbles qui passaient au-dessus de la zone de l'office 2. Il a été impossible de déterminer si la pièce produite 1-3796 provenait de l'un de ces chemins de câbles et, le cas échéant, de quel chemin de câbles il s'agissait.
1.12.3.6 Examen des neuf fils et câbles endommagés par un arc électrique
Dans le but d'évaluer si les quatre segments de câble PSU du RDB (1-3790, 1-3791, 1-3792 et 1-3793) et les quatre segments de fil de commande (1-3794, 1-3795, 1-3788 et 1-10503) étaient situés à l'intérieur du guide-fils, on les a soumis à la Division de chimie de la GRC (Ottawa et Halifax) pour fins d'analyse. On n'a pas soumis à la GRC l'unique fil de commande (1-10503); ce fil était complètement dénudé à l'exception d'un morceau d'isolant en ETFE. Le segment de fil de calibre 16 AWG nickelé a également été soumis afin qu'on puisse déterminer si de la résine FEP s'était transférée sur le fil pendant la séquence d'impact; cette dernière analyse visait à éterminer la proximité de ce segment de fil par rapport au guide-fils. De plus, on a demandé à la Division de chimie d'identifier tous les autres matériaux découverts sur ces pièces produites. Aux fins d'analyses comparatives, on a fourni des échantillons de guide-fils en FEP, des colliers en nylon utilisés pour supporter le guide-fils, des attaches autobloquantes, ainsi que d'autres matériaux. Les résultats de ces analyses figurent au tableau 12.
La pièce produite 1-3791 a également été soumise au Centre d'essais techniques de la qualité du MDN du Canada pour que ce dernier effectue d'autres analyses chimiques des débris emprisonnés dans l'extrémité entortillée, près de la zone de cuivre fondu identifiée comme étant la pièce produite 1-14723.
Chacun des quatre câbles PSU comprenait trois fils individuels (pour les trois phases électriques). Il a été impossible de déterminer quel fil avait été utilisé pour chacune des phases; par conséquent, chaque fil a été arbitrairement étiqueté phase A, B ou C.
Le tableau 12 décrit en détail les résultats des analyses physiques et chimiques effectuées sur les neuf segments de fil et de câble récupérés de la pièce produite 1-4372. Les extrémités entortillées des quatre câbles PSU ont été redressées. On a alors mesuré les câbles à partir de leur extrémité redressée pour déterminer la longueur globale de chaque fil de phase et la distance jusqu'au point d'amorçage d'arc. Figure 22 montre les endroits où se sont produits les arcs électriques et d'autres caractéristiques particulières sur les câbles, les uns par rapport aux autres.
Numéro de pièce produite Numéro des fils/calibre (AWG) Longueur du fil (cm) | Phase (ph) où il y avait du cuivre fondu et distance (@) par rapport à l'extrémité redressée (cm) | Analyse chimique | Autres observations | |
---|---|---|---|---|
Présence de FEP (cm)* | Nylon (cm)* | |||
1-3790 (RDB) 3/12 AWG ph A - 88 ph B- 112 ph C - 100 |
ph A @ 11 (1-14746) ph A @ 62 (1-12652) ph B @ 77 (1-12651) ph C @ 69 (1-11182) |
0 à 15, ph A - 46 ph C - 3 ph C - 13 ph C - 46 91 à 102 |
86 à 97 | Revêtement d'étain manquant entre 58 et 89 cm. Petits fragments de caoutchouc silicone rouge à 10 cm de l'extrémité. Isolant en fibre de verre jaune noyé dans l'extrémité entortillée. |
1-3791 (RDB) 3/12 AWG ph A - 115 ph B - 116 ph C - 117 |
ph A @ 9 (1-14723) ph A @ 62 (1-12653) ph B @ 65 (1-12654) |
0 à 15, ph B - 10 ph B - 37 ph B - 54 76 à 91 |
91 à 107 | 1-14723 était dans l'extrémité entortillée des fils. Petits fragments de caoutchouc silicone rouge et d'isolant en fibre de verre jaune noyés dans l'extrémité entortillée. |
1-3792 (RDB) 3/12 AWG ph A - 97 ph B - 97 ph C - 104 |
ph A @ 22 (1-12668) ph B @ 23 (1-12666) ph B @ 23 (1-12667) |
15 à 30 ph A - 45 ph A - 48 ph C - 53 ph C - 98 91 à 104 |
0 à 15 | Revêtement d'étain manquant entre 58 et 89 cm. Petits fragments de caoutchouc silicone rouge à 13 cm de l'extrémité. |
1-3793 (RDB) 3/12 AWG ph A - 102 ph B - 120 ph C - 120 |
ph A @ 64 (1-12669) ph A @ 66 (1-12670) ph A @ 67 (1-12732) |
0 à 15, ph B - 7 ph C - 37 ph C - 43 ph C - 54 45 à 61 |
91 à 107 | Petits fragments de caoutchouc silicone rouge à 9 cm de l'extrémité du fil le plus long à l'extrémité entortillée. |
1-3788 (RDB) 1/16 AWG 31 cm |
Extrémité du fil - (1-11166) | 9 cm (de l'extrémité fondue) | Revêtement d'étain manquant sur les torons de fil effilochés de l'extrémité opposée à la zone de cuivre fondu. | |
1-3794 (RDB) 1/16 AWG 23 cm |
Extrémité du fil - (1-11167) et 2 cm de l'extrémité fondue (1-11168) | 9 et 19 cm de l'extrémité fondue | Revêtement d'étain manquant sur les torons extérieurs du fil sur les 7 derniers centimètres de l'extrémité fondue. Petits fragments de caoutchouc silicone rouge présents entre les torons. | |
1-3795 (RDB) 1/16 AWG 31 cm |
Extrémité du fil - (1-11173) | Aucun FEP trouvé | Revêtement d'étain manquant sur les torons à 6 cm de l'extrémité fondue et de nouveau 10 cm plus loin le long du fil sur 10 cm; de l'étain était présent sur les 6 derniers centimètres. | |
1-10503 (RDB) 1/16 AWG 13 cm |
Extrémité du fil (1-11163) | Non soumis | Revêtement d'étain manquant sur 2,5 cm de l'extrémité fondue. | |
1-3796 1/16 AWG 27 cm |
3 cm de l'extrémité du fil et 2 cm de longueur (1-11175) | Aucun FEP trouvé | Fil nickelé avec une mince pellicule polyimide emprisonnée dans les torons du fil. |
* Dans son rapport d'analyse, la GRC de Halifax a indiqué la présence de FEP et de nylon sous la forme de plages, tandis que la GRC d'Ottawa l'a indiquée sous la forme d'une distance par rapport à une extrémité.
1.12.3.7 Examen des fils de systèmes de bord ayant des zones de cuivre fondu
On a identifié avec certitude quatre segments de fil ayant des zones de cuivre fondu grâce aux numéros de fil qui étaient marqués sur leur isolant. Trois de ces quatre fils portaient encore une cosse de borne à l'une de leurs extrémités, ce qui a permis de positionner ces fils avec précision sur la structure de reconstruction.
Ces quatre segments de fil provenaient tous de derrière le tableau de distribution supérieur, qui constitue la partie supérieure du tableau de commutation supérieur (voir Figure 23). Les tableaux de commutation et le tableau de distribution sont fixés à une enceinte en fibre de verre, appelée « boîtier », à l'intérieur de laquelle sont montés les borniers, les barres bus ainsi que d'autres composants électriques. Les fils sont acheminés vers ce boîtier et ils en ressortent par deux trous situés des côtés gauche et droit de l'extrémité arrière du boîtier.
La pièce produite 1-6976 est un segment de fil de calibre 6 AWG nickelé et isolé à l'aide d'une pellicule polyimide, d'une longueur approximative de 102 cm (40 po) et qui porte le numéro de fil B205-4-6 imprimé sur l'isolant. Ce numéro indique qu'il s'agit d'un segment du fil d'alimentation du bus c.c. d'urgence gauche. L'une des extrémités du segment de fil portait deux pattes de fixation drapeau qui devaient être branchées au bus c.c. d'urgence gauche situé derrière le tableau de commutation supérieur. L'emplacement connu de la patte de fixation drapeau sur la borne du bus a permis de disposer ce segment de fil avec précision sur la structure de reconstruction. L'extrémité qui présentait du cuivre fondu était située à environ 15 cm (6 po) à l'extérieur du trou droit perforé dans le boîtier du tableau de commutation supérieur. Par conséquent, ce segment de fil était situé du côté avant droit du plafond du poste de pilotage.
Il y avait une section de 2 cm (0,8 po) de longueur de cuivre resolidifié situé à quelque 97 cm (38 po) des pattes de fixation drapeau. Le conducteur avait perdu son nickelage sur une longueur de quelque 6 cm (2,4 po) de part et d'autre de la zone fondue. La surface extérieure du cuivre resolidifié était lisse et elle ne montrait aucune des caractéristiques habituelles associées à un arc électrique, comme de la porosité de surface ou une structure de surface irrégulière. Les radiographies de cette zone ont révélé qu'il s'agissait d'une masse pleine sans aucun vide. C'était le seul segment de fil nickelé qui montrait du revêtement en nickel fondu au-delà de la zone de cuivre resolidifié. On a considéré que ce cuivre fondu devait être le résultat direct d'une opération de soudure effectuée au moment de la fabrication du filNote de bas de page 56.
L'opération de soudage ou de « raccordement » est effectuée dans le but d'éviter les interruptions dans le processus de fabrication du fil. Les joints raccordés doivent être étiquetés et enlevés avant que le fil soit posé dans l'avion. Si on omet de le faire, un tel morceau de conducteur en cuivre plein, surtout dans le cas d'un fil de fort calibre, comme le fil de calibre 6 AWG, est davantage sujet au criquage par fatigue. Le fil d'alimentation du bus c.c. d'urgence gauche était installé dans l'avion en question en un endroit où le chemin de câbles était relativement droit et où les risques de vibrations étaient faibles. Ces facteurs atténuants auraient diminué les risques de criquage par fatigue; la zone fondue de la pièce produite 1-6976 ne montrait aucun signe de criquage par fatigue.
La pièce produite 1-3029 a été identifiée à l'aide du numéro de fil B205-1-10 comme étant un segment du fil d'alimentation du bus c.a. d'urgence gauche (voir Figure 20). Même si, selon la base de données de câblage de Boeing, ce fil aurait dû être un fil nickelé isolé à l'aide d'une pellicule polyimide, il s'agissait en fait d'un fil étamé isolé à l'aide de XL-ETFE (BXS7008). Le segment récupéré avait une longueur approximative de 122 cm (48 po). L'une des extrémités du segment de fil portait deux pattes de fixation drapeau qui auraient été branchées au bus c.a. d'urgence gauche. L'extrémité opposée aux pattes de fixation drapeau montrait du cuivre fondu à la surface des conducteurs. Installée dans l'avion, l'extrémité qui présentait du cuivre fondu aurait été située à 15 cm (6 po) environ à l'extérieur du trou ovale droit dans le boîtier du tableau de commutation supérieur, ce qui l'aurait placée dans le voisinage immédiat de la zone de cuivre fondu sur le fil d'alimentation du bus c.c. d'urgence gauche. L'isolant était encore intact sur ce fil, entre la patte de fixation drapeau et jusqu'à 17,5 cm (7 po) de la zone de cuivre fondu à l'autre extrémité.
On a identifié la pièce produite 1-1733 à l'aide du numéro de fil comme étant un segment du fil B203-974-24, un fil de calibre 24 AWG nickelé et isolé à l'aide d'une pellicule polyimide et qui a été identifié comme un élément du circuit « A » de la boucle de détection incendie du moteur 2. Le segment repêché mesurait environ 39 cm (15 po) de longueur. L'une des extrémités du segment de fil était fixée à un fragment du bloc modulaire 46 qui était originalement fixé au rail modulaire S3-613, situé du côté droit du boîtier du tableau de commutation supérieur. L'autre extrémité du segment de fil montrait du cuivre fondu. La position connue du bloc modulaire a permis de le remettre à sa place dans le boîtier du tableau de commutation supérieur sur la structure de reconstruction. Cette disposition plaçait la zone de cuivre fondu à environ 15 cm (6 po) à l'extérieur du trou ovale droit du boîtier du tableau de commutation supérieur.
On a identifié la pièce produite 1-12755 à l'aide du numéro de fil comme étant un segment de B203-189-22, un fil de calibre 22 AWG nickelé et isolé à l'aide d'une pellicule polyimide qui faisait partie du circuit des feux à éclats d'extrémité d'aile à haute intensité (feux de reconnaissance supplémentaires). Le segment repêché mesurait environ 81 cm (32 po) de longueur. Ce segment de fil montrait du cuivre fondu à une extrémité, tandis que l'autre extrémité était effilochée. L'extrémité effilochée ne semblait pas avoir été munie d'une attache de borne ni d'une broche; elle semblait être un segment provenant d'un fil plus long. Installé dans l'avion, ce fil était acheminé entre le bouton-poussoir S1-9094, qui portait l'inscription HI INTENSITY LTS, situé dans le tableau supérieur, et la fiche P1-420 de la broche X située sur le tableau de distribution supérieur derrière le tableau avionique supérieur. Il a été impossible de positionner avec précision la zone de cuivre fondu entre le début du fil et les points d'extrémité, mais le fil était acheminé dans les chemins de câbles AMJ et AMK qui sortent par le trou ovale situé du côté droit du boîtier.
1.12.3.8 Examen des fils non identifiés restants
Il a été impossible d’identifier la fonction des huit fils restants qui présentaient des dommages par arc électrique, et il a également été impossible de préciser leur emplacement spécifique dans l’avion. Le tableau 13 présente une description de ces huit fils.
1.12.4 Examen des lampes de lecture (liseuses de carte) de l'équipage de conduite
La liseuse de carte du copilote a été repêchée, et on l'a examinée pour trouver des dommages causés par un arc électrique ou par la chaleur, mais on n'a découvert aucun dommage de ce type. L'ampoule électrique était encore vissée dans la douille de la lampe. Le filament de la lampe s'était brisé en de nombreux morceaux, ce qui révèle qu'il était froid ou éteint au moment de l'impact. Habituellement, lorsqu'un filament incandescent reçoit un coup violent alors qu'il est allumé, il s'étire d'une manière caractéristique.
On a retrouvé et examiné des morceaux de la liseuse de carte de l'observateur de droite, dont la coupelle sphérique. Il n'y avait aucun signe de dommages causés par un arc électrique ou la chaleur; cependant, la plupart des pièces de contact électrique étaient manquantes. La surface extérieure du boîtier en aluminium dans lequel la liseuse était montée était recouverte de suie, mais le boîtier ne présentait aucun dommage causé par la chaleur. Deux petits segments de fil, un blanc et un rouge, étaient visibles à l'intérieur du boîtier. Le fil blanc montrait une rupture mécanique; aucun des deux fils ne montrait des signes de dommages causés par un arc électrique ou la chaleur. L'ampoule électrique n'a pas été récupérée.
Plusieurs morceaux de la liseuse de carte Hella ont été retrouvés et examinés. Comme les composants internes de la liseuse de carte et des lampes de couchette sont identiques, il a été impossible de déterminer de quelles pièces provenaient ces composants. Aucune de ces pièces ne présentait de signes de dommages causés par un arc électrique ou la chaleur.
On a également récupéré deux coupelles sphériques. Selon les dommages matériels relevés sur ces pièces et la quantité de suie qui les recouvrait, on a considéré qu'elles devaient provenir de la liseuse de carte du commandant de bord ou du copilote.
Voir la rubrique 1.16.2 pour des renseignements plus détaillés sur les recherches et les essais effectués sur les liseuses de carte, ainsi que la rubrique 4.1.4 pour connaître le suivi des mesures de sécurité prises.
Numéro de pièce produite | Longueur (cm)/ calibre / plaquage / isolant (nouveau numéro de pièce produite) | Cuivre fondu | Observations |
---|---|---|---|
1-4689 | 19 cm/10 AWG/ étamé / aucun isolant restant (1-11177) | À 0,2 cm de l'extrémité. Le cuivre fondu touchait 8 à 9 torons de 0,3 à 0,5 cm de longueur et de 1 à 2 mm de largeur. La zone fondue présentait de nombreux vides et trous. | Les torons de fil avaient perdu leur revêtement en étain. Les deux extrémités étaient effilochées. Une pellicule polyimide était emprisonnée dans les torons, mais on n'a pu déterminer avec certitude si elle provenait de ce fil. |
1-11897 | 16 cm/10 AWG étamé / | Deux extrémités fondues. | Fil fragilisé d'un bout à |
aucun isolant restant | l'autre. | ||
(1-12657) | Extrémité droite du fil à | ||
14 cm de l'extrémité | |||
(1-12659) | courbée. | ||
(1-12661) | À 6 cm de l'extrémité | ||
(1-12662) | courbée. | ||
(1-12665) | |||
1-12756 | 40 cm/18 AWG /étamé / pellicule polyimide isolante (1-12737) |
Cuivre fondu sur 0,2 cm de longueur, à 0,8 cm vers l'intérieur à partir d'une extrémité et qui touchait 8 à 10 torons. La zone fondue présentait de nombreux vides et trous. | M81381/21 (pellicule polyimide isolante/étamé) |
1-11252 | 7 cm/24 AWG nickelé (1-11179) | Cuivre fondu à l'extrémité se prolongeant 0,15 cm sur le fil. Petite perle de cuivre fondu sur les torons près de l'extrémité fondue. | Fil fragilisé d'un bout à l'autre. Le revêtement en nickel était manquant dans certaines zones et du matériau carbonisé ou noirci adhérait aux torons. |
1-3713 | 9 mm/24 AWG/nickelé (1-3713) |
Fondu d'une extrémité à l'autre sans trace de placage restant. | De nombreux vides et trous tout le long du fil. Aucun isolant restant. |
1-12809 | 25 cm/24 AWG nickelé (1-12736) | À 1,2 cm d'une des extrémités et 0,2 cm de longueur qui touchait tous les torons avec une petite perle en saillie. | Aucun isolant restant. |
1-3700 | 10 cm/20 AWG nickelé (1-11165) | Extrémité du fil fondue sur 1 cm avec une perle de 1,5 mm sur une extrémité. | Aucun isolant restant. |
1-3718 | 28 cm/20 AWG nickelé (1-11164) | Extrémité du fil fondue sur 0,6 cm se terminant par un point aplati. | Aucun isolant restant. Zone fondue noircie par la fumée. |
Voir la rubrique 1.16.2 pour des renseignements plus détaillés sur les recherches et les essais effectués sur les liseuses de carte, ainsi que la rubrique 4.1.4 pour connaître le suivi des mesures de sécurité prises.
1.12.5 Examen des plafonniers d'allée et des lumières d'urgence de la cabine
La cabine était équipée de plafonniers d'allée et de lumières d'urgence fabriqués par Luminator Aircraft Products (numéro de pièce 0200486-001). Ces appareils d'éclairage étaient installés dans les ensembles de raccordement qui supportaient les panneaux de plafond utilisés tout le long de la cabine au-dessus des allées gauche et droite. Chaque appareil d'éclairage comprenait un plafonnier d'allée et une lumière d'urgence; cependant, seul le plafonnier d'allée était allumé pendant les opérations normales. Certains des ensembles de raccordement repêchés montraient une marque circulaire noire unique et un certain ternissement brunâtre près de la zone de montage des plafonniers d'allée et des lumières d'urgence.
À l'occasion d'examens subséquents d'autres appareils MD-11, on a constaté le même type de ternissement causé par la chaleur sur les ensembles de raccordement. De plus, on a découvert que certains couvercles de lentille de plafonnier d'allée étaient déformés. On a effectué des essais à l'aide de bandes de mesure de la température afin de déterminer les températures atteintes à l'intérieur des couvercles de lentille près de la lumière et également près de la partie extérieure des plafonniers d'allée au cours des opérations normales de l'avion. On a mesuré des températures internes de pointe d'environ 200 °C (392 °F), et des températures moyennes comprises entre 143 et 160 °C (289 et 320 °F). On a également mesuré des températures comprises entre 110 et 138 °C (230 et 280 °F) sur la partie extérieure des plafonniers. Le ternissement des ensembles de raccordement au plafond avait été causé par la chaleur des appareils d'éclairage des allées. On a aussi remarqué que la quantité et la fréquence des dommages causés par la chaleur augmentaient en fonction du temps de service accumulé par les appareils d'éclairage.
On a constaté que certains ensembles plafonnier et lumière d'urgence de cabine examinés étaient contaminés par une épaisse couche de poussière et de peluche. On a aussi remarqué une certaine contamination sur les ballasts, les faisceaux de fils, les borniers et les connecteurs électriques, de même que dans certaines zones au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine et ailleurs dans l'avion. Sous certaines formes, la poussière et la peluche peuvent être très combustibles, c'est-à-dire qu'elles peuvent s'enflammer en présence d'une petite source d'inflammationNote de bas de page 57. Les accumulations de poussière et de peluche pourraient propager un incendie. L'analyse et l'examen au microscope de la poussière et de la peluche prélevées sur les filtres déposés des avions de Swissair ont révélé que les dépôts étaient constitués d'un mélange de différents matériaux, comme des fragments de fibres de textile et de papier. On a déterminé que ces dépôts étaient inflammablesNote de bas de page 58 et qu'il suffisait d'une petite source d'inflammation pour les enflammer.
1.12.6 Examen des instruments de secours
On a repêché et examiné l’indicateur d’assiette de secours afin de déterminer s’il était sous tension et en état de marche avant l’impact, et si l’indicateur pouvait aider à déterminer l’assiette de l’avion au moment de l’impact. Le boîtier de l’instrument avait été lourdement endommagé par l’impact. À la suite de cette déformation, les indicateurs d’assiettes longitudinale et latérale s’étaient figés respectivement à environ 110° d’inclinaison à droite et 20° de piqué. L’échelle d’assiette portait une marque rouge très visible qui correspondait à la forme et aux dimensions du drapeau d’avertissement rouge. Ce drapeau apparaît complètement en moins d’une seconde en cas de coupure de l’alimentation électrique, ou lorsque la vitesse de rotation du gyroscope chute à moins de 18 000 tr/min. L’emplacement de l’empreinte a révélé que le drapeau d’avertissement était complètement sorti au moment de l’impact.
L’arbre de la masselotte du gyro présentait une fracture en surcharge de torsion, et il y avait des marques de frottement en rotation superposées. La masselotte du rotor et le boîtier montraient tous deux du frottement de surface, et il s’était produit un transfert de marques de machine-outil entre les deux. Ce marquage laisse croire que la vitesse de rotation était élevée lorsque la masselotte du rotor est entrée en contact avec l’enceinte, ce qui se serait produit lorsque l’arbre de support s’est fracturé. Par conséquent, on peut conclure qu’au moment de l’impact, le gyroscope était animé d’une grande énergie de rotation.
En cas de perte d’alimentation électrique de l’indicateur d’assiette de secours, la vitesse de décélération du gyro permet à l’indicateur de fournir des indications d’assiette fiables pendant encore cinq à six minutes. L’instrument est alimenté par le bus batterie de l’avion, par l’intermédiaire du disjoncteur C-01 situé sur le tableau de commutation supérieur.
La seule partie de l’indicateur d’altitude et de vitesse de secours qui était identifiable était le tambour du cadran de vitesse. Ce dernier était lourdement déformé; toutefois, il montrait deux empreintes distinctes au niveau des graduations de 80 nœuds et de 120 nœuds. Ces empreintes semblaient avoir été produites au moment de l’impact par le contact avec deux supports internes qui étaient situés à l’arrière de l’indicateur, mais à faible distance du tambour en rotation. Par comparaison avec un anémomètre en état de marche, on a aligné les empreintes du tambour du cadran de vitesse avec celles qui étaient présentes sur les supports internes. La comparaison a situé la graduation de 300 nœuds au niveau du curseur de vitesse, ce qui laisse croire que l’avion se déplaçait à une vitesse d’environ 300 nœuds au moment de l’impact.
1.12.7 Examen des gouvernes
On a examiné les actionneurs des gouvernes, et rien ne permet de croire qu’il y aurait eu une défaillance des actionneurs avant l’impact qui aurait pu compromettre leur fonctionnement normal. L’examen des actionneurs laisse croire que les volets étaient sortis à 15°; toutefois, les becs de bord d’attaque n’étaient pas sortis, contrairement à ce que l’on s’attendrait normalement lorsque les volets sont sortis. La sortie des volets ne nécessite pas d’énergie électrique, alors qu’il en faut pour actionner les becs de bord d’attaque. Le fait que les becs de bord d’attaque soient demeurés rentrés est sans doute attribuable à une panne d’alimentation électrique des robinets de commande des becs de bord d’attaque, attribuable aux effets de l’incendie en vol.
Pour une sortie des volets de 15°, les ailerons extérieurs auraient dû se braquer. Les déporteurs (aérofreins) étaient rentrés au moment de l’impact; toutefois, on ignore s’ils avaient été utilisés à un moment donné pendant la descente sous les 10 000 pi après la perte du FDR. Les marques d’impact relevées sur la gouverne de profondeur, le gouvernail de direction et les vérins des ailerons, de même que les positions dans lesquelles on a retrouvé les vérins à vis du stabilisateur laissent croire que les gouvernes de l’avion pouvaient être dans la configuration suivante au moment de l’impact : profondeur braquée de 2 à 3° vers le haut; gouvernail de direction de 3° à gauche; ailerons et stabilisateur en position neutre.
Les enregistrements du FDR, juste avant qu’il cesse de fonctionner, ne montraient aucune anomalie au niveau des gouvernes. Les derniers enregistrements valides indiquaient que le pilote automatique s’était débrayé et qu’on ne pouvait plus commander l’amortisseur de lacet supérieur et inférieur A (la commande de l’amortisseur de lacet supérieur et inférieur B était encore disponible). Lorsque le FDR a cessé d’enregistrer, l’avion était en configuration lisse, c’est-à-dire que les volets, les becs de bord d’attaque et le train d’atterrissage étaient rentrés.
1.12.8 Examen des composants du circuit carburant
On a retrouvé les 17 pompes carburant entraînées par un moteur électrique de 115 V c.a., et on est parvenu à préciser l'emplacement de chacune, sauf deux d'entre elles. Chaque pompe carburant était alimentée à partir de l'un des trois bus c.a. d'alternateur, et chaque pompe à l'intérieur de chacun des réservoirs carburant était alimentée à partir d'une source d'énergie électrique différente. On a examiné chacune des pompes carburant à l'atelier du fabricant afin de déterminer si elles étaient sous tension au moment de l'impact, ce qui fournirait de l'information sur l'état des bus électriques.
L'examen des pompes carburant a donc porté principalement sur l'identification des dommages particuliers indiquant si les pompes fonctionnaient au moment de l'impact. Ces dommages comprenaient des rainures sur le boîtier du rotor caractéristiques d'un contact entre le boîtier et les aubes du rotor en rotation ou stationnaire, et des dommages au dispositif à goupille et fente qui supporte le rotor sur l'arbre en rotation. L'examen de dommages a révélé que six pompes étaient animées d'une grande énergie de rotation au moment de l'impact, ce qui révèle que les rotors étaient entraînés par les moteurs électriques.
Le corps de la pompe d'appoint arrière gauche du réservoir 2 montrait des empreintes caractéristiques causées par le rotor stationnaire; on a déterminé que ce rotor n'était pas entraîné électriquement au moment de l'impact.
Il a été impossible d'établir l'état de fonctionnement des autres pompes, car elles ne présentaient pas de marques caractéristiques suffisantes. Le tableau 14 identifie les six pompes carburant qui, selon l'examen des dommages, fonctionnaient au moment de l'impact ainsi que leur source d'alimentation électrique.
Emplacement de la pompe carburant | Bus électrique |
---|---|
Pompe d'appoint avant du réservoir 1 | Bus 1 de l'alternateur de 115 V c.a. |
Pompe de transfert du réservoir 3 | Bus 1 de l'alternateur de 115 V c.a. |
Pompe de transfert droite du réservoir auxiliaire supérieur | Bus 1 de l'alternateur de 115 V c.a. |
Pompe de transfert gauche du réservoir d'empennage | Bus 1 de l'alternateur de 115 V c.a. |
Pompe d'appoint arrière du réservoir 1 | Bus 3 de l'alternateur de 115 V c.a. |
Pompe de transfert du réservoir 2 | Bus 3 de l'alternateur de 115 V c.a. |
On a récupéré et examiné les deux robinets vide-vite. Les dommages et les rainures observés indiquaient que les deux robinets étaient en position CLOSED (fermée) au moment de l'impact.
On a récupéré et examiné le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir auxiliaire et le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir d'empennage. Sous les forces de l'impact, les guillotines des deux robinets sont demeurées coincées en position CLOSED (fermée) au moment de l'impact. Selon la configuration connue du système carburant et le fonctionnement normal du FSC, le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir d'empennage aurait dû être fermé. Toutefois, le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir auxiliaire aurait dû être ouvert au moment de l'impact, à moins qu'il n'y ait pas eu d'alimentation électrique disponible pour l'ouvrir, ou que l'on ait amorcé le largage du carburant à un moment donné. En effet, lors d'une opération de largage de carburant, le circuit carburant est reconfiguré pour fermer le robinet d'isolement/de remplissage du réservoir auxiliaire.
On n'a récupéré que des fragments des trois robinets d'intercommunication; il a donc été impossible de déterminer la position de leur guillotine au moment de l'impact.
1.12.9 Examen des moteurs
1.12.9.1 Généralités
On a examiné les trois moteurs afin de déterminer leur état de fonctionnement tout juste avant l'impact. Chaque moteur peut délivrer une poussée maximale de 62 000 livres (lb) au niveau de la mer. On n'a découvert aucune anomalie mécanique qui aurait pu compromettre le fonctionnement normal des trois moteurs.
On a repêché les cartes éélectroniques du régulateur automatique à pleine autorité redondante (FADEC) du moteur 1; toutefois, la puce de mémoire morte programmable effaçable électriquement (EEPROM) qui contenait la mémoire permanente avait été arrachée. Par conséquent, il a été impossible de récupérer quelque renseignement que ce soit du FADEC concernant le moteur 1.
On a repêché les FADEC des moteurs 2 et 3 et extrait les données de la mémoire permanente de chaque régulateur. Les FADEC avaient enregistré 10 anomalies identiques pour le vol en question. Le FADEC du moteur 2 avait enregistré 10 anomalies supplémentaires, dont 7 étaient de même nature que les 10 anomalies précédentes (voir la rubrique 1.12.9.3). Toutes les anomalies enregistrées sur la mémoire permanente du FADEC sont survenues après que l'avion eut descendu à environ 10 000 pi. Toutes ces anomalies étaient reliées à la perte des données en provenance des FCC et des ADC, ainsi qu'à la perte des sources d'alimentation électrique de 115 V c.a. et de 28 V c.c. des FADEC.
L'interruption de l'alimentation électrique de 115 V c.a. a entraîné la perte du réchauffeur de la sonde de prise d'air du moteur associé. Ce réchauffeur est nécessaire pour permettre au FADEC de réguler le régime du moteur dans le mode d'échantillonnage d'EPR primaire; par conséquent, après la perte du réchauffeur de la sonde de prise d'air, le mode de régulation du moteur serait passé du mode EPR primaire au mode de repli automatique N1. Le FADEC adopte alors un plafonnement de N1 afin de maintenir le même niveau de poussée qu'avant le changement de mode. Un commutateur marqué SELECT qui se trouve sur le tableau de commande FADEC, situé sur le panneau supérieur, permet aux pilotes de supprimer le plafonnement de la régulation N1; les moteurs fonctionnent alors en mode de repli manuel N1. Les moteurs continuent de réagir aux sollicitations sur les manettes des gaz dans les deux modes de repli N1.
Le FADEC enregistre les anomalies par périodes de 20 minutes, et ces enregistrements ne sont pas synchronisés avec les enregistrements du FDR. Il est par conséquent difficile de corréler l'heure d'entrée en mémoire des anomalies dans le FADEC avec l'heure UTC enregistrée par l'avion, c'est pourquoi il a été impossible de corréler avec précision les anomalies enregistrées par le FADEC avec les données enregistrées par le FDR.
1.12.9.2 Moteur 1
Les dommages relevés sur le moteur 1 sont typiques d'un moteur qui tourne à régime élevé et qui développe une puissance élevée au moment de l'impact. Des marques d'impact se sont produites sur l'axe de la manette des gaz et sur son secteur lorsque la manette s'est libérée de son axe de débattement en se fracturant. Après avoir aligné les marques d'impact, on a déterminé que la position de la manette des gaz correspondait à un réglage de poussée d'environ 45 960 livres dans le mode de régulation EPR, ou de 54 195 livres dans le mode de régulation de repli manuel N1. On ignore lequel des deux modes de régulation de repli N1 avait été sélectionné par l'équipage.
Le doseur du dispositif de dosage de carburant (FMU) était à sa position de débit maximal ou proche de celle-ci, soit un débit carburant compris entre 26 900 et 28 400 livres par heure. Un tel débit correspond à une puissance élevée.
1.12.9.3 Moteur 2
Les dommages d'impact subis par le moteur 2 présentaient les signes caractéristiques d'un moteur qui tournait en moulinet et qui ne développait pas une puissance élevée au moment de l'impact. Des marques d'impact se sont produites sur l'axe de la manette des gaz et sur son secteur lorsque la manette s'est libérée de son axe de débattement en se fracturant. Il y avait deux marques d'impact sur le secteur de la manette. Après qu'on eut aligné la marque d'impact sur l'arbre de la manette avec l'une des marques sur le secteur de la manette, cette dernière se trouvait dans une position semblable à celle du moteur 1. Après qu'on eut aligné la deuxième marque d'impact présente sur le secteur avec celle de la manette, cette dernière se trouvait dans une position proche du réglage de ralenti. Le dommage correspondant à cette deuxième marque sur le secteur de la manette a été attribué à un déplacement survenu après l'écrasement. Par conséquent, on peut conclure que la manette des gaz était poussée vers l'avant au moment de l'impact, même si le moteur ne produisait pas de puissance.
Sur les 10 anomalies supplémentaires enregistrées par le FADEC du moteur 2, 3 étaient reliées à une perte des signaux d'entrée TRA vers le FADEC. Le câblage du TRA pour le moteur 2 part du pylône central, il passe au-dessus du plafond du poste de pilotage, et il se dirige ensuite vers l'arrière en passant par une zone où l'on sait qu'il y a eu des dommages causés par l'incendie dans le plafond suspendu de la partie avant de la cabine. La perte des signaux d'entrée TRA aurait forcé le moteur 2 à passer en mode de poussée fixe et à maintenir la puissance à la dernière valeur d'angle des manettes. Comme le FDR avait cessé d'enregistrer, les valeurs EPR n'étaient pas disponibles. Les derniers réglages de poussée enregistrés obtenus du FADEC avant l'arrêt du moteur correspondaient à environ 72 % N2, soit un régime de ralenti de prise de terrain.
Les renseignements tirés du FADEC laissent croire que le moteur 2 avait été coupé à une altitude de quelque 1 800 piNote de bas de page 59 et à une vitesse vraie d'environ 227 noeuds. Pour que le FADEC puisse transférer les anomalies existantes dans sa mémoire permanente, il faut normalement que le moteur ait été coupé à l'aide de l'interrupteur FUEL. Dans le cas de SR 111, on a également examiné la possibilité que le circuit électrique menant au sélecteur ait pu être compromis par les dommages causés par l'incendie. Cependant, la configuration du câblage de l'avion fait en sorte que le réglage de l'interrupteur FUEL met deux circuits électriques à la masse et un circuit électrique sous tension. Comme deux des trois fils associés passaient à l'intérieur de chemins de câbles qui se trouvaient complètement à l'extérieur de la zone d'incendie, on considère qu'il est peu probable que l'incendie ait pu endommager les fils de manière à produire par coïncidence exactement cette configuration électrique. Ainsi, tout laisse croire que l'équipage aurait volontairement coupé le moteur 2 à l'aide de l'interrupteur FUEL.
1.12.9.4 Moteur 3
Les dommages relevés sur le moteur 3 sont typiques d’un moteur qui développe une puissance supérieure à celle du ralenti de vol, mais inférieure à la puissance maximale. Comme le moteur avait perdu le signal d’entrée du réchauffeur Pitot vers le FADEC, il devait être revenu au mode de plafonnement N1. Les marques d’impact relevées sur l’axe de la manette des gaz et sur son secteur ont été attribuées au fait que la manette s’est libérée de son axe de débattement en se brisant. Après avoir aligné les marques d’impact, on a déterminé que la position de la manette des gaz correspondait à un réglage de poussée d’environ 40 315 livres dans le mode EPR. Comme le moteur avait perdu le signal d’entrée du réchauffeur Pitot vers le FADEC, il devait être revenu au mode de repli automatique N1. Par conséquent, si l’on en juge uniquement par les indications de position de la manette des gaz, les niveaux de poussée du moteur semblent correspondre à une puissance relativement élevée.
Toutefois, le dispositif de dosage de carburant fournit des renseignements différents. On a déterminé que le doseur du FMU était approximativement à mi-course, ce qui équivaut à un débit carburant compris entre 3 180 et 3 420 livres par heure. Un tel débit carburant correspond à une puissance un peu au-dessus du ralenti de vol. Les renseignements tirés de l’examen du FMU ont fourni une représentation plus précise de l’état du moteur que ceux obtenus par déduction de la position de la manette des gaz à partir des marques d’impact. De plus, les dommages matériels relevés sur le moteur correspondent à une puissance de faible à moyenne comme l’indiquait le réglage du FMU; l’analyse des composants connexes du moteur laisse également croire que le moteur fonctionnait à un régime égal ou légèrement supérieur au ralenti de vol au moment de l’impact.
1.12.10 Examen des composants structuraux de l'avion
1.12.10.1 Généralités
Des composants structuraux spécifiques ont été identifiés dans la zone de débris principale comme provenant de toutes les extrémités de l'avion, du nez à l'empennage, de l'extrémité de l'aile gauche à celle de l'aile droite, et de la partie inférieure du fuselage à la dérive. Une analyse des performances a révélé que l'avion n'avait pas accéléré jusqu'à une vitesse suffisante pour provoquer une dislocation structurale en vol avant l'impact, et aucun indice ne pointe dans cette direction. Rien ne permet de croire que le feu aurait perforé le fuselage, ni qu'une structure donnée se serait séparée de l'avion à cause de l'incendie.
1.12.10.2 Empennage et voilure
On a examiné les morceaux de structure de l'avion qui mesuraient plus de 1,22 m (4 pi) de longueur pour tenter de déterminer des types de dommages susceptibles d'aider à établir l'assiette et la configuration de l'avion au moment de l'impact. On a considéré que ces morceaux plus gros étaient les plus susceptibles de fournir des indices significatifs clairs sur le mode de déformation de la structure dans son ensemble.
Les modes de déformation et de fragmentation constatés sur les deux stabilisateurs étaient relativement symétriques, quoique le stabilisateur droit était légèrement plus endommagé, ce qui laisse croire que le côté droit aurait heurté la surface de l'eau avant le côté gauche.
Aucun des morceaux du gouvernail de direction n'a révélé des profils de déformation ou de rupture significatifs.
Les modes de déformation et de fragmentation constatés sur les deux ailes étaient relativement symétriques. Par conséquent, on a conclu qu'il n'y avait pas eu de différences significatives au niveau de l'ampleur et de l'orientation des forces d'impact qui s'étaient exercées sur les deux ailes. L'examen approfondi des déformations en flexion et en torsion du revêtement de voilure, les dommages relevés sur les lisses, les attaches de cisaillement, les longerons et les nervures, la courbure des rails de bec de bord d'attaque et les dommages relevés sur les ferrures de fixation de pylône moteur montraient de légères différences qui permettaient de croire que l'aile gauche aurait subi des dommages plus importants, et que l'avion accusait peut-être un angle de lacet à droite au moment de l'impact. Toutefois, les différences étaient si subtiles et elles portaient sur un nombre si restreint de morceaux qu'elles n'ont pas été concluantes. Compte tenu du manque d'information, il a été impossible, uniquement sur la foi de l'examen de la voilure, de tirer des conclusions valables sur l'angle d'inclinaison latérale ou sur l'assiette longitudinale de l'avion au moment de l'impact.
1.12.10.3 Trappes de vanne de régulation échappement cabine
On a examiné les trappes de vanne de régulation échappement cabine afin de déterminer si elles étaient ouvertes ou fermées au moment de l'impact. Même si l'on a constaté de nombreuses égratignures, rainures et autres empreintes sur les surfaces et les rebords des deux trappes, aucune de ces marques n'était continue sur les deux trappes. Cette absence de continuité laisse croire que les trappes n'étaient pas fermées lorsque ces marques ont été faites. Des marques supplémentaires ont été faites par la déformation de cadre de trappe et la déformation des charnières de trappe indique que les deux trappes étaient au moins partiellement ouvertes au moment de l'impact.
Lorsqu'elles s'ouvrent, la trappe avant bascule vers l'extérieur, à l'écart du fuselage et dans le courant d'air, tandis que la trappe arrière bascule vers l'intérieur dans la zone du tunnel de gauche. Une quantité légère à moyenne de suie a été observée à certains endroits du revêtement extérieur de la trappe arrière, et un léger dépôt de suie était présent le long de la charnière de la trappe avant. Les dépôts de suie observés laissent croire que les trappes avaient été ouvertes suffisamment longtemps pour être salies par les produits de combustion de l'incendie.
1.12.10.4 Fenêtres coulissantes du poste de pilotage
Le MD-11 est équipé de deux fenêtres coulissantes dans le poste de pilotage (une de chaque côté) qui sont normalement fermées et verrouillées pendant le vol. Les pilotes peuvent ouvrir ces fenêtres lorsque l’avion n’est pas pressurisé; cette mesure fait partie de la liste de vérifications de Swissair pour évacuer la fumée ou les émanations du poste de pilotage. On a examiné la structure qui entourait les fenêtres coulissantes afin de déterminer si ces dernières étaient ouvertes, ou fermées et verrouillées au moment de l’impact.
Les fenêtres coulissantes de poste de pilotage sont de type à emboîtement qui reposent contre une bride tout autour du périmètre de l’appui de fenêtre. On peut ouvrir et fermer chaque fenêtre à l’aide d’un mécanisme à chaîne et manivelle situé sur la cloison sous l’appui de la fenêtre. Pour ouvrir la fenêtre, le pilote doit d’abord libérer le mécanisme de verrouillage. Cette mesure préliminaire dégage les verrous du rebord arrière de la fenêtre, mais sans déplacer la fenêtre. Pour ouvrir la fenêtre, il faut tourner la manivelle, ce qui tire le rebord arrière de la fenêtre suffisamment loin vers l’intérieur pour qu’il se dégage de l’appui, et la fenêtre peut ensuite coulisser librement vers l’arrière si l’on continue de tourner la manivelle. On peut déverrouiller la fenêtre même si l’avion est pressurisé, mais la force vers l’extérieur exercée sur la fenêtre est alors si grande qu’il est impossible d’ouvrir la fenêtre en tournant la manivelle.
Les dommages relevés sur deux des trois plaques de verrouillage de la fenêtre coulissante du copilote étaient alignés avec la position verrouillée, et les dommages avaient la même forme que les extrémités des verrous. Ces indices laissent croire que les verrous étaient fermés au moment de l’impact. La séparation de la troisième plaque de verrouillage correspondait à la direction des dommages des deux premières. Les dommages constatés laissent croire que la fenêtre était fermée et verrouillée et qu’elle aurait été enfoncée vers l’intérieur lorsque l’avion a heurté la surface de l’eau.
Les dommages relevés sur les trois plaques de verrouillage, de même que sur le mécanisme de verrouillage, la fenêtre et l’appui de la fenêtre du commandant de bord indiquent que les verrous étaient ouverts au moment de l’impact. De plus, les marques d’impact relevées le long de l’appui correspondent à l’intervalle de pas et à l’emplacement des fixations autour du périmètre de la fenêtre. Dans la plupart des cas, ces rainures étaient suffisamment profondes pour traverser les couches de peinture et d’apprêt et pour laisser une empreinte dans le métal. Ces marques laissent croire que la fenêtre était en position fermée au moment de l’impact.
1.12.11 Examen des sièges de l'équipage de conduite et des passagers
1.12.11.1 Sièges de l'équipage de conduite
Les ceintures de sécurité du siège du commandant de bord n'étaient pas bouclées au moment de l'impact, et le siège était en position d'évacuation. Le siège s'est rompu au moment de l'impact sous l'effet d'une force dont la composante vectorielle agissait de droite à gauche. Aucun indice clair n'a permis de déterminer si le siège était occupé au moment de l'impact.
Le siège du copilote, qui s'est rompu et libéré de son support, était orienté vers l'avant dans une position de vol normale, et les ceintures de sécurité étaient bouclées au moment de l'impact. Le siège du copilote était occupé au moment de l'impact.
Le siège de l'observateur droit, qui s'est rompu et libéré de son support, était orienté vers l'avant dans sa position la plus avancée et la plus à gauche au moment de l'impact. La ceinture de sécurité n'était pas bouclée. Il a été impossible de déterminer si le siège était occupé au moment de l'impact.
On a retrouvé des zones de couleur jaune pâle sur les revêtements de siège en peau de mouton du poste de pilotage. L'analyse au microscope a révélé que cette coloration avait été créée par la présence d'une multitude de petites particules de fibre de verre jaune pâle. Ces particules s'étaient encastrées et entrelacées dans les fibres de laine grise des revêtements de siège.
1.12.11.2 Sièges des passagers
Les sièges des passagers avaient été lourdement endommagés par l’impact, à tel point qu’il a été impossible d’identifier et de reconstruire individuellement les sièges. L’étendue des dommages a également empêché de déterminer quels sièges étaient occupés au moment de l’impact.
1.12.12 Assiette et vitesse de l’avion au moment de l’impact
L’emplacement de la zone de débris par rapport au dernier écho du radar primaire reçu de l’avion indique que l’appareil était en virage à droite avant l’impact. La zone de débris était relativement restreinte, ce qui laisse croire que l’avion a heurté le plan d’eau selon un angle de piqué relativement prononcé. L’indicateur d’assiette de secours affichait un angle de piqué de 20° et une inclinaison latérale à droite de 110° au moment de l’impact. La face du cadran de l’anémomètre portait des marques, produites au moment de l’impact, qui correspondent à une vitesse de 300 nœuds. Les dommages structuraux indiquent que l’avion se trouvait dans un piqué d’environ 20° et qu’il présentait un angle d’inclinaison latérale à droite supérieur à 60°. L’analyse des marques relevées sur divers morceaux d’épave indique que la force de l’impact s’est exercée selon un angle de 15° à droite de l’axe de l’avion.
1.13 Renseignements médicaux
La présente section résume les renseignements médicaux et pathologiques obtenus après l’accident sur les occupants à bord du vol SR 111. Les antécédents médicaux des pilotes figurent à la Section 1.5, Renseignements sur le personnel.
1.13.1 Récupération des corps
L'impact avec le plan d'eau a été si violent que les restes humains ont été fragmentés. Un passager, titulaire d'une licence de pilote, portait un gilet de sauvetage. Il n'a pas été possible de déterminer si la plupart des autres occupants portaient leur gilet de sauvetage, mais on a déterminé que le maître de cabine ne portait pas son gilet de sauvetage.
L'état des restes humains était aussi fonction des conditions extrêmes du milieu après l'impact. Dans les jours qui ont suivi l'accident, il est devenu évident qu'on ne pourrait récupérer les corps qu'au moment où serait repêchée l'épave.
1.13.2 Identification des personnes
L’identification des passagers et des membres d’équipage a été effectuée par une équipe réunissant les médecins légistes en chef des provinces de la Nouvelle-Écosse et de l’Ontario, des membres de la GRC, du personnel du MDN et d’autres personnes de la communauté médicale de l’endroit. Un passager a pu être identifié visuellement. Les 214 autres passagers et 14 membres d’équipage ont été identifiés grâce aux moyens suivants : fiches dentaires, empreintes digitales, radiographie médico-légale et protocoles d’identification par empreintes génétiques (ADN). En décembre 1998, les 229 occupants de l’avion avaient tous été identifiés.
1.13.3 Types de blessure
Tous les passagers et les membres d’équipage sont morts sur le coup sous l’effet des forces de décélération (g)60 et des forces d’impact lorsque l’avion a percuté le plan d’eau. L’ampleur des blessures laisse croire que les forces d’impact étaient de l’ordre de 350 g. On n’a découvert aucun signe d’exposition à la chaleur sur les restes humains qui ont été récupérés. Les types de blessure correspondaient à l’application de forces longitudinales accompagnées d’une composante latérale droite d’environ 15°, ce qui concorde avec l’information relative à l’assiette de l’avion au moment de l’impact.
1.13.3 Types de blessure
Tous les passagers et les membres d'équipage sont morts sur le coup sous l'effet des forces de décélération (g)Note de bas de page 60 et des forces d'impact lorsque l'avion a percuté le plan d'eau. L'ampleur des blessures laisse croire que les forces d'impact étaient de l'ordre de 350 g. On n'a découvert aucun signe d'exposition à la chaleur sur les restes humains qui ont été récupérés. Les types de blessure correspondaient à l'application de forces longitudinales accompagnées d'une composante latérale droite d'environ 15°, ce qui concorde avec l'information relative à l'assiette de l'avion au moment de l'impact.
1.13.4 Renseignements toxicologiques
Une analyse toxicologique de certains prélèvements de restes humains a été entreprise, notamment sur les corps des deux pilotes de SR 111, au Civil Aerospace Medical Institute de la FAA, afin de déceler la présence de produits de combustion provenant de l'incendie en vol, plus particulièrement du monoxyde de carbone ou de l'acide cyanhydrique. La présence de l'un de ces composés dans les prélèvements pourrait indiquer qu'il y avait eu inhalation de fumée ou d'émanations, ou des deux, ce qui aurait permis de se faire une meilleure idée de la situation dans le poste de pilotage et la cabine avant le moment de l'impact.
Aucun des prélèvements toxicologiques soumis aux essais n'a permis d'effectuer une analyse en bonne et due forme de la présence de monoxyde de carbone. On n'a retrouvé aucune trace d'acide cyanhydrique dans les prélèvements. Ces résultats peuvent indiquer qu'il n'y avait pas suffisamment de fumée dans la cabine pour que le cyanure soit absorbé dans les tissus, ou que les prélèvements de tissus soumis aux essais ne convenaient pas.
Les deux pilotes ont été identifiés grâce à leurs empreintes génétiques. Bien qu'on ait tenté de vérifier la présence de monoxyde de carbone chez eux, on n'a obtenu aucun résultat utile parce que des prélèvements convenant à une analyse toxicologique n'étaient pas disponibles. Aucune trace de cyanure n'a été détectée chez les pilotes. L'absence de cyanure peut s'expliquer par la protection offerte par le masque à oxygène d'équipage de conduite ou tout autre équipement de protection individuel, ou parce que les tissus soumis aux essais ne convenaient pas.
Il n'est pas rare de détecter de l'alcool éthylique lors de l'examen toxicologique des tissus d'une victime d'un accident d'aviation. La production d'alcool éthylique après la mort résulte d'une action bactérienne et elle fait partie du processus de putréfaction. La présence d'alcool éthylique dépend de plusieurs facteurs, comme la nature et l'état du prélèvement, les conditions environnementales auxquelles les tissus du prélèvement sont exposés, la durée écoulée avant que le prélèvement soit récupéré, la possibilité qu'une contamination bactérienne ait lieu avant et pendant la sélection des tissus récupérés, et la manipulation des tissus. Pour confirmer la présence de conditions favorables à l'apparition de ce phénomène, d'autre prélèvements ont fait l'objet d'examens à partir d'individus qui n'auraient pas ingéré de l'alcool pour des raisons d'âge ou d'antécédents culturels. Des six prélèvements examinés, cinq se sont révélés positifs, c'est-à-dire qu'ils contenaient de l'alcool éthylique.
Les analyses visant à déceler la présence d'alcool ou de drogues chez les pilotes ont été négatives. Rien n'indique que les pilotes aient consommé de l'alcool avant ou pendant le vol. Des résultats positifs à l'alcool éthylique ont été obtenus pour les deux pilotes; ces résultats positifs pourraient avoir été causés par une ingestion d'alcool avant la mort ou la production d'alcool après celle-ci. Les résultats obtenus de prélèvements d'autres personnes ont confirmé que des conditions avaient permis que de l'alcool soit produit après la mort.
1.14 Incendie
La présente section décrit les normes en vigueur pour l'aviation au moment de l'accident de SR 111 en ce qui a trait à l'inflammabilité, à la détection et à l'extinction des incendies et à la lutte contre les incendies. Elle décrit également la nature de l'incendie et les dommages causés par la chaleur, de même que les sources possibles d'inflammation et les sources de combustible
1.14.1 Normes de certification des avions
1.14.1.1 Élaboration de normes d'inflammabilité des matériaux
Parmi les autorités de l'aviation civile, la FAA a traditionnellement assumé le leadership des travaux de recherche et de développement visant à améliorer la prévention des incendies en aviation. En 1988, le United States Aviation Safety Research Act confiait à la FAA le mandat d'effectuer des recherches fondamentales sur la sécurité incendie à bord des aéronefs. Les FAR sont utilisées au plan international comme principale source en matière d'exigences de certification des aéronefs, notamment de normes d'inflammabilité des matériaux. La réglementation actuelle de la FAA reflète une philosophie adoptée à la suite d'une étude menée en 1975 et 1976 afin d'établir la faisabilité de deux approches fondamentales visant à apporter des améliorations à la sécurité incendie des fuselages des gros-porteurs modernes, et les compromis entre les deux. L'étude avait pour objet d'examiner les conséquences d'incendies en vol, après écrasement et sur la piste sur les compartiments du fuselage, et d'évaluer les exigences de protection incendie.
La première approche visait la possibilité d'appliquer les plus récentes technologies en matière de détection et d'extinction rapides des incendies. Cette approche suppose le recours à ce qui a été décrit comme un « système de gestion des incendies », c'est-à-dire un système intégrant la détection, la surveillance et l'extinction des incendies dans l'ensemble de l'avion.
La deuxième approche visait la possibilité d'améliorer les normes d'inflammabilité des matériaux utilisés en cabine afin qu'ils présentent de meilleures qualités ignifuges et un faible niveau d'émission de fumée et de gaz toxiques.
L'étude a conclu que les deux approches présentaient des avantages et des inconvénients et qu'une approche combinant un système de gestion des incendies et des améliorations sélectives des matériaux utilisés pourrait offrir le meilleur potentiel de protection contre les incendies dans toutes les situations.
Par la suite, conformément aux recommandations du rapport du comité consultatif SAFERNote de bas de page 61 de la FAA, les principaux efforts de recherche et de développement de cette dernière ont été concentrés sur ce qui a été établi comme la plus grave menace : l'incendie après un accident. Le scénario d'incendie après un accident qui a été examiné présentait un fuselage intact voisin d'un incendie alimenté par du carburant d'aviation non confiné. Il a été établi que, dans un tel scénario, la plus grave menace pour les passagers survivants proviendrait de la combustion des matériaux utilisés à l'intérieur de la cabine. L'étude de la FAA a conclu que, dans un tel scénario, les passagers survivants pourraient être invalidés par les gaz toxiques générés par un phénomène appelé « embrasement général »Note de bas de page 62. En conséquence, pour augmenter les chances de survie, la FAA a concentré ses efforts sur l'amélioration des normes d'inflammabilité des matériaux utilisés à l'intérieur de la cabine afin de retarder l'apparition d'un embrasement général.
Les incendies en vol étaient considérés comme des accidents rares, et la FAA a conclu que le meilleur moyen de protection contre de tels accidents était l'utilisation dans la cabine de matériaux présentant d'excellentes caractéristiques anti-feu et de résistance à l'inflammation, ainsi que l'utilisation de dispositifs de détection et d'extinction des incendies dans les « zones de feu potentielles ».
Les travaux de recherche et développement dans le domaine des incendies en vol ont mené à une amélioration de la protection contre les incendies dans des zones comme la soute et les toilettes.
1.14.1.2 Normes d’inflammabilité des matériaux - procédures d’essai
Dans le cadre du processus de certification de la FAA, les matériaux destinés à être utilisés dans la construction des aéronefs doivent satisfaire à des critères ou à des normes de rendement (essais) définis lorsqu’ils sont exposés à la chaleur ou à une flamme. Les critères des essais d’inflammabilité sont en principe conçus de façon à exposer un matériau donné à un environnement représentatif d’un incendie. Lorsque vient le moment de décider du mode et de l’ampleur des essais menés pour un matériau donné, la composition du matériau, la quantité à utiliser et son emplacement dans l’aéronef sont évalués. Les essais visent à mesurer la tendance de chaque matériau à l’inflammation et à la propagation de la flamme.
Pour la plupart des matériaux utilisés dans un fuselage pressurisé, les essais d’inflammabilité en vigueur au moment de la certification du MD-11 consistaient principalement en une variété d’essais au bec Bunsen. Un seul bec Bunsen était utilisé somme source d’inflammation. Chaque essai pouvait être effectué de différentes façons. Par exemple, l’orientation du matériau par rapport à la flamme pouvait être modifiée depuis l’horizontale jusqu’à la verticale. L’orientation était fonction des objectifs des essais, qui étaient eux-mêmes fondés sur le degré de menace perçue, l’essai de combustion verticale étant normalement le plus exigeant. En outre, la durée de l’exposition à la flamme pouvait également varier, une exposition plus longue correspondant à un essai plus rigoureux.
Pour chaque essai au bec Bunsen, des exigences ont été établies permettant de distinguer l’échec du succès pour le matériau testé. La liste ci-dessous présente les critères qui pouvaient être utilisés dans la mesure des caractéristiques d’inflammabilité d’un matériau :
- délai d’inflammation (temps requis pour l’inflammation du matériau exposé à la flamme du bec Bunsen; les essais portent habituellement sur une exposition à la flamme de 12, 15, 30 ou 60 secondes);
- durée d’incandescence (le temps moyen durant lequel le matériau reste incandescent après le retrait de la source d’inflammation);
- durée de flamme (le temps moyen durant lequel le matériau continue de produire une flamme après le retrait de la source d’inflammation);
- durée de flamme goutte à goutte (le temps moyen durant lequel un matériau qui s’égoutte continue de produire une flamme);
- longueur de combustion (la valeur moyenne de la longueur de combustion, mesurée avec une précision de 0,2 cm (0,1 po));
- vitesse de combustion (mesurée en pouces par minute).
Conformément aux exigences individuelles de l’essai au bec Bunsen, le comportement du matériau a été déterminé par la moyenne des résultats obtenus sur au moins trois éprouvettes.
Sauf pour les matériaux choisis dans les soutes de classe C, les normes d’inflammabilité les plus strictes ont été appliquées aux matériaux devant être utilisés dans les zones occupées de l’avion. Les grandes surfaces, comme les parois latérales, les plafonds, les porte-bagages et les cloisons, ont fait l’objet d’une attention particulière. Non seulement les matériaux utilisés dans ces parois ont-ils été soumis aux essais les plus rigoureux, mais ils devaient aussi être autoextinguibles, c’est-à-dire qu’ils ne devaient pas permettre la propagation de la flamme au-delà d’une certaine distance, habituellement moins de 20 cm (8 po). Les matériaux utilisés en cabine étaient également soumis à des essais de dégagement de chaleur et de fumée. Aucun essai n’était requis sur la toxicité.
Comme conséquence des exigences d’essai, des normes d’inflammabilité moins strictes ont été appliquées aux matériaux destinés à une utilisation à l’intérieur du fuselage pressurisé, mais qui se situaient hors des zones occupées. Certains matériaux ne nécessitaient que l’essai au bec Bunsen à l’horizontale. Pour que l’essai soit concluant, le matériau ne devait pas excéder une vitesse de combustion donnée. Selon l’utilisation prévue du matériau, la vitesse de combustion ne devait pas dépasser 6 ou 10 cm (2,4 ou 4 po) par minute. Aucune exigence d’autoextinguibilité ne s’appliquait à ces matériaux.
Dans les faits, les exigences des différents essais d’inflammabilité décrits ci-dessus ont conduit à une hiérarchisation de l’inflammabilité des matériaux :
- des matériaux autoextinguibles après une durée de flamme et une longueur de combustion acceptables;
- des matériaux de cabine choisis, autoextinguibles et ne dégageant pas plus qu’une quantité préétablie de chaleur et de fumée;
- des matériaux inflammables présentant une vitesse de combustion acceptable.
En conséquence, plusieurs matériaux ont été certifiés pour utilisation à bord des avions même s’ils étaient inflammables ou qu’ils brûleraient dans les limites des critères établis.
Bien des matériaux sont installés dans les avions comme parties intégrantes de systèmes, même si les essais d’inflammabilité sont normalement menés sur les matériaux eux-mêmes. Les matériaux d’isolation thermique et acoustique, par exemple, sont habituellement installés comme un système qui comprend le matériau de recouvrement, l’isolant et les matériaux connexes, comme le ruban adhésif pour joints, les attaches et les reniflards. Toutefois, par règlement, les essais du « produit fini » ne portent que sur l’isolant et le matériau de recouvrement ensemble. En conséquence, les matériaux d’isolation thermique et acoustique « tels qu’ils sont installés » peuvent présenter une propension différente à l’inflammation et à la propagation des flammes de ce qu’auraient révélé les essais (DIT1-93 (vidéoclip)).
1.14.2 Examen des données sur les accidents causés par un incendie en vol
L'examen par le BST des données sur les incendies en vol indique que les incendies non maîtrisés comme celui de l'avion du vol SR 111 sont rares. L'examen indique également que, dans les cas où un incendie en vol a conduit à un accident, le délai écoulé entre la détection de l'incendie et l'accident se situait entre 5 et 35 minutes. Ce délai laisse peu de temps pour maîtriser l'incendie. (Voir la rubrique 1.16.7.2.)
Dans le cas du vol SR 111, le délai entre le moment où une odeur a été décelée la première fois dans le poste de pilotage et celui où l'avion s'est abîmé en mer a été d'environ 21 minutes.
1.14.3 Zones désignées comme zones de feu et détection et suppression de la fumée et des incendies
L'avion du vol SR 111 répondait aux exigences réglementaires et satisfaisait aux normes de l'industrie concernant l'équipement de détection et de suppression de la fumée/des incendies. Il n'y avait aucune exigence réglementaire à l'égard de dispositifs intégrés de détection ou de suppression de la fumée/des incendies dans les zones qui ne sont pas spécifiquement désignées comme zones de feu ou zones de feu potentielles, qui sont appelées dans ce rapport zones de feu non spécifiées. Les zones de feu non spécifiées comprennent notamment le poste de pilotage, la cabine, les offices, les compartiments du matériel électrique et électronique, les espaces inoccupés, les zones situées derrière les parois latérales et les zones situées derrière les panneaux électriques.
La détection et la suppression des incendies/de la fumée dans les zones de feu non spécifiées dépend de l'intervention humaine. Toutefois, dans le MD-11 et d'autres avions de transport, la circulation de l'air dans l'avion est telle que l'air circulant de certaines zones inaccessibles vers les zones occupées est d'abord filtré par des systèmes de ventilation et de filtrage à grande efficacité qui peuvent effectivement retirer la plupart des sous-produits de combustion de petits incendies. Par conséquent, un incendie pourrait se déclarer et se propager dans un endroit inaccessible, et sa détection en serait retardée.
Certaines zones ont été désignées zones de feu parce qu'on a reconnu qu'elles contenaient à la fois des sources d'inflammation et des matériaux inflammables. Bien que des matériaux inflammables soient présents dans les zones de feu non spécifiées, le risque d'inflammation était considéré minimal. On n'avait pas jugé nécessaire de former les équipages à la lutte contre les incendies ailleurs que dans les zones intérieures de la cabine ni de concevoir les avions de façon à permettre un accès facile et rapide en cas d'incendie aux zones de feu non spécifiées qui sont dissimulées.
La lutte contre les incendies dans les zones formant la cabine se fait principalement avec des extincteurs placés dans des endroits comme le poste de pilotage et les offices. Pour les petits incendies dans des endroits accessibles, les extincteurs portatifs se sont avérés suffisants. Il n'a pas été démontré que les membres d'équipage pouvaient lutter efficacement contre un incendie en utilisant des extincteurs portatifs et qu'ils pouvaient accéder facilement aux zones moins accessibles, comme les espaces inoccupés ou les compartiments d'avionique, aussi appelés baies d'équipement électrique et électronique.
1.14.4 Temps nécessaire au diagnostic de situations où des odeurs et de la fumée sont présentes
Il peut s'écouler un certain temps avant qu'une odeur ou de la fumée se développe en concentration suffisante pour que l'équipage reconnaisse qu'il fait face à une situation anormale, ce qui retarde l'utilisation des listes de vérifications.
Lorsque la source de l'odeur ou de la fumée n'est pas évidente, les équipages sont formés pour appliquer des procédures d'évaluation grâce à des listes de vérifications qui leur permettent de procéder par élimination pour déterminer l'origine de l'odeur ou de la fumée. La plupart de ces procédures comprennent la coupure de l'alimentation électrique ou l'isolement d'un système de ventilation. Il faut un délai variable pour évaluer l'effet de chaque intervention, généralement pour voir si l'odeur ou la fumée disparaît. Pour certaines listes de vérifications, y compris celle du MD-11, cette procédure peut prendre passablement de temps. Plus il faut de temps pour exécuter une liste de vérifications conçue pour interrompre l'alimentation d'une source de fumée, plus les risques sont grands que la source de fumée gagne en intensité ou se transforme en source d'inflammation et déclenche un incendie.
1.14.5 Danger de poursuivre le vol et atterrissage d'urgence
La présence d'odeur ou de fumée donne rarement lieu à un incendie non maîtrisé en vol. Au moment de l'accident de SR 111, l'industrie de l'aviation se préoccupait de moins en moins des odeurs « mineures ». Sur la base de l'expérience, on s'attendait à ce que la source de ces odeurs soit rapidement découverte et que l'équipage puisse intervenir rapidement pour régler le problèmeNote de bas de page 63. Dans l'environnement opérationnel de l'époque, les exploitants ne disposaient pas de politiques visant à assurer que les équipages traitent toutes les situations liées à la présence d'odeur ou de fumée comme des menaces possibles d'incendies graves jusqu'à preuve du contraire.
Toutefois, lorsque la présence d'une odeur ou de fumée donne lieu à un incendie non maîtrisé en vol, l'équipage a peu de temps pour poser l'appareil en toute sécurité. En conséquence, la décision de dérouter l'avion, d'entreprendre une descente d'urgence, ou les deux, doit être prise rapidement afin qu'on puisse préparer l'avion à effectuer un atterrissage d'urgence si cela devient nécessaire. Généralement, les équipages de conduite n'étaient pas obligés de se dérouter immédiatement vers l'aéroport approprié le plus proche ni de préparer l'avion pour un atterrissage aussitôt que possible advenant un incendie non maîtrisable en vol.
1.14.6 Mesures intégrées de lutte contre les incendies
Au moment de l'accident de SR 111, l'industrie de l'aviation ne s'était pas penchée de façon systématique sur la lutte contre les incendies en vol. Généralement, les équipages n'étaient pas équipés pour reconnaître et réagir immédiatement aux signes avant-coureurs d'un incendie potentiel en vol. Un plan efficace de lutte contre les incendies doit inclure des procédures comprenant une participation optimale de l'équipage de conduite et de l'équipage de cabine à la détection, à la localisation, à l'accès, à l'évaluation et à l'extinction d'un incendie en vol d'une manière cohérente et coordonnée. Lorsque de la fumée d'une source inconnue est décelée, les pilotes doivent prendre des mesures immédiates en vue de se préparer à atterrir le plus rapidement possible tout en prenant les autres mesures appropriées de la liste de vérifications. De façon optimale, ces préparatifs engageraient les pilotes, ce qui souligne l'importance de faire participer les autres membres d'équipage à la détection et à l'extinction de l'incendie ou à l'élimination des situations pouvant mener à un incendie.
Si l'avion est dans une position géographique telle qu'un atterrissage opportun à un aéroport convenable n'est pas possible, les pilotes doivent être formés à étudier des solutions de rechange comme la préparation à un atterrissage ou à un amerrissage forcé. Dans un tel cas, la capacité de localiser l'incendie et de l'éteindre devient cruciale. Généralement, les équipages ne sont pas formés à mettre rapidement en oeuvre de telles mesures.
1.14.7 Trajets de la circulation de l'air
Les trajets de la circulation de l'air dans le MD-11 sont influencés par la configuration de l'avion. Dans la partie avant de l'avion, cette configuration comprend la position des soupapes des différentes buses d'air individuel dans le poste de pilotage et dans toute la cabine ainsi que la position des persiennes dans le bas de la porte du poste de pilotage. En outre, tous les MD-11 sont munis d'un rideau anti-fumée installé transversalement dans l'espace inoccupé au-dessus de la paroi arrière du poste de pilotage (voir Figure 3). L'inspection des MD-11 de Swissair a permis de constater que le rideau anti-fumée était scellé de façon relativement étanche dans certains avions, alors que dans d'autres avions il présentait des interstices aux extrémités ainsi qu'aux joints où passaient les gaines d'air conditionné. Ces interstices permettaient à l'air de passer à travers le rideau anti-fumée. Les trous dans le rideau anti-fumée, conçus pour permettre le passage des câbles des poignées coupe-feu, pourraient aussi permettre à la fumée de circuler entre la cabine et le poste de pilotage. On trouvera des renseignements additionnels sur la circulation de l'air à la rubrique 1.16.3.
1.14.8 Description de la zone de SR 111 endommagée par l'incendie
Afin de documenter et d'évaluer les profils de chaleur et de suie créés par l'incendie en vol, il a fallu recenser et inspecter des milliers de débris et en replacer un grand nombre dans une structure de reconstruction (voir Figure 19). La structure de reconstruction a été conçue pour correspondre aux dimensions de la partie avant d'un MD-11 et elle comprend la section située au-dessus du plancher entre les références 275 et 595 du fuselage (approximativement 8,23 m (27 pi) de longueur).
L'incendie s'est déclaré dans une zone où la numérotation de l'axe longitudinal (Y) et celle de l'axe vertical (Z) est positive. La numérotation de l'axe transversal (X) peut être positive (côté gauche) ou négative (côté droit). Pour faciliter la lecture du rapport, les positions sur l'axe des Y seront données par leurs références. (Voir la rubrique 1.6.1.3 pour une description du système des coordonnées de l'avion.)
1.14.9 Détermination des dommages causés par la chaleur
Afin de fournir une température de référence permettant d'évaluer l'intensité des dommages causés par la chaleur résultant de l'incendie, on a exposé intentionnellement des morceaux de matériaux comparables, dans des conditions contrôlées, à des températures variées durant des périodes déterminées. Les matériaux comprenaient des morceaux de gaines de conditionnement d'air, de cadres et de lisses en aluminium, généralement recouverts d'un apprêt de couleur verte résistant aux liquides. En chauffant ces matériaux, on a découvert que l'apprêt résistant aux liquides changeait graduellement de couleur lorsqu'il était exposé à des températures croissantes, rendant ainsi possible la détermination de l'importance approximative de l'exposition à la chaleur subie par les morceaux d'avion endommagés par l'incendie. Durant la création des éprouvettes de référence de température des cadres, on a découvert qu'en portant la température à une valeur comprise entre 482 et 593 °C (900 et 1 100 °F) durant 10 minutes, l'apprêt résistant aux liquides disparaissait de la surface des éprouvettes de référence, laissant le métal à nu. Les températures indiquées dans les figures du présent rapport sont soit la température d'une éprouvette représentative donnée, soit la valeur moyenne d'une plage de températures dans les cas où plus d'une éprouvette est considérée. Ces éprouvettes ont été faites en fonction d'une exposition de 10 minutes à une température constante. Il est possible qu'une exposition à des températures plus élevées, sur une plus courte période, puisse créer des dommages causés par la chaleur similaires à ceux qui ont été observés sur l'épave.
Des morceaux de matériaux non métalliques, y compris l'isolant des fils et les modules de raccordement électriques, ont aussi été exposés à la chaleur dans des conditions contrôlées afin de produire des éprouvettes de référence qui ont permis d'évaluer les températures atteintes par des matériaux similaires retirés de l'épave de l'avion.
Les dommages les plus graves causés par la chaleur à la structure métallique de l'avion ont été repérés par la présence, dans un petit nombre de zones, d'aluminium resolidifié qui avait auparavant fondu ou presque fondu. Les forces d'impact sur l'aluminium fondu ou presque fondu peuvent laisser une trace particulière, appelée « coulisse », en bordure d'une fracture. La chaleur élevée peut aussi créer un aspect particulier, en couches, semblable aux barbes d'une plume aux bords d'une fracture. Les bords sont alors dits à stries multiples.
En recensant et en plaçant les différents morceaux d'épave sur la structure de reconstruction, on a pu évaluer les dommages causés par la chaleur et l'aspect de la suie dans l'espoir de déterminer l'origine de l'incendie et son mode de propagation. L'information sur la distribution de la chaleur et de la suie, ainsi que d'autres données, comme le type, la quantité et l'emplacement des matières combustibles, a été entrée dans des modèles informatiques afin de permettre l'intégration de l'information et de faciliter la visualisation et l'évaluation des profils.
Les dommages indiquent que l'incendie s'est concentré dans les espaces situés au-dessus du revêtement du plafond du poste de pilotage et au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine. La reconstruction de l'épave a révélé d'importants dommages causés par la chaleur sur des parties de la structure de la cellule et des gaines du système de conditionnement d'air aux endroits situés entre les références 338 et 675. La plupart des dommages causés par la chaleur dans le poste de pilotage se trouvaient au-dessus du bas du tableau de distribution avionique supérieur (Z= 59) et dans la zone du plafond suspendu de la partie avant de la cabine, au-dessus de Z= 61. Les dépôts de suie observés le plus loin vers l'avant dans le poste de pilotage se trouvaient sur le compas de secours, près de la référence 313. Les dépôts de suie situés le plus loin vers l'arrière ont été découverts sur un porte-bagages situé près de la référence 1780.
1.14.10 Évaluation des dommages causés par l'incendie
1.14.10.1 Panneaux de revêtement de l'avion
La construction du sommet de l'avion comprend principalement des panneaux extérieurs de revêtement travaillant en alliage d'aluminium 2024, rivetés sur une structure de cellule en alliage d'aluminium 7075. Le revêtement de l'avion était peint à l'extérieur avec une peinture d'extérieur blanche et à l'intérieur avec un apprêt de couleur verte résistant aux liquides.
Rien n'indique que l'incendie ait traversé le revêtement à quelque endroit que ce soit du fuselage, et il n'y avait non plus aucun signe de ternissement de la peinture extérieure blanche. On a relevé des dépôts de suie de différentes épaisseurs sur la surface intérieure de certains panneaux de revêtement de l'avion dans la zone de l'incendie.
À l'avant de la référence 475, des matelas isolants étaient placés directement contre le revêtement de l'avion entre les cadres de la structure. Une couche de matelas isolants a ensuite été ajoutée par-dessus les cadres de façon à recouvrir l'ensemble de la surface. Entre les références 475 et 755, aucun matelas d'isolation n'avait été installé entre les cadres, mais uniquement par-dessus ceux-ci.
Dans certaines zones endommagées par l'incendie, l'absence de dépôts de suie sur les panneaux du revêtement semble indiquer que l'isolant avait protégé le revêtement contre l'incendie, plus particulièrement aux endroits recouverts d'une double couche de matelas isolants. À ces endroits, il semble que les matelas isolants placés entre les cadres soient demeurés en place jusqu'à ce que l'avion percute le plan d'eau.
Deux endroits présentant d'importants dépôts de suie avaient été relevés sur le revêtement de l'avion. L'un d'eux est situé entre les références 401 et 420, de X= 25 à X= –25, et l'autre, entre les références 475 et 555, de X= 35 à X= –50. Entre ces deux endroits, de la référence 420 à la référence 475 entre X= 40 et X= –30, on retrouve une zone présentant des dépôts de suie de faible et de moyenne épaisseur. Cette zone se situe au-dessus des rails et des câbles d'ouverture de la porte d'entrée avant des passagers. Une autre zone présentant des dépôts moyens de suie se situe entre les références 374 et 401, de X= 45 à X= –25. En dehors de ces zones, les dépôts de suie sur les portions récupérées du revêtement de l'avion varient de légers à nuls.
1.14.10.2 État de la partie avant de la structure de la cellule
La plupart des composants structuraux de la cellule avaient été recouverts avant assemblage d'un apprêt de couleur verte résistant aux liquides, puis de matelas isolants durant la construction de l'avion (voir Figure 4). Pour que les surfaces intérieures des cadres et des lisses soient exposées à la suie ou aux dommages causés par la chaleur, l'intégrité du matelas d'isolation devait d'abord être compromise.
Les essais d'exposition à la chaleur réalisés sur les matériaux ont montré qu'une exposition de dix minutes à des températures inférieures à 204 °C (400 °F) n'entraînait aucun ternissement de l'apprêt résistant aux liquides; en conséquence, les éléments structuraux récupérés ne présentant aucun ternissement ont été utiles pour établir la frontière entre les zones endommagées par la chaleur et celles qui ne l'étaient pas.
La structure de la cellule dans l'espace inoccupé du poste de pilotage présentant les plus graves dommages causés par la chaleur se trouve devant la référence 366, entre les lisses 15 gauche et 15 droite (voir Figure 24 et Figure 25). Les lisses semblent avoir créé une barrière dont la plus grande partie a empêché l'incendie de se propager vers l'extérieur et vers le bas. Du côté gauche, les dommages causés par la chaleur se prolongent à l'extérieur du plan de la lisse 15, sur le cadre de la référence 366, sur une distance d'environ 10 à 15 cm (4 à 6 po). Du côté droit, les dommages causés par la chaleur se prolongent à l'extérieur du plan de la lisse 15, sur les plans des cadres 10, 11 et 12 sur environ 30 cm (12 po). Cette zone est située directement derrière et au-dessus du tableau de distribution avionique supérieur.
Entre les références 366 et 401, les plus importants dommages causés par la chaleur se situent près du sommet de l'avion, entre les lisses 15 gauche et 15 droite de l'avion. La gravité des dommages causés par la chaleur augmente lorsqu'on se rapproche de la référence 401. Cette zone se trouve au-dessus du diffuseur de plafond placé au centre du poste de pilotage et immédiatement derrière la porte du poste de pilotage.
La structure de la cellule endommagée par la chaleur au point de mettre le métal à nu et située le plus loin vers l'avant se trouve à la référence 353, à X= –20, alors que celle située le plus loin vers l'arrière se trouve à la référence 535, entre X= 31 et X= –48. Entre ces deux références, on retrouve 17 autres cadres ou lisses présentant des profils similaires de dommages causés par la chaleur.
La zone présentant des dommages en stries multiples située le plus loin vers l'avant est le cadre situé à la référence 374, entre X= 17 et X= 9, alors que celle située le plus loin vers l'arrière se trouvait au cadre de la référence 515, entre X= –15 et X= –22. Dans la zone située entre ces deux cadres, 17 autres cadres ou lisses présentent des dommages en stries multiples.
Des fractures mécaniques avec des coulisses ont été récupérées en 16 endroits différents sur les cadres et les lisses, entre le cadre de la référence 374 et celui de la référence 466. Des coulisses ont également été relevées sur les rails de la porte d'entrée avant D1 des passagers, aux environs de la référence 427, entre X= –29 et X= –31.
1.14.10.3 Système de distribution de l'air – poste de pilotage et cabine
La zone de dommages causés par l'incendie au-dessus du plafond à l'avant de l'avion contenait un réseau de gaines d'air principalement en aluminium faisant partie du système de distribution d'air de l'avion (voir Figure 3, Figure 8, Figure 24, Figure 26 et Figure 27). Les gaines de cette zone ont été reconstruites à partir de petits morceaux qui ont été redressés, identifiés, appariés selon les plans de rupture et cousus ensemble au moyen de fil-frein afin de reproduire leur forme originale. La plupart des gaines en aluminium dans la zone endommagée par l'incendie avaient été peintes avec un apprêt résistant aux liquides avant l'installation. En service, elles étaient recouvertes de matelas d'isolation thermique et acoustique. Les gaines d'air reconstruites ont fourni des renseignements sur les limites de l'incendie et l'intensité de la chaleur.
Les dommages causés par la chaleur aux gaines qui assuraient l'alimentation en air du poste de pilotage vont de l'absence totale de dommages à des dommages causés par la chaleur se traduisant par la mise à nu du métal. Le métal a été mis à nu par la chaleur à peu près du dessus de l'office 1 et, vers l'avant, jusqu'au collecteur du poste de pilotage. Une portion de gaine située au-dessus de la porte du poste de pilotage, aux environs de la référence 396, X= 19 et Z= 72, présentait plusieurs dépôts d'aluminium resolidifié sur sa surface extérieure. L'alliage exact de cet aluminium n'a pu être déterminé.
Le métal avait été mis à nu par la chaleur sur les gaines situées derrière les diffuseurs d'air du poste de pilotage, depuis la référence 350 à l'arrière jusqu'à la référence 402, principalement entre les lisses 15 gauche et 15 droite de l'avion. La seule exception était la gaine de distribution du diffuseur de fenêtre, dont le métal avait été mis à nu par la chaleur le long de la référence 392 jusqu'à X= 32. Les dommages causés par la chaleur aux portions récupérées des diffuseurs variaient, une chaleur plus élevée touchant les surfaces supérieures, et une chaleur moins élevée, les surfaces inférieures voisines du revêtement du plafond du poste de pilotage.
Les dommages causés par la chaleur aux gaines verticales allaient de l'absence de dommages jusqu'à la mise à nu du métal. La portion verticale de ces gaines ne présentait aucun dommage causé par la chaleur. La première section de métal mis à nu par la chaleur sur les gaines verticales débutait à la lisse 15 droite, où le métal avait été mis à nu par la chaleur sur la section inférieure de la gaine entre X= –30 vers l'intérieur et le joint à X= –20. Cette zone se trouvait dans le voisinage de l'embout de la gaine de ventilation de l'office 2. Le métal était mis à nu par la chaleur depuis à peu près la référence 395 jusqu'à la référence 442 , entre X= 25 et X= –10. Une section de gaine moulée était installée dans cette zone, de la référence 420 jusqu'à la référence 442, entre X= 5 et X= 25. Aucune partie de cette gaine moulée n'a été retrouvée dans l'épave.
Entre les références 480 et 545 approximativement, les gaines d'air conditionné principales pour les zones 2, 3 et 4 couraient près du dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine et se dirigeaient vers le haut pour passer près du sommet de l'avion. Dans cette zone, des dommages causés par la chaleur avaient mis à nu le métal à certains endroits le long de la partie supérieure des gaines. L'apprêt appliqué sur la partie inférieure des gaines ne montrait aucun dommage causé par la chaleur. Les portions récupérées de deux gaines d'air individuel allant à peu près de la référence 555 à la référence 595, à X= 70 et X= –70, présentaient des dépôts de suie légers à moyens.
1.14.10.4 Système de recirculation d'air
La recirculation de l'air était assurée par quatre ventilateurs disposés au-dessus du plafond de la cabine aux références 685, 725, 1009 et 1109, à X= 28 (voir Figure 24). Chaque ventilateur aspirait l'air à travers un filtre et une chambre de tranquillisation situés à la référence correspondante, entre X= 40 et X= 65. Les chambres de tranquillisation, dont les pièces en aluminium étaient recouvertes de l'apprêt résistant aux liquides, ont été reconstruites.
L'apprêt des chambres de tranquillisation aux références 685 et 725 ne présentait aucun ternissement. Elles présentaient toutefois des zones localisées d'importants dépôts de suie. Les parties récupérées des éléments filtrants en fibre de verre présentaient un ternissement gris foncé d'un côté et un ternissement gris pâle de l'autre côté. Les tuyaux souples reliant les chambres de tranquillisation aux boîtiers de ventilateurs présentaient de légers dépôts de suie localisés sur les surfaces extérieures, mais aucun dépôt de suie sur les surfaces intérieures. Les portions récupérées des chambres de tranquillisation, aux références 1009 et 1109 ne présentaient ni dommages causés par la chaleur ni dépôts de suie.
La gaine de recirculation d'air n'était pas recouverte d'un isolant entre la référence 569 et le ventilateur de recirculation. Un clapet de non-retour était monté sur la gaine afin d'empêcher le retour de l'air lorsque le ventilateur n'était pas en marche. Les portions reconstruites de la gaine de recirculation d'air avaient été installées entre le ventilateur de la référence 685 et la gaine d'air conditionné de la cabine, située tout juste devant le silencieux, aux environs de la référence 555. Le métal de la gaine avait été mis à nu par la chaleur le long des sections non isolées à l'arrière de la référence 569.
L'approvisionnement en air individuel destiné à la section centrale de la partie avant de la cabine était fourni par deux gaines raccordées à une gaine de recirculation d'air à la référence 575 à X= 29 et à la référence 672 à X= 24. Les deux gaines d'approvisionnement en air individuel présentaient des dommages causés par la chaleur qui avaient mis le métal à nu.
1.14.10.5 Air individuel à gauche et à droite dans la partie avant de la cabine
L'alimentation en air individuel dans la partie avant de la cabine était assurée par un ensemble ventilateur et chambre de tranquillisation identique à l'ensemble ventilateur et chambre de tranquillisation de recirculation d'air. Le ventilateur était situé à la référence 990, à X= –24. La chambre de tranquillisation était située entre X= –40 et X= –65. Les portions récupérées de la chambre ne présentaient ni dommages causés par la chaleur ni dépôts de suie. Les gaines d'air individuel n'étaient pas isolées et elles couraient vers l'avant à partir de la référence 990 jusqu'à un embranchement en « Y » (division) à la référence 750, à Z= 91, X= –21. L'une des branches du « Y » traversait le sommet de l'avion vers le côté gauche de la cabine à X= 76, alors que l'autre allait vers le côté droit de la cabine, à X= –76. Les portions récupérées de ces gaines présentaient un dépôt de suie moyen à important sur leur face externe, sans traces de dommages causés par la chaleur. La section de gaine située le plus loin vers l'arrière qui avait été identifiée venait des références 934 à 955, à X= –22 et présentait de légers dépôts de suie sur sa face externe.
1.14.10.6 Offices avant
Les offices 1, 2 et 3 étaient installées à l'avant de la cabine de première classe. Les surfaces extérieures du dessus de ces offices étaient exposées au plafond suspendu de la partie avant de la cabine par une découpe pratiquée dans les panneaux du plafond. On a reconstruit les portions identifiées de ces offices afin d'examiner leur exposition à l'incendie.
L'office 1, installée du côté gauche de la cabine, entre la paroi arrière du poste de pilotage et la porte G1, présentait sur sa surface extérieure supérieure d'importants dépôts de suie et des dommages causés par la chaleur (voir Figure 27). D'autres éléments de l'office 1 présentaient des degrés variables de dépôts de suie, plus particulièrement dans la partie supérieure exposée à l'incendie. L'équipement électrique situé dans le compartiment supérieur avant de l'office 1 ne présentait ni dommages causés par l'incendie ni dépôts de suie. Les fils installés à l'intérieur de l'office n'avaient pas été touchés par l'incendie. Un faisceau de quatre fils passant par une ouverture d'accès au sommet de l'office était recouvert d'un emballage hélicoïdal blanc qui présentait des traces localisées de dépôts de suie. Les fils du faisceau présentaient un ternissement brun pâle.
L'office 2 était installée du côté droit de la cabine, entre la paroi arrière du poste de pilotage et la porte D1. Aucun morceau de la partie extérieure supérieure de cette office n'a pu être identifié. Des morceaux de l'office 2 provenant du plafond suspendu de la partie avant de la cabine ont été identifiés et ils ne présentaient ni dommages causés par la chaleur ni dépôts de suie.
L'office 3 était installée en position centrale avant dans l'avion, immédiatement à l'arrière des portes G1 et D1, entre les références 470 et 508. Il y avait des zones localisées de légers dépôts de suie sur des morceaux situés sur le dessus ou près du dessus de l'office. Les portions de fils installés sur la surface supérieure de l'office présentaient certains dépôts de suie, alors que les fils situés à l'intérieur de l'office n'en présentaient pas. Les fils associés au panneau de coupure de l'alimentation de l'office 3 présentaient des dépôts de suie allant de traces à une accumulation importante, et ils présentaient des dommages causés par la chaleur.
1.14.10.6.1 Système de ventilation des offices avant
Les gaines de ventilation des offices avant comprenaient une gaine unique en aluminium, non isolée, avec des embranchements vers les trois offices avant (voir Figure 3 et Figure 8). L'extrémité amont de la gaine de ventilation était située au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine, au-dessus de l'office 3. La gaine courait horizontalement vers l'avant au-dessus des gaines d'air conditionné jusqu'à l'office 2, avant de continuer latéralement à travers le fuselage jusqu'à un point situé au-dessus de la partie supérieure de l'office 1. La gaine de ventilation descendait ensuite verticalement le long de la paroi gauche du fuselage, à l'extérieur de l'office 1, vers une zone située sous le plancher de la cabine. La gaine continuait ensuite vers l'arrière sous le plancher de la cabine, du côté gauche de l'avion, pour se terminer à la vanne de régulation échappement cabine située juste à l'avant de l'emplanture de l'aile gauche. Le système de ventilation de l'office avant utilisait une pompe venturi pneumatique commandée par l'air de prélèvement venant du circuit pneumatique 1. La pompe venturi était installée à peu près à la référence 872 pour fournir une seule source constante de dépression aux offices avant, tant en vol qu'au sol. Cette installation fournissait à la pompe venturi un débit constant compris entre 200 et 400 pieds par minute (pi/min) qui était évacué vers l'extérieur par la vanne de régulation échappement située à la référence 920.
De l'extrémité amont de la gaine de ventilation des offices avant, une gaine secondaire partait verticalement vers le bas pour se brancher sur la grille d'admission d'air située près du dessus de l'office 3. Une gaine secondaire verticale similaire allait de la gaine de ventilation vers la partie supérieure de l'office 2; toutefois, cette gaine secondaire n'était pas reliée à l'office 2 et elle était fermée au moyen d'un embout en élastomère de silicone (voir Figure 4 et Figure 6). La gaine de ventilation n'était pas branchée à l'office 2 parce que celle-ci n'était pas alimentée en électricité et qu'aucun four n'y était installéNote de bas de page 64. Une chambre de tranquillisation d'admission d'air était montée au plafond, dans le couloir à l'extérieur du poste de pilotage, près de l'extrémité intérieure de l'office 1. La chambre de tranquillisation d'admission d'air était reliée à la gaine de ventilation des offices avant par un tuyau souple de 8 cm (3 po) de diamètre placé à travers le plafond de l'office 1. Ce tuyau souple était relié au segment vertical de la gaine de ventilation des offices avant, entre la paroi gauche du fuselage et la face extérieure de l'office 1. Un deuxième tuyau souple, d'un diamètre de 5 cm (2 po), partait de la face extérieure de l'office 1 et il se raccordait à la partie verticale de la gaine de ventilation des offices à la référence 398, X= 48, Z= 60, tout juste sous le tuyau souple de 8 cm (3 po). Ce second tuyau souple aspirait l'air (les odeurs) de l'office 1 vers la gaine de ventilation.
Deux segments de la gaine de ventilation des offices avant ont été identifiés; les deux se situaient dans la section verticale de la gaine de ventilation qui courait entre la paroi gauche du fuselage et la face extérieure de l'office 1. Le premier segment était situé au niveau du plancher de la cabine (Z= –18); le second segment était situé sous le point où les tuyaux souples de 8 cm et de 5 cm (3 po et 2 po) étaient reliés à la gaine de ventilation (Z= 11 à Z= 42). Les deux segments de gaine situés au-dessus du niveau du plancher avaient été endommagés par une chaleur intense. Les segments identifiés du système de ventilation des offices provenant d'en dessous du plancher de la cabine, entre les références 396 et 457, montraient des zones localisées de dommages moyens causés par la chaleur. Les portions identifiées de la gaine de ventilation située sous le plancher et à l'arrière de la référence 457 ne montraient aucun dommage causé par la chaleur.
1.14.10.7 Toilettes avant
Le module des toilettes A était installé du côté gauche de la partie avant de la cabine de l'avion, approximativement entre les références 465 et 495, immédiatement derrière la porte G1. Une partie du dessus des toilettes A a été récupéré, et il portait encore un faisceau de fils (voir Figure 27). Des dépôts de suie localisés ont été relevés sur les surfaces de l'espace inoccupé et sur celles des parties récupéréres faisant face à la cabine. Le faisceau de fils attaché était également recouvert de suie. Quelques autres morceaux seulement provenant de ce module de toilettes ont été récupérés et identifiés. Ceux qui ont été identifiés ne portaient aucune trace de dommages causés par la chaleur.
Le module des toilettes B était installé du côté droit de la partie avant de la cabine de l'avion, approximativement entre les références 460 et 496, immédiatement derrière la porte D1. Trois morceaux de ce module seulement ont été identifiés. Il y avait des dépôts de suie sur le côté de ces morceaux faisant face à la cabine, lesquels provenaient de la partie supérieure du module. L'affichette des toilettes B présentait des dépôts de suie.
Il n'y avait pas de signes de dommages causés par la chaleur ni d'arc électrique sur aucun des fils associés aux toilettes avant. De légers dépôts de suie ont été relevés sur certains fils. Le panneau de contrôle des détecteurs de fumée pour les deux toilettes, situé par-dessus le plafond suspendu de la partie avant de la cabine, au-dessus de l'office 1, présentait des dépôts de suie et des dommages causés par la chaleur.
Rien n'indique que l'un ou l'autre des détecteurs de fumée se soit déclenché avant l'arrêt des enregistreurs de bord. L'information disponible indique que l'incendie ne s'est pas déclaré dans une des toilettes avant.
1.14.10.8 Matériaux du poste de pilotage et de la cabine
On a examiné des matériaux provenant de la cabine à la recherche de dommages causés par l'incendie. Un des coussins de sièges de la classe affaires, récupéré au complet avec sa housse, présentait en plusieurs endroits des marques caractéristiques de fusion et des ternissures assimilées à la chute de matières brûlantes. En aucun endroit le matériau en fusion ne semble avoir pénétré le coussin sous-jacent. Des sections de rideaux en tissu utilisés dans la cabine présentaient des dommages causés par une exposition à la chaleur (ternissement, raideur ou rugosité ou les deux). On a également relevé des endroits où des matériaux fondus et resolidifiés adhéraient au tissu des rideaux, y compris un matelas isolant recouvert de PET métallisé, un matériau bleu-vert qui pourrait provenir d'un raccordement électrique modulaire et un matériau dont les caractéristiques correspondent à un alliage d'aluminium 7075. Ces rideaux étaient fort probablement installés dans l'allée, entre les toilettes A et B et l'office 3.
Des couvertures complètes et des morceaux de couvertures ont été récupérés. Lorsqu'elles ne sont pas utilisées, ces couvertures sont rangées dans les porte-bagages de la cabine. Certaines couvertures présentaient de légers dommages causés par la chaleur.
Des zones localisées du plancher des offices avant et de la moquette de la partie avant de la cabine, près des toilettes avant, présentaient des dommages causés par la chaleur correspondant à la chute de matières brûlantes. Une quantité minuscule d'alliage d'aluminium qui semble avoir fondu et s'être resolidifié a été trouvée sur un morceau du plancher de l'office avant installé le long d'une paroi. Le type exact de l'alliage n'a pu être déterminé.
Une portion de la moquette de la cabine présentait de nombreux petits trous à travers les fibres et la sous-couche de la moquette, qui semblaient avoir été causés par la chute de matières brûlantes. Cette section s'étendait de la zone située approximativement entre les références 472 et 505, entre X= −26 et X= −46, la concentration la plus élevée se trouvant à peu près entre les références 482 et 493, ce qui correspond à l'allée située entre l'office 3 et les toilettes B.
Dans le poste de pilotage, on a relevé de nombreux endroits présentant des dommages localisés causés par la chaleur. L'analyse microscopique des fibres a confirmé que le mouchetage avait été causé par l'égouttement de matières en feu. Les tentatives de retrouver le matériau afin d'en déterminer la nature ont été infructueuses, car il semble qu'il ait été délogé au moment de l'impact. La source de la plus grande partie des dommages causés par l'égouttement de matières en feu est fort probablement le matériau de recouvrement du plafond du poste de pilotage, qui a fondu sous l'effet de la chaleur et s'est égoutté sur le tapis (voir la rubrique 1.14.10.10).
Plusieurs dépôts ont été retrouvés sur le siège de l'observateur de droite. De faibles quantités d'aluminium 2024 resolidifié se sont déposées sur la ceinture de sécurité et sur le côté droit du siège. Lorsque le métal solidifié a été retiré de la ceinture de sécurité pour analyse, il est resté un dépôt blanc. D'autres dépôts blancs ont été observés ailleurs sur la même ceinture de sécurité. L'analyse des traces de ces dépôts a révélé qu'ils étaient principalement constitués d'oxyde d'aluminium, et l'analyse microscopique des fibres a révélé des signes de dommages causés par la chaleur (fusion) à chaque endroit. On a déterminé que les dépôts blancs étaient les restants d'autres endroits où l'aluminium resolidifié s'était également déposé. Il n'a pas été possible d'établir le type d'alliage d'aluminium à partir des restants. Une faible quantité d'alliage d'aluminium 6061 resolidifié a été trouvée à l'arrière de la base du siège de l'observateur de droite.
Deux livrets de listes de vérifications ont été récupérés dans les débris de l'avion, et tous deux présentaient des dommages causés par la chaleur. Dans ces listes de vérifications, chaque double-page est insérée dans une jaquette plastifiée, et les pages sont reliées le long d'un bord. Chaque jaquette peut être retournée le long de la reliure et sous le livret, de façon à ce qu'une page soit visible d'un côté, et la page suivante, de l'autre côté.
L'un des livrets présentait des dommages causés par la chaleur plus importants que l'autre. Une certain nombre des bordures des jaquettes en plastique avait partiellement fondu et fusionné, figeant le livret ouvert aux pages 10 et 11. La page 10 était la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue, et la page 11, celle de l'élimination de la fumée ou des émanations. La page 11 présentait des dommages causés par la chaleur plus importants que ceux de la page 10. Le profil de chaleur semblait aller de la surface extérieure vers l'intérieur, ce qui donne à penser que le livret se trouvait en position horizontale, la page 11 vers le haut, au moment où il a été chauffé. Sur le deuxième livret des listes de vérifications, une petite marque de brûlure se trouvait sur le bord supérieur de la page 1 (Index) et se prolongeait jusqu'a la page 4 (ENG2 A-ICE DUCT). Deux marques correspondantes causées par la chaleur ont été retrouvées à la page 2 (INTENTIONALLY LEFT BLANK) et à la page 3 (ENGINE - FIRE).
1.14.10.9 Panneaux de plafond de la cabine
Des panneaux de plafond avaient utilisés pour séparer la cabine de l'espace inoccupé sur toute sa longueur. Les panneaux avait été suspendus à la structure du fuselage à l'aide de tiges de suspension, de montants et d'attaches. Tous les panneaux étaient constitués d'un reouvrement de résine phénolique ou de fibre de verre, collé sur un nid d'abeille en fibres méta-aramide. Certains panneaux portaient un recouvrement encollé de poly(fluorure de vinyle) (PVF) blanc sur une face, certains sur les deux faces. Un laminé décoratif en PVF était collé sur la face des panneaux visibles depuis la cabine.
Trois types de panneau de plafond avaient été utilisés pour construire le plafond de la cabine et quatre autres pour le plafond suspendu de la partie avant de la cabine. De ces quatre types, les panneaux de type CD 207 avaient été utilisés dans la construction d'une partie des porte-bagages et des deux panneaux de plafond coulissants aux portes avant. Différents types de panneau de construction similaire avaient été utilisés pour fabriquer les panneaux de recouvrement, le plafond suspendu de la partie avant de la cabine, les panneaux de linteaux et les panneaux de raccordement.
On a récupéré et examiné des morceaux de différents panneaux pour y vérifier la présence de dépôts de suie et de dommages causés par la chaleur. Les panneaux du plafond ayant été brisés en un grand nombre de fragments par les forces de l'impact, leur emplacement exact dans l'avion n'a pu être établi avec certitude. Parmi les morceaux récupérés, beaucoup présentaient des signes de dommages causés par la chaleur, des dépôts de suie ou les deux. Les dommages allaient d'un ternissement à une carbonisation importante du coeur en nid d'abeille. La plupart des dommages touchaient la face située du côté de l'espace inoccupé, mais certains panneaux présentaient également des dommages sur la face située du côté de la cabine. Ces indices pourraient indiquer que l'incendie a traversé le plafond en certains endroits.
Le type de certains panneaux a pu être identifié d'après leur construction. On a déterminé qu'un morceau de panneau CD 207 provenait soit de l'un des panneaux des portes coulissantes avant dans la zone du plafond suspendu de la partie avant de la cabine, soit d'un panneau de porte-bagages de la cabine de première classe. Les dommages constatés sur ce morceau correspondaient à une exposition à une température de 593 °C (1 100 °F) durant 10 minutes. Quatre des morceaux récupérés ont été identifiés comme étant des parties de panneaux de raccordement dans lesquels étaient installés les plafonniers d'allée et les lampes d'éclairage d'urgence. Ces segments présentaient des zones de ternissement brun foncé en forme de demi-lune, qui correspondaient à l'endroit où étaient installés les plafonniers d'allée et les lampes d'éclairage d'urgence. Quatre autres morceaux récupérés ont été identifiés comme des segments de porte-bagages. Trois de ces morceaux ne présentaient aucune trace de dommages causés par la chaleur. Le quatrième morceau, identifié comme un morceau de gaine d'air de porte-bagages, présentait un profil de dépôt de suie similaire à celui récupéré sur un panneau voisin.
1.14.10.10 Revêtement de plafond et plafonnier du poste de pilotage
Les revêtements de plafond du poste de pilotage, faits d'un matériau thermoformableNote de bas de page 65 gris pâle en feuilles à faible dégagement de chaleur, servent de fini intérieur dans le poste de pilotage. Le matériau est thermoformable à basse température, c'est-à-dire qu'il fond à une température relativement basse. Il commence à amollir et à pendre entre 246 et 274 °C (475 à 525 °F). Les cinq sections qui forment le revêtement de plafond du poste de pilotage sont attachées à la structure de l'avion par des vis et des écrous d'ancrage.
Le revêtement de plafond est installé immédiatement derrière le tableau de distribution supérieur (voir Figure 9 et Figure 10). Le revêtement comprend le plafonnier du poste de pilotage et des ouvertures pour les diffuseurs du système de conditionnement d'air et les commandes des diffuseurs. Certains composants du plafonnier présentaient de légers dépôts de suie; les parties identifiées du plafonnier présentaient quelques dommages causés par la chaleur. Seuls un petit nombre de morceaux du revêtement central du plafond ont été identifiés. Des dommages causés par la chaleur sur la surface orientée vers le fuselage étaient signalés par un ternissement variant de brun foncé à noir. La surface des morceaux faisant face au poste de pilotage présentait des dommages localisés causés par la chaleur, révélés par un ternissement de couleur taupe. La chaleur avait également causé un amincissement, une striction, une fusion de surface et un plissement du matériau. Les surfaces présentaient par endroits des dépôts de suie légers à moyens, des plissements, des bulles et une fusion des bordures.
Les parties gauche et centrale gauche du revêtement recouvraient la zone circonscrite par le bord gauche du boîtier du tableau de commutation supérieur, vers l'arrière jusqu'au panneau de plafond et suivait le plafonnier et la sortie du diffuseur gauche vers l'arrière jusqu'à la penderie du poste de pilotage. Le bord inférieur des revêtements suit le haut des fenêtres coulissantes et arrière jusqu'à la penderie du poste de pilotage. Le revêtement de gauche présente des découpes qui permettent le passage de deux curseurs de commande d'air conditionné, de l'approvisionnement en air individuel, de la liseuse de carte du commandant de bord et du boîtier de commande du haut-parleur, de la liseuse de carte de l'observateur, des interrupteurs marche/arrêt et d'un gradateur, des panneaux du système audio et de la prise du microphone ainsi que de trois panneaux de visite. La découpe pour la liseuse de carte du commandant de bord et le boîtier de commande du haut-parleur se trouve dans le coin avant inférieur du revêtement de gauche. Ce revêtement comprend aussi la porte du compartiment de la corde d'évacuation, située à côté du curseur de commande d'air conditionné du commandant de bord. Le revêtement central gauche présente des découpes pour le panneau du compartiment des ampoules de rechange et l'approvisionnement en air individuel.
La plus grande partie du revêtement de gauche a pu être identifiée et reconstruite. La surface du revêtement faisant face au fuselage présentait d'importants dépôts de suie sur presque toute sa surface, en plus de dommages causés par la chaleur. Ces dommages présentaient un ternissement variant du brun foncé au noir, accompagné de petits plis localisés et d'une fusion superficielle. La surface orientée vers le poste de pilotage présentait des dépôts de suie moyens à élevés de l'avant à l'arrière du revêtement avec, par endroits, un plissement de la surface causé par la chaleur. Le support du microphone/casque d'écoute, placé environ au tiers du revêtement à partir de l'avant, présentait une accumulation moyenne de suie en surface. Un morceau de la porte du compartiment de la corde d'évacuation ne présentait pas de dommages causés par la chaleur. Le seul morceau du revêtement central gauche qui a été identifié était une petite partie du panneau du compartiment des ampoules de rechange qui était restée fixée à sa charnière. La surface orientée vers le poste de pilotage présentait des traces de fusion et des bulles ainsi qu'un ternissement brun foncé et noir. La surface orientée vers l'intérieur du compartiment des ampoules de rechange présentait de légers dépôts de suie localisés.
Les revêtements droit et arrière droit couvrent la zone située entre le bord droit du boîtier du tableau de commutation supérieur, le tableau de distribution avionique supérieur, le tableau de distribution avionique inférieur et le moniteur vidéo du poste de pilotage. Le bord inférieur des revêtements suit le dessus des fenêtres coulissantes et arrière pour revenir vers le moniteur vidéo. Le revêtement droit est pourvu de découpes pour le curseur de commande d'air conditionné, l'approvisionnement en air individuel, la liseuse de carte du copilote et le boîtier de commande du haut-parleur ainsi que le panneau du système audio et de la prise du microphone. La découpe pour la liseuse de carte du copilote et le boîtier de commande du haut-parleur est située dans le coin avant inférieur du revêtement droit. Ce revêtement comprend aussi la porte du compartiment pour la corde d'évacuation située à côté du curseur de commande d'air conditionné du copilote.
La plus grande partie des revêtements droits et arrière droits a été identifiée et reconstruite. La surface du revêtement droit orientée vers le fuselage présentait de légers dépôts de suie ainsi que plusieurs endroits endommagés par la chaleur. Les dommages causés par la chaleur variaient d'un ternissement brun pâle à brun foncé près du support de microphone, à un ternissement noir avec des cloques et une fusion superficielle près du tableau de distribution supérieur. La surface faisant face au poste de pilotage présentait de légers dépôts de suie localisés. Le ternissement dû à la chaleur variait de gris foncé à gris foncé avec des nuances taupe pâle localisées. La surface présentait de légères cloques. Le revêtement arrière droit ne présentait que de légers dépôts de suie, sans dommages causés par la chaleur.
1.14.10.11 Tableau de distribution avionique
Le tableau de distribution avionique comprend un panneau inférieur et un panneau supérieur, situés au-dessus de la table de travail du poste de l'observateur de droite (voir Figure 12). La partie principale de chaque panneau était fabriquée en aluminium. Le panneau de distribution avionique supérieur compte cinq rangées de disjoncteurs désignées alphabétiquement de A à E. Chaque disjoncteur était numéroté de façon séquentielle, à partir de la gauche, et identifié en fonction de la rangée dans laquelle il était installé (p. ex., disjoncteur D1). Le panneau de distribution avionique inférieur ne portait qu'une rangée de disjoncteurs, désignés par la lettre F. La face avant (intérieure) des panneaux de distribution avionique inférieur et supérieur était peinte en gris, et la face arrière (extérieure) n'était pas peinte.
Près de 75 % des panneaux inférieur et supérieur du tableau de distribution avionique ont pu être identifiés, reconstruits et placés dans la structure de reconstruction (voir Figure 27 et Figure 28). Les parties les plus à l'avant des tableaux de distribution supérieur et inférieur n'ont pas été récupérées. Le panneau supérieur avait été exposé à la chaleur par l'arrière et par l'avant. Le panneau inférieur ne présentait pas de dommages causés par la chaleur. Le type de dommages causés par la chaleur sur la face avant du panneau supérieur était évident selon le changement de couleur de la peinture. Des parties du panneau présentaient des dommages correspondant aux éprouvettes de référence de température exposées à des températures comprises entre 430 et 620 °C (800 à 1 150 °F) pendant 10 minutesNote de bas de page 66. Un ternissement et des dommages causés par la chaleur étaient également présents sur la face arrière de ce panneau sur certains composants électriques et sur certaines surfaces métalliques à nu. Bien qu'il y eut des similitudes à certains endroits, les dommages présents sur la face arrière étaient moins graves que sur la face avant, surtout sur les morceaux situés près de l'avant du panneau où la face avant présentait beaucoup plus de dommages causés par la chaleur que la face arrière. Il y avait des dépôts de suie sur la bague indicatrice blanche de certains disjoncteurs; la suie ne pouvait s'y être déposée que si les disjoncteurs s'étaient déclenchés et qu'ils avaient par la suite été exposés à des sous-produits de combustion. On trouvera plus de détails sur les disjoncteurs du tableau de distribution avionique et les fils installés à proximité dans d'autres sections du présent rapport.
On a remarqué que les dommages causés par la chaleur à certaines parties du panneau supérieur du tableau de distribution avionique correspondaient aux dommages constatés sur les éprouvettes de référence de température exposées à des températures de 427 à 620 °C (800 à 1 150 °F) durant 10 minutesNote de bas de page 67.
1.14.10.12 Tableau de distribution supérieur
Le tableau de distribution supérieur est situé juste à l'arrière du tableau de commutation supérieur, au plafond du poste de pilotage, au-dessus des sièges du commandant de bord et du copilote et derrière eux (voir Figure 12). Le tableau porte sept rangées de disjoncteurs désignées alphabétiquement de A à G. Comme dans le cas du tableau de distribution avionique, chaque disjoncteur est numéroté de façon séquentielle à partir de la gauche, et identifié en fonction de la rangée dans laquelle il se trouve (p. ex., disjoncteur A1). Une plaquette lumineuse en polycarbonate à éclairage intégré avait été installée sur chaque rangée de disjoncteurs.
La plus grande partie du tableau de distribution a été identifiée, reconstruite et placée dans la structure de reconstruction (voir Figure 27 et Figure 29). Du côté faisant face au poste de pilotage, environ les deux tiers de la surface de la plaquette lumineuse en polycarbonate de la rangée A avaient fondu et la plaquette s'était repliée sur elle-même, formant une masse de matériau fondu près du coin supérieur droit du panneau. Une partie de l'extrémité droite de la plaquette lumineuse de la rangée B avait également fondu et elle s'était intégrée à cette masse. Le coin supérieur droit du tableau où la peinture manquait présentait des dommages causés par la chaleur qui correspondaient aux éprouvettes de référence de température qui avaient été exposées à des températures comprises entre 427 et 621 °C (800 à 1 150 °F) durant 10 minutes, et l'endroit où la peinture était ternie présentait des dommages causés par la chaleur (correspondant à des éprouvettes de référence de température qui avaient été exposées à des températures comprises entre 343 et 398 °C (650 à 750 °F) durant 10 minutes). La surface arrière du tableau présentait également des signes localisés de dommages causés par une forte chaleur dans le coin supérieur droit.
Il y avait des dépôts de suie sur la bague indicatrice blanche de certains disjoncteurs; la suie ne pouvait s'y être déposée que si les disjoncteurs s'étaient déclenchés et qu'ils avaient par la suite été exposés à la fumée.
1.14.10.13 Profils des dommages causés par la chaleur et l’incendie – fils et câbles de l’avion
Tous les segments de fil identifiés comme provenant de la section de l’avion endommagée par la chaleur ont été comparés à des fils de référence avant d’être placés dans la maquette de reconstruction. Les fils de référence ont été produits par exposition à des températures définies durant des périodes définies dans un environnement de chaleur contrôlée. Lorsque les fils de référence ont été chauffés, on a remarqué que les fils recouverts d’ETFE étaient plus sensibles à la chaleur que les fils recouverts de polyimide. Cette constatation était compatible avec les dommages observés sur les segments de fils récupérés. L’examen des segments de fils de la zone endommagée par la chaleur a aidé à définir le profil de chaleur et les limites de l’incendie.
Certains fils provenant de la zone d’incendie ne présentaient pas de dommages causés par la chaleur. D’autres fils présentaient une variété de dommages, allant de légers dépôts de suie à la fusion et à la destruction complète de l’isolant des fils.
Les fils acheminés entre le panneau supérieur du tableau de distribution avionique et le tableau de coupure de l’alimentation avionique présentaient des dépôts de suie localisés et certains dommages légers causés par la chaleur. Les fils d’alimentation du bus acheminés entre le panneau supérieur du tableau de distribution avionique et le panneau supérieur du tableau de distribution principal présentaient des dépôts de suie localisés et certains dommages légers causés par la chaleur près du panneau supérieur du tableau de distribution avionique. Les fils recouverts d’ETFE acheminés au-dessus de cette zone, plus près de la structure de l’avion, présentaient des dommages causés par la chaleur plus prononcés.
Les fils de raccordement du RDB de calibre 8 AWG recouverts de PTFE provenant de l’extrémité avant du panneau inférieur du tableau de distribution avionique n’ont pas été endommagés par la chaleur. Les fils recouverts de polyimide dans le même endroit, près du panneau inférieur du tableau de distribution avionique, présentaient des dépôts de suie, mais pas de dommages causés par la chaleur. Selon l’apparence de la zone avoisinante, on a considéré que les fils de calibre 8 AWG et 12 AWG liés au RDB qui étaient acheminés de l’extrémité arrière du panneau inférieur du tableau de distribution avionique vers le haut en direction de la base du tableau de coupure de l’alimentation avionique étaient probablement peu endommagés par la chaleur. Les parties de ces fils qui étaient situées près de la structure du plafond, y compris où les fils de calibre 12 AWG du RDB pénétraient dans le guide-fils, étaient endommagées par la chaleur.
1.14.11 Sources d'inflammation possibles
1.14.11.1 Généralités
La structure de reconstruction a permis de délimiter les dommages causés par l'incendie, lesquels se situaient principalement dans l'espace inoccupé du poste de pilotage et le plafond suspendu de la partie avant de la cabine. Dans la zone de feu principale, la source d'inflammation la plus courante était l'électricité. De nombreux câbles et fils électriques se trouvaient dans cette zone, en provenance ou en direction du compartiment avionique, des tableaux de distribution du poste de pilotage ou des tableaux de commutation supérieurs. On y retrouvait également de nombreux autres composants électriques, comme des blocs modulaires, des goujons de mise à la masse, des appareils d'éclairage, des batteries, deux offices alimentées à l'électricité, deux toilettes et des mécanismes de portes actionnés à l'électricité. D'autres mécanismes d'inflammation ont été examinés, comme des réactions chimiques, des procédés thermiques (conduction, convection, rayonnement) et des activités mécaniques (frottement), mais aucun n'a été trouvé. Seules les sources d'inflammation associées à l'énergie électrique ont été jugées pertinentes.
Chacun des 20 segments de câble ou de fil présentant des dommages causés par un arc électrique a fait l'objet d'une évaluation quant à la possibilité qu'il ait pu être une source d'inflammation. Plusieurs critères ont été pris en compte dans cette évaluation, comme l'information du CVR sur la situation dans le poste de pilotage et la cabine, le délai entre le moment où l'odeur a été décelée pour la première fois et le moment où l'incendie a commencé à avoir une incidence sur les systèmes de bord, la présence, la proximité et la quantité de matériaux inflammables, le profil des dommages causés par l'incendie et les profils de circulation d'air dans l'avion, établis à partir d'essais et de recherches en vol.
Initialement, l'odeur et la fumée n'avaient été perçues que dans le poste de pilotage, et les pilotes avaient estimé qu'elles provenaient du système de conditionnement d'air. Les gestes posés par les pilotes et les profils de circulation d'air dans le poste de pilotage tendent à indiquer que la fumée était le plus visible à la paroi arrière du poste de pilotage ou près de celle-ci. (Pour plus de détails sur la circulation d'air, voir la rubrique 1.16.3.)
1.14.11.2 Position des segments de câbles d'alimentation du RDB présentant des signes d'arc électrique
Lorsque les quatre segments de câbles du bloc d'alimentation du RDB qui présentaient une zone de cuivre fondu ont été placés les uns à côté des autres, les similitudes observées ont permis de croire qu'il s'agissait de deux paires correspondantes de segments de câble (voir Figure 22 et la rubrique 1.12.3.6). Les pièces produites 1-3791 et 1-3793 étaient d'une longueur et d'une couleur presque identiques aux pièces 1-3790 et 1-3792.
Une fois les deux paires appariées, des différences notables les distinguaient. La paire 1-3790/1-3792 était plus courte d'environ 18 cm (7 po) que la paire 1-3791/1-3793; à partir d'un point situé à environ 61 cm (24 po) de l'extrémité redressée, les deux câbles de la paire 1-3790/1-3792 présentaient une longueur quasi identique de 30 cm (12 po) le long duquel le revêtement en étain était complètement absent. Sur le dernier segment de 5 cm (2 po), le revêtement en étain était à nouveau présent. La zone de 30 cm (12 po) dans laquelle le revêtement d'étain manquait résultait d'une exposition à une température localement plus élevée que celle qui prévalait dans les zones où l'étamage était encore intact.
La pièce produite 1-3790 présentait une zone de fusion du cuivre sur un seul fil à compter d'un point situé à 11 cm (4,3 po) de son extrémité, et une autre sur les trois fils entre 62 et 77 cm (24,3 et 30,5 po) de leurs extrémités respectives. La pièce 1-3792 présentait une zone de cuivre fondu sur un fil à 22 cm (8,8 po) et sur un deuxième fil en deux endroits : à 22,6 cm (8,9 po) et à 23,4 cm (9,2 po) de son extrémité. Le second fil était coupé entre les deux zones de fusion du cuivre.
Le câble 1-3791 présentait une fusion du cuivre sur un fil à 9 cm (3,7 po) de son extrémité et à 62 cm (24,5 po). Un deuxième fil présentait également une fusion du cuivre à 65 cm (25,8 po). Le câble 1-3793 présentait une fusion du cuivre sur un seul fil dans une zone située entre 64 et 67 cm (25 et 26,5 po) de son extrémité.
On n'a pu co-localiser les deux paires de segments de câble en les alignant sur l'une ou l'autre de leurs extrémités parce qu'on ne retrouve pas sur la paire 1-3791/1-3793 la zone d'étamage manquant de la paire 1-3790/1-3792. Comme les câbles avaient été installés en faisceaux voisins, il n'est pas possible que deux câbles seulement sur les quatre aient été touchés par une hausse localisée de la température.
En se fondant sur la présence de résidus de FEP emprisonnés dans les torons de fil, on a supposé que les paires de câbles d'alimentation se trouvaient dans le guide-fils situé au-dessus de l'office 2 ou très près de celui-ci. Les segments récupérés des chemins de câbles FBC et FDC, placés parallèlement au guide-fils dans la zone située au-dessus de l'office 2, ont été localisés hors de tout doute dans l'avion à la position où se trouve le collier jumelé, à peu près à la référence 427. On a constaté qu'à partir d'un point situé à environ 30 cm (12 po) à l'arrière et à l'avant du collier le long du chemin de câbles FBC, il y avait une zone qui semblait avoir été soumise à une température plus élevée que les autres fils du faisceau, tout comme la zone de la paire de câbles 1-3790/1-3792 où manque l'étamage. Des deux côtés du double collier de retenue, le film isolant en polyimide restant sur les fils FBC et FDC est noirci d'une façon similaire aux échantillons d'essai qui avaient été exposés à une température d'environ 500 °C (932 °F) durant 10 minutes.
Un morceau de 38 cm (15 po) de câble d'alimentation du RDB présentant une segment de 30 cm (12 po) sur lequel l'étain manquait sur les trois fils a été récupéré et désigné pièce produite 1-4687. On a présumé que ce segment de câble provenait de la zone située près du collier de retenue FBC/FDC et qu'il était la suite de la pièce produite 1-3791 ou de la pièce 1-3793. Le segment de la pièce 1-4687où se trouvait la transition entre la présence et l'absence d'étain a été aligné avec l'extrémité arrière du guide-fils, de façon à correspondre avec le début de l'absence d'étain sur la paire de câbles 1-3790/1-3792. Lorsque les trois câbles ont été placés de façon à ce que les zones où manquait l'étain soient alignées, on a remarqué que les fils individuels dans la zone où manquait l'étain présentaient une fragilisation similaire. En outre, deux des segments de câble, les pièces produites 1-3790 et 1-4687, présentaient des torsions quasi identiques dans des fils individuels voisins l'un de l'autre dans cet alignement. La couleur de l'extrémité effilochée (arrière) de la pièce produite 1-3791 se rapprochait étroitement de celle de l'extrémité de la pièce produite 1-4687 où l'étain était présent. Les extrémités brisées étaient de longueur similaire, donnant à penser qu'elles auraient pu être reliées à un certain moment. Sur la foi de cette similitude, on a présumé que la pièce 1-4687 était le prolongement de la pièce 1-3791. Lorsqu'on aligne la zone d'absence d'étain de la paire de câbles 1-3790/1-3792 et 1-4687 d'un côté ou de l'autre du collier de retenue et qu'on tient compte de l'acheminement connu des câbles à leur sortie du guide-fils, le début de la zone d'absence d'étain se trouve à peu près à l'arrière du guide-fils médian ou extérieur, ou peut-être tout juste à l'intérieur du guide-fils, à moins de 2,5 cm (1 po).
Lorsqu'on aligne les câbles dans le guide-fils extérieur en se servant des mêmes critères que ci-dessus pour localiser la zone d'étain manquant, le seul amorçage d'arc sur 1-3790 se trouvait près de la référence 410, et le reste des zones de fusion (arrière) du cuivre sur les trois fils de la pièce produite 1-3790 se trouvait à environ 25 cm (10 po) le long des fils, derrière la référence 420. Les zones de fusion du cuivre de deux des fils de la pièce produite 1-3791 se trouvaient alors à côté des zones de fusion du cuivre de la pièce produite 1-3793, près de la référence 401. La seule zone de fusion du cuivre à l'extrémité avant de la pièce produite 1-3791 se retrouvait aussi à environ 8 cm (3 po) le long du fil, devant le support situé à la référence 383. Figure 30 montre cette configuration.
Lorsqu'on aligne les câbles dans le guide-fils médian, le seul point de fusion du cuivre (avant) sur la pièce produite 1-3790 se trouvait près de la référence 407, à l'intérieur du guide-fils, et le reste des zones de fusion (arrière) du cuivre sur les trois fils de la pièce produite 1-3790 se trouvait à environ 7,5 cm (3 po) à l'extérieur de la partie arrière du guide-fils. Dans cette configuration, le reste des zones de fusion du cuivre sur la pièce produite 1-3792 se trouvait dans le guide-fils, entre les références 407 et 408. Alignées ainsi, les extrémités avant des câbles 1-3791/1-3793 se trouvaient à environ 25 cm (10 po) le long du passage des fils au-delà du support de la référence 383. Les zones de fusion du cuivre de deux des fils de la pièce produite 1-3791 se trouvaient alors à côté des zones de fusion du cuivre de la pièce produite 1-3793, près de la référence 398. La seule zone de fusion du cuivre à l'avant de la pièce produite 1-3791 se retrouvait aussi à environ 15 cm (6 po) le long du passage des fils à l'extérieur de l'extrémité avant du guide-fils. Figure 31 montre cette configuration.
Les extrémités recourbées des quatre fils de commande de calibre 16 AWG (1-3788, 1-3794, 1-3795 et 1-10503) auraient pu avoir été causées par deux amorçages d'arc qui avaient coupé les fils. Les extrémités recourbées des pièces produites 1-3795 et 1-10503 correspondaient, compte tenu du fait que l'étain était manquant de façon similaire sur une courte distance à partir de chacune de leurs extrémités recourbées. Si l'on suppose que les extrémités recourbées de 1-3788 et de 1-10503 correspondaient aussi, et si l'on assemble les quatre segments de fils en un seul fil continu, leur longueur totale équivaut à quelques centimètres près à la longueur de la paire de fils 1-3790/1-3792 de calibre 12 AWG. Si l'on dépose le fil de commande combiné de calibre 16 AWG à côté de la paire 1-3790/1-3792, on constate que leurs points d'amorçage d'arc pourraient être co-alignés, signe qu'ils pourraient avoir été produits en même temps. Cependant, sur la pièce produite 1-3795, il ne manquait pas d'étain sur la même longueur que sur la paire 1-3790/1-3792; voilà qui rendait moins probable le fait qu'ils auraient pu être co-alignés.
Les zones de cuivre fondu sur la paire 1-3791/1-3793 étaient situées au même endroit, ce qui donne à penser que les arcs électriques qui ont causé la fusion du cuivre sont survenus à peu près au même moment ou à quelques secondes l'un de l'autre. Tous ces arcs sont survenus alors que les câbles se trouvaient dans le guide-fils, ce qui tend à indiquer que des amorçages d'arc entre phases se sont produits lorsque l'incendie a détruit le guide-fils et l'isolant des fils.
La seule anomalie est le cuivre fondu sur un seul fil près de l'extrémité avant de la pièce 1-3791. Ce même fil présente également une zone de cuivre fondu située environ 51 cm (20 po) plus à l'arrière, dans le guide-fils. Le cuivre fondu à deux endroits indique que l'un des amorçages d'arc n'avait pas déclenché le disjoncteur correspondant. Les amorçages d'arc qui se sont produits dans le guide-fils semblent plus prononcés, et on croit qu'ils auraient déclenché le disjoncteur. En conséquence, l'amorçage d'arc qui s'est produit sur la partie avant de la pièce 1-3791 a dû se produire en premier, puisqu'il n'y aurait pas eu d'électricité pour produire un arc électrique à l'avant si les amorçages d'arc s'étaient produits d'abord dans le guide-fils et qu'ils avaient déclenché le disjoncteur.
Le cuivre fondu sur la paire de câbles 1-3790/1-3792 à l'intérieur du guide-fils semble aussi être le résultat de l'incendie qui a détruit le guide-fils et l'isolant des fils. Il s'en est suivi la production d'arcs électriques entre phases, ainsi qu'avec le fil de commande de calibre 16 AWG. Dans la disposition de la paire 1-3790/1-3792, tel qu'il est décrit ci-dessus, le point d'amorçage d'arc unique (avant) sur la pièce produite 1-3790 n'est pas exactement aligné avec le cuivre fondu de la pièce 1-3792 à l'intérieur du guide-fils. L'alignement initial s'est traduit par un écart d'environ 5 cm (2 po) entre ces points d'amorçage d'arc.
Puisque l'amorçage d'arc unique (avant) sur la pièce 1-3790 s'est produit à l'intérieur du guide-fils, il doit y avoir eu arc électrique avec un autre câble d'alimentation du RDB ou avec le fil de commande de calibre 16 AWG. En conséquence, on a dû modifier légèrement le positionnement initial de la paire de câbles 1-3790/1-3792 (dans les limites de l'écart de 5 cm (2 po)) afin d'aligner toutes les zones de cuivre fondu. Comme dans le cas de la pièce produite 1-3791, le fait qu'un arc unique se soit produit sur un fil sur lequel d'autres arcs se sont produits quelque 51 cm (20 pouces) plus loin vers l'arrière indique que le premier arc électrique n'a pas entraîné le déclenchement du disjoncteur. Les arcs qui se sont produits sur la pièce produite 1-3790 à l'extérieur de l'extrémité arrière du guide-fils couvraient les trois phases. Le disjoncteur aurait dû se déclencher, ce qui indique que l'arc avant s'est produit en premier et qu'il n'a pas déclenché le disjoncteur.
On a essayé différentes combinaisons afin de déterminer le meilleur positionnement pour le câble d'alimentation du RDB endommagé par un arc électrique et les segments du fil de commande de calibre 16 AWG, plus particulièrement en ce qui a trait à leur position relative par rapport à la zone de chaleur localisée des deux côtés des deux colliers de retenue. Cependant, toutes les permutations devaient tenir compte des zones où l'étain est absent sur la paire 1-3790/1-3792 de câbles du bloc d'alimentation. Pour les différents schémas, la zone où l'étain est absent était toujours appariée à la zone où se trouvait les deux colliers de retenue sur les chemins de câbles FBC et FDC, puisque cette zone constituait un point de départ connu. Aucune autre combinaison ou disposition ne pouvait être appuyée par les indices relevés sur les câbles et les fils.
Comme il est indiqué ci-dessus, la disposition des fils et des câbles permet d'évaluer la direction de propagation de l'incendie à partir de l'ordre de production des arcs électriques. Les arcs produits à l'arrière sur les pièces 1-3790 et 1-3791 auraient fort probablement déclenché les disjoncteurs connexes; en conséquence, les arcs ont dû se produire à l'avant d'abord, sans déclencher les disjoncteurs, ce qui indique fortement que l'incendie se serait propagé de l'avant vers l'arrière.
La zone d'absence d'étain représente une zone de chaleur plus intense. Si elle avait été attribuable à un événement antérieur, il y aurait tout lieu de croire que les trois câbles auraient produit des arcs similaires près de la pièce produite 1-3790, à l'extérieur de l'extrémité arrière du guide-fils. Les câbles et le fil de commande étant positionnés de la façon indiquée plus haut, toutes les zones de cuivre fondu peuvent être attribuées à des arcs électriques entre phases sur le même câble ou entre les câbles et le fil de commande, sauf dans le cas de l'arc qui s'est produit à l'extrémité avant de la pièce produite 1-3791, ou aux deux. Il n'y a pas de dommages correspondants causés par un arc électrique sur le câble 1-3793 à cet endroit. Toutefois, le prolongement des pièces produites 1-3790/1-3792 à partir de la référence 401 environ et celui du fil de commande de calibre 16 AWG vers l'avant n'ont pu être retrouvés. En conséquence, on n'a pu déterminer avec exactitude avec quoi le fil unique de la pièce produite 1-3791 a pu venir en contact à son extrémité avant.
1.14.11.3 Trois fils des systèmes de bord endommagés par des arcs électriques
Les trois pièces produites faisant l'objet de la présente rubrique portent les numéros 1-3029, 1-1733 et 1-12755.
Des trois fils des systèmes de bord endommagés par des arcs électriques identifiés, deux ont pu être placés avec exactitude de façon que les arcs se trouvent à environ 15 cm (6 po) à l'arrière de l'ouverture ovale de droite pratiquée dans le boîtier du tableau de commutation supérieur (voir Figure 23). L'arc sur le troisième fil était situé à peu près au même endroit. Du point de vue du potentiel de production d'arcs électriques, cette zone est considérée relativement sûre, en ce sens que les fils, de la façon qu'ils sont installés, présentent peu de risques d'usure par frottement ou de risques d'être autrement endommagés. Toutefois, on trouve des matelas d'isolation recouverts de PET métallisé très près de ces fils. Les trois fils ont fait l'objet d'une évaluation en vue d'établir s'ils sont reliés à l'événement déclencheur de l'incendie.
La pièce produite 1-3029 est un segment de fil de cuivre étamé de calibre 10 AWG recouvert d'un isolant en X-ETFE (BXS7008) provenant du câble d'alimentation du bus c.a. d'urgence de gauche. La zone de cuivre fondu était située à environ 15 cm (6 po) à l'extérieur de l'ouverture ovale de droite du boîtier du tableau de commutation supérieur. Les fonctions alimentées par le bus c.a. d'urgence de gauche ont été perdues à 1 h 25 min 6 s. L'arc électrique sur ce fil aurait déclenché le disjoncteur commandé à distance du bus c.a. d'urgence de gauche. Si cet amorçage d'arc était lié à l'événement déclencheur, la perte de ce bus aurait été évidente pour les pilotes, et la perte des systèmes connexes aurait été enregistrée sur le FDR. L'arc sur ce fil a été le résultat de dommages causés par l'incendie et il n'est pas relié à l'événement déclencheur de l'incendie.
La pièce produite 1-1733 est un segment de fil nickelé de calibre 24 AWG, recouvert d'un isolant polyimide et provenant du circuit de la boucle de détection incendie A du moteur 2. Le fil a été sectionné à une extrémité par un arc électrique. La zone de cuivre fondu se trouve à environ 15 cm (6 po) à l'extérieur de l'ouverture ovale de droite du boîtier du tableau de commutation supérieur. L'arc électrique sur ce fil aurait entraîné l'ouverture du circuit de la boucle de détection incendie A du moteur 2 ou le déclenchement du disjoncteur connexe, entraînant la coupure de l'alimentation électrique de la boucle A. Le module de contrôle de détection incendie aurait alors envoyé au module électronique d'affichage un code de défaillance qui serait apparu à l'équipage sous la forme d'une alerte de niveau 1 (jaune) « FIRE DET 2 FAULT » sur l'écran d'affichage des indications moteur et des alertes. Une alarme d'incendie ne se serait pas déclenchée, pas plus que se serait allumé le voyant d'avertissement supérieur. Le CVR ne revèle aucune mention par l'équipage d'alertes qui se seraient affichées avant que la fumée n'envahisse le poste de pilotage. Cet arc électrique est fort probablement survenu à la suite de dommages causés au fil par l'incendie et il n'est probablement pas relié à l'événement déclencheur.
La pièce produite 1-12755 est un segment de fil nickelé de calibre 22 AWG, recouvert d'un isolant polyimide, provenant des feux à haute intensité (reconnaissance supplémentaire) des feux à éclats de bout d'aile. Les feux à éclats de bout d'aile à haute intensité sont allumés depuis le poste de pilotage au moyen du bouton-poussoir HI-INT situé sur le panneau d'éclairage supérieur. Lorsque les feux sont éteints, le bouton allume en bleu les lettres OFF. Ce fil est sous tension lorsque les feux sont allumés. La perte de l'alimentation de ce fil entraîne l'extinction des feux, mais le mot OFF sur le bouton ne s'allumera pas tant que le bouton restera en position ON et que le relais de détection de mise à la masse R2-5009 gauche restera sous tension. En conséquence, un court-circuit dans ce fil passerait inaperçu pour l'équipage à moins qu'un disjoncteur ne se déclenche et soit remarqué.
La pièce produite 1-12755 a été sectionnée par un arc électrique à l'une de ses extrémités. Il n'a pas été possible de déterminer avec précision l'emplacement du fil sur la structure de reconstruction; toutefois, elle a été installée dans le chemin de câbles entre la prise du tableau de commutation avant R5-204 dans le boîtier du tableau de commutation supérieur et la fiche électrique P1-420 dans le panneau supérieur de coupure de l'alimentation. Rien n'indique qu'un arc électrique se soit produit dans le boîtier du tableau de commutation supérieur; cependant, l'arc sur ce fil s'est probablement produit entre le boîtier du tableau de commutation supérieur et le panneau de coupure de l'alimentation, vraisemblablement à environ 15 cm (6 po) à l'extérieur de l'ouverture ovale de droite, au même endroit que les autres arcs électriques causés par l'incendie dans cette zone. Voilà qui laisse croire que l'arc électrique s'est produit à la suite de dommages causés par l'incendie et qu'il n'est pas relié à l'événement déclencheur.
1.14.11.4 Neuf fils endommagés par des arcs électriques – emplacements indéterminés
Les neufs pièces produites dont il est question dans cette rubrique portent les numéros 1-3700, 1-3713, 1-3718, 1-3796, 1-4689, 1-11252, 1-11897, 1-12756 et 1-12809.
L'emplacement et la fonction exacts de chacun des neuf fils endommagés par des arcs électriques n'ont pu être déterminés. Il est très peu probable que les neuf fils aient subi un amorçage d'arc électrique au même endroit et au même moment.
1.14.11.4.1 Pièces produites 1-4689 et 1-11897
Les pièces produites 1-4689 et 1-11897 ont été identifiées comme des segments de fil étamé de calibre 10 AWG, dont l'isolant manquait. Selon l'étamage, il est probable que ces deux segments étaient recouverts d'isolant de type MIL-W-22759. Le bus c.a d'urgence de gauche présentait des dommages causés par des arcs électriques; il s'agissait d'un fil étamé de calibre 10 AWG recouvert d'un isolant de type MIL-W-22759/34. On sait également que l'alimentation électrique de ce bus a été interrompue à 1 h 25 min 6 s, lorsque de multiples fonctions alimentées par ce bus ont été perdues simultanément.
La perte du bus c.a. d'urgence de gauche ferait que le bus c.c. d'urgence de gauche serait alimenté à partir de la batterie et que le bus c.a. d'urgence de gauche serait alimenté par un convertisseur statique lui aussi alimenté par la batterie. Même si le disjoncteur commandé à distance du bus c.a. d'urgence de gauche s'est probablement déclenché à la suite de l'arc électrique survenu à 1 h 25 min 6 s, le bus c.a. d'urgence de gauche n'est plus protégé par un disjoncteur lorsqu'il est alimenté par le convertisseur statique. Le courant n'est limité que par le convertisseur lui-même; en conséquence, tout court-circuit continuerait d'être alimenté en électricité jusqu'à la défaillance du convertisseur lui-même. En conséquence, il est possible que les pièces produites 1-4689 et 1-11897 proviennent de l'alimentation du bus c.a. d'urgence de gauche.
D'autres fils de calibre 10 AWG acheminés dans la zone endommagée par l'incendie ont également fait l'objet d'une évaluation. Trois systèmes ou composants étaient alimentés par des fils de calibre 10 AWG. L'un des fils de calibre 10 AWG était installé complètement à l'intérieur du boîtier du tableau de commutation supérieur où il est peu probable qu'un arc électrique se soit produit. Les deux autres circuits de calibre 10 AWG étaient associés à la pompe de secours du réservoir d'empennage et à la pompe carburant arrière gauche du réservoir 2. Ces deux fils d'alimentation triphasés passaient par le côté droit du plafond suspendu de la partie avant de la cabine.
De ces deux pompes, seule la pompe carburant arrière gauche du réservoir 2 aurait été alimentée au moment où la première odeur a été décelée. Selon le schéma de câblage pour ce circuit, les trois fils de calibre 10 AWG, C104-147(148) (149)-10, passaient entre la référence 475 vers l'arrière jusqu'à la référence 1059. Aussi, selon la liste des guide-fils de Boeing, les fils de calibre 10 AWG de la pompe carburant arrière gauche du réservoir 2 étaient nickelés, non étamés et recouverts d'un isolant polyimide. Comme l'emplacement situé le plus à l'avant pour ces fils était la référence 475, on a jugé qu'ils étaient situés trop loin en arrière pour avoir constitué une source d'inflammation potentielle.
1.14.11.4.2 Pièces produites restantes non identifiées
La pièce produite 1-11252 est un segment de fil nickelé de calibre 24 AWG recouvert d'un isolant polyimide. La pièce produite 1-11252 est presque identique en apparence à la pièce produite 1-1733 (un segment du circuit de la boucle de détection d'incendie A du moteur 2) et elle pourrait constituer une extrémité correspondante et, à ce titre, un prolongement de ce fil.
Les pièces produites 1-3700 et 1-3718 sont des segments de fil nickelé de calibre 20 AWG, recouverts d'un isolant polyimide, et les pièces produites 1-3713 et 1-12809 (voir une photographie de la pièce produite 1-12809 à Figure 20) sont des segments de fil nickelé de calibre 24 AWG, recouverts d'un isolant polyimide. Ces fils n'ont pu être associés à aucun système ou circuit en particulier. Durant les 92 dernières secondes de fonctionnement du FDR, de nombreuses anomalies de systèmes ont été enregistrées. Deux des anomalies portaient sur des systèmes alimentés par des fils de calibre 20 AWG, et six portaient sur des fils de calibre 24 AWG. Toutes ces anomalies auraient pu résulter d'un arc électrique ou du déclenchement thermique d'un disjoncteur du système.
La pièce produite 1-12756 est un segment de fil étamé de calibre 18 AWG, recouvert d'un isolant polyimide. La présence de ce fil est inhabituelle en ce que le fil nickelé recouvert d'un isolant polyimide constituait la norme appliquée durant la construction de l'avion. La pièce produite 1-12756 pourrait être reliée à une modification apportée à l'avion après sa construction, mais on ne peut en être absolument sûr. Comme le fil n'a pas pu être placé sur la structure de reconstruction, son rôle possible dans l'événement déclencheur n'a pu être évalué relativement aux systèmes.
La pièce produite 1-3796 a été récupérée dans le faisceau des fils emmêlés (pièce produite 1-4372) qui contenait les morceaux de câbles des blocs d'alimentation du RDB, ce qui laisse croire qu'il avait pu être installé au même endroit dans l'avion. On a déterminé que ces morceaux de câble de blocs d'alimentation avaient été installés au-dessus de l'office 2 (voir la rubrique 1.12.3.4), commençant dans le voisinage de la découpe pratiquée sur le dessus de la paroi arrière du poste de pilotage et courant vers l'arrière à peu près jusqu'à la référence 420. On a évalué si la pièce 1-3796 pouvait avoir participé à l'amorçage d'arc déclencheur.
La zone entre la découpe pratiquée sur le dessus de la paroi arrière du poste de pilotage, derrière la référence 420 (au-dessus de l'office 2), avait fait l'objet d'une inspection effectuée sur tous les MD-11 de la flotte de Swissair à la recherche d'anomalies potentielles pouvant mener à des amorçages d'arc. Les faisceaux de fils et les guide-fils sont relativement rectilignes à cet endroit, et ce dernier n'est pas considéré comme étant sujet aux dommages résultant des opérations de maintenance de routine ou de la contamination. Les risques d'usure mécanique des fils par frottement à cet endroit étaient considérés faibles. Au cours des inspections, aucune anomalie potentielle pouvant mener à des amorçages d'arc n'a été découverte.
Pour créer un point de fusion du cuivre de 2 cm sur la pièce produite 1-3796, il faudrait que se produise un cheminement d'arc important. Un tel cheminement d'arc aurait presque très certainement fait intervenir au moins un autre amorçage d'arc sur un fil et causé des dommages importants à un certain nombre de fils voisins. Des dommages indirects importants au câblage voisin se produisent souvent lorsqu'un cheminement d'arc similaire se produit lors d'essais en laboratoire, ce qui pourrait expliquer la présence d'autres fils ayant subi des amorçages d'arc qui ont été découverts mais dont l'emplacement ou la fonction n'ont pu être déterminés hors de tout doute.
On a aussi évalué la possibilité que la pièce produite 1-3796 ait été associée à un amorçage d'arc déclencheur dans la zone située devant la découpe pratiquée sur le dessus de la paroi arrière du poste de pilotage, derrière le tableau de distribution avionique. Ce scénario est considéré improbable pour les raisons suivantes. Dans des essais en laboratoire, des amorçages d'arc semblables produisent une série de claquements secs. Ces bruits de claquement sec s'accompagnent habituellement d'éclairs brillants semblables à ceux du soudage à l'arc. Dans le MD-11, ces éclairs pourraient être vus dans les conditions d'éclairage nocturne (obscurci) du poste de pilotage à travers les petites ouvertures situées autour du tableau de distribution, ou autour des bords des trous de disjoncteurs inutilisés. Il est peu probable que le type d'amorçage d'arc qui a donné lieu à la pièce produite 1-3796 pourrait être confondu par les pilotes avec une anomalie de conditionnement d'air s'il se produisait derrière le tableau de distribution avionique. Si ce type d'amorçage d'arc s'était produit derrière le tableau de distribution avionique, on s'attendrait à ce qu'il endommage lourdement le câblage voisin. Au cours d'un tel événement, il est fort probable qu'un ou plusieurs messages d'alerte s'afficheraient, des anomalies seraient enregistrées sur le FDR ou des disjoncteurs se déclencheraient. Il convient de noter qu'aucune anomalie de ce genre n'a été évoquée par les pilotes ni enregistrée sur le FDR pendant quelque 13 minutes.
1.14.11.5 Liseuses de carte Hella
Les liseuses de carte du copilote et de l'observateur de droite ont été récupérées et ont fait l'objet d'un examen au terme duquel on a écarté la possibilité qu'elles aient représenté des sources potentielles d'inflammation. Les liseuses de carte du commandant de bord et de l'observateur de gauche n'ont pas été récupérées dans l'épave. La liseuse de carte installée à la position de l'observateur de gauche ne présentait pas d'antécédents d'anomalies électriques semblables à celles présentées par les liseuses de carte Hella, et l'hypothèse qu'elle ait pu être une source d'inflammation potentielle a été écartée.
La liseuse de carte Hella placée très près du matériau de recouvrement en PET métallisé à la position de la liseuse de carte du commandant de bord pourrait figurer dans un scénario dans lequel elle serait l'élément déclencheur de l'incendie. Les essais de circulation d'air en vol ont permis de constater qu'une partie de la fumée générée à l'essai au-dessus du plafond du poste de pilotage, à la position de la liseuse de carte du commandant de bord, entrerait dans le poste de pilotage par les diffuseurs d'air de la fenêtre de gauche. La fumée entrerait aussi fort probablement par une ou plusieurs autres ouvertures, y compris par le boîtier de la liseuse de carte, le curseur de commande du diffuseur d'air de la fenêtre de gauche et les poignées coupe-feu.
Si l'incendie avait pris naissance immédiatement au-dessus de la tête du commandant de bord, on s'attendrait à ce qu'il ait été le premier à déceler l'odeur; il semble que ce n'ait pas été le cas. En outre, si la fumée initiale provenait de la zone de la liseuse de carte, il n'aurait pas été nécessaire que le copilote se lève pour examiner l'endroit. Il aurait été moins probable de confondre une fumée pénétrant par des ouvertures situées loin des diffuseurs d'air, surtout par le boîtier de la liseuse elle-même, avec une fumée provenant du système de conditionnement d'air. En outre, un incendie déclenché par une source d'inflammation initiale située aussi loin vers l'avant de l'avion n'aurait pas pu causer les dommages importants dans l'espace inoccupé de la partie avant de la cabine dans les délais connus liés à l'incendie. L'information recueillie porte à croire que l'incendie ne s'est déclaré dans aucune des liseuses de carte.
1.14.11.6 Intérieur du boîtier du tableau de commutation supérieur
Les matériaux récupérés en provenance de l'intérieur du boîtier du tableau de commutation supérieur présentaient peu de dommages causés par la chaleur, à l'exception d'une zone localisée à l'extrémité arrière. On n'a trouvé aucune indication permettant de croire que l'incendie ait pu prendre naissance dans le boîtier avant de se propager à l'extérieur. Les dommages causés par la chaleur indiquent que celle-ci provenait de l'extérieur du boîtier et qu'elle était entrée par les découpes arrière.
1.14.11.7 Offices avant
L'office 2 n'était pas alimentée en électricité, et aucun des fils récupérés provenant de l'intérieur des offices 1 et 3 ne présentait de dommages causés par la chaleur ou l'incendie. Tous les dommages causés par la chaleur et les dépôts de suie sur la partie supérieure de ces offices résultaient de l'exposition à un incendie externe. Aucun des fils récupérés et dont il a été établi qu'ils provenaient des offices ne présentait de dommages causés par un arc électrique.
Les offices auraient été en cours d'utilisation au moment où une odeur a été décelée pour la première fois dans le poste de pilotage. Si un arc électrique était survenu dans un fil d'alimentation des offices, le dispositif de contrôle de charge aurait détecté un écart entre le courant à l'entrée et à la sortie et mis hors tension les offices. Le voyant OFF correspondant se serait allumé sur le panneau de commande supérieur du poste de pilotage et une alerte (en jaune) de niveau 1 (coupure d'alimentation des offices) aurait été produite. L'équipage de conduite s'en serait probablement aperçu. Les CVR n'a révélé aucun problème lié aux offices. L'information recueillie révèle que l'incendie n'a pas pris naissance dans une des offices.
1.14.11.8 Plafonniers d'allée et éclairage d'urgence
L'examen de l'épave et l'examen d'autres MD-11 ont permis de constater un ternissement sur certains panneaux du plafond de la cabine. Le ternissement était dû à une surchauffe par l'ampoule des plafonniers d'allée et de l'éclairage d'urgence. Hormis la présence possible de dépôts de poussière et de charpie, il n'y avait aucun matériau inflammable, comme le matériau de recouvrement en PET métallisé, à proximité des appareils d'éclairage. On estime que l'incendie n'a pas pris naissance dans un de ces appareils d'éclairage.
1.14.11.9 Batterie des lumières d’urgence
L’examen de la batterie a permis de constater que, bien que celle-ci ait été gravement endommagée par la chaleur, la source de la chaleur était extérieure à la batterie (voir Figure 27). Cette constatation démontre que l’incendie n’a pas été déclenché par une chaleur excessive, comme une surcharge thermique, à l’intérieur de la batterie.
1.14.12 Matériaux de propagation de l'incendie
1.14.12.1 Matelas isolants
Les matériaux d'isolation thermique et acoustique sont utilisés en grande quantité dans le fuselage de l'avion afin de maintenir une température confortable dans la cabine et de réduire le bruit dans la cabine et le poste de pilotage (voir Figure 4). Bien que des matériaux comme les composés de polymères fluorés ou la mousse de polyéthylène aient aussi été utilisés à cet effet, les matelas isolants constituent de loin le choix le plus populaire. Ces matelas isolants sont généralement installés directement contre l'intérieur du revêtement du fuselage, par-dessus les cadres et autour des gaines de conditionnement d'air.
Les matelas isolants sont fabriqués d'un isolant matelassé en fibre de verre enveloppé d'un recouvrement protecteur sous la forme d'une mince membrane étanche. Cette couverture protectrice est une construction mixte dans laquelle une mince toile de nylon ou de polyester peut être collée à la membrane afin de prévenir les déchirures. On peut également utiliser du ruban adhésif pour joints afin de joindre plusieurs matelas isolants en un seul. Les matériaux d'isolation thermique et acoustique doivent satisfaire aux critères d'essais d'inflammabilité de l'annexe F de la FAR 25.853.
Pour faire le choix d'un recouvrement pour les matelas isolants, on tient compte de la durabilité, de la résistance au feu, du poids, de l'imperméabilité et de la facilité de fabrication. Deux matériaux largement utilisés dans l'industrie de l'aviation et qui avaient été utilisés dans l'avion en question sont le PET et le PVF. Le PET est couramment connu sous le nom de MylarMDNote de bas de page 68, et le PVF est couramment connu sous le nom de TedlarMDNote de bas de page 69. Les deux matériaux peuvent être métallisés ou non, et leur utilisation était autorisée en vertu des essais de certification de la FAA en vigueur à ce moment.
L'essai d'inflammabilité utilisé pour la certification des matelas isolants recouverts de PET métallisé était l'essai au bec Bunsen à la verticale (voir la rubrique 1.14.1.2). Dans cet essai, on suspendait une bande du matériau isolant à la verticale au-dessus d'un bec Bunsen, pour ensuite la soumettre à une flamme durant 12 secondes. Pour que l'essai soit réussi, au moins trois éprouvettes du matériau du matelas isolant doivent s'éteindre d'elles-mêmes dans un délai moyen de 15 secondes après le retrait de la flamme. En outre, la longueur de combustion moyenne ne doit pas dépasser 20 cm (8 po), et le matériau fondu qui s'égoutte du matériau du matelas isolant ne doit pas brûler durant plus de 5 secondes en moyenne. Les matelas isolants recouverts de PET métallisé satisfont à ces critères; lorsqu'il est exposé à la flamme du bec Bunsen, le matériau se recroqueville immédiatement et ne s'enflamme pas.
Douglas a utilisé des matelas isolants recouverts de PET métallisé sur différents modèles d'avion de série entre 1981 et 1994. Les matelas isolants recouverts de PET métallisé ont ensuite été remplacés par des matelas isolants recouverts de PET non métallisé.
Sur l'avion en question, construit en 1991, des matelas isolants recouverts de PET métallisé avaient été utilisés pour isoler le fuselage. Ils avaient également été utilisés pour isoler certaines gaines d'air conditionné. La plus grande partie des gaines d'air conditionné était toutefois isolée au moyen de matelas isolants recouverts de PVF métallisé (voir Figure 4).
1.14.12.2 Incidents antérieurs connus
Entre novembre 1993 et mars 1999, on compte sept incidents connus liés à des matelas isolants recouverts de PET métallisé ou de PVF métallisé qui se sont enflammés et ont propagé la flamme. Ces incidents se sont produits sur un MD-87, un MD-82 et deux B737-300 en 1994 et 1995, et sur trois MD-11 en 1995.
Les sources d'inflammation dans chaque cas étaient relativement peu importantes et comprenaient des arcs électriques, des ébarbures métalliques brûlantes et la rupture d'un ballast d'éclairage. Dans tous les cas sauf un, l'incendie s'est déclaré dans l'avion au sol. Dans le cas de l'incendie en vol, le moment de l'incendie n'a pu être établi, les dommages n'ayant été découverts qu'au cours de l'entretien subséquent.
L'Administration de l'aviation civile de Chine (CAAC) a mené l'enquête sur trois de ces incidents : les deux Boeing 737 qui contenaient du PET et un MD-11 qui contenait du PET métallisé. Selon les documents disponibles, la CAAC a effectué des essais sur le matériau des matelas isolants recouverts de PET (code de matériel BMS8-142 de Boeing). Elle a établi qu'une fois enflammé, le matériau était complètement consumé par la flamme. Dans un rapport daté du 24 mai 1996, qui a été communiqué à la FAA, la CAAC recommandait d'informer le constructeur que « les matelas isolants installés sur les Boeing 737-300, [et sur les] MD-11 sont inflammables. Le constructeur devrait réagir rapidement et de façon positive ».
Dans une réponse au rapport de la CAAC datée du 24 juillet 1996, la FAA indiquait son intention d'étudier le comportement des matériaux de matelas isolants à plus grande échelle. La FAA indiquait également que, bien que les essais menés par la CAAC aient été indicatifs, le type d'essai mené par la CAAC (inflammation à la bordure cousue de l'échantillon) n'était pas obligatoire pour la certification.
Le 9 août 1996, Douglas publiait une lettre à tous les exploitants de plusieurs types d'avion construits par la société à propos des matelas isolants. La lettre contenait les renseignements suivants :
[traduction] À la suite de récents incendies au sol liés à des matelas isolants recouverts de Mylar métallisé sur des avions MD-80 et MD-11, Douglas a examiné ses méthodes pour les essais d'inflammabilité des matelas isolants. Nous avons conclu qu'un élargissement des conditions de ces essais, comprenant l'ajout de conditions d'inflammation à celles déjà appliquées auparavant, permettrait de mieux établir les caractéristiques d'inflammabilité des matelas isolants. Tous les matériaux des matelas isolants installés à bord des avions construits par Douglas ont satisfait aux normes applicables pour la certification par la FAA. Douglas recommande que les exploitants cessent d'utiliser les matelas isolants en Mylar métallisé de référence (D) et les rubans de référence (E). Douglas recommande également que les critères d'essais élargis de Douglas, publiés dans le document DMS 2446 de référence (C) ci-joint, soient appliqués par les exploitants lors du remplacement des matelas isolants dans les avions en service...
Douglas a informé la FAA et l'industrie de ses conclusions à l'égard des essais d'inflammabilité et elle participe à un groupe de travail FAA/industrie sur l'inflammabilité qui traite des méthodes d'essais et de l'inflammabilité de matériaux comme ceux qui sont utilisés pour les matelas isolants. Le groupe de travail conduira des essais d'inflammabilité sur les matelas isolants provenant de fournisseurs connus et testera des échantillons de différentes tailles dans différentes configurations d'essai. À partir des données tirées des essais menés par le groupe de travail et des essais que la société continuera de mener, Douglas entend élaborer un ensemble encore plus rigoureux de critères d'essai d'inflammabilité.
Le document DMS 2446, daté du 5 août 1996, présentait un nouvel essai d'inflammabilité qui devait être utilisé par tous les fournisseurs de matelas isolants de McDonnell Douglas. L'essai, mis au point par les avionneurs, comprenait l'exposition d'un échantillon du matelas isolant à des tampons de cotons imbibés d'alcool isopropylique enflammés (essai de type tampon de coton). McDonnell Douglas a découvert que les matelas isolants recouverts de PET métallisé, soumis à un tel essai, s'enflammaient et continuaient de brûler.
La lettre aux exploitants expliquait également que McDonnell Douglas avait entrepris d'installer des matelas isolants recouverts de PET dans les avions de série et que la société tentait de trouver des matériaux améliorés qui satisferaient à des critères d'inflammabilité plus stricts tout en continuant de présenter les autres caractéristiques souhaitées. Finalement, McDonnell Douglas a émis le 31 octobre 1997 un bulletin de service recommandant aux exploitants de MD-11 d'enlever les matelas isolants recouverts de PET métallisé et de les remplacer par des matelas isolants recouverts de PVF métallisé. Le bulletin de service annonçait également que les avions de série en construction utiliseraient également des matelas isolants recouverts de PVF métallisé.
En novembre 1989, la FAA, avec d'autres organismes de réglementation et des représentants de l'industrie, ont formé le International Aircraft Materials Fire Test Working Group. De 1996 à 1997, ce groupe de travail a mené des essais afin d'évaluer le comportement de différents matelas isolants à la fois face à l'essai de certification au bec Bunsen et aux essais de type tampon de coton mis au point par l'industrie. Il s'en est suivi la publication en septembre 1997 d'un document diffusé par le département des Transports des É.-U. sous le titre Evaluation of Fire Test Methods for Aircraft Thermal Acoustical Insulation (DOT/FAA/AR-97/58)(évaluation des méthodes d'essai de résistance au feu pour l'isolant thermique et acoustique d'aéronef). Les extraits qui suivent sont tirés de ce document:
[traduction] Le présent rapport présente les résultats des essais d'inflammabilité menés à la ronde par différents laboratoires sur les matelas d'isolation thermique et acoustique et les pellicules utilisées comme revêtements isolants. Ces travaux ont été demandés par l'industrie aéronautique à la suite d'incidents qui ont révélé que la propagation des flammes était liée aux matelas d'isolation thermique et acoustique. Des essais d'inflammabilité à la verticale ont été menés comme prévu à l'annexe F de la FAR 25.853. En outre, un essai de type tampon de coton, mis au point par les avionneurs, a également fait l'objet d'une évaluation. Pour mener ces essais de type tampon de coton, on a placé un tampon de coton imbibé d'alcool et enflammé contre un matelas taillé pour l'essai et on a mesuré la longueur de combustion la plus longue. Les résultats indiquent que les essais de type tampon de coton ont donné des résultats uniformes, ce qui n'avait pas été le cas des essais d'inflammabilité à la verticale. C'était particulièrement le cas pour une pellicule de recouvrement donnée, qui avait réussi l'essai d'inflammabilité à la verticale selon 50 % des laboratoires participants alors que tous les laboratoires, sauf un, avaient indiqué que la pellicule avait entièrement brûlé lors de l'essai de type tampon de coton, le dernier laboratoire rapportant que l'échantillon avait brûlé à 75 %...
Le poly(fluorure de vinyle) (PVF) métallisé et le poly(éthylène téréphtalate) (PET) métallisé ou non métallisé sont actuellement les pellicules les plus largement utilisées dans l'industrie aéronautique...
Dans l'air, le PET brûle avec une flamme fumante accompagnée de fusion, d'égouttement et d'un peu de carbonisation. Des traitements ignifuges s'imposent donc. Le traitement comprend habituellement l'incorporation de matériaux halogénés ou non halogénés dans la molécule de polymère ou comme additifs. Des activateurs aux oxydes métalliques, comme l'oxyde d'antimoine, sont fréquemment inclus. Bien que les pellicules ignifuges de PET puissent résister à une source d'inflammation faible dans un flux thermique de faible intensité, elles brûlent facilement quand un incendie fait rage...
Dans l'air, la pellicule de PVF biorienté (Tedlar) présente des caractéristiques de combustion similaires à celles de la pellicule de PET...
La face frontale de l'échantillon de matelas isolant au PET métallisé a été totalement consumée lors de l'essai de type tampon de coton, ont signalé tous les laboratoires sauf un, qui a rapporté que 75 % de la face frontale avait été consumée. Voilà qui contraste fortement avec les résultats de l'essai d'inflammabilité à la verticale, que les échantillons de PET métallisé/fibre de verre (comprimé et non comprimé) ont subi avec succès dans la plupart des cas. Il en ressort que l'essai de type tampon de coton s'est avéré plus reproductible que l'essai d'inflammabilité à la verticale pour ce système particulier de fibre de verre/pellicule...
Les classes de pellicule de PET métallisé évaluées dans cette série d'essais sont inflammables et pourraient permettre à un incendie de se propager.
Le document Evaluation of Fire Test Methods for Aircraft Thermal Acoustical Insulation (évaluation des méthodes d'essai de tenue au feu de l'isolant thermique et acoustique pour les aéronefs) décrit cinq incidents (inclus dans les sept événements notés plus hauts) survenus entre 1993 et 1995, qui ont révélé que la propagation de l'incendie était liée aux matelas isolants.
Après l'accident de SR 111, dans un communiqué daté du 14 octobre 1998, l'administrateur de la FAA a déclaré que la FAA élaborerait une nouvelle spécification d'essais pour les matériaux isolants utilisés à bord des avions et qu'elle exigerait que les matériaux actuels soient remplacés par d'autres qui satisferaient aux nouvelles normes d'essais. Le 20 septembre 2000, la FAA émettait un avis de projet de réglementation préconisant l'adoption de normes d'inflammabilité plus rigoureuses pour tous les matériaux d'isolation thermique et acoustique.
Vers la fin de 1997, McDonnell Douglas avait cessé d'utiliser les matelas isolants recouverts de PET métallisé et de PET dans les avions de série. Toutefois, l'utilisation de matelas isolants recouverts de PET métallisé s'est poursuivie jusqu'en 2000, lorsque la FAA a publié des consignes de navigabilité exigeant le retrait de ces matelas des avions en service. La FAA a aussi publié un NPRM proposant de nouvelles normes d'inflammabilité pour les matériaux d'isolation thermique et acoustique.
1.14.12.3 Effets de la contamination sur le matériau de recouvrement des matelas isolants
Des essais effectués pour le compte du BST ont montré que plusieurs matériaux retrouvés dans la zone endommagée par l'incendie de SR 111 sont inflammables avant même qu'ils soient exposés à leur milieu d'utilisation prévu; en fait, ils sont inflammables même s'ils ne sont pas contaminés. À titre d'exemples, on trouve les matériaux de recouvrement des matelas isolants, les bandes adhésives pour joints, la mousse de polyéthylène et les embouts en élastomère de silicone.
On trouve peu de renseignements dans l'industrie pour quantifier les effets de la contamination. Selon diverses sourcesNote de bas de page 70, les caractéristiques d'inflammabilité des matériaux peuvent être compromises en service, c'est-à-dire lorsque ces derniers sont exposés à des contaminants comme la poussière, des fibres, des adhésifs, de la graisse, de l'huile ou des inhibiteurs de corrosionNote de bas de page 71. Aucun résultat d'essai corroborant n'existait pour appuyer cette information. Dans certains essais d'inflammabilité menés par le BST et dans lesquels des matelas isolants légèrement contaminés retirés de MD-11 en service ont été testés, aucune différence appréciable n'avait été remarquée dans les caractéristiques d'inflammabilité du matériau.
L'industrie de l'aviation n'a pas encore quantifié les conséquences de la contamination sur le maintien de la navigabilité aérienne des matelas isolants. Toutefois, la recherche a montré un lien entre l'inflammabilité et la contamination. L'extrait suivant provient du bulletin d'information 00-09 sur les normes de vol de la FAA, publié le 28 septembre 2000 et prenant fin le 30 septembre 2001, qui était intitulé « Special Emphasis Inspection on Contamination of Thermal/Acoustic Insulation » (inspection spéciale de la contamination de l'isolant thermique et acoustique) :
[traduction] Les résultats de la recherche ont montré, par contre, que l'inflammabilité de la plupart des matériaux peut changer si ces derniers sont contaminés. La contamination peut se présenter sous la forme de fibres, de poussière, de graisse, etc., et elle peut augmenter la vulnérabilité du matériau à s'enflammer et à propager les flammes.
1.14.13 Risque d'incendie potentiel accru en raison de systèmes de bord non résistants au feu
En vertu de la réglementation en vigueur au moment de la certification du MD-11, il n'existait aucune exigence visant à déterminer si la défaillance d'un matériau donné, utilisé dans un des systèmes de bord, pouvait aggraver un incendie en cours. La défaillance prématurée de certains systèmes, comme les systèmes d'alimentation en oxygène, les systèmes hydrauliques ou les systèmes de conditionnement d'air, pourraient aggraver un incendie en vol.
À l'origine, les conduites de distribution d'oxygène de l'équipage du MD-11 étaient construites en tubes d'aluminium. Durant la construction de l'avion, on avait découvert que les conduites en aluminium pouvaient être endommagées durant la manutention; par conséquent, les conduites, ainsi que la plus grande partie des raccords, avaient été remplacées par des pièces en acier résistant à la corrosion. Bien que McDonnell Douglas ait remplacé les tubes en aluminium et la plus grande partie des raccords par des pièces en acier résistant à la corrosion, l'avionneur a continué d'utiliser des embouts en aluminium (p. ex. AN 929-6) sur les conduites inutilisées mais pressurisées. Un tel embout en aluminium avait été utilisé sur la conduite en acier inoxydable de 8 cm (3 po) de longueur qui partait de la conduite principale d'alimentation en oxygène, située au-dessus du plafond du poste de pilotage, à la référence 374. Cet embout était installé de telle façon qu'il dépassait du matelas d'isolation. Durant l'incendie, cette zone a été exposée aux flammes et à la chaleur.
Le Laboratoire technique du BST a effectué des essais au four sur un ensemble représentatif conduite en acier résistant à la corrosion /embout en aluminium afin d'observer les effets des températures élevées sur ces deux métaux différents. La plage normale de fonctionnement du circuit d'alimentation en oxygène de l'équipage du MD-11 se situe entre 62 et 85 lb/po2. Durant l'essai, la conduite a été pressurisée à 70 lb/po2 et on a chauffé uniformément l'ensemble. Au cours de certains essais, des fuites sont apparues à 427 °C (801 °F); à des températures supérieures à 427 °C (801 °F), l'embout en aluminium se desserrait.
Des essais ont été réalisés à des températures comprises entre 566 °C (1 051 °F) et 593 °C (1 099 °F). Après une exposition d'environ 10 minutes et demie, l'embout en aluminium se brisait généralement en deux morceaux, laissant l'extrémité de la conduite complètement ouverte. Dans cette plage de température, des fuites se produiraient avant la rupture.
Des essais ont également été menés à des températures de 649, 704 et 760 °C (1 200, 1 300 et 1 400 °F). Les embouts en aluminium se sont brisés après environ 5 3/4 minutes, 4 minutes et 3 1/4 minutes d'exposition, respectivement. L'analyse métallurgique des faciès de rupture a permis de constater que ces températures avaient entraîné une croissance du grain et que les défaillances s'étaient produites sous la forme de ruptures intergranulaires le long des joints de grain fragilisés. Lors de ces essais, aucune fuite mesurable ne s'est produite avant la rupture, la croissance accélérée du grain ayant causé la déformation et la rupture de l'embout avant l'apparition d'une fuite.
À des fins de comparaison, des essais similaires ont été menés au moyen d'embouts en acier résistant à la corrosion à la place des embouts en aluminium. Avec les embouts en acier résistant à la corrosion, il n'y a pas eu desserrage et il n'y a eu ni fuites ni rupture de l'embout, même lorsque l'ensemble a été exposé à une température de 760 °C (1 400 °F) durant 20 minutes.
Les essais étaient jugés simples en ce qu'une température uniforme avait été appliquée. Sur l'avion en question, les effets de la chaleur n'ont probablement pas été uniformes. Par exemple, puisque l'embout dépassait du matelas isolant, contrairement à la conduite, l'embout doit avoir été chauffé en premier et à une plus forte intensité que la conduite. En outre, un gradient de température aurait déjà existé entre la conduite d'alimentation, placée contre le revêtement extérieur froid du fuselage, et l'embout, exposé à l'intérieur plus chaud.
Si cet embout devait se briser ou présenter des fuites durant un incendie, de l'oxygène pur se mêlerait à l'incendie et en augmenterait considérablement l'intensité. En outre, une défaillance de l'embout entraînerait une perte de pression dans la conduite, interrompant ainsi le flux d'oxygène vers les masques à oxygène des pilotes.
Dans la zone endommagée par l'incendie, des embouts en élastomère avaient été utilisés sur les gaines de conditionnement d'air. Les essais de tenue au feu ont démontré que les embouts en élastomère pouvaient être facilement enflammés par une source d'inflammation faible. Une fois enflammés, les embouts étaient détruits par un front de flamme autopropagé. Des tuyaux souples et des raccords en fibre de verre avaient aussi été utilisés dans le système de conditionnement d'air dans tout l'avion. Ce matériau est thermotolérant; néanmoins, lorsqu'il a été testé dans un calorimètre à cêne, le matériau s'est enflammé au bout de deux minutes et demie après avoir été exposé à un flux de chaleur de 25 kilowatts par mètre carré, ce qui équivaut à une température de 591 °C (1 095 °F). Une rupture du système de conditionnement d'air dans la zone d'incendie y aurait introduit un flux d'air important qui aurait accru l'intensité de l'incendie. Les dommages causés par la chaleur à la structure de l'avion sur la structure de reconstruction indiquent que ces températures ont probablement été atteintes ou dépassées à certains endroits où étaient installés des tuyaux souples en fibre de verre.
La FAR 25.1309 stipule que tout système doit faire l'objet d'une analyse de sécurité dans le cadre de son processus de certification. Bien que ce soit une pratique bien établie dans l'industrie aéronautique d'examiner les conséquences de la défaillance d'un système durant le processus de certification, l'analyse de sécurité d'un système ne comprend généralement pas l'évaluation des conséquences de la défaillance du système en raison d'un incendie en cours.
1.15 Questions relatives à la survie des occupants
L'accident n'offrait aucune chance de survie en raison de l'importance des forces d'impact avec le plan d'eau.
1.16 Essais et recherches
La présente section décrit les diverses méthodes d'essai utilisées, les inspections et les recherches menées au cours de l'enquête sur l'accident du vol 111 de Swissair, de même que les résultats de ces activités. Elle présente également des statistiques sur d'autres accidents où de la fumée ou un incendie s'était déclaré à bord.
1.16.1 Analyse par spectroscopie Auger des perles d'arcs électriques récupérées
Toutes les perles produites par la fusion des fils de cuivre de SR 111 ont été analysées par spectroscopie AugerNote de bas de page 72 (voir la rubrique 1.19.4.1). La spectroscopie Auger est une méthode qui permet de déterminer sur le plan quantitatif la composition chimique en surface ou la composition des éléments qui constituent les perles de fusion en fonction de la profondeur sous la surface. L'analyse par spectroscopie Auger présente l'avantage complémentaire d'être essentiellement non destructive, car le profilage de la concentration ne descend pas normalement en deçà de 5 000 angströmsNote de bas de page 73. Les données chimiques recueillies sur les éléments peuvent servir à une analyse comparée entre les échantillons. L'analyse de la documentation existante révèle qu'il est sans doute possible de recourir à cette analyse comparée pour faire la distinction entre une perle de cuivre produite par un arc électrique dans un environnement sain (avant l'incendie) et une perle produite durant un incendie dans un milieu enfumé. Les fils ayant subi des amorçages d'arc électrique dans un environnement sain pourraient être identifiés comme d'éventuels éléments déclencheurs de l'incendie.
Pour élaborer un protocole au sujet de l'examen et de l'analyse comparée des perles de cuivre par spectroscopie Auger, un certain nombre de perles ont été formées dans des conditions connues d'amorçage d'arc et d'incendie. Vingt-quatre de ces perles de référence ont été examinées et analysées dans un test en aveugle. D'après les résultats de ce test, il ressort que sept des quatorze perles qui s'étaient formées dans un environnement sain ont été justement identifiées comme telles. Sur les dix perles qui s'étaient formées sous l'effet d'un incendie, une a été caractérisée à tort comme s'étant formée avant l'incendie, et la caractérisation des neuf autres n'a pas été concluante. Cette dernière caractérisation dénote un problème dans l'utilisation de la spectroscopie Auger pour évaluer les perles d'arc électrique qui ont été soumises à un incendie en cours, peu importe l'atmosphère qui régnait au moment de la production de l'arc. L'incendie a soumis les surfaces du cuivre fondu à une forte oxydation qui a créé une croûte ou une couche protectrice. Lorsque cette couche était présente, il n'était pas possible de déterminer l'atmosphère qui régnait au moment où la perle s'était formée.
Plusieurs autres difficultés ont surgi à l'utilisation de la spectroscopie Auger dans la collecte des données visant à caractériser l'atmosphère qui régnait au moment où la perle s'est formée. L'irrégularité de la surface du cuivre fondu sur les perles de SR 111 a difficilement permis de trouver une surface plane pour procéder à l'analyse. Bon nombre des endroits étaient contaminés par les résidus de l'isolant calciné des fils et les précipités ou les dépôts blanchâtres ou verdâtres résultant de l'exposition à l'eau de mer. Cette contamination s'est traduite par l'accumulation d'une charge électrostatique durant l'essai, et il a été difficile de repérer les endroits que l'on avait décidé de soumettre à une analyse. Même si chaque perle a été rincée aux ultrasons dans de l'eau distillée avant d'être examinée, cette procédure n'a pas permis d'éliminer la totalité des artefacts. Pas plus qu'il n'a été facile d'éliminer les artefacts par une autre méthode; compte tenu des faibles profondeurs examinées, toute déformation physique de la surface la rendait pratiquement inutilisable pour l'analyse par spectroscopie Auger.
On a noté l'absence de répétabilité durant l'essai, même dans les données recueillies sur des sites distants d'à peine quelques micronsNote de bas de page 74 sur la même perle. Dans bien des cas, cette absence de répétabilité a abouti à différentes interprétations de l'atmosphère qui régnait au moment de la formation de la perle. Étant donné que les résultats de la spectroscopie Auger n'ont pas fourni de données répétables susceptibles de faire l'objet d'une interprétation uniforme, on n'a pas eu recours à l'analyse comparée fondée sur la spectroscopie Auger pour évaluer l'implication de chaque perle dans la formation de l'arc électrique initial.
1.16.1.1 Inspection des fils des MD-11 en service
On a examiné les fils de plusieurs MD-11 en service pour tenter d’y trouver les sources d’une éventuelle production d’arcs électriques et d’autres sources de dégagement de chaleur indu. Les enquêteurs du BST se sont rendus dans deux ateliers de maintenance et ont examiné plusieurs MD-11 aux endroits où l’on savait que SR 111 avait subi des dommages causés par la chaleur.
Les anomalies suivantes ont été constatées sur un ou plusieurs des avions examinés :
- des fils usés par frottement et sectionnés dans la partie avant de la cabine;
- une légère usure du fini de l’isolant de plusieurs fils derrière le tableau de distribution supérieur du poste de pilotage, près de l’endroit où les faisceaux de fils pénètrent dans le boîtier du tableau de commutation supérieur;
- des fils endommagés, fendus ou usés par frottement à plusieurs autres endroits;
- des fils de mise à la masseNote de bas de page 75 cassés et des fils présentant des rayons de pliage plus petits que les spécifications du constructeur;
- des connexions de borne de fils mal serrées;
- des divergences dans l’acheminement des fils et des faisceaux de fils;
- des ouvertures dans le rideau anti-fumée installé au-dessus de la cloison séparant le poste de pilotage de la cabine;
- des divergences dans le lieu d’installation de la batterie de l’éclairage d’urgence, au-dessus de la porte d’accès au poste de pilotage.
Aucun rapport direct n’a été établi entre les divergences constatées au cours de ces inspections et les fils endommagés de l’épave de SR 111.
1.16.2 Essais et recherches sur les liseuses de carte
En décembre 1999, les enquêteurs du Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation (BEAA) de la Suisse, pour le compte du BST, ont surveillé un programme de Swissair visant à retirer de sa flotte de MD-11 l'isolation acoustique et thermique recouverte de PET métallisé. Les enquêteurs ont découvert que les matériaux isolants voisins de certaines des liseuses de carte présentaient des signes de dommages causés par la chaleur. Dans bien des cas, l'arrière des liseuses de carte installées au-dessus des sièges de l'équipage de conduite était en contact direct avec le matériau isolant. Cette combinaison représentait une source potentielle d'inflammation juste à côté d'un matériau inflammable.
L'examen ultérieur des liseuses de carte Hella sur la flotte de MD-11 de Swissair et d'autres MD-11 entretenus par SR Technics a révélé que les capuchons protecteurs de certaines d'entre elles avaient subi des dommages, allant de fissures à des pièces manquantes; on a même découvert des dommages provoqués par des arcs électriques sur le contact ressort métallique et le support.
D'après ces données, le BST a adressé un avis de sécurité aérienne au NTSB et aux intervenants concernés le 3 mars 2000. Le 20 avril 2000, la FAA publiait une consigne de navigabilité réclamant l'inspection de l'installation des liseuses de carte Hella sur tous les MD-11 immatriculés aux États-Unis. Même si cette consigne n'obligeait pas les transporteurs à rendre compte des résultats de ces inspections à la FAA, certaines réponses ont été transmises volontairement à Boeing. Ces résultats révèlent qu'environ 40 % des liseuses de carte échantillonnées présentaient des anomalies, comme des dommages causés aux fils par la chaleur et des fissures dans les capuchons protecteurs.
Des essais ultérieurs menés sur des liseuses de carte Hella ont démontré que, lorsqu'il manquait des pièces au capuchon protecteur isolant, des arcs électriques pouvaient se produire entre le contact ressort métallique et le support à deux emplacements sur ce dernier. Pour simuler les conditions d'utilisation possibles, la liseuse de carte Hella a été exposée à des vibrations durant la production d'arcs électriques. On a observé que les vibrations prolongeaient la durée des arcs sans pour autant déclencher le disjoncteur.
Pour simuler son installation réelle dans un avion, une liseuse de carte a été testée dans un espace clos, entourée par des matelas isolants recouverts de PET métallisé et en contact avec eux. Les températures dans l'espace clos ont été réglées entre 151 et 159 °C (304 et 318 °F). Au bout de deux mois d'essais ininterrompus, l'intérieur du matelas isolant présentait des signes de dommages causés par la chaleur, semblables aux dommages constatés dans les installations des avions en service.
Pour évaluer les conditions d'exploitation réelles, des thermomètres-rubans ont été fixés aux matelas isolants, derrière les liseuses de carte Hella dans trois MD-11. Une température maximale de 77 °C (171 °F) a été enregistrée, et on n'a constaté aucun dommage causé par la chaleur dans les matelas isolants. À bord de l'un des avions testés, il y avait plus d'espace entre les liseuses de cartes et le matelas isolant. Cet espace offrait une meilleure aération autour des liseuses de carte, ce qui réduisait la température d'utilisation.
L'examen plus poussé des liseuses de carte Hella a révélé d'autres modes de défaillance, en dehors des dommages subis par le capuchon protecteur isolant, où l'ampoule pouvait donner lieu à la production d'arcs électriques. Les possibilités supplémentaires s'établissent ainsi :
- un court-circuit peut se produire entre la fixation de la suspension universelle en forme de U et la connexion de borne de fil;
- un court-circuit peut se produire entre la fixation de la suspension universelle en forme de U et le microrupteur ON/OFF;
- un court-circuit peut se produire entre le porte-ampoules de rechange et le microrupteur ON/OFF.
Poussée par un avis de sécurité important émis par la FAA sans rapport avec la présente enquête, Hella a procédé à des essais pour mesurer la chaleur dégagée par l'installation des liseuses de carte à bord du MD-11. À l'issue de ces essais, Hella a publié un bulletin de service conseillant de remplacer l'ampoule à halogène de 11,5 W par une ampoule à incandescence de 7 W.
1.16.3 Essais en vol sur la circulation de l'air
Deux essais en vol distincts ont été menés pour évaluer la configuration de la circulation d'air dans le poste de pilotage, dans l'espace inoccupé au-dessus du plafond du poste de pilotage et dans l'espace inoccupé situé au-dessus du plafond de la partie avant de la cabine. Le premier essai a été réalisé par le BST le 27 janvier 2000 à Long Beach, en Californie, sur un appareil MD-11 de Swissair immatriculé HB-IWE et avec les équipements et les installations de Boeing. Le deuxième essai a été réalisé le 2 décembre 2000 par Swissair et Boeing à Zurich, en Suisse, sur l'avion de Swissair immatriculé HB-IWE. Le BEAA de la Suisse a assisté au deuxième essai en vol et a recueilli des données pour le compte du BST.
Les essais en vol sur la circulation de l'air ont donné les résultats suivants :
- La fumée provenant de l'intérieur du compartiment de l'équipage de conduite, en avant de la cloison arrière du poste, ne se dirige pas vers l'arrière dans la cabine, mais est essentiellement aspirée vers le bas dans le compartiment avionique, sous le plancher du poste de pilotage, en passant par les pédales de direction de gauche et de droite.
- La fumée qui provient du dessus du revêtement du plafond à la droite du poste de pilotage ou derrière le tableau de distribution avionique commence par se diriger vers la droite avant d'emprunter la descente de câbles en échelle; lorsque le volume de fumée est suffisant, la fumée pénètre dans le boîtier du tableau supérieur par les découpes ovales arrière et dans le poste de pilotage par les découpes des poignées coupe-feu.
- La fumée qui provient de derrière le revêtement du plafond à la gauche du poste de pilotage pénètre dans celui-ci par un ou deux endroits : autour des diffuseurs d'air de la fenêtre gauche ou par l'ouverture du panneau du levier de commande coulissant du diffuseur gauche.
- La circulation de la fumée provenant d'un endroit situé n'importe où en avant de la cloison arrière du poste de pilotage n'est pas influencée par le réglage sur ON ou OFF de l'interrupteur ECON (ventilateur de recirculation d'air en cabine).
- Lorsque l'interrupteur ECON est en position ON, la fumée qui provient de derrière la cloison du poste de pilotage, dans l'espace inoccupé au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine, est principalement aspirée en arrière vers les ventilateurs de recirculation d'air. Toutefois, il se peut que de la fumée proche de la paroi arrière du poste de pilotage soit aspirée en avant dans l'espace inoccupé du poste de pilotage et le long de la descente de câbles avant de pénétrer dans le poste de pilotage. En pénétrant dans le poste de pilotage par la descente de câbles, la fumée peut se diriger vers l'avant et tourbillonner devant les fenêtres de gauche du poste de pilotage, se diriger vers les pédales de direction du commandant, ou se diriger de la penderie vers la droite, puis remonter pour tourbillonner autour du coin supérieur extérieur du tableau de distribution supérieur principal avant de poursuivre sa course en avant vers les pédales de direction du copilote.
- Lorsque l'interrupteur ECON est en position ON, la fumée dégagée dans le plafond au-dessus des portes G1 et D1 n'est sentie dans la cabine que dans le secteur situé sous ces deux zones.
- Lorsque le commutateur ECON est en position OFF, l'air dans l'espace inoccupé au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine se dirige vers l'avant du poste de pilotage. La fumée provenant de l'espace inoccupé suit le mouvement de circulation d'air en direction du poste de pilotage, aspirée par l'air expulsé du poste de pilotage par l'intermédiaire du ventilateur de refroidissement du compartiment avionique dans la vanne de régulation échappement cabine. La fumée qui emplit l'espace inoccupé a aussi tendance à dériver dans la cabine par les fentes ou les ouvertures existantes.
1.16.4 Analyse des sons du poste de pilotage enregistrés sur le CVR
Durant l'écoute du canal du microphone d'ambiance du poste de pilotage du CVR, on a pu entendre de nombreux déclics, dont beaucoup ont été subjectivement identifiés comme étant des événements courants qui se déroulent dans un poste de pilotage, comme la syntonisation de la radio, l'ouverture ou la fermeture de reliures, les bruits de la coutellerie contre une assiette et l'ouverture ou la fermeture de la porte d'accès au poste de pilotage. D'autres déclics n'ont pas pu être facilement identifiés, et on a cherché à déterminer si l'un de ces déclics pouvait être le bruit du déclenchement d'un disjoncteur.
Plusieurs essais ont été réalisés dans le poste de pilotage d'un MD-11 au cours desquels les disjoncteurs situés à divers endroits sur plusieurs panneaux de distribution ont été déclenchés dans un environnement acoustique rappelant celui d'un vol. Les enregistrements sonores de ces essais et les déclics inconnus du CVR de SR 111 ont été numérisés et analysés au Centre de recherches sur les communications d'Industrie Canada. On s'est servi d'une étude par recoupements pour tenter d'établir des similitudes entre les déclics de chaque fichier numérisé. L'analyse des spectres des signaux originaux et des corrélations croisées a révélé que le bruit de fond avait un effet marqué sur les signaux. Les tentatives visant à isoler le bruit de fond des déclics par filtrage éliminateur de bande, prédiction linéaire, soustraction spectrale et lissage médian ont échoué.
Les résultats de l'étude du Centre de recherches sur les communications d'Industrie Canada n'ont pas été concluants. Sur le plan subjectif, certains des bruits enregistrés sur le CVR de SR 111 étaient semblables aux bruits de disjoncteur enregistrés durant l'essai dans le poste de pilotage du MD-11; toutefois, il n'a pas été possible de démontrer de manière scientifique que ces bruits étaient semblables.
1.16.5 Essais en simulateur (DIT1-100)
Plusieurs séances en simulateur de MD-11 ont été menées en appui à l'enquête sur l'accident. Ces séances ont d'abord permis d'évaluer les performances en descente du MD-11 et les effets potentiels de diverses défaillances de systèmes. À cause du manque de renseignements précis quant aux repères initiaux à la disposition des pilotes, à la perte de systèmes de bord et à la détérioration de l'environnement dans le poste de pilotage au cours des cinq dernières minutes du vol, on n'a pas tenté de reproduire le vol réel.
Pour certains essais réalisés en vue d'évaluer les défaillances des systèmes, on a réglé le simulateur selon les conditions atmosphériques, les performances de l'avion et les configurations de l'avion qui étaient similaires à celles de SR 111 à divers moments au cours des 30 dernières minutes de vol. Diverses défaillances de systèmes de bord qui avaient été enregistrées par le FDR au cours de la période de 92 secondes précédant immédiatement l'arrêt de l'enregistreur ont été simulées. Des observations ont été formulées sur les tableaux, le pylône et les écrans d'affichage dans le poste de pilotage lorsque ces défaillances étaient simulées. Aussi, on a tourné le sélecteur SMOKE ELEC/AIR sur diverses positions après que les défaillances ont été introduites. Au cours de cette séance, un autre essai avait été conçu pour permettre d'évaluer la pilotabilité du MD-11 en vol alors que le système d'augmentation de la stabilité longitudinale (LSAS) était en panne et qu'il y avait une panne de courant totale. On a déterminé que le simulateur était toujours pilotable dans chacune des situations suivantes :
- lorsqu'il n'y avait qu'un seul canal du LSAS utilisable;
- lorsqu'il n'y avait plus de LSAS;
- lorsqu'il n'y avait aucune alimentation électrique.
1.16.6 Calculs théoriques sur la descente d'urgence
1.16.6.1 Généralités
Des calculs de performances théoriques, reposant sur les tables de performances du constructeur, ont été réalisés pour déterminer la capacité du MD-11 à effectuer un atterrissage d'urgence à l'aéroport de Halifax dans le délai le plus court possible, depuis le niveau de vol 330. L'objectif était de savoir à quel point le long de la trajectoire de SR 111 l'avion aurait dû amorcer une descente d'urgence qui lui aurait permis d'atterrir le plus vite possible sur la piste 06 à Halifax. Les calculs reposaient sur le vent réel et d'autres facteurs environnementaux, les chiffres réels relatifs à la masse et au centrage de SR 111 et les données de performances d'un avion en parfait état de marche.
En effectuant ces calculs théoriques, on n'a pas tenu compte des décisions prises par l'équipage de conduite, ni des diverses indisponibilités des systèmes de bord ou de la détérioration de l'environnement dans le poste de pilotage.
Les résultats de ces calculs fournissent un point de repère permettant d'examiner les premiers indices limités dont disposaient les pilotes et la baisse réelle de pilotabilité de l'avion au cours des dernières minutes du vol par rapport au délai minimum qu'il leur aurait fallu pour atteindre l'aéroport international de Halifax et réussir un atterrissage dans des conditions théoriques idéales.
1.16.6.2 Calculs
Pour déterminer l’heure d’atterrissage la plus hâtive possible, on a utilisé les données d’un simulateur technique ainsi que les vents réels extraits de l’enregistreur de données de vol pour calculer la vitesse-sol de l’avion au cours de la descente d’urgence. La vitesse-sol a ensuite été mathématiquement intégrée pour donner le déplacement ou la distance parcourue dans le temps. Le calcul a présumé l’alignement direct sur la balise Golf de Halifax à partir du point d’amorce de la descente d’urgence, suivi par un tronçon rectiligne depuis la balise jusqu’au seuil de la piste 06.
Les calculs ont révélé un point le long de la trajectoire de vol où la distanceNote de bas de page 76 entre l’avion et la balise Golf était équivalente à la distance parcourueNote de bas de page 77 le long du profil optimal de descente d’urgence. Ce point coïncidait avec une heure de 1 h 14 min 18 s. Une descente amorcée à ce moment aurait nécessité une trajectoire de 044°V jusqu’à la balise Golf et aurait couvert une distance calculée d’environ 62 nm. Les vents obtenus indiquent un élément important de vent arrière pendant les sept premières minutes de la descente d’urgence, suivi par de légers vents debout pendant le reste de cette descente et de cette approche particulières.
Pour savoir si SR 111 aurait pu réussir à atterrir à l’aéroport de Halifax si une manœuvre de déroutement énergique d’urgenceNote de bas de page 78 avait été amorcée à 1 h 14 min 18 s, on a transposé les événements significatifs connus relatifs aux systèmes de bord sur le profil de descente d’urgence théorique.
Si l’avion avait suivi le profil théorique de descente d’urgence, la première défaillance technique dont les pilotes auraient eu connaissance (le débrayage du pilote automatique à 1 h 24 min 9 s) se serait produite à l’approche au voisinage de la balise Golf, à environ 5 nm du seuil de la piste 06. L’avion aurait alors subi des défaillances techniques progressives au cours de l’approche. Lorsque les enregistreurs de bord se sont arrêtés à 1 h 25 min 41 s, l’avion aurait dû se trouver à environ 700 pi au-dessus du seuil de piste. L’heure prévue la plus proche de franchissement du seuil de piste était 1 h 26 min 17 s, soit 1 minute 35 secondes après que les pilotes eurent déclaré une urgence. Il aurait fallu environ 35 secondes de plus pour poser et immobiliser l’avion, de sorte que l’atterrissage se serait terminé vers 1 h 27.
En réalité, l’équipage ignorait totalement l’existence d’un incendie à bord et il a pensé que la fumée et les émanations provenaient du système de conditionnement d’air; or, la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d’air ne prescrit pas l’atterrissage immédiat de l’avion. À 1 h 19 min 50 s, l’avion se trouvait à 30 nm du seuil de la piste 06; il franchissait en descente le FL210 à environ 3 300 pi/min et selon une vitesse indiquée de 320 nœuds. Les pilotes avaient fait savoir à l’ATC qu’ils avaient besoin de plus de 30 nm.
Les calculs théoriques du déroulement de la descente ont permis à l’équipe d’enquêteurs d’évaluer la décision prise par les pilotes selon laquelle il leur fallait plus de 30 nm pour effectuer un atterrissage à Halifax. À titre de comparaison, si l’équipage avait poursuivi sa route jusqu’à l’aéroport sur le cap assigné et qu’il avait amorcé un profil de descente d’urgence à une distance de 30 nm, il aurait intercepté la trajectoire d’approche finale à environ 15 nm du seuil de piste tout en effectuant son approche à une altitude d’environ 10 000 pi à une vitesse indiquée de 355 nœuds. Selon les calculs théoriques du déroulement de la descente, si l’avion avait amorcé sa descente à 1 h 14 min 18 s, il se serait trouvé dans la même position à environ 4 000 pi et 200 nœuds. La différence d’altitude et de vitesse aurait obligé l’appareil à perdre beaucoup d’altitude et de vitesse, nécessitant des manœuvres hors-trajectoire, ce qui peut aboutir à une approche déstabilisée. C’est pourquoi les calculs étayent l’évaluation faite par les pilotes de SR 111 à 1 h 19 min 50 s selon laquelle l’avion avait besoin de plus de 30 nm pour effectuer une descente sans danger.
1.16.7 Statistiques sur les accidents mettant en cause de la fumée ou un incendie
1.16.7.1 Statistiques sur les incidents de Boeing
La société Boeing a procédé à une analyse des incidents signalés en cours de vol qui se sont produits entre novembre 1992 et juin 2000, au cours desquels on a détecté de la fumée, des émanations, un incendie ou une surchauffe dans les zones pressurisées des avions construits par BoeingNote de bas de page 79. Les événements en question ont été affectés à l'une des trois grandes catégories suivantes : conditionnement d'air, systèmes électriques ou matériaux. Boeing a attribué 64 % des événements en question à des sources électriques, 14 % au système de conditionnement d'air et 12 % à des matériaux. Les 10 % restants des événements déclarés ne comportaient pas suffisamment de données pour permettre de déterminer l'origine de la fumée, des émanations, de l'incendie ou de la chaleur. En ce qui concerne les événements mettant en cause des MD-11 ou des DC-10, 51 % ont été attribués à des sources électriques, 21 % au système de conditionnement d'air et 15 % à des matériaux.
L'étude de Boeing a conclu que « les avions de grande capacité dotés de systèmes plus complexes affichent une prédominance d'incidents de fumée d'origine électrique, par rapport au système de conditionnement d'air et aux matériaux ». L'étude de Boeing a également conclu que, « pour ce qui est des incidents de fumée dont l'équipage de conduite n'a pas pu déterminer l'origine, les équipes d'entretien ont déterminé ultérieurement que la plupart d'entre eux étaient d'origine électrique ».
1.16.7.2 Examen des données sur les accidents dus à un incendie en vol
Le BST a analysé les données sur les incendies en vol qui sont survenus entre janvier 1967 et septembr 1998 afin de calculer le délai moyen qui s’écoule entre le moment où un incendie en vol est décelé et celui où l’avion fait un amerrissage ou un atterrissage forcé, ou qu’il s’écrase. L’analyse s’est limitée aux incendies qui se sont déclarés à bord d’avions commerciaux d’une masse maximale au décollage supérieure à 50 000 livres. L’analyse a englobé tous les incendies qui s’étaient déclarés à l’intérieur du fuselage. Les incidents relatifs à des incendies moteur, à des incendies du logement de train et à des explosions ont été écartés, tout comme ceux qui s’étaient terminés par un atterrissage réussi. Les données ont révélé que, dans 15 incidents représentatifs, entre 5 et 35 minutes s’étaient écoulées entre la détection des premiers signes d’un incendie et l’écrasement de l’avion. Même si les circonstances variaient dans chacun de ces incidents, les recherches portent à croire que, lorsqu’un incendie en vol continue de se propager, il peut avoir des conséquences catastrophiques en un rien de temps. Dans le cas de SR 111, le temps écoulé entre le moment où l’odeur inhabituelle avait été décelée dans le poste de pilotage et celui où l’avion avait percuté le plan d’eau était d’environ 20 minutes.
L’étude de Boeing dont il est question à la rubrique 1.16.7.1 faisait observer également que « l’analyse des données historiques sur les rares cas d’incendie qui ont entraîné une perte de l’avion indique que le temps qui s’écoule entre le premier signe de fumée et une situation désespérée peut être très court, une question de quelques minutes ».
1.16.8 Essais d'inflammation électrique des matelas isolants recouverts de PET métallisé
Les décharges électriques sous forme d'arcs ou d'étincelles peuvent engendrer des températures localisées dépassant 5 500 °C (9 932 °F). Un court-circuit normal peut déclencher un disjoncteur classique et mettre hors tension le circuit défectueux. Toutefois, il se peut qu'un disjoncteur ne se déclenche pas en cas de court-circuit intermittent.
Des essais ont été menés pour caractériser les propriétés d'inflammation et déterminer si des matelas isolants recouverts de PET métallisé s'enflamment lorsqu'ils sont exposés à des étincelles électriques résultant de courts-circuits à la masse sur des fils transportant un courant de 115 V c.a. et un courant de 28 V c.c. On a pu observer que les matelas isolants recouverts de PET métallisé s'enflammaient et propageaient une flamme lorsqu'ils étaient exposés à un arc électrique ou à une étincelle. Toutefois, l'inflammation était sporadique en ce sens qu'elle se produisait parfois au premier coup d'arc, alors que, d'autres fois, rien ne se passait après de nombreuses tentatives. Les arcs étaient produits à la main et ils entraînaient généralement le déclenchement du disjoncteur. Il semble que les arcs électriques soient suffisamment rapides au début et localisés pour prévenir la tendance d'un matériau de recouvrement à pellicule mince, comme le PET métallisé, à rétrécir sous l'effet d'une source de chaleur.
Dans un de ces essais, un matelas isolant recouvert de PET métallisé, semblable à ceux qui se trouvaient dans l'avion en question, a été placé entre les cadres verticaux d'un tronçon du fuselage d'un avion. Le matelas a été exposé à un court-circuit électrique intermittent entre un fil dénudé de 115 V et le fuselage mis à la terre. Le matelas isolant recouvert de PET métallisé s'est enflammé, et la flamme s'est propagée à la verticale et à l'horizontale à la surface du matelas et en dessous.
1.16.9 Modélisation informatique de l'incendie
Au cours de l'enquête, l'analyse de la naissance et de la propagation de l'incendie a été obtenue à partir d'une combinaison de sources comprenant l'examen et la reconstruction détaillée de l'épave, des résultats d'essais de combustion en laboratoire, des profils de circulation d'air, le déroulement des événements et la chronologie de ces derniers. Dans la dernière partie du processus d'analyse, on a aussi eu recours à une modélisation de l'incendie.
En janvier 2002, le BST a octroyé un contrat au Fire Safety Engineering Group (FSEG) de l'université de GreenwichNote de bas de page 80 pour qu'il réalise une modélisation basée sur la simulation numérique en mécanique des fluides (CFD)Note de bas de page 81 au moyen du logiciel SMARTFIREMD mis au point par le FSEG. L'objectif consistait à intégrer l'information à un modèleNote de bas de page 82 du champ de l'incendie pour étudier les effets potentiels de différentes variables sur la circulation de l'air et le comportement de l'incendie. La modélisation a aidé à obtenir une meilleure connaissance et une meilleure compréhension de l'incendie tout en aidant à l'évaluation de l'endroit où il aurait pu prendre naissance. Ces travaux ont aussi aidé à interpréter les profils des dommages causés par la chaleur en fournissant des données sur les possibilités de dégagement de chaleur et de taux de perte.
Le modèle du champ de l'incendie sur le terrain fondé sur la CFD comprenait des renseignements tels les suivants :
- des détails de construction et de géométrie de l'avion à l'intérieur et à l'extérieur au moyens de la conception assistée par ordinateur (CAO) en trois dimensions;
- les propriétés des matériaux et les résultats des essais de combustion connexes;
- des données sur la circulation de l'air en théorie et lors d'essais en vol;
- des renseignements sur les conditions atmosphériques et le profil de vol tirés du FDR de l'avion en question.
La technique de modélisation a permis aux enquêteurs de mener une série de combustions virtuelles pleine grandeur au moyen d'ordinateurs puissants pour effectuer une multitude de calculs complexes relativement à l'interaction des processus, comme la conduction, la convection et le rayonnement. Le traitement informatique des calculs pour un seul scénario relatif au déclenchement d'un incendie prenait souvent plusieurs jours de temps de calcul continu et ininterrompu. Les sujets étudiés étaient les trajets de migration potentiels de l'odeur et de la fumée, le dégagement de chaleur et des éléments complexes comme les taux de déperdition thermique vers l'atmosphère à travers la cellule. Comme il n'était pas possible d'effectuer des essais de combustion sur un avion pleine grandeur, il n'aurait pas été possible d'obtenir des renseignements sur l'origine de l'incendie en vol et les effets de sa propagation sans le recours à la modélisation de l'incendie.
La modélisation par CFD appuie le scénario d'incendie figurant dans le présent rapport. Lorsque le modèle a été réalisé au moyen des données d'essais en vol de la circulation de l'air, on a remarqué que l'air était aspiré à l'intérieur du poste de pilotage dans la zone du tableau de distribution avionique et qu'il se déplaçait dans le poste de pilotage vers le compartiment avionique, comme le décrit la rubrique 1.16.3. La modélisation de l'incendie a aussi montré que la propagation initiale de l'incendie et ses caractéristiques de développement correspondaient au scénario d'incendie figurant dans le présent rapport. Pour les derniers moments de l'incendie, seule une évaluation limitée a été faite des données découlant de la modélisation de l'incendie en raison des nombreuses permutations et combinaisons d'événements possibles.
1.17 Renseignements sur les organismes et la gestion
La présente section contient des renseignements sur la structure et la gestion de SAirGroup, de Swissair, de SR Technics, de l'OFAC, de la FAA et de la société Boeing, qui ont tous pris part à la construction, à la maintenance ou à l'exploitation de l'avion en question. On y trouve des renseignements précis sur le Programme de sécurité des vols de Swissair, le Programme d'assurance qualité de SR Technics et le Programme de fiabilité de SR Technics.
1.17.1 SAirGroup/Swissair/SR Technics
La compagnie Swissair a été fondée en 1931 sous la raison sociale de Swissair Swiss Air Transport Company Limited. Cette société s'est grandement diversifiée pour devenir une entreprise comptant diverses sociétés spécialisées dans le transport aérien, la maintenance des aéronefs, les servitudes aéroportuaires, la conception de logiciels et l'immobilier. En mars 1996, une nouvelle structure de gestion a été adoptée, donnant lieu à une société de portefeuille structurée de manière à améliorer la responsabilité de gestion et l'imputabilité. En 1997, la Swissair Swiss Air Transport Company Limited a été réorganisée en un groupe de sociétés de portefeuille appelé SAirGroup.
Au moment de l'accident de SR 111, SAirGroup était la société mère d'une entreprise de crédit-bail d'aéronefs (Flightlease AG) et des quatre sociétés de portefeuille suivantes : SAirLines, SAirServices, SAirLogistics et SAirRelations. L'ancienne compagnie aérienne est devenue une filiale opérationnelle de SAirLines, mais a conservé l'appellation de Swissair Swiss Air Transport Company Limited (Swissair dans le présent rapport). De même, l'ancienne société de maintenance des avions est devenue une filiale à cent pour cent de SAirServices et a reçu le nom de Swissair Technical Services Limited, laquelle est devenue une société autonome le 1er janvier 1997 connue sous le nom de SR Technics Group AG (SR Technics dans le présent rapport).
Au moment de l'accident de SR 111, SR Technics comptait plus de 3 000 employés et était responsable de la maintenance des avions de Swissair, son principal client. SR Technics effectuait également la maintenance des avions d'autres transporteurs de SAirLines et de compagnies tierces. Environ 50 % de l'ensemble des travaux de SR Technics étaient consacrés à des clients n'appartenant pas à SAirGroup.
En avril 2001, la société mère, SAirGroup, a été rebaptisée Le Groupe Swissair. Le 31 mars 2002, Swissair a fermé ses portes.
1.17.1.1 Programme de sécurité des vols de Swissair
Swissair a institué un système de comptes rendus confidentiels en 1983, qui a cependant été rarement utilisé par les équipages de conduite parce qu'un système d'analyse des données de vol permettait d'analyser les données sur les performances des avions. Les données extraites du système d'acquisition de données auxiliaires (ADAS) étaient confidentielles, et l'analyse de ces données était confiée à trois pilotes sélectionnés par Swissair.
Dans chaque cas, les analystes de Swissair examinaient les données pour savoir comment les avions étaient pilotés, et ils surveillaient toute nouvelle dynamique dans les performances, comme les paramètres de vol hors tolérance ou les écarts par rapport aux procédures d'utilisation normalisées. À titre d'exemple, ils surveillaient les vitesses aérodynamiques pour déterminer si elles se situaient dans les tolérances prévues. Le nom des pilotes aux commandes des vols analysés était confidentiel. Seuls les éléments pertinents de l'analyse étaient transmis au Service de la sécurité des vols pour qu'il analyse les tendances et en traite dans des bulletins de nouvelles ou dans le cadre de l'entraînement sur simulateur. Chaque mois, un bulletin intitulé Incidents and Non-routine Occurrences (incidents et situations particulières) était publié et distribué à tous les pilotes de Swissair et également à d'autres sociétés de SAirGroup. Une lettre de sécurité trimestrielle, intitulée Bulletin d'information, était également diffusée.
Les pilotes avaient une grande confiance dans ce programme. Chaque pilote de la société pouvait réclamer une analyse des vols qu'il avait effectués. On estime qu'au moins 60 % des évaluations de cas étaient demandées par les pilotes.
1.17.1.2 Responsable de la maintenance chez Swissair
Swissair était une compagnie aérienne régulière assujettie à l'OPS 1 des JAR (voir section 1.17.2). À compter du 1er avril 1998, Swissair a été obligée, en vertu de l'OPS 1.175 des JAR, de nommer des responsables désignésNote de bas de page 83 chargés de la gestion et de la surveillance des secteurs suivants :
- opérations aériennes;
- système de maintenance;
- entraînement des équipages;
- exploitation au sol.
L'OPS 1.895 des JAR oblige un exploitant à employer une personne ou un groupe de personnes afin de garantir que toute la maintenance est effectuée dans les délais et selon une norme approuvée. La personne ou le cadre, selon le cas, était le responsable désigné.
Le chef des études techniques et du soutien des opérations aériennes de Swissair a été nommé responsable désigné pour le système de maintenance. Le titulaire de ce poste était chargé de protéger les intérêts de la compagnie aérienne au sujet de toutes les opérations de maintenance, de construction et de prestation de services, et il était le principal interlocuteur entre Swissair et tous les pourvoyeurs de services de maintenance. Entre autres responsabilités, celui-ci devait s'assurer que les avions étaient aptes au vol et que les équipements opérationnels et d'urgence étaient en bon état de marche.
Le responsable désigné de Swissair pour le système de maintenance était également chargé d'assurer la surveillance systématique des activités de maintenance accomplies par SR Technics. Certains des éléments nécessitant des responsabilités de surveillance au sein du Service de gestion de la maintenance de Swissair étaient :
- les audits avec des vérificateurs qualifiés;
- la présentation d'un rapport écrit, indiquant les constatations, les mesures nécessaires, les responsabilités et l'échéance des mesures;
- la présentation d'un exemplaire du rapport au gestionnaire de la qualité;
- la conservation du rapport pendant cinq ans;
- la surveillance de la mise en œuvre des mesures prises et de leur efficacité.
1.17.1.3 Programme d'assurance qualité de SR Technics
Au moment de l'accident, SR Technics était titulaire d'une homologation d'organisme de maintenance valide, conforme au JAR-145 et délivrée par l'OFAC. Le système qualité (programme d'assurance qualité) avait été établi conformément au JAR 145.65 et il se fondait sur les prescriptions de la Norme Euro/International EN 29001/ISO 9001. Le programme d'assurance qualité comprenait tous les besoins et toutes les activités de l'organisation relatifs à la qualité. Le programme était conçu pour garantir que tous les travaux exécutés et les services fournis l'étaient conformément aux politiques, aux procédures et aux directives de SR Technics de même qu'aux pratiques de maintenance courantes dans l'industrie.
Le programme d'assurance qualité garantissait également le respect des exigences réglementaires applicables. L'assurance qualité au sein de SR Technics, en particulier la navigabilité des aéronefs et l'utilisation des pièces d'aéronef, relevait des responsabilités des différentes unités de production, conformément aux descriptions de travail et aux procédures pertinentes. SR Technics avait adopté une approche de « gestion de la qualité totale », ce qui signifie que chaque employé était tenu responsable de la qualité de ses travaux et devait procéder à une auto-inspection à l'issue de chaque « opération ». Selon la nature de la procédure de maintenance, d'autres inspections étaient nécessaires, conformément à la présentation de l'organisme de maintenance de SR Technics. Les superviseurs des unités devaient s'assurer que leurs employés étaient suffisamment qualifiés et bien équipés pour exécuter les tâches qu'on leur confiait et inspecter la qualité du travail de leurs employés. Des inspections de qualité aléatoires étaient également effectuées par des membres du service qualité de SR Technics.
1.17.1.4 Programme de fiabilité de SR Technics
Au moment de l’accident, SR Technics était dotée d’un programme de fiabilité dont le but était d’assurer la navigabilité et un niveau de fiabilité élevé afin d’optimiser l’exploitation économique. Ce programme existait sous l’égide d’un programme de fiabilité conjoint. Ce programme était désigné KSSU parce qu’il comprenait les exploitants suivants : KLM, SAS, Swissair, l’Union de Transports Aériens et, plus tard, Air France. Il devait être utilisé lorsqu’on procédait à la maintenance des avions de la flotte de Swissair ou d’autres compagnies aériennes clientes. Le programme de maintenance global reposait sur la circulaire consultative (AC) 120-17A de la FAA. Le programme de fiabilité KSSU était publié dans le Manuel technique de SR Technics, Technik, et était valable pour tous les types d’avions exploités par Swissair.
Dans l’ensemble, la fiabilité de la cellule, des moteurs et des systèmes des avions faisait l’objet d’une surveillance et d’une analyse constantes, comme l’exige la sous-partie M de l’OPS 1 des JAR.
1.17.2 Office fédéral de l'aviation civile de la Suisse
En Suisse, l'organisme de réglementation chargé de surveiller l'aviation civile est l'OFAC, office du ministère fédéral de l'Environnement, des Transports, de l'Énergie et des Communications. La Suisse est un État membre des JAA. Les autorités de l'aviation civile de certains pays d'Europe ont adopté des codes communs de l'aviation extrêmement détaillés (appelés JAR). La partie 1 de l'OPS des JAR contient les exigences qui s'appliquent à l'exploitation de tout aéronef civil affecté à l'aviation commerciale par un exploitant dont le siège principal d'exploitation se trouve dans un État membre des JAA. Les exigences de la partie 1 de l'OPS des JAR sont entrées en vigueur pour Swissair le 1er avril 1998. On n'a trouvé aucune donnée indiquant que Swissair ne respectait pas les JAR au moment de l'accident.
Après le 1er avril 1998, l'OFAC a adopté la philosophie des JAA qui prévoyait qu'en raison « de la complexité croissante et de l'échelle à la fois des aéronefs et de leur exploitation commerciale, les contrôles aléatoires traditionnels effectués par les autorités n'offrent plus un tableau intelligible ou complet des opérations aériennes, sauf les plus restreintes »Note de bas de page 84. Selon les dispositions des JAR, une compagnie aérienne doit assumer sa part des responsabilités dans la surveillance de la qualité d'un service sans danger offert au public. Au cœur de l'efficacité de la politique, l'OPS des JAR prescrit l'établissement par l'exploitant d'un système de qualité. Cela présuppose la nomination d'un gestionnaire désigné de la qualité et d'un gestionnaire responsable; Swissair avait établi une telle structure.
Avant l'accident, l'OFAC surveillait officieusement les opérations de Swissair, sans pour autant avoir procédé au moindre audit opérationnel officiel. L'inspecteur chargé de surveiller Swissair était un ancien commandant de bord d'Airbus A310. Au moment de l'accident, on comptait quatre inspecteurs de l'exploitation au sein de la Section des opérations aériennes de l'OFAC, qui entretenaient tous des rapports avec Swissair.
L'exploitation de Swissair était surveillée par l'OFAC dans le cadre de réunions de coordination semestrielles et par l'examen du rapport quotidien d'exploitation, des rapports de sécurité aérienne et des déclarations des incidents inhabituels par les équipages. Les résultats du programme d'assurance qualité des opérations aériennes de Swissair et de l'analyse de l'ADAS étaient également transmis à l'OFAC.
La responsabilité des vols de vérification compétence était confiée aux pilotes inspecteurs désignés de Swissair; ces vols se déroulaient conformément au système qualité. C'est ainsi que les inspecteurs de l'OFAC n'effectuaient pas de vols de vérification compétence des pilotes de Swissair, même s'il leur arrivait régulièrement de voler dans le poste de pilotage de vols réguliers de Swissair afin de surveiller les opérations en vol. D'après sa surveillance, l'OFAC a déclaré n'avoir jamais eu de préoccupations sur les opérations aériennes de Swissair.
1.17.3 Federal Aviation Administration
En tant qu'organisme de l'État où l'avion avait été construit, la FAA était responsable de l'homologation technique d'origine du MD-11. La FAA avait pour ce faire établi un partenariat avec l'avionneur, qui s'était traduit par la délivrance du certificat de type numéro A22WE. Après qu'un avion est entré en service, l'organisme de réglementation assure la gestion du certificat de type d'une manière conforme à la politique de la FAA et aux exigences des FAR. Le bureau de certification des aéronefs responsable assure la surveillance en se tenant directement en rapport avec le titulaire du certificat de type pour toute question relative au maintien de la navigabilité aérienne.
1.17.4 La société Boeing
Boeing, et la société McDonnell Douglas qui était le titulaire précédent du certificat de type du MD-11, est responsable des activités relatives au maintien de la navigabilité du MD-11. Parmi ces activités, on peut citer les suivantes :
- le respect des instructions relatives au maintien de la navigabilité;
- la participation au système de rapports de difficultés en service, selon les prescriptions du Code of Federal Regulations 14 (CFR) 21.3;
- les modifications de conception nécessaires pour remédier à toute situation dangereuse selon les prescriptions du 14 CFR 21.99;
- l'élaboration de consignes de navigabilité et la coordination des problèmes de sécurité avec le bureau compétent de la FAA.
1.18 Renseignements supplémentaires
La présente section contient divers renseignements pertinents concernant l'accident du vol SR 111, dont il n'est pas fait état ailleurs dans le présent rapport.
1.18.1 Formation chez Swissair
1.18.1.1 Équipage de conduite
1.18.1.1.1 Entraînement au vol
Les pilotes de Swissair qui passaient sur MD-11 à partir d'autres avions de la compagnie devaient suivre la formation standard de Swissair d'une durée de six semaines. Le programme de Swissair était adapté du cours de McDonnell Douglas, approuvé par la FAA. Lors de ces cours, commandants de bord et copilotes étaient formés ensemble et sensibilisés à la nécessité de travailler en équipe.
Les équipages de conduite étaient non seulement formés à suivre les procédures figurant sur des listes de vérifications adaptées à chaque cas d'urgence, mais aussi à réagir conformément à la séquence suivante : Alimentation, Performance, Analyse, Action. Cette séquence a pour objet de garantir la configuration appropriée de l'avion, l'évaluation correcte de la situation sous tous ses angles, la mise en place de priorités adéquates et le recours à des ressources extérieures appropriées au besoin.
1.18.1.1.2 Formation en cas de fumée, d'émanations ou d'incendie
Au cours de la formation standard de Swissair d'une durée de six semaines destinée aux pilotes en vue du passage sur MD-11, des procédures en cas de fumée, d'émanations ou d'incendie étaient étudiées dans le cadre de discussions en classe et de l'entraînement sur simulateur. Les pilotes avaient reçu pour consigne de mettre leur masque à oxygène intégral dès les premiers signes de fumée en raison du danger que représente l'inhalation d'émanations toxiques. Cette procédure était considérée comme un élément à mémoriser et elle ne figurait donc pas sur la liste de vérifications écrite. On considérait qu'il revenait aux membres de l'équipage de conduite de décider s'il fallait amorcer une descente d'urgence en se fondant sur leur perception du danger. L'amorce d'une descente d'urgence était également considérée comme un élément à mémoriser et ne figurait donc pas sur la liste de vérifications écrite.
Les équipages de conduite avaient appris à évaluer toute situation d'urgence avant de se reporter à une liste de vérifications. En cas d'émission de fumée ou d'émanations, à moins d'être certains que le système de conditionnement d'air en était bel et bien la source, les équipages de conduite avaient reçu la consigne d'entamer les vérifications de la liste « Fumée ou émanations d'origine inconnue » (voir l'Annexe C – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue). S'ils avaient la certitude que le système de conditionnement d'air était la source de la fumée ou des émanations, ils pouvaient utiliser la liste « Fumée dans le système de conditionnement d'air » (voir l'Annexe B – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air).
La décision relative à un déroutement en vue d'un atterrissage de précaution ou d'urgence devait être prise avec discernement et tenir compte de la nature du danger perçu. Le manuel de l'équipage de conduite de la Compagnie intitulé General/Basics Flight Crew Manual stipulait ce qui suit :
[traduction] Dans le cas où un vol ne peut pas se rendre à destination, il faut entreprendre un déroutement vers l'aérodrome de dégagement le plus approprié offrant les meilleurs services opérationnels et de traitement des passagers.
En accord avec cet énoncé, le premier choix aurait dû se porter sur un aéroport avec une présence de Swissair ou d'un agent de service d'escale contractuel, tel que Boston. Halifax était aussi un aéroport en route approuvé pour le déroutement des MD-11 de Swissair.
Le manuel General/Basics faisait également état des diverses circonstances exigeant un atterrissage à l'aérodrome d'urgence le plus proche. Parmi celles-ci figuraient les scénarios suivants :
- tout inlst-spcdlst-spcdlst-spcdcendie à bord d'un avion, y compris un incendie moteur, contre lequel la lutte est impossible ou inefficace;
- fumée persistante d'origine inconnue.
Le manuel General/Basics définissait un aérodrome d'urgence de la façon suivante :
[traduction] Dans ce contexte, un aérodrome d'urgence est un aérodrome où un atterrissage sûr peut avoir lieu compte tenu du type d'avion et de sa configuration, abstraction faite des installations de réparation, du traitement des passagers, etc.
Chez Swissair, comme dans toute l'industrie de l'aviation, il était généralement convenu que les sens de l'être humain lui permettent de distinguer la fumée ou les émanations provenant du système de conditionnement d'air de celles provenant du système électrique. Par exemple, on s'attendrait à ce que la fumée ou les émanations dues à une défaillance du système électrique soient âcres et qu'elles irritent les yeux et les voies respiratoires. Ces indications peuvent être complétées par d'autres indices pouvant indiquer l'origine de la fumée, notamment sa couleur, son intensité, son point d'émanation ou toute anomalie du système de bord qui y est associée.
De tous les sens, l'odorat est le plus rudimentaire et le moins bien compris. De plus, la perception de différentes odeurs est un phénomène subjectif. Bien que les seuils de concentration nécessaires à la détection olfactive de nombreuses substances soient peu élevésNote de bas de page 85, les êtres humains n'arrivent en général pas très bien à déterminer l'origine exacte des odeursNote de bas de page 86. Bien que l'on ait pu constater que la perception olfactive peut être renforcée par d'autres caractéristiques liées à la source de l'odeur (p. ex., irritation, âcreté, picotement)Note de bas de page 87, il est peu probable qu'un équipage arrive à différencier des fumées aux caractéristiques analogues. De plus, il a été démontré que le degré d'attention, certaines affections temporaires, telle la congestion, et certaines sensations physiques temporaires, telle la faim, affectent la perception olfactiveNote de bas de page 88. Même si l'odeur et la fumée qui se sont manifestées dans le poste de pilotage de SR 111 étaient des sous-produits de combustion, les indices limités perçus par les pilotes les ont amenés à croire que le système de conditionnement d'air était en cause.
La formation relative à la Liste de vérifications en cas fumée ou d'émanations d'origine inconnue avait été donnée dans le simulateur de vol. Au cours de la formation en vue du passage sur MD-11, les pilotes s'exerçaient à utiliser les trois positions du sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Ils devaient vérifier quels systèmes de bord fonctionnaient et lesquels ne fonctionnaient pas sur chacune des positions. Les équipages de conduite avaient appris qu'il faut environ cinq minutes pour renouveler la totalité de l'air dans l'avion. Ce renseignement était destiné à leur faire prendre conscience du temps nécessaire pour déterminer si la sélection d'une position donnée provoquerait la dissipation de la fumée ou des émanations. La durée de la période nécessaire au renouvellement de l'air n'était indiquée dans aucun manuel ni sur aucune liste de vérifications, y compris les documents fournis par le constructeur.
L'entraînement sur simulateur comprenait une séance au cours de laquelle était simulée une urgence due à de la « fumée d'origine inconnue » au décollage. L'équipage de conduite devait alors suivre la Liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue et utiliser le sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Afin de ne pas passer trop de temps dans le simulateur, on arrêtait la simulation de fumée lorsque les pilotes plaçaient le sélecteur sur la première position. Conformément à la pratique courante dans l'industrie, aucune formation relative à un incendie en cours ne se faisait sur simulateur. Par conséquent, les pilotes n'étaient pas exposés aux effets combinés des incendies, tels qu'une détérioration de l'environnement du poste de pilotage accompagnée d'une déficience des instruments de bord. La même séance sur simulateur mettait également en scène une situation d'incendie de soute non maîtrisé. L'équipage de conduite devait amorcer une descente d'urgence, suivie d'un atterrissage et de l'évacuation de l'appareil.
Aucune formation n'était donnée en matière de localisation et d'extinction des incendies dans le poste de pilotage et dans le compartiment avionique. La réglementation en vigueur n'imposait pas une telle formation, qui n'était d'ailleurs pas pratique courante dans l'industrie.
Aucune formation n'était donnée en ce qui concerne le pilotage de l'avion uniquement avec les instruments de secours, et il n'existe aucun règlement imposant ce type de formation. On a sondé plusieurs exploitants d'avions de la catégorie transport afin de déterminer s'ils offraient ce type de formation à leurs pilotes; aucun ne le faisait.
Conformément aux normes en vigueur dans l'industrie, les pilotes ne recevaient aucune formation relativement à l'emplacement des matières potentiellement inflammables à bord de l'avion, notamment dans les endroits dissimulés. L'absence d'une telle formation traduisait un manque de sensibilisation au sein de l'industrie au fait que certains des matériaux utilisés dans la construction de l'avion, tout en étant dûment homologués, pouvaient s'enflammer et contribuer à la propagation des flammes.
1.18.1.1.3 Approches sur faisceau arrière
Bien que la base de données du système de gestion de vol du MD-11 ne comporte pas de renseignements sur les approches sur faisceau arrière, cette situation n'aurait pas empêché les pilotes de SR 111 d'effectuer une approche aux instruments sur faisceau arrière à l'aide du mode de contrôle automatique de la route du pilote automatique, ou d'effectuer une approche au NDB sur la piste 06 pour laquelle des données sont stockées dans la base de données du système de gestion de vol du MD-11.
Étant donné que certains des vols réguliers de Swissair avaient pour destination des aéroports dotés de l'équipement nécessaire pour permettre les approches sur faisceau arrière, il existait des procédures à cet effet, et les équipages de conduite avaient reçu une formation leur permettant d'exécuter des approches sur faisceau arrière sans l'aide du système de gestion de vol. Dans le cadre de leur programme de formation sur simulateur, les équipages de conduite des MD-11 de Swissair apprennent à exécuter des approches sur faisceau arrière à l'aéroport de Dorval, situé près de Montréal (Québec). Le copilote avait reçu cette formation au cours des six mois précédents, tandis que le commandant de bord, étant un instructeur sur simulateur qualifié, connaissait bien les approches sur faisceau arrière.
Pour effectuer une approche, les pilotes veulent disposer de renseignements détaillés sur la procédure d'approche, renseignements qu'ils trouvent normalement sur la carte d'approche. Par ailleurs, si la situation l'exige, il est possible d'obtenir suffisamment de renseignements en s'adressant au contrôleur des Services de la circulation aérienne. Lorsqu'on effectue une approche sur faisceau arrière aux commandes d'un MD-11, on peut se servir du pilote automatique pour l'effectuer en mode de contrôle automatique de la route; cependant, les pilotes ont constamment recours au mode de contrôle automatique de la route et à l'autonavigation au cours de leur formation et en vol. Par conséquent, la réalisation d'une approche sur faisceau arrière nécessiterait davantage d'interventions de l'équipage de conduite et lui imposerait une charge de travail plus lourde qu'une approche aux instruments dirigée par le système de gestion de vol pour laquelle des renseignements figurent dans la base de données de ce dernier sur MD-11. Certains exploitants de MD-11 ont décidé de ne pas établir de procédures relatives aux approches sur faisceau arrière.
1.18.1.1.4 Largage du carburant
Une des séances de formation sur simulateur avait pour sujet un incendie moteur nécessitant un largage du carburant. Comme il est de mise au sein de l'industrie, Swissair informe ses pilotes que le largage du carburant peut s'effectuer de deux façons distinctes selon l'urgence : si l'avion se trouve en situation d'urgence, le largage du carburant peut être amorcé sur-le-champ et se poursuivre jusqu'aux derniers moments avant l'atterrissage; par ailleurs, si la situation et le temps le permettent, l'avion peut être acheminé jusqu'à une zone désignée comme zone de largage du carburant.
1.18.1.2 Formation des agents de bord
Tous les agents de bord de SR 111 avaient reçu une formation conforme aux exigences de Swissair, lesquelles se fondaient sur les OPS des JAR ou y étaient conformes. En matière de lutte contre les incendies, cette formation prévoyait une séance de formation initiale, suivie de séances périodiques. Le plan de cours prévoyait l'étude des sujets suivants : importance de déterminer la source de l'incendie, emplacement et utilisation du matériel d'incendie, communications avec le poste de pilotage, responsabilités en matière de lutte contre les incendies ainsi que techniques appropriées de lutte contre les incendies, notamment utilisation des extincteurs.
Aucune formation spécifique ne portait sur la lutte contre les incendies se déclarant dans l'espace inoccupé, ni sur l'accès aux autres zones difficilement accessibles des parties pressurisées de l'avion. De plus, l'équipage de cabine n'avait reçu aucune formation spécifique sur la lutte contre les incendies se déclarant dans le poste de pilotage. Cet état de fait était conforme aux prescriptions réglementaires et aux normes en vigueur dans l'industrie.
1.18.2 Listes de vérifications de Swissair concernant la lutte contre les incendies en vol
1.18.2.1 Généralités
Pour les besoins des procédures d'urgence, chaque pilote disposait dans le poste de pilotage d'un recueil de listes de vérifications intitulé Emergency Checklist Alert and Non-alert, dans lequel les trois listes de vérifications suivantes portaient sur la fumée et les émanations :
- fumée dans le système de conditionnement d'air (voir l'Annexe B – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air);
- fumée ou émanations d'origine inconnue (voir l'Annexe C – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue);
- dissipation de la fumée et des émanations.
En cas de fumée ou d'incendie, l'équipage de cabine pouvait trouver dans la Liste de vérifications pour les préparatifs et l'évacuation en cas d'urgence dans la cabine deux procédures intitulées « Fumée à bord » et « Incendie à bord ».
1.18.2.2 Listes de vérifications de l'équipage de conduite en cas de fumée ou d'émanations
La certification du MD-11 prévoyait que les trois listes de vérifications suivantes seraient mises à la disposition des équipages de conduite pour leur permettre d'identifier et de traiter la fumée et les émanations : fumée dans le système de conditionnement d'air; fumée ou émanations d'origine inconnue; dissipation de la fumée et des émanations. L'avionneur avait recommandé d'utiliser la Liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air uniquement quand les membres de l'équipage de conduite étaient certains que la fumée ou les émanations provenaient du système de conditionnement d'air.
En mars 1993, la Liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air avait été retirée du manuel d'exploitation de l'équipage de conduite (FCOM) par l'avionneur, mais elle avait été conservée dans le manuel de vol (AFM) approuvé par la FAA. La Liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue avait alors été renommée Liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations du système électrique, du système de conditionnement d'air ou d'origine inconnue. On avait justifié cette modification en disant que, étant donné que les mêmes étapes figuraient dans la Liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue, quelle que soit l'origine de la fumée ou des émanations, il était possible d'avoir recours aux mêmes mesures pour tenter de l'isoler.
Swissair a élaboré ses listes de vérifications du MD-11 en se fondant sur le manuel de vol approuvé par la FAA. Lorsque l'avionneur a décidé de fusionner en une seule les deux listes de vérifications du FCOM ayant trait à la fumée et aux émanations, certains exploitants de ligne aérienne, dont Swissair, ont décidé de conserver deux listes de vérifications distinctes. Swissair en était arrivée à cette décision en se disant que si l'équipage de conduite était en mesure de déterminer, avec une certitude absolue, que le système de conditionnement d'air était à l'origine de la fumée ou des émanations, il pourrait utiliser la Liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air et éviter ainsi toute perturbation du système électrique de l'avion. Swissair considérait que cette option était la plus sûre parce que lorsque la Liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue était exécutée, l'alimentation électrique et la pression pneumatique sont coupées d'un certain nombre de services (voir l'Annexe C), ce qui rend le pilotage de l'avion plus exigeant.
1.18.2.3 Conception des listes de vérifications du MD-11 de Swissair
1.18.2.3.1 Philosophie et méthodologie
Le document de base pour les listes de vérifications du MD-11 utilisées par les équipages de Swissair est le manuel d'exploitation du MD-11 de Swissair. Ce manuel, élaboré par Swissair, décrit les systèmes de bord du MD-11 ainsi que les procédures d'exploitation en situation normale, anormale et d'urgence. Il a été élaboré à partir du manuel de vol approuvé par la FAA, du manuel d'exploitation du MD-11 de McDonnell Douglas et de la politique d'entreprise de Swissair. Les modifications apportées au manuel d'exploitation ont été communiquées à ses détenteurs au fur et à mesure des besoins au moyen de « Lettres d'envoi » numérotées de façon consécutive. Des bulletins du manuel d'exploitation (AOM) ont été périodiquement publiés afin d'informer les détenteurs du manuel des questions techniques ou opérationnelles relatives au manuel, y compris les modifications apportées aux listes de vérifications. Le manuel d'exploitation et les modifications qui y ont été apportées ont été soumis à l'OFAC pour examen; les JAR n'exigent pas que les modifications apportées aux listes de vérifications soient approuvées par l'OFAC. Les bulletins AOM sont soumis à l'OFAC à titre indicatif seulement.
La philosophie de Swissair en matière de conception des listes de vérifications s'appuyait sur les principes suivants : convivialité, accessibilité, brièveté et regroupement des éléments similaires. Les listes de vérifications devaient être conçues afin d'être de présentation simple, surtout celles ayant trait aux situations d'urgence, et de pouvoir être consultées rapidement et facilement par l'équipage de conduite. Chacune des procédures, dans son intégralité, devait être conçue de façon à pouvoir tenir sur une page, et les procédures portant sur les mêmes thèmes ont été regroupées.
Swissair a conçu ses listes de vérifications en étroite collaboration avec le constructeur. Les représentants des deux parties se sont rencontrés fréquemment afin d'étudier diverses questions, comme les modifications susceptibles d'être apportées aux listes et les problèmes relevés à l'occasion de l'utilisation des listes dans le cadre des séances de formation sur simulateur; cependant, le constructeur n'a pas à approuver les listes de vérifications utilisées par les exploitants.
1.18.2.3.2 Comparaison avec les lignes directrices
La FAA a publié en 1995 un document intitulé Human Performance Considerations in the Use and Design of Aircraft Checklists (considérations relatives aux facteurs humains dans la conception et l'utilisation des listes de vérifications de bord) afin d'aider les exploitants assujettis aux parties 121 et 135 des FAR à concevoir, à élaborer et à utiliser les listes de vérifications dans le poste de pilotage et de les sensibiliser à l'incidence du comportement humain sur l'utilisation des listes.
La Civil Aviation Authority (CAA) du Royaume-Uni dispose d'un recueil de lignes directrices analogue, intitulé Guidelines for the Design and Presentation of Emergency and Abnormal Checklists (lignes directrices sur la conception et la présentation des listes de vérifications en cas de situations d'urgence ou anormales).
Bien que ces lignes directrices n'aient pas été en vigueur au moment de la conception du MD-11, il était possible de s'y reporter lorsque les listes de vérifications ont été modifiées. Au cours de l'enquête sur l'accident de SR 111, ces lignes directrices ont été utilisées dans l'évaluation de la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations.
Les dérogations aux lignes directrices ont été consignées. Bien que le principe de la page unique soit en général approprié, dans le cas de la Liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue, son application se faisait au détriment de l'observation d'autres principes de conception. Ainsi, il a fallu, pour faire tenir cette liste sur une page, utiliser des caractères plus petits qu'il n'est recommandé dans la section des notes.
1.18.3 Accessibilité des cartes d'approche réglementaires
Les cartes d'approche réglementaires offrent à l'équipage de conduite des renseignements comme l'orientation des pistes, leur longueur et leur balisage lumineux, les altitudes minimales de sécurité et les altitudes de descente, les noms, les lettres d'identification et les fréquences des aides à la navigation, les fréquences radio et les caps à suivre en vol. Ces renseignements sont utilisés lorsqu'on pénètre dans l'espace aérien entourant un aéroport pour exécuter une approche aux instruments.
Comme nombre d'exploitants, la Swissair a établi pour l'avion MD-11 une procédure selon laquelle un jeu de cartes d'approche doit être placé dans un porte-documents rangé dans la bibliothèque de bord, à l'arrière du poste de pilotage. Comme aucun des deux pilotes ne pouvait atteindre le porte-documents en position assise, un pilote devait, pour y avoir accès, quitter son siège ou demander à un membre de l'équipage de cabine de le lui passer. En temps normal, ces situations présentent peu de risques; cependant, en cas de situation anormale ou d'urgence, cette tâche supplémentaire constitue une distraction qui peut faire perdre un temps précieux.
1.18.4 Questions relatives au câblage
1.18.4.1 Questions relatives à l'espacement des câbles
1.18.4.1.1 Généralités
Dans l'avion MD-11, le tableau de distribution supérieur renferme six bus qui assurent l'alimentation de nombreux systèmes : quatre bus d'urgence, le bus batterie et le bus permanent de batterie. Les câbles d'alimentation du bus batterie et du bus permanent de batterie sont acheminés ensemble dans cinq chemins de câbles distincts allant du compartiment avionique au tableau de distribution supérieur du poste de pilotage. Les cinq chemins de câbles sont maintenus espacés les uns des autres jusqu'à un endroit situé à environ 31 à 46 cm (12 à 18 po) à l'arrière du boîtier situé derrière le tableau de distribution supérieur. Ils sont alors mis en faisceau et pénètrent dans le tableau de distribution supérieur par une ouverture ovale pratiquée du côté droit, à l'arrière du boîtier.
On a trouvé dans les débris un des câbles d'alimentation d'un bus d'urgence, dont on a déterminé qu'il s'agissait d'un segment du câble d'alimentation du bus c.a. d'urgence de gauche, dont le cuivre avait fondu comme à la suite d'un amorçage d'arc électrique à un endroit situé de 10 à 15 cm (3,9 à 5,9 po) à l'extérieur du logement. Le câble en question était gainé d'un isolant de type BXS7008, un isolant au XL-ETFE, tandis que les autres câbles étaient revêtus d'un isolant BSX7007, un guipage de polyimide et d'une gaine extérieure en fibre méta-aramide. On a constaté dans cette zone générale au-dessus de la cabine de pilotage des dommages causés par la chaleur dégagée par l'incendie en vol. D'autres câbles provenant de la même zone, mais appartenant à un faisceau différent, avaient aussi été endommagés par des arcs électriques. Comme l'indique la rubrique 1.18.8 du présent rapport, la séquence connue d'événements ne vient pas étayer l'hypothèse selon laquelle ce serait l'amorçage d'arcs électriques dans cette zone qui aurait été à l'origine de l'événement initial. En d'autres termes, la production d'arcs électriques dans cette zone était survenue à un stade ultérieur de la séquence de défaillance et elle avait été occasionnée par les dommages causés aux câbles du fait de la chaleur dégagée par l'incendie.
L'alimentation du bus c.a. d'urgence de gauche a été interrompue peu de temps avant que les enregistreurs de bord ne cessent de fonctionner. On ignore si l'un ou l'ensemble des autres bus d'urgence ou le bus batterie ont été touchés ultérieurement, mais on sait qu'aucun d'entre eux ne l'a été en même temps que le bus c.a. d'urgence de gauche. Cependant, étant donné que les câbles se trouvaient tout près les uns des autres à l'intérieur du panneau supérieur, ils auraient tous été exposés au même danger, à savoir chaleur, incendie ou amorçage d'arcs électriques.
1.18.4.1.2 Conséquences d'une perte totale d'alimentation du panneau supérieur
Il a été impossible de déterminer si le bus d'urgence c.a. de gauche avait été le seul bus du panneau supérieur dont l'alimentation avait été interrompue; une évaluation a toutefois été faite afin qu'on puisse déterminer quel effet aurait sur les systèmes de bord une perte totale d'alimentation. Comme on savait que l'alimentation primaire avait été maintenue jusqu'au moment de l'impact, l'évaluation a visé à déterminer quelles fonctions le maintien de cette alimentation avait permis de garder actives et capables de transmettre des renseignements de base, comme l'assiette, l'altitude, la vitesse indiquée et le cap. Étant donné que les gouvernes principales n'ont pas besoin d'être alimentées pour fonctionner, elles n'ont pas été soumises à la présente évaluation.
L'écran d'affichage 2 continuerait d'être alimenté par l'alimentation primaire et serait reconfiguré en tant qu'écran principal de vol dont les signaux d'entrée seraient fournis par le module électronique d'affichage 3. Le PFD indiquerait l'assiette et le cap, tandis que l'altitude et la vitesse indiquée seraient données par l'instrument de secours. Les commandes moteur seraient fonctionnelles, mais on ne disposerait pas de renseignements sur le fonctionnement des moteurs ni de données d'alerte. Toutes les communications radio seraient interrompues. Nombre d'autres voyants d'alarme, tels que le voyant d'alarme principal et les voyants d'avertissement, ne seraient pas fonctionnels.
1.18.4.1.3 Exigences réglementaires
On a procédé dans le cadre de l'enquête à une évaluation visant à déterminer si le câblage de l'avion MD-11 respectait les exigences réglementaires relatives à l'espacement des fils et s'il y avait eu des manquements à la sécurité connexes.
Les FAR suivantes ont trait à l'espacement et à l'acheminement des câbles :
- la FAR 25.1309(b) stipule que l'analyse de défaillance doit tenir pour acquis qu'aucune défaillance simple ne doit compromettre la sûreté du vol et de l'atterrissage;
- la FAR 25.903(d) stipule que les moteurs à turbine doivent être installés et conçus de façon à réduire au minimum le risque d'endommagement des câbles en cas de défaillance du rotor;
- la FAR 25.631 stipule que le câblage nécessaire à la poursuite du vol et à un atterrissage en toute sécurité doit être protégé contre les risques aviaires;
- la FAR 25.1353(b) porte sur l'espacement du câblage des systèmes essentiels et des câbles d'alimentation haute tension.
Cette évaluation a porté plus particulièrement sur la zone où les câbles d'alimentation sont mis en faisceau juste avant leur entrée dans le boîtier du tableau de commutation supérieur. Ce faisceau se trouvait à proximité immédiate de centaines d'autres fils eux aussi groupés en faisceau à leur entrée ou à leur sortie du boîtier. Pour ce qui concerne l'évaluation de la zone du panneau supérieur du MD-11, la FAR 25.1353(b) est la plus pertinente, qui stipule que « Les câbles doivent être groupés, acheminés et espacés de façon à réduire au minimum les dommages subis par les circuits essentiels en cas de défectuosité des câbles d'alimentation haute tension. » Cette prescription oblige donc à assurer l'espacement des câbles pour éviter d'endommager les circuits essentiels. Selon le constructeur du MD-11, les charges essentielles sont celles qui sont nécessaires au maintien d'un vol contrôlé à visibilité nulleNote de bas de page 89. Le règlement exige qu'une menace possible soit réduite au minimum et non pas qu'elle soit éliminée. Bien que l'expression « réduire au minimum »ne soit pas définie, elle sous-entend selon la FAA dans des limites raisonnables.
Pour satisfaire aux exigences de la FAR 25.1353(b), un espacement est maintenu entre les câbles électriques du MD-11 qui sont acheminés vers le panneau supérieur jusqu'à leur entrée dans le panneau. Une fois les câbles mis en faisceau, l'espacement est supprimé. Afin de réduire au minimum le risque d'usure par frottement de l'isolant des câbles, le constructeur a installé un passe-câble en nylon dans l'ouverture ovale du logement. Pour assurer une meilleure protection mécanique, les câbles de calibre 8 AWG à 00 AWG sont revêtus d'un autre (troisième) guipage de polyimide et d'une gaine extérieure (fibre méta-aramide). Les fils de calibre 24 AWG à 10 AWG sont revêtus de deux guipages de polyimide. Les trois câbles du bus c.a. d'urgence de droite étaient aussi revêtus d'un tube en fibre de verre tressé gainé d'élastomère de silicone pour plus de protection. La protection mécanique supplémentaire dont étaient dotés les câbles dans la zone de mise en faisceau était conforme aux exigences de réduction au minimum dans des limites raisonnables comme l'interprétait la FAA. Faute de données quantitatives spécifiques dans les documents d'orientation, il a été impossible d'établir les critères utilisés pour déterminer le degré de protection mécanique nécessaire pour satisfaire aux exigences de la FAR 25.1353(b) dans les situations où il est impossible d'assurer un espacement approprié.
L'acheminement des fils du MD-11 dans le boîtier du tableau de commutation supérieur était basé sur celui qui était utilisé pour le DC-10. On a examiné les antécédents en service des deux avions afin de déterminer si d'autres problèmes, comme de l'usure par frottement, avaient été signalés. Aucun n'a été découvert.
1.18.4.1.4 Utilisation de divers types d'isolant électrique
Le principal isolant électrique utilisé dans l'avion en question était le MIL-W-81381, pellicule polyimide isolante. Cependant, d'autres types d'isolant étaient aussi utilisés selon les exigences. Des fils gainés d'un isolant distinct étaient parfois acheminés dans le même faisceau de fils. Bien qu'aucun règlement ne porte sur l'utilisation d'isolants aux propriétés distinctes, les AC 25-16 et 43.13-1B de la FAA énoncent certains principes directeurs. Selon ces principes, il revient à l'avionneur ou à la personne ayant subséquemment modifié l'avion d'établir la compatibilité des divers matériaux isolants à la lumière des antécédents en service, de tests additionnels, ou des deux.
Lorsque le DC-10 a effectué son premier vol commercial il y a plus de 25 ans, il avait fallu faire face à certains problèmes liés à la défaillance prématurée des colliers et des fils aux points de fixation situés dans des zones de fortes vibrations (mâts, aile et moteur d'empennage). Le constructeur du MD-11 avait alors mis au point une méthode d'essai de compatibilité des fils permettant de simuler le milieu vibratoire le plus intense de l'avion et de reproduire les défaillances survenues dans des avions en service. Des essais ont permis au constructeur du MD-11 d'évaluer la compatibilité de divers matériaux isolants, d'évaluer de nouveaux types d'isolant et de mettre au point des pièces de retenue (colliers, attaches autobloquantes en nylon, etc.), des matériaux ainsi que des tubes et des manchons de protection. Le constructeur du MD-11 indique que les essais de vibration et d'usure par frottement des fils entre eux ont démontré que, pour autant que les fils soient installés correctement, l'utilisation des différents isolants approuvés n'avait pas posé de problèmesNote de bas de page 90. En règle générale, les profils d'usure s'étaient révélés similaires peu importe si on utilisait un seul isolant ou plusieurs. L'essai de compatibilité des fils mis au point par le constructeur du MD-11 lui sert maintenant d'essai standard pour évaluer et mettre au point de nouveaux types d'isolant électrique, de nouveaux éléments et matériaux de retenue, ainsi que de nouveaux tubes et manchons de protection. De plus, la FAA a indiqué qu'aucun problème systémique n'est associé à l'utilisation de types de fil différents, pour autant que ceux-ci fassent l'objet d'une installation et d'un entretien appropriés.
1.18.5 Dispositifs de protection des circuits
1.18.5.1 Généralités
Une prescription réglementaire exige que les fils et les câbles électriques soient protégés contre les surintensitésNote de bas de page 91. En général, cette protection est assurée par un dispositif de protection de circuit (CPD). Les CPD sont conçus pour protéger le fil ou le câble; ils ne sont pas conçus pour protéger les composants électriques connexes, comme les ensembles remplaçables en première ligne (LRU), qui pourraient nécessiter leurs propres CPD.
1.18.5.2 Conception des disjoncteurs
La majorité des CPD utilisés dans les avions sont des disjoncteurs thermiques à réenclenchement, mis au point pour remplacer les fusibles. Ces disjoncteurs classiques comportent en général un circuit constitué d'un bilame et de deux contacts électriques, dont l'un est à ressort. En cas de surintensité, la température du circuit s'élève en fonction de l'intensité du courant et du temps. Lorsque la température de déclenchement est atteinte, le bilame se déforme pour provoquer le déclenchement du contact et l'ouverture du circuit. Ce disjoncteur est dit à déclenchement libre du fait qu'il ne peut être réarmé en présence d'une surintensité. Après un intervalle de refroidissement prédéterminé, le disjoncteur peut être réenclenché manuellement.
Ce type de disjoncteur s'est révélé capable de remplir efficacement sa fonction principale, qui consiste à protéger les fils et les câbles contre les dommages liés aux surintensités. Plus précisément, ce type de disjoncteur protège efficacement le circuit à l'intérieur de ses limites nominales de température et de durée d'exposition aux surintensités.
Cependant, certains types de défaillance des fils et des câbles sont associés à la formation d'arcs électriques. La formation de ces arcs crée des conditions qui s'écartent des conditions nominales de déclenchement du disjoncteur classique. Elle peut entre autres donner lieu à un contact métal sur métal (fil conducteur sur fil conducteur ou fil conducteur sur masse) intermittent appelé « crépitement ». Ces événements peuvent générer des températures extrêmement élevées au point du défaut d'isolement; cependant, il se peut que l'appel de courant ne soit pas suffisant pour porter la température du bilame à la valeur de déclenchement du disjoncteur. Dans certains cas, un défaut d'isolement d'un fil peut entraîner d'autres défaillances d'arc électrique, comme le cheminement d'arc. Le cheminement d'arc se caractérise par une carbonisation du matériau isolant pouvant donner lieu à des amorçages d'arc intermittents entre les fils conducteurs, le châssis de l'avion ou un autre matériau conducteur mis à la masse.
Bien que l'on soit bien au fait des dangers associés au crépitement et au cheminent d'arc, il n'existe, dans l'état actuel de la technologie, aucun CPD d'avion permettant d'assurer une détection fiable et précise des anomalies associées aux défauts d'isolement des fils. La Marine américaine (USN), la FAA et les avionneurs parrainent des initiatives visant à combler cette lacune et à mettre au point des disjoncteurs d'arc électrique, conçus spécialement pour les avions.
1.18.5.3 Philosophie en matière de réenclenchement des disjoncteurs
Les philosophies ayant cours au sein de l'industrie de l'aviation en matière de réenclenchement des disjoncteurs sont entachées d'incohérences qui ont donné lieu à la mise en place de pratiques inappropriées. Ainsi, la majorité des membres des équipages de conduite et du personnel de maintenance ont l'impression qu'il est toujours acceptable de réenclencher un disjoncteur déclenché. Par conséquent, il est fréquent que la première étape du dépannage en cas de déclenchement d'un disjoncteur soit une tentative de réenclenchement. On considère aussi qu'il est moins dangereux de réenclencher un disjoncteur de faible courant nominal qu'un disjoncteur de courant nominal plus élevé. Or, bien que le réenclenchement d'un disjoncteur de faible courant nominal puisse avoir des conséquences moins graves, dans des conditions propices, un amorçage d'arc touchant un circuit de faible intensité pourrait facilement allumer un incendie. Comme il est en pratique impossible de savoir si de telles conditions existent dans une situation donnée, il faut éviter de réenclencher un disjoncteur déclenché avant d'avoir repéré et corrigé le défaut à l'origine du déclenchement.
Il est possible que les divers intervenants au sein de l'industrie de l'aviation ne comprennent pas toutes les conséquences défavorables que peut avoir le réenclenchement d'un disjoncteur. Un réenclenchement inapproprié peut aggraver les conséquences de l'anomalie initiale et entraîner un amorçage d'arc ou un cheminement d'arc; cependant, aucun règlement ne prescrit clairement à l'industrie la marche à suivre en la matière. Dans l'AC 25.16, la FAA recommande d'inclure dans tous les manuels de vol les directives suivantes :
[traduction] L'équipage ne doit faire qu'une seule tentative pour rétablir une source d'alimentation automatiquement interrompue ou pour réenclencher ou remplacer un CPD dont le déclenchement a une incidence sur la conduite ou la sécurité du vol.
Cet énoncé n'indique pas clairement quelle mesure il convient de prendre. De plus, aucun règlement ne stipule que les manuels de vol doivent informer les équipages de conduite des conséquences défavorables du réenclenchement des disjoncteurs ou énoncer de façon catégorique que n'est autorisé aucun réenclenchement autre que celui des systèmes que le pilote commandant de bord estime essentiels à la poursuite du vol.
De même, les documents d'orientation élaborés par la FAA à l'intention du personnel de maintenance ne traitent pas du réenclenchement des disjoncteurs déclenchés. L'AC 43.13-1B de la FAA renvoie toutefois à l'Aerospace Recommended Practice (ARP) 1199 de la Society of Automotive Engineering, qui porte sur les dispositifs de protection contre les surintensités. Bien que cette ARP ne traite pas nommément des conséquences immédiates du réenclenchement des disjoncteurs, elle recommande toutefois de ne pas laisser le déclenchement des disjoncteurs devenir une habitude.
En 1999, les principaux avionneurs ont fait la synthèse de leur politique existante en matière de réenclenchement des disjoncteurs pour transmettre à tous les exploitants des directives claires et limpides à ce sujet. Or, les exploitants ne sont pas tenus de se conformer aux recommandations des avionneurs; ils sont uniquement tenus de satisfaire aux exigences des organismes de réglementation.
Le 21 août 2000, afin de tenter de normaliser l'approche adoptée dans l'industrie, la FAA publiait un Joint Flight Standards Information Bulletin intitulé Resetting Tripped Circuit Breakers (réenclenchement des disjoncteurs). Ce bulletin avait pour objet de veiller à ce que tous les transporteurs aériens mettent à la disposition des équipages de conduite, du personnel de maintenance et du personnel chargé de l'entretien au sol des aéronefs des programmes de formation et des manuels faisant état d'une politique et de procédures d'entreprise concernant le réenclenchement des disjoncteurs qui reflètent la position de la FAA. Le bulletin s'adressait uniquement aux compagnies de transport aérien régulier, dont les aéronefs comptent au moins 10 sièges passagers ou ont une charge utile de plus de 7 500 livres. La date limite pour se conformer aux normes énoncées dans ce bulletin était le 31 octobre 2001.
1.18.5.4 Utilisation des disjoncteurs comme interrupteurs
Il n'est pas recommandé d'utiliser les disjoncteurs comme interrupteurs, que ce soit à dessein ou en raison de la performance en service d'un système. Les directives de la FAA à ce sujet sont énoncées dans l'AC 43.13-1B, qui stipule : [traduction]« Il n'est pas recommandé d'utiliser les disjoncteurs comme ... interrupteurs. L'utilisation d'un disjoncteur comme interrupteur aura pour effet de réduire sa vie utile. »
L'ARP 1199 de la Society of Automotive Engineering précise en outre que :
- les disjoncteurs sont conçus pour une autre fin et leur durée de vie est au moins dix fois inférieure à celle des interrupteurs;
- il faut éviter de considérer les disjoncteurs comme des substituts aux interrupteurs;
- l'actionnement manuel trop fréquent d'un disjoncteur peut entraîner l'usure dynamique de ses zones de verrouillage et de ses points d'articulation;
- l'utilisation d'un disjoncteur comme interrupteur peut provoquer un amorçage d'arc entre les contacts, et donc la corrosion par piqûres des contacts et du brouillage électromagnétique.
Étant donné qu'aucun règlement n'interdit l'utilisation des disjoncteurs comme interrupteurs, il semble que cette directive ait pour objet d'améliorer la fiabilité du système plutôt que d'établir les exigences minimales à satisfaire pour assurer un fonctionnement sûr du système.
Tel qu'il a été certifié et installé à bord de l'avion en question, le RDB d'origine ne comportait pas d'interrupteur général de marche-arrêt. Le disjoncteur du système de divertissement vidéo (VES) / Interactive Flight Technologies de 28V a été installé pour assurer cette fonction marche-arrêt. Bien qu'on ait déterminé que cette configuration n'avait aucunement été liée au déclenchement de l'incendie, elle constituait une source possible de problèmes, comme le suggère l'ARP 1199 de la Society of Automotive Engineering. Comme l'avion moderne utilise davantage d'équipement informatisé, il n'est pas rare que des systèmes soient conçus de cette manière. Les disjoncteurs sont utilisés plus souvent comme interrupteurs, étant donné que l'on considère que leur actionnement représente une méthode commode de « réinitialisation » en cas d'arrêt imprévu du logiciel.
Bien que l'enquête n'ait pas permis de confirmer la présence de conditions dangereuses associées à l'utilisation des disjoncteurs comme interrupteurs, la pratique n'en soulève pas moins des questions, notamment sur la possibilité qu'une « commutation » fréquente modifie les propriétés physiques d'un disjoncteur et ait une incidence sur son temps de réaction en cas de surintensité. L'utilisation systématique d'un disjoncteur comme interrupteur risque en outre d'influer sur la perception qu'a une personne de la fonction réelle d'un disjoncteur.
1.18.5 Dispositifs de protection des circuits
1.18.5.1 Généralités
Une prescription réglementaire exige que les fils et les câbles électriques soient protégés contre les surintensités91. En général, cette protection est assurée par un dispositif de protection de circuit (CPD). Les CPD sont conçus pour protéger le fil ou le câble; ils ne sont pas conçus pour protéger les composants électriques connexes, comme les ensembles remplaçables en première ligne (LRU), qui pourraient nécessiter leurs propres CPD.
1.18.5.2 Conception des disjoncteurs
La majorité des CPD utilisés dans les avions sont des disjoncteurs thermiques à réenclenchement, mis au point pour remplacer les fusibles. Ces disjoncteurs classiques comportent en général un circuit constitué d'un bilame et de deux contacts électriques, dont l'un est à ressort. En cas de surintensité, la température du circuit s'élève en fonction de l'intensité du courant et du temps (DIT1-107). Lorsque la température de déclenchement est atteinte, le bilame se déforme pour provoquer le déclenchement du contact et l'ouverture du circuit. Ce disjoncteur est dit à déclenchement libre du fait qu'il ne peut être réarmé en présence d'une surintensité.
Après un intervalle de refroidissement prédéterminé, le disjoncteur peut être réenclenché manuellement.
Ce type de disjoncteur s'est révélé capable de remplir efficacement sa fonction principale, qui consiste à protéger les fils et les câbles contre les dommages liés aux surintensités. Plus précisément, ce type de disjoncteur protège efficacement le circuit à l'intérieur de ses limites nominales de température et de durée d'exposition aux surintensités.
Cependant, certains types de défaillance des fils et des câbles sont associés à la formation d'arcs électriques. La formation de ces arcs crée des conditions qui s'écartent des conditions nominales de déclenchement du disjoncteur classique. Elle peut entre autres donner lieu à un contact métal sur métal (fil conducteur sur fil conducteur ou fil conducteur sur masse) intermittent appelé « crépitement ». Ces événements peuvent générer des températures extrêmement élevées au point du défaut d'isolement; cependant, il se peut que l'appel de courant ne soit pas suffisant pour porter la température du bilame à la valeur de déclenchement du disjoncteur.
Dans certains cas, un défaut d'isolement d'un fil peut entraîner d'autres défaillances d'arc électrique, comme le cheminement d'arc. Le cheminement d'arc se caractérise par une carbonisation du matériau isolant pouvant donner lieu à des amorçages d'arc intermittents entre les fils conducteurs, le châssis de l'avion ou un autre matériau conducteur mis à la masse.
Bien que l'on soit bien au fait des dangers associés au crépitement et au cheminent d'arc, il n'existe, dans l'état actuel de la technologie, aucun CPD d'avion permettant d'assurer une détection fiable et précise des anomalies associées aux défauts d'isolement des fils. La Marine américaine (USN), la FAA et les avionneurs parrainent des initiatives visant à combler cette lacune et à mettre au point des disjoncteurs d'arc électrique, conçus spécialement pour les avions.
1.18.5.3 Philosophie en matière de réenclenchement des disjoncteurs
Les philosophies ayant cours au sein de l'industrie de l'aviation en matière de réenclenchement des disjoncteurs sont entachées d'incohérences qui ont donné lieu à la mise en place de pratiques inappropriées. Ainsi, la majorité des membres des équipages de conduite et du personnel de maintenance ont l'impression qu'il est toujours acceptable de réenclencher un disjoncteur déclenché. Par conséquent, il est fréquent que la première étape du dépannage en cas de déclenchement d'un disjoncteur soit une tentative de réenclenchement. On considère aussi qu'il est moins dangereux de réenclencher un disjoncteur de faible courant nominal qu'un
disjoncteur de courant nominal plus élevé. Or, bien que le réenclenchement d'un disjoncteur de faible courant nominal puisse avoir des conséquences moins graves, dans des conditions propices, un amorçage d'arc touchant un circuit de faible intensité pourrait facilement allumer un incendie. Comme il est en pratique impossible de savoir si de telles conditions existent dans une situation donnée, il faut éviter de réenclencher un disjoncteur déclenché avant d'avoir repéré et corrigé le défaut à l'origine du déclenchement.
Il est possible que les divers intervenants au sein de l'industrie de l'aviation ne comprennent pas toutes les conséquences défavorables que peut avoir le réenclenchement d'un disjoncteur. Un réenclenchement inapproprié peut aggraver les conséquences de l'anomalie initiale et entraîner un amorçage d'arc ou un cheminement d'arc; cependant, aucun règlement ne prescrit clairement à l'industrie la marche à suivre en la matière. Dans l'AC 25.16, la FAA recommande d'inclure dans tous les manuels de vol les directives suivantes :
[TRADUCTION] L'équipage ne doit faire qu'une seule tentative pour rétablir une source d'alimentation automatiquement interrompue ou pour réenclencher ou remplacer un CPD dont le déclenchement a une incidence sur la conduite ou la sécurité du vol.
Cet énoncé n'indique pas clairement quelle mesure il convient de prendre. De plus, aucun règlement ne stipule que les manuels de vol doivent informer les équipages de conduite des conséquences défavorables du réenclenchement des disjoncteurs ou énoncer de façon catégorique que n'est autorisé aucun réenclenchement autre que celui des systèmes que le pilote commandant de bord estime essentiels à la poursuite du vol.
De même, les documents d'orientation élaborés par la FAA à l'intention du personnel de maintenance ne traitent pas du réenclenchement des disjoncteurs déclenchés. L'AC 43.13-1B de la FAA renvoie toutefois à l'Aerospace Recommended Practice (ARP) 1199 de la Society of Automotive Engineering, qui porte sur les dispositifs de protection contre les surintensités. Bien que cette ARP ne traite pas nommément des conséquences immédiates du réenclenchement des disjoncteurs, elle recommande toutefois de ne pas laisser le déclenchement des disjoncteurs devenir une habitude.
En 1999, les principaux avionneurs ont fait la synthèse de leur politique existante en matière de réenclenchement des disjoncteurs pour transmettre à tous les exploitants des directives claires et limpides à ce sujet. Or, les exploitants ne sont pas tenus de se conformer aux recommandations des avionneurs; ils sont uniquement tenus de satisfaire aux exigences des organismes de réglementation.
Le 21 août 2000, afin de tenter de normaliser l'approche adoptée dans l'industrie, la FAA publiait un Joint Flight Standards Information Bulletin intitulé Resetting Tripped Circuit Breakers (réenclenchement des disjoncteurs). Ce bulletin avait pour objet de veiller à ce que tous les transporteurs aériens mettent à la disposition des équipages de conduite, du personnel de maintenance et du personnel chargé de l'entretien au sol des aéronefs des programmes de formation et des manuels faisant état d'une politique et de procédures d'entreprise concernant le réenclenchement des disjoncteurs qui reflètent la position de la FAA. Le bulletin s'adressait uniquement aux compagnies de transport aérien régulier, dont les aéronefs comptent au moins 10 sièges passagers ou ont une charge utile de plus de 7 500 livres. La date limite pour se conformer aux normes énoncées dans ce bulletin était le 31 octobre 2001.
1.18.5.4 Utilisation des disjoncteurs comme interrupteurs
Il n'est pas recommandé d'utiliser les disjoncteurs comme interrupteurs, que ce soit à dessein ou en raison de la performance en service d'un système. Les directives de la FAA à ce sujet sont énoncées dans l'AC 43.13-1B, qui stipule :
[TRADUCTION] « Il n'est pas recommandé d'utiliser les disjoncteurs comme... interrupteurs. L'utilisation d'un disjoncteur comme interrupteur aura pour effet de réduire sa vie utile. »
L'ARP 1199 de la Society of Automotive Engineering précise en outre que :
- les disjoncteurs sont conçus pour une autre fin et leur durée de vie est au moins dix fois inférieure à celle des interrupteurs;
- il faut éviter de considérer les disjoncteurs comme des substituts aux interrupteurs;
- l'actionnement manuel trop fréquent d'un disjoncteur peut entraîner l'usure dynamique de ses zones de verrouillage et de ses points d'articulation;
- l'utilisation d'un disjoncteur comme interrupteur peut provoquer un amorçage d'arc entre les contacts, et donc la corrosion par piqûres des contacts et du brouillage électromagnétique.
Étant donné qu'aucun règlement n'interdit l'utilisation des disjoncteurs comme interrupteurs, il semble que cette directive ait pour objet d'améliorer la fiabilité du système plutôt que d'établir les exigences minimales à satisfaire pour assurer un fonctionnement sûr du système.
Tel qu'il a été certifié et installé à bord de l'avion en question, le RDB d'origine ne comportait pas d'interrupteur général de marche-arrêt. Le disjoncteur du système de divertissement vidéo (VES) / Interactive Flight Technologies de 28V a été installé pour assurer cette fonction
marche-arrêt. Bien qu'on ait déterminé que cette configuration n'avait aucunement été liée au déclenchement de l'incendie, elle constituait une source possible de problèmes, comme le suggère l'ARP 1199 de la Society of Automotive Engineering. Comme l'avion moderne utilise davantage d'équipement informatisé, il n'est pas rare que des systèmes soient conçus de cette manière. Les disjoncteurs sont utilisés plus souvent comme interrupteurs, étant donné que l'on considère que leur actionnement représente une méthode commode de « réinitialisation » en cas d'arrêt imprévu du logiciel.
Bien que l'enquête n'ait pas permis de confirmer la présence de conditions dangereuses associées à l'utilisation des disjoncteurs comme interrupteurs, la pratique n'en soulève pas moins des questions, notamment sur la possibilité qu'une « commutation » fréquente modifie les propriétés physiques d'un disjoncteur et ait une incidence sur son temps de réaction en cas de surintensité. L'utilisation systématique d'un disjoncteur comme interrupteur risque en outre d'influer sur la perception qu'a une personne de la fonction réelle d'un disjoncteur.
1.18.5.5 Entretien des disjoncteurs
Le disjoncteur est reconnu au sein de la communauté aéronautique comme un composant simple, durable et fiable, conçu pour protéger les fils et les câbles de l'aéronef pendant toute la durée de vie de ce dernier. En raison de sa sûreté de fonctionnement, l'entretien du disjoncteur se limite d'ordinaire à le remplacer en cas de défaillance.
Figurent au nombre des modes de défaillance types des disjoncteurs : le soudage, l'érosion des contacts électriques et la contamination.
De plus, les caractéristiques mécaniques d'un disjoncteur se modifient lorsque son mécanisme de déclenchement est resté inactif pendant longtemps. Par la suite, il peut arriver que le dispositif fonctionne mal en cas de surintensité et n'assure pas une protection appropriée du circuit. Il peut être utile de soumettre le disjoncteur à des inspections périodiques, comprenant entre autres l'actionnement répétitif hors tension de son mécanisme, pour en assurer la fiabilité. Un tel actionnement répétitif permet de rehausser la performance du disjoncteur par le fonctionnement du mécanisme de déclenchement du disjoncteur et par l'élimination des impuretés des surfaces de contact. Tant la FAA que la Society of Automotive Engineering recommandent d'avoir recours à cette pratique pour améliorer la fiabilité des disjoncteursNote de bas de page 92.
1.18.6 Champs rayonnés à haute intensité
1.18.6.1 Généralités
Les aéronefs modernes émettent et reçoivent des signaux de radiofréquence dans l'atmosphère à l'extérieur des aéronefs. De plus, des signaux RF sont acheminés et diffusés à l'intérieur de l'aéronef, par l'intermédiaire de câbles électriques, pour commander divers systèmes éélectroniques et communiquer avec eux. Des champs rayonnés à haute intensité (CRHI), produits par de puissants émetteurs radar ou par la foudre, pénètrent partiellement dans un avion commercial par des ouvertures de son fuselageNote de bas de page 93. Ces CRHI peuvent s'infiltrer dans le câblage à l'intérieur de la structure de l'avion et provoquer la distorsion ou l'altération des signaux acheminés dans ces câbles et perturber ainsi le fonctionnement normal des systèmes de bord connexes. De plus, si le gradient des CRHI à l'intérieur de la partie pressurisée de l'avion excède 23 kilovolt(s) par centimètre (kV/cm), il peut arriver qu'une décharge électrique se produise entre deux fils conducteurs rapprochésNote de bas de page 94. En pareil cas, il se peut que des composants électriques soient endommagés et que des matériaux inflammables prennent feu dans la zone voisine. On a étudié les caractéristiques des CRHI dans le voisinage de l'avion en question afin de déterminer si l'intensité du champ local était suffisante pour produire un tel effet.
1.18.6.2 Environnement à l'aéroport international JFK
L'environnement électromagnétique à l'aéroport international JFK a été évalué à partir d'une étudeNote de bas de page 95, réalisée en 1998, qui portait sur les valeurs de champ de crête et moyennes auxquelles les avions sillonnant l'espace aérien civil des États-Unis pouvaient être exposés. Pendant les opérations normales d'approche et de décollage aux aéroports et autour de ceux-ci, on peut enregistrer une valeur de champ de crête de 3 kV/m dans la bande de fréquence allant de 2 à 6 gigahertz (GHz).
1.18.6.3 Environnement électromagnétique en route
Pour la portion en route du vol en question, les plus importants CRHI ont été produits par un radar de surveillance de route aérienne AN/FPS-117, situé près de Barrington, en Nouvelle-Écosse. À 1 h 9, l'avion en question est passé à moins de 10 nm de cet emplacement radar à un angle de site d'environ 30° par rapport à l'horizontale. Le radar de Barrington peut produire un champ dont la valeur de crête atteint 20 volts par mètre (V/m), à une distance oblique d'environ 10,5 nm. Cependant, comme ce radar est conçu pour assurer un gain optimal à des angles de site relativement faibles, il a produit un champ d'une valeur d'environ 4,3 V/m dans l'environnement externe de l'avion en question. Le radar de Barrington et les émetteurs d'arrière-plan ont produit un champ dont la valeur de crête combinée a atteint environ 12,1 V/m dans l'environnement externe de l'avion en question.
1.18.6.4 Environnement CRHI théoriquement le plus défavorable
Une estimation de l'environnement CRHI le plus défavorable auquel l'avion a pu être exposé au cours d'une des phases de vol a été établie pour l'espace aérien où sont admis les avions commerciaux. Pour ce faire, on a calculé la valeur des champs produits par les émetteurs de surface et les radars d'interception aéroportés, exploités conformément aux minima d'espacement autorisés par les règles de vol aux instruments. Il n'a pas été tenu compte des émetteurs mobiles et expérimentaux, ni des émetteurs situés à l'intérieur de zones à accès limité, de zones à accès interdit et de zones dangereuses. Selon cette méthodologie, le champ électromagnétique le plus défavorable aurait atteint une valeur de crête de 7 200 V/m, à l'intérieur de la bande de fréquence de 4 à 6 GHz.
1.18.6.5 Environnement CRHI de certification du MD-11
Dans le cadre de sa certification, l'avion MD-11 a été soumis à des essais réalisés dans un environnement CRHI conformément aux exigences de la FAA et des JAA. Des méthodes d'essai ont été spécifiées pour démontrer que les systèmes de bord du MD-11 étaient suffisamment protégés contre les effets des CRHI. Le MD-11 a été soumis lors de ces essais à des champs d'une intensité supérieure à celle qui est spécifiée dans les directives de certification s'appliquant aux nouveaux aéronefs et à celle prévue dans l'environnement théoriquement le plus défavorable. Ainsi, la méthode d'essai précisait que le MD-11 devait être soumis, dans la bande de fréquence de 4 à 6 GHz où on observe théoriquement les valeurs de crête, à un champ d'une valeur de crête de 14 500 V/m, soit une valeur près de deux fois supérieure à la valeur de crête prévue dans l'environnement électromagnétique théoriquement le plus défavorable. La méthode précisait en outre que le MD-11 devait être soumis à un champ d'une valeur de crête de 9 000 V/m dans la bande de fréquence de 1 à 2 GHz, soit la bande de fréquence du radar de Barrington.
1.18.6.6 Effet des CRHI sur les communications VHF
Les antennes des avions sont conçues pour recevoir les signaux RF dans des bandes de fréquence données et acheminer ces signaux aux récepteurs radio ou radar de bord. Les radios de bord sont conçues pour fonctionner à des fréquences attribuées conformément aux allocations nationales et internationales du spectre RF. Ces allocations sont conçues pour éviter tout brouillage entre les sources autorisées de RF haute puissance et les radios et radars d'avion. Si une source de CRHI devait être exploitée à l'intérieur de la bande de fréquence attribuée à une radio de bord, les signaux CRHI émis à l'intérieur de la bande de fréquence à laquelle est syntonisé le récepteur radio seraient démodulés et amplifiés, ce qui nuirait aux communications VHF. Les récepteurs radio modernes sont toutefois conçus pour éviter que les signaux radioélectriques soient amplifiés à des intensités dangereuses. En général, il n'y a pas de lien entre la dégradation ou la perturbation des communications VHF attribuable au brouillage électromagnétique et la présence de champs d'une intensité suffisante pour induire une décharge électrique entre fils conducteurs voisins. Les dossiers d'entretien des avions commerciaux de Douglas ne renferment aucun cas de détérioration ou d'interruption des communications VHF attribuable aux CRHI, ni de présence de champs suffisamment forts pour induire des décharges électriques entre des conducteurs voisins.
1.18.6.7 Effet de la résonance sur l’intensité des CRHI (DIT1-114)
Lorsqu’une onde progressive est réfléchie sur elle-même, l’énergie de l’onde incidente et celle de l’onde réfléchie peuvent se combiner pour former une onde stationnaire renforcée. Dans le cas des ondes électromagnétiques, telles que les CRHI, le phénomène d’onde renforcée ou la résonance peut se produire dans des cavités fermées, le long d’un segment de fil ou sur le périmètre d’une ouverture. En cas de résonance, l’onde renforcée peut avoir une densité énergétique jusqu’à 25 fois supérieure à celle de l’onde incidente. En pratique, il est rare que les facteurs de gain associés au phénomène de résonance excèdent l’ordre de grandeur.
1.18.7 Réseau de divertissement de bord
1.18.7.1 Généralités
En mai 1996, Swissair a confié à Interactive Flight Technologies (IFT) l'installation d'un RDB, qui était alors ultra-moderne, dans 16 de ses MD-11 et 5 de ses B-747. L'installation devait se faire avec l'autorisation de l'OFAC suisse, conformément au certificat de type supplémentaire ST00236LA-D de la FAA.
1.18.7.2 Installation du RDB – Rôles et responsabilités
Aux termes de l'entente conclue avec la Swissair, IFT était responsable de tous les aspects de l'intégration du RDB dans les MD-11 et les B-747 de Swissair, notamment la conception de l'intégration du réseau à l'avion, la certification, l'installation du matériel, le soutien permanent, la formation et le maintien de la navigabilité aérienne.
Interactive Flight Technologies était spécialisée dans la conception et la fabrication de composants de RDB. Pour les besoins de l'installation, elle a retenu les services d'une autre société possédant un savoir-faire en matière d'intégration d'un réseau de divertissement de bord à la conception d'un avion, de certification du réseau et d'installation des composants du réseau.
IFT a ainsi confié à Hollingsead International la certification du RDB, la conception de l'intégration du réseau à l'avion et l'installation des divers composants dans l'avion. Les travaux dont l'exécution était confiée au sous-traitant comprenaient l'élaboration de tous les plans et documents techniques nécessaires et la fabrication des faisceaux de câbles, des baies d'équipement et des supports structuraux. Aux termes du contrat, Hollingsead International était responsable de l'installation des composants matériels du réseau dans les MD-11 et les B-747 de Swissair, installation qui devait se faire dans les ateliers de SR Technics à Zurich, en SuisseNote de bas de page 96.
HI a par la suite confié la certification FAA du réseau à Santa Barbara Aerospace (SBA), atelier de modification désigné (DAS) approuvé par la FAA. Aux termes d'une entente conclue avec Hollingsead International et Interactive Flight Technology, Santa Barbara Aerospace est devenue le titulaire du certificat de type supplémentaire ST00236LA-D et, à ce titre, responsable d'assurer la conformité avec toutes les prescriptions réglementaires, y compris celles ayant trait au maintien de la navigabilité aérienne.
Aux fins d'attestation du STC, la FAA avait délégué à SBA l'autorisation d'agir pour le compte de la FAA. Les procédures de la FAA exigent qu'un DAS soumette pour chaque projet STC une lettre d'intention décrivant le projet de façon assez détaillée pour permettre à la FAA de déterminer dans quelle mesure elle doit participer au processus et en assurer la supervisionNote de bas de page 97.
L'OFAC suisse a accepté qu'un STC approuvé par la FAA soit utilisé pour le projet. Son acceptation était conditionnelle à ce que les travaux d'installation soient effectués par le personnel de HI, conformément aux dispositions du programme d'assurance qualité agréé JAR 145 en place chez SR Technics. De plus, Hollingsead International devait remettre à SR Technics le formulaire 337Note de bas de page 98 de la FAA, attestant que le réseau avait été installé conformément aux exigences de certification du STC ST00236LA-D et de la Partie 43 des FAR. L'OFAC suisse n'a assumé aucune responsabilité directe relativement à l'autorisation ou à la surveillance du projet d'installation du RDB.
La fonction de SR Technics dans le projet RDB de Swissair était régie par son contrat avec Swissair, connu sous le nom d'« Offre de septembre 1996 » et par ses responsabilités découlant de son rôle de fournisseur de maintenance conforme aux JAR 145 pour la flotte de MD-11 de Swissair. Interactive Flight Technologies, par l'intermédiaire de son sous-traitant Hollingsead International, était responsable de la conception et de l'installation du système RDB à bord des MD-11 de Swissair. SR Technics était chargée de fournir le soutien logistique, les données techniques, et de l'aide « à la demande », ainsi que d'exécuter l'assurance qualité de chacune des installations RDB à bord des MD-11 conformément à ses obligations en vertu des JAR 145. SR Technics n'était pas responsable de la revue ni de l'approbation de la conception et de la certification du système RDB.
1.18.7.3 Lettre d'intention de Santa Barbara Aerospace – Examen de la FAA
La FAA a reçu la lettre d'intention de Santa Barbara Aerospace relative au projet Swissair le 23 août 1996 et, conformément aux procédures établies, a confié à une équipe de la FAA la tâche de l'examiner afin de déterminer le degré approprié de participation de la FAA. Cette équipe était formée d'ingénieurs de certification ainsi que de membres du personnel du bureau d'inspection de la fabrication du district (MIDO) et du groupe d'évaluation des aéronefs (AEG). Il incombe entre autres au groupe d'évaluation des aéronefs de déterminer le caractère opérationnel approprié des avions nouvellement certifiés ou modifiés et, contrairement aux autres responsabilités de certification de la FAA, qui sont déléguées, celles du groupe d'évaluation des aéronefs ne font pas partie des responsabilités confiées à l'atelier de modification désignéNote de bas de page 99.
La lettre d'intention décrivait le RDB comme un système « non essentiel, non nécessaire de divertissement des passagers ». Après avoir réalisé une analyse de sûreté qualitative du système conformément aux exigences de la FAR 25.1309, SBA a conclu qu'aucune défaillance simple ni aucune défaillance multiple non détectée du système ne pourrait compromettre la capacité de l'avion de poursuivre sa route et d'atterrir en toute sécurité, accroître de façon sensible la charge de travail de l'équipage de conduite, ni nécessiter un effectif inhabituel. La lettre indiquait en outre que ni le tableau du pilote ni le tableau du copilote ne seraient modifiésNote de bas de page 100.
À la suite de son examen initial de la lettre d'intention, la FAA a avisé Santa Barbara Aerospace que le RDB devrait être soumis à deux essais additionnels avant d'être certifié. Le premier de ces essais visait à évaluer la résistance à l'impact des nouveaux plateaux de siège et le second, à déterminer l'inflammabilité des matériaux constitutifs des composants RDB ajoutés dans la cabine. Le 3 octobre 1996, SBA a soumis à la FAA une lettre d'intention modifiée faisant état de ces exigences additionnelles. Le tampon « FAA Accepted » a été apposé sur la lettre d'intention initiale le 8 octobre 1996.
En se fondant sur la description du RDB proposé figurant dans la lettre d'intention, la FAA a déterminé que Santa Barbara Aerospace était en mesure de mener le processus d'approbation du STC. La FAA s'attendait à ce que Santa Barbara Aerospace l'informe de toute modification subséquente de la portée du projet, et à ce qu'elle fasse appel aux services de la FAA au besoin. Santa Barbara Aerospace n'a apporté aucune autre modification écrite à la lettre d'intention au cours du projet.
1.18.7.4 Gestion du projet RDB par Santa Barbara Aerospace
À titre de responsable de la certification, Santa Barbara Aerospace devait approuver les données fournies par Hollingsead International et confirmer que la conception et l'installation du RDB étaient conformes aux exigences réglementaires sous tous les rapports. Santa Barbara Aerospace devait aussi superviser les essais, passer les plans en revue et vérifier la conformité des pièces et de l'installation. Santa Barbara Aerospace n'était toutefois responsable ni du volet conception ni du volet installation du projet comme tels. De plus, à titre d'atelier de modification désigné, il ne revenait pas à Santa Barbara Aerospace de certifier le caractère opérationnel approprié du RDB.
Les principaux documents soumis à l'examen de Santa Barbara Aerospace ont été les plans et les documents à l'appui figurant dans la liste principale des documents (MDL) et les rapports d'analyse de la charge électrique (ELA) produits par Hollingsead International.
Une version antérieure du rapport ELA, établi par Hollingsead International le 18 août 1996, indiquait que l'alimentation électrique du RDB serait assurée par le circuit de distribution du bus c.a. de cabine, dont la charge pourrait être délestée manuellement en cas de situation anormale et automatiquement en cas d'urgence. Rien n'indique que Santa Barbara Aerospace ait eu accès à cette version antérieure. Les versions ultérieures du rapport ELA établi par Hollingsead International indiquent que l'alimentation, pour les compartiments de première classe et de classe affaires, est assurée par le bus 2 de 115 V c.a. Hollingsead International a décidé d'apporter cette modification, selon son analyse des charges électriques du MD-11 de Swissair, après avoir découvert que le circuit de distribution du bus cabine ne permettait pas de satisfaire aux exigences d'alimentation des 257 sièges prévus dans la configuration du RDB. Le recours au bus d'alternateur 2 de 115 V c.a. a eu pour effet de modifier la fonction prévue du commutateur CABIN BUS, modification dont la conception d'intégration du RDB n'avait pas prévu l'incidence opérationnelle. La modification de la source d'alimentation n'était pas mentionnée dans la lettre d'intention soumise à la FAA, et aucune lettre d'intention modifiée n'avait été soumise à la FAA.
Les plans utilisés par Santa Barbara Aerospace pour approuver la demande de STC indiquaient que les disjoncteurs du RDB devaient être ajoutés au tableau de distribution avionique inférieur du poste de pilotage. L'ajout des disjoncteurs dans le poste de pilotage n'était pas mentionné dans la lettre d'intention soumise à la FAA.
Les membres du personnel de Hollingsead International qui ont réalisé l'analyse de la charge électrique n'avaient aucune expérience du MD-11. Ni Santa Barbara Aerospace ni Hollingsead International ne comptaient parmi leur personnel de personnes connaissant la philosophie de conception des circuits électriques du MD-11, ce qui limitait leur capacité d'évaluer la compatibilité du RDB avec les systèmes de bord existants et avec les procédures des listes de vérifications du Manuel d'exploitation. Le libellé des contrats commerciaux relatifs au projet d'installation du RDB laisse croire que des tiers, y compris l'exploitant, devaient participer à l'évaluation de la compatibilité du système intégré avec les systèmes de bord. Le rapport ELA final relatif à l'intégration du RDB, qui contenait certaines imprécisions mineures, n'a été transmis à SR Technics qu'après l'accident de SR 111.
1.18.7.5 Intégration du RDB – alimentation électrique
Dans la configuration qui avait été certifiée, le RDB était relié à l'alimentation électrique de l'avion d'une façon qui était incompatible avec les principes de délestage électrique d'urgence du MD-11 et qui n'était pas conforme au certificat de type de l'avion. Le RDB était alimenté à partir du bus 2 de 115 V c.a., un bus qui n'est pas touché par l'utilisation du commutateur CABIN BUS.
Le commutateur CABIN BUS était conçu pour permettre la coupure de toute l'alimentation électrique des services de la cabine de l'avion, sauf les services d'urgence. Le premier élément figurant sur la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue consiste à régler le commutateur CABIN BUS sur OFF. La conception de l'intégration de l'alimentation électrique système RDB-avion constituait une condition dangereuse latente. Toutefois, alors que l'incendie était en cours au moment où le commutateur CABIN BUS avait été utilisé (13 minutes 7 secondes après que l'odeur eut été décelée pour la première fois), aucun lien n'a été établi entre cette condition dangereuse latente et la naissance ou la propagation de l'incendie.
1.18.7.6 Surveillance du travail de Santa Barbara Aerospace par la FAA
Le bureau de certification des aéronefs de Los Angeles (LAACO) de la FAA devait assurer la surveillance réglementaire de Santa Barbara Aerospace, tâche dont il s'est acquitté en surveillant des projets réalisés par cette dernière à titre d'atelier de modification désigné et en effectuant des évaluations.
Bien que la FAA ait tenu un dossier administratif sur Santa Barbara Aerospace, le LAACO n'avait pas pour pratique de tenir des registres de ses contacts quotidiens avec Santa Barbara Aerospace, ni de ses activités de surveillance de projets individuels d'approbation de demande de STC. On a trouvé dans les dossiers de la FAA deux rapports d'évaluation de Santa Barbara Aerospace, établis respectivement en mars 1996 et en mai 1998. Ces deux rapports faisaient état de cas de non-respect des exigences existantes, cas dont la FAA n'a pas estimé qu'ils compromettaient la sécurité de vol, les décrivant comme ayant trait à la « tenue des dossiers ». La FAA s'est dite satisfaite des mesures prises par Santa Barbara Aerospace à la suite de ces évaluations. Au moment de l'accident de SR 111, Santa Barbara Aerospace satisfaisait à toutes les exigences que lui imposait la FAA à titre d'atelier de modification désigné.
Après l'accident de SR 111, la FAA a effectué un examen de certification spécial du STC ST00236LA-D. Cet examen a permis de relever des lacunes tant dans les procédures de certification de Santa Barbara Aerospace que dans la surveillance du projet par la FAA. Le 30 novembre 1998, Santa Barbara Aerospace a déménagé dans de nouvelles installations; selon les règlements en vigueur, Santa Barbara Aerospace devait, à la suite de ce déménagement, présenter une nouvelle demande d'autorisation pour pouvoir continuer d'agir à titre d'atelier de modification désigné. Santa Barbara Aerospace a alors volontairement renoncé à obtenir un nouveau certificat d'atelier de modification désigné de la FAA. Santa Barbara Aerospace est par la suite devenue insolvable.
1.18.7.7 Fonctions du Groupe d'évaluation des aéronefs de la FAA
Certains services de certification STC doivent faire l'objet d'une approbation de la FAA et ils ne sont donc pas délégués à un atelier de modification désigné. C'est les cas des services de certification fournis par le groupe d'évaluation des aéronefs.
Nommément, l'ordonnance 8110.4A de la FAA indique que le groupe d'évaluation des aéronefs doit participer aux projets STC ayant une incidence sur l'adaptation aux opérations et sur les Instructions de maintien de la navigabilité (IMN). On peut citer comme exemples les modifications des exigences relatives à l'équipage, de l'affichage des instruments de vol et des listes d'équipement minimal.
Dans le cas du STC ST00236LA-D, Santa Barbara Aerospace a soumis une lettre d'intention qui concluait que le RDB était compatible avec les exigences opérationnelles de l'avion MD-11. Le groupe d'évaluation des aéronefs a accepté cette décision même si, en tant qu'atelier de modification désigné, Santa Barbara Aerospace n'était pas autorisée à la prendre.
1.18.7.8 Information fournie à Swissair et à SR Technics
Interactive Flight Technologies a donné une formation technique qui portait sur ses activités de maintenance et d'entretien courant approuvées au personnel de maintenance de SR Technics. Une formation non structurée a aussi été offerte aux équipages de Swissair afin de leur permettre de se familiariser avec le fonctionnement du RDB. À la suite de fréquents problèmes logiciels, les équipages de conduite avaient été informés par un bulletin AOM qu'ils pouvaient, au besoin, utiliser le disjoncteur 28 V DC IFEN du tableau de distribution avionique inférieur pour mettre le RDB hors tension ou le remettre sous tension. En l'absence d'un interrupteur marche-arrêt, cette procédure visait à donner aux équipages de conduite un moyen de remédier aux anomalies périodiques du RDB. Il est raisonnable de croire que, s'il s'était révélé nécessaire de mettre les circuits de cabine hors tension, les équipages de conduite de Swissair auraient estimé qu'ils pouvaient couper l'alimentation du RDB et des autres circuits de cabine en réglant le commutateur CABIN BUS à OFF.
1.18.7.9 Exigences relatives à l'analyse et à la conception du système
Conformément à la FAR 25.1309, le RDB devait faire l'objet d'une analyse de sûreté. Une telle analyse va de l'évaluation qualitative (p. ex., une évaluation des risques en fonctionnement) basé sur un avis technique fondé sur l'expérience, à une évaluation quantitative complexe (p. ex., analyse des modes de défaillance et de leurs effets), comportant une analyse de probabilité numérique. L'AC 25.1309-1A de la FAA diffusé en 1988 ne fait pas de distinction entre les systèmes « essentiels » et « non essentiels », mais exige plutôt que tous les systèmes de bord fassent l'objet d'une analyse de défaillance. Santa Barbara Aerospace a décrit le RDB comme étant « non essentiel, non nécessaire »Note de bas de page 101.
Bien que l'expression « non essentiel, non nécessaire » ne soit ni utilisée ni définie dans les FAR, elle est en général utilisée dans l'industrie de l'aviation pour décrire un système dont la défaillance n'a pas d'incidence sur la sûreté du vol et de l'atterrissage d'un avion. En règle générale, on décrit les systèmes de divertissement comme étant « non essentiels, non nécessaires », en supposant que leur défaillance n'aurait qu'un effet « mineur » sur le fonctionnement de l'avion. Il s'ensuit que l'analyse de sûreté du système peut consister en une évaluation qualitative fondée sur une évaluation technique antérieure de systèmes similaires et sur les antécédents en service du système.
1.18.7.10 Anomalies de fonctionnement
Dans les deux avions MD-11 de Swissair dont les 257 sièges avaient été initialement raccordés au RDB, par temps chaud, l'apport de chaleur résultant du fonctionnement du système était suffisant pour rendre difficile la climatisation de la cabine. Les équipages de conduite avaient été informés qu'en cas d'élévation trop grande de la température de la cabine, ils devaient régler le commutateur ECON à OFF pour y admettre de l'air plus frais. Par la suite, si l'air de la cabine ne s'était pas suffisamment rafraîchi au bout de quatre heures de vol, ils devaient mettre le RDB hors tension en déclenchant le disjoncteur 28 V DC IFEN du tableau de distribution avionique inférieur. Le livret technique de l'avion en question ne faisait mention d'aucun problème de régulation de la température de la cabine associé à l'installation du RDB. Ce problème de régulation de la température avait été réglé dès que la configuration du RDB avait été réduite à 61 sièges et il ne s'était donc pas posé dans l'avion en question.
1.18.7.11 Registres d'entretien du RDB
On a passé en revue les registres d'entretien du RDB pour la flotte de Swissair afin de repérer les défectuosités possibles des câbles ou des composants électriques. On y a relevé deux cas de défaillance du bloc d'alimentation, mettant respectivement en cause le RDB d'un MD-11, autre que l'avion en question, et celui d'un B-747.
L'incident relatif au MD-11 s'était produit le 30 août 1998. Le disjoncteur F-9 du bloc d'alimentation 2 s'était déclenché en vol. Le disjoncteur avait alors été réenclenché, mais il s'était déclenché de nouveau. Après le vol, lorsque le personnel de maintenance avait réenclenché le disjoncteur, il s'était immédiatement déclenché, et un bruit s'était fait entendre à l'intérieur du bloc d'alimentation 2. Le bloc d'alimentation défectueux avait été remplacé, puis l'avion avait été remis en service. Une vérification ultérieure du bloc d'alimentation a révélé que divers composants internes de ce dernier avaient été exposés à un court-circuit. L'incident relatif au B-747 avait lui aussi trait à la défaillance en vol d'un bloc d'alimentation ayant eu pour effet de couper l'alimentation du RDB. Le bloc d'alimentation avait par après été remplacé, puis l'avion avait été remis en service.
Une évaluation a été effectuée afin de déterminer si un bloc d'alimentation du RDB aurait pu être à l'origine de l'incendie qui s'était déclaré à bord de SR 111. Un examen des parties récupérées des blocs d'alimentation du RDB de SR 111 n'a permis d'y relever aucune trace de dommages causés par l'incendie. De plus, aucune trace de dommages causés par l'incendie n'a été relevée dans le voisinage des blocs d'alimentation. Ces observations viennent étayer l'hypothèse selon laquelle les blocs d'alimentation étaient situés trop loin à l'arrière de l'avion pour être inclus dans la zone touchée par l'incendie. Il a donc été exclu que l'incendie ait pu avoir pour origine la surchauffe ou la défaillance d'un bloc d'alimentation du RDB.
1.18.7.12 Examen après l'accident des documents d'installation du RDB
L'examen des documents d'installation du RDB a permis de relever diverses erreurs dans les plans approuvés et dans les documents à l'appui préparés par Hollingsead International. Figurent au nombre de ces erreurs l'existence de données discordantes d'un plan à un autre, une identification erronée des fils et des contacts, et des renvois incorrects à d'autres documents.
Les renseignements figurant dans les documents de définition de type à l'appui de la demande de STC n'étaient pas assez détaillés pour donner une description complète de la configuration d'installation du RDB. Plus précisément, aucun plan d'installation ni aucun document à l'appui n'indiquait comment les câbles et le fil de commande de calibre 16 AWG du bloc d'alimentation devaient être acheminés depuis l'arrière du tableau de distribution avionique inférieur vers l'arrière jusqu'à la référence 515 environ. À maintes reprises, plutôt que de fournir des plans et des données d'installation détaillés, les documents renvoyaient à l'AC 43.13-1A, dans laquelle on trouve des directives générales quant aux « pratiques exemplaires ». Cette approche mise énormément sur le fait que la formation et l'expérience des personnes chargées de l'installation devraient leur permettre d'acheminer les fils correctement et d'assurer la qualité de l'installation.
Au moment de l'installation du RDB dans les avions, il semble qu'il y ait eu des interprétations très variées de ce qu'était un avant-projet approprié et des documents nécessaires pour démontrer la conformité de modifications telles que l'ajout d'un RDB. La FAA stipulait qu'il fallait présenter un avant-projet qui définissait clairement la configuration, les matériaux et le processus de production nécessaires pour produire chaque pièce conformément aux critères d'homologation du produit. Elle stipulait également que des documents devaient décrire de façon complète et exacte la fabrication, l'assemblage et l'installation de toutes les parties du système faisant l'objet de la modificationNote de bas de page 102. Le jeu de documents produits par Hollingsead International a été jugé acceptable par l'organisme agissant pour le compte de la FAA (l'atelier de modification désigné : Santa Barbara Aerospace).
Au cours de l'année durant laquelle l'avion en question avait été exploité après l'installation du RDB à son bord, on n'a consigné dans les registres de l'avion aucune anomalie pouvant être attribuée à l'installation des quatre câbles et du fil de commande de calibre 16 AWG du bloc d'alimentation dans la zone allant de l'arrière du tableau de distribution avionique inférieur vers l'arrière, jusqu'à la référence 515 environ. Cependant, un examen des autres MD-11 de la flotte de Swissair a permis de relever plusieurs anomalies. Dans certains cas, les fils du RDB n'étaient pas installés conformément aux plans d'implantation. En outre, des raccordements aux cosses à borne des disjoncteurs du bloc d'alimentation étaient faits à l'aide de pièces de fixation non conformes à celles décrites dans les plans, et des fils étaient raccordés aux disjoncteurs du bloc d'alimentation d'une façon non conforme aux pratiques exemplaires. Ainsi, on a noté que les plans d'implantation et l'instruction technique ne précisaient pas l'installation d'une tresse de mise à la masse au tableau de distribution avionique inférieur, comme ce devrait être le cas pour un tableau exposé à une tension de 115 V c.a. comme l'était ce dernier une fois les disjoncteurs RDB de 115 V installés. Il est possible que certaines des anomalies soient attribuables à l'absence de directives appropriées dans les documents. Les fils étaient acheminés différemment d'un avion à l'autre.
En l'absence de données d'implantation complètes et exactes, il était laissé à la discrétion de l'installateur de décider s'il y avait lieu d'utiliser, par exemple, des matériaux anti-usure. Par exemple, au cours des inspections par le BST des installations à bord d'autres MD-11 de Swissair, on a découvert que les câbles PSU étaient acheminés de telle sorte qu'ils touchaient le bord du module de contrôle des données sur la quantité de carburant, situé directement derrière le tableau de distribution avionique inférieur. Ce contact avait laissé des marques sur l'isolant des câbles. Dans certaines installations, une enveloppe hélicoïdale servait à protéger les câbles qui passaient sur le bord du module de contrôle des données sur la quantité de carburant; on n'avait pas remarqué la présence de cette enveloppe dans d'autres installations. Comme l'avant-projet approuvé ne décrivait pas l'installation des fils dans cette zone, aucun avis de modification des documents n'avait été établi pour consigner et justifier les variations relatives à l'acheminement des fils. Les câbles du bloc d'alimentation du RDB étaient parfois acheminés derrière les chemins de câbles de l'avion avant de passer dans le guide-fils. Il n'y avait donc aucun moyen de déterminer avec précision comment les quatre câbles et le fil de commande de calibre 16 AWG du bloc d'alimentation du RDB avaient été acheminés dans cette zone dans l'avion en question.
À la suite de l'accident de SR 111, le BST a surveillé les essais pleine grandeur d'insertion d'anomalies auxquels la FAA a soumis le RDB à l'aide d'un équipement d'essai spécial. Les essais consistaient à introduire des anomalies visant à simuler diverses conditions, telles que des courts-circuits multiples, des surintensités et des défaillances du ventilateur de refroidissement. Dans tous les cas, les composants du RDB ont rempli leur fonction comme prévu sans production de chaleur excessive ni signes apparents d'endommagement des fils ou des composants. Ces essais ont été réalisés de façon systématique en laboratoire.
1.18.7.13 Gestion du projet d’approbation du STC du RDB
Le projet d’approbation du STC du RDB a nécessité la participation des neuf sociétés et organismes suivants : Swissair, Interactive Flight Technologies, Hollingsead International, Santa Barbara Aerospace, la FAA, l’OFAC, Recaro, Rumbold et SR TechnicsNote de bas de page 103. Pour l’essentiel, le projet a fait l’objet d’une gestion efficace malgré les nombreuses erreurs et omissions relevées dans les documents. On a toutefois relevé une exception notable à cet égard, la gestion du volet du projet ayant trait à l’intégration du RDB dans le système électrique de l’avion ayant été moins qu’efficace, plus particulièrement en ce qui a trait aux procédures d’urgence.
Swissair a confié à Interactive Flight Technologies la tâche de fournir un RDB compatible avec le MD-11 et certifié conformément aux normes existantes. Interactive Flight Technologies ne possédant pas l’expertise nécessaire pour assurer l’intégration et la certification du système, elle a fait appel à un sous-traitant, Hollingsead International. Ce dernier était en mesure d’assurer la conception du système et son intégration dans l’avion, mais elle n’était pas autorisée à en assurer la certification FAA; par conséquent, elle a confié cette tâche en sous-traitance à Santa Barbara Aerospace. Bien que la FAA ait déterminé que les sociétés en question possédaient les compétences voulues pour concevoir, installer et certifier le système, aucune de ces sociétés ne possédait une connaissance spécifique du système électrique du MD-11 ni de son mode de fonctionnement prévu en cas d’urgence.
Certains contrats liant deux parties comportaient des obligations contractuelles ayant une incidence directe sur une tierce partie. Dans certains cas, la tierce partie a semblé n’être pas au fait de ces obligations. De plus, tant Interactive Flight Technologies que ses sous-traitants ont supposé que Swissair leur fournirait des données opérationnelles et techniques sur l’avion en question. De même, Swissair a supposé qu’Interactive Flight Technologies avait, par l’intermédiaire de ses sous-traitants Hollingsead International et Santa Barbara Aerospace, la capacité technique et opérationnelle de lui fournir un RDB dûment certifié.
Par ailleurs, il n’était pas clairement établi quelle était l’entité devant assurer la gestion d’ensemble du projet. La FAA a estimé que cette responsabilité relative au processus de certification incombait au demandeur, à savoir Santa Barbara Aerospace. Or, c’était Interactive Flight Technologies, par l’intermédiaire de ses sous-traitants, qui avait l’obligation de livrer à Swissair un RDB intégré et certifié. Hollingsead International a confié à Santa Barbara Aerospace la tâche d’assurer la certification du système. Santa Barbara Aerospace était donc responsable de la certification, mais elle n’a pas joué de rôle important dans la gestion d’ensemble du projet.
Le projet d’approbation du STC du RDB était un projet complexe au calendrier ambitieux. Il nécessitait l’établissement d’une structure de gestion de projet clairement définie, conçue pour assurer le suivi d’une multitude de détails. Pour être efficace, il aurait fallu qu’une telle structure assure la mise en place de tous les éléments nécessaires pour concevoir le système, l’installer et en certifier la compatibilité avec le certificat de type de l’avion.
1.18.8 Chronologie des événements
1.18.8.1 Généralités
Dans le cadre de l'enquête, on a compilé selon un schéma chronologique toutes les données pertinentes provenant des enregistrements du FDR, du CVR, de l'ATC, de la mémoire permanente des FADEC, des radars et de l'ACARS (voir l'Annexe D – Chronologie de événements). Certains éléments d'information mentionnés dans la présente section apparaissent également sur une carte de la trajectoire de vol (voir l'Annexe A – Profil de vol : événements choisis).
1.18.8.2 ACARS
1.18.8.2.1 Premières anomalies
Selon les systèmes de suivi de l'ARINC et de l'INMARSAT, ces deux systèmes fonctionnaient normalement pendant le vol de SR 111. Par ailleurs, les registres de l'INMARSAT indiquent que le service de téléphone par satellite n'a pas été utilisé au cours du vol. SR 111 a maintenu sa trajectoire à l'intérieur de la zone de couverture VHF normale. La transmission de données s'effectue principalement dans la zone de couverture VHF lorsque celle-ci est disponible.
Les registres d'audit des prestataires de service SITA, ARINC et INMARSAT révèlent que l'ACARS et le SATCOM de SR 111 avaient été initialisés et qu'ils fonctionnaient normalement au moment où l'avion se trouvait au poste de stationnement de l'aéroport JFK de New York. Ces deux systèmes se sont connectés à 23 h 18 min 55 s et 23 h 30 min 18 s, respectivement. Le SATCOM s'est connecté en classe 3 (mode phonique et de communication des données), ce qui signifie que le module de gestion de l'ACARS et le module des données par satellite fonctionnaient à ce moment.
L'ACARS est conçu de telle sorte que, après un délai d'inactivité de 10 minutes, le module de gestion envoie au prestataire de service un message de suivi afin de lui permettre de savoir que son récepteur se trouve toujours dans la zone de couverture attribuée. Un message ARINC a été envoyé par SR 111 à 0 h 21 min 18 s. Des messages de suivi auraient dû être envoyés par SR 111 aux environs de 0 h 31 min 18 s et de 0 h 41 min 18 s. Rien n'indique que l'un ou l'autre de ces messages aient été reçus par une station au sol. Pourtant, selon des messages enregistrés par la suite par les prestataires de service, le module de gestion de l'ACARS et le compteur de messages avaient été mis à jour, ce qui signifie que l'ACARS avait enregistré des messages de sortie pendant cet intervalle de temps. Il est possible que le système ait été connecté avec un ou deux autres réseaux et que les zones de couverture se soient chevauchées. Cette situation se produit parfois lorsqu'un système devient saturé. Les dossiers qui auraient permis de vérifier cet élément d'information n'étaient pas disponibles au moment de l'enquête; les enquêteurs ont dû en faire la demandeNote de bas de page 104.
1.18.8.2.2 Interruption de 13 minutes dans les communications VHF
Environ 15 minutes après le décollage, il s'est produit une interruption des communications radio entre SR 111 et le centre de contrôle de la circulation aérienne en route (ARTCC) de Boston qui avait duré 13 minutes. La dernière communication avant l'interruption avait été effectuée depuis l'avion à 0 h 33 min 12 s alors que le commandant de bord avait accusé réception d'une demande de changement de fréquence radio (de 124,52 MHz à 128,75 MHz) en provenance de l'ARTCC de Boston. Neuf secondes plus tard, soit à 0 h 33 min 21 s, le FDR avait enregistré un événement lié à l'utilisation du bouton d'émission du micro du poste VHF 1 qui semble correspondre à une tentative d'un pilote de communiquer avec l'ARTCC de Boston. Aucune communication en provenance de SR 111 n'avait été enregistrée sur la fréquence de 128,75 MHz ni sur aucune autre fréquence des ATS.
Pendant cette interruption de 13 minutes, le FDR de SR 111 avait enregistré onze événements liés au bouton d'émission du micro : neuf pour le poste VHF 1 et deux pour le poste VHF 2. Pendant ce même intervalle de temps, l'ARTCC de Boston avait tenté de joindre SR 111 quatre fois sur la fréquence attribuée de 128,75 MHz, trois fois sur la fréquence précédente de 124,52 MHz et au moins une fois sur la fréquence de secours de 121,5 MHz. Aucune des onze interventions effectuées depuis l'avion ne coïncide avec l'heure des communications en provenance de l'ARTCC de Boston, ce qui signifie que SR 111 n'avait jamais reçu les appels radio des ATS.
À 0 h 46 min 27 s, SR 111 a communiqué avec l'ARTCC de Boston à l'aide du poste VHF 1 sur une fréquence non attribuée (134,95 MHz). Le message avait été enregistré par les ATS. Toutefois, le contrôleur de l'ARTCC de Boston n'avait pas saisi la communication émise sur une fréquence non attribuée et n'avait donc pu répondre immédiatement à ce premier appel de SR 111.
Selon l'enregistrement du FDR, à 0 h 47 min 2 s, SR 111 a fait une brève tentative de communication à l'aide du poste VHF 1 sur une fréquence inconnue. Selon les registres de l'INMARSAT, à 0 h 47 min 3 s, un message en liaison descendante en provenance de SR 111 signale une perte des communications de données de VHF 3, ce qui laisse supposer que les pilotes avaient fait passer le poste VHF 3 du mode communication des données au mode phonique. À 0 h 47 min 15 s, SR 111 a communiqué de nouveau avec l'ARTCC de Boston à l'aide du poste VHF 1 sur une fréquence de 134,95 MHz. L'ARTCC de Boston a accusé réception de cette communication et a demandé à SR 111 de passer à la fréquence appropriée à la zone de contrôle dans laquelle il se trouvait (133,45 MHz).
La communication avait été rétablie dans les deux sens, et le contrôleur en a conclu que l'équipage de SR 111 pouvait entendre clairement les ATS. Aucun enregistrement ne contient les commentaires des pilotes ou des contrôleurs de l'ARTCC de Boston à l'égard de l'interruption des communications. Aucune difficulté de communication n'avait été signalée entre les ATS et d'autres avions dans la zone en question. Le FDR n'avait enregistré aucune anomalie de nature technique pendant l'interruption de 13 minutes, et l'enquête n'a révélé aucune défaillance technique plausible. Il convient de noter que les FDR enregistrent une faible portion seulement des données liées aux circuits électriques et aux divers systèmes de bord. Des interruptions se produisent régulièrement au cours des communications radio lorsque les pilotes font des erreurs de sélection au moment du changement de fréquence. Il n'est pas possible d'établir si ce type d'erreur est à l'origine de l'interruption signalée, mais aucune autre explication n'a été avancée à cet égard.
1.18.8.2.3 Autres données sur l'ACARS
Le CVR a permis d'obtenir un enregistrement d'une durée d'environ 32 minutes; celui-ci commence à 0 h 53 min 17 s alors que SR 111 volait en croisière au FL330. Selon les enregistrements de l'INMARSAT, à 0 h 53 min 51 s, un message en liaison descendante avait été envoyé par SR 111 pour confirmer qu'il y avait eu une interruption des communications VHF 3 pendant plus de sept minutes. Ce message concorde avec le message en liaison descendante qui avait été communiqué à 0 h 47 min 3 s pour indiquer une interruption des communications VHF 3, et il correspondrait au moment où les pilotes auraient fait passer le poste VHF 3 du mode communication des données au mode phonique.
À 1 h 4 min 14 s, le module de gestion de l'ACARS avait envoyé un message en liaison descendante indiquant que la zone de couverture avait été ramenée de l'INMARSAT à l'ARINC, ce qui correspondrait au moment où les pilotes avaient ramené le poste VHF 3 du mode phonique au mode de communication des données.
Après 1 h 4 min 14 s, l'ACARS fonctionnait normalement. Les pilotes ont utilisé l'ACARS pour demander la météo à 1 h 13 min 13 s et à 1 h 14 min 37 s. La dernière communication a pris fin à 1 h 15 min 18 s. L'équipage n'a plus utilisé l'ACARS par la suite. Le dernier message en provenance de l'ACARS a été enregistré à 1 h 25 min 8 s alors qu'un message de suivi permettant d'assurer le suivi du vol a été envoyé et bien reçu. À 1 h 26 min 1 s, le module de gestion de l'ACARS est tombé en panne en raison de l'incendie.
1.18.8.3 Détection d'une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage
Le premier signe d'une situation anormale est survenu à 1 h 10 min 38 s; le copilote a signalé une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Les enregistrements du FDR ne font état d'aucun signe d'alerte concernant des difficultés techniques dans l'avion. Les pilotes n'ont pas fait allusion à des difficultés techniques à ce moment, ni au cours des 17 minutes précédant cet événement.
À 1 h 10 min 57 s, le commandant de bord a dit : « Regarde », en indiquant que quelque chose était visible dans le poste de pilotageNote de bas de page 105. Il est probable qu'il ait aperçu un peu de fumée, si l'on se fie au commentaire qu'il a formulé à 1 h 12 min 24 s concernant le fait qu'il s'agissait bien de fumée.
À 1 h 11 min 6 s, le copilote a reçu la permission de se lever. À 1 h 11 min 14 s, il a laissé les commandes au commandant de bord, ce qui signifie qu'il était en train de se lever. Quinze secondes plus tard, à 1 h 11 min 29 s, le copilote a indiqué qu'il n'y avait plus rien « là-haut », ce qui signifie que la fumée n'était plus visible après 30 secondes.
À 1 h 12 min 6 s, le commandant de bord a demandé à une agent de bord de la première classe de se rendre dans le poste de pilotage. Quelques secondes plus tard, elle a ouvert la porte du poste de pilotage et est entrée dans le poste. En réponse à une question du commandant, l'agent de bord a indiqué qu'elle pouvait sentir l'odeur dans le poste de pilotage, mais qu'elle ne sentait rien dans la cabine où elle travaillait. Personne n'a passé de remarques sur une fumée visible à ce moment.
À 1 h 12 min 24 s, il semble que, où que la fumée ait été repérée à l'origine, il n'y en avait pas beaucoup, que sa présence avait été momentanée et qu'elle n'était plus visible si l'on se fie au commentaire du commandant de bord. Pendant une période de 18 secondes, le CVR a enregistré deux fois le bruit du déplacement d'un siège électrique dans le poste de pilotage; chaque fois, le bruit a duré deux secondes. Il n'est pas possible de savoir si le bruit était associé au siège du copilote ou à celui du commandant de bord. Le commandant de bord a demandé : « C'est le conditionnement d'air, n'est-ce pas? ». Le copilote a répondu : « Oui ». Le commandant de bord a formulé sa question comme s'il cherchait à confirmer auprès du copilote qu'ils devaient entreprendre la procédure à suivre dans le cas d'une anomalie liée au système de conditionnement d'air (consultation de la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air ou sélection de la page Air sur l'écran d'affichage du système). La réponse par l'affirmative du copilote suggère que les deux hommes étaient d'accord sur le fait que le problème était lié au système de conditionnement d'air. Le commandant de bord a indiqué qu'il fallait fermer quelque chose; il demandait probablement à l'agent de bord de fermer la porte du poste de pilotage. Deux secondes après, on entend sur l'enregistrement un bruit laissant supposer que l'on ferme la porte du poste de pilotage.
À 1 h 12 min 52 s, le FDR indique que la page Air avait été sélectionnée. La page Air a pu être sélectionnée n'importe quand au cours des 63 dernières secondes puisque l'échantillonnage pour ce paramètre s'effectue toutes les 64 secondes. Dans le cadre de la procédure à suivre en cas de détection de fumée dans le système de conditionnement d'air, les pilotes doivent normalement sélectionner la page Air.
À 1 h 12 min 54 s, les lumières indiquant aux passagers d'attacher leur ceinture se sont allumées sous l'effet d'une faible turbulence.
À 1 h 13 min 14 s, les pilotes ont vu de la fumée dans le poste de pilotage. Ils ont envisagé les aéroports de déroutement possibles, et ont indiqué qu'ils voulaient consulter les cartes de navigation de la bibliothèque de bord. Ils ont pris en compte les conditions météorologiques en vigueur pour sélectionner les destinations de déroutement possibles. Les demandes enregistrées par l'ACARS concernent les aéroports suivants : LLSG (Genève, Suisse), KJFK (New York, New York), KBOS (Boston, Massachusetts) et CVQM (destination inconnue; les pilotes ont probablement voulu dire « CYQM », qui désigne l'aéroport de Moncton, au Nouveau-Brunswick, qui se situe à 90 nm au nord-ouest de Halifax).
À 1 h 13 min 53 s, le commandant de bord a dit : « Cela ne va pas bien du tout là-haut ». À 1 h 14 min 5 s, il a tenté de communiquer avec l'ACC de Moncton, mais le message radio a été bloqué par un message en provenance d'un autre avion. La fréquence a continué d'être utilisée par d'autres avions, et les autres communications ont probablement été entendues par les pilotes de SR 111.
À 1 h 14 min 15 s, le commandant de bord a envoyé un signal « Pan Pan Pan » au centre de Moncton et a demandé de revenir immédiatement à un endroit approprié. Le commandant de bord avait d'abord choisi Boston, qu'il connaissait bien, pour son déroutement. Le vol a reçu l'autorisation de se rendre à Boston et de demeurer au niveau de vol 310. Il a ensuite amorcé un virage à droite vers Boston. Au moment où il a envoyé le signal « Pan Pan Pan », l'avion se trouvait au FL330, à 66 nm du seuil de piste 06 de l'aéroport international de Halifax.
À 1 h 14 min 48 s, le masque à oxygène du commandant de bord a été retiré de son compartiment de rangement; on entend clairement le bruit produit par le débit d'oxygène. Le maître de cabine a dit à un agent de bord qu'on lui avait signalé la présence de fumée dans le poste de pilotage et que le commandant de bord ne voulait pas qu'on ouvre la porte du poste de pilotage.
1.18.8.4 Déroutement sur Halifax
À 1 h 15 min 6 s, le contrôleur a demandé aux pilotes s'ils préféraient plutôt se diriger vers l'aéroport international de Halifax. Ayant déterminé qu'il s'agissait de l'aéroport le plus proche, ils ont acquiescé. L'aéroport de Halifax était un aéroport intermédiaire désigné comme aéroport de dégagement par la Swissair, et il pouvait donc recevoir des avions MD-11. À 1 h 15 min 29 s, le copilote a repris les commandes de l'avion et a reçu pour consigne de perdre de l'altitude immédiatement. Sept secondes plus tard, l'avion a amorcé une descente, initialement à environ 2 000 pi/min. La vitesse indiquée était égale à la valeur sélectionnée de 292 nœuds ou était voisine de cette valeur, laquelle correspondait à une vitesse-sol d'un peu plus de 8 nm/minute. Le commandant de bord s'est chargé des communications radio. À 1 h 15 min 36 s, le commandant de bord a indiqué au contrôleur que l'équipage de conduite avait convenu qu'il était préférable d'atterrir à Halifax. À 1 h 15 min 41 s, le contrôleur a autorisé SR 111 à se rendre directement à Halifax et à descendre au niveau de vol 290. À ce moment, l'avion était au niveau de vol 328 et il se trouvait à environ 56 nm du seuil de la piste 06.
À 1 h 15 min 56 s et 1 h 16 min 3 s respectivement, le commandant de bord et le copilote ont enfilé leur masque à oxygène. L'enfilement d'un masque à oxygène n'est pas une mesure prévue dans les listes de vérifications de Swissair en cas de fumée, puisque cette mesure est considérée comme un élément à mémoriser et qu'elle a été enseignée à tous les équipages de conduite de Swissair dans le cadre de leur formation sur simulateur de vol. De fait, au cours de cette formation, les membres des équipages de conduite ont reçu pour consigne d'enfiler leur masque à oxygène dès qu'ils remarquent la présence de fumée. On ne sait quelle était la quantité de fumée constatée ou s'il y en avait, mais il est probable qu'au moins une odeur aurait été discernable.
Entre 1 h 16 min 8 s et 1 h 16 min 27 s, de l'information sur les conditions météo régnant à Halifax a été transmise à SR 111 par l'équipage d'un avion le survolant. Le contrôleur a autorisé SR 111 à continuer sa descente jusqu'à 10 000 pi. L'ACC de Moncton assurait la coordination de l'arrivée de SR 111 conjointement avec la tour de Halifax, les communications entre le centre et la tour étant acheminées au moyen d'une ligne terrestre. Le contrôleur de Moncton a demandé à SR 111 de lui indiquer la quantité de carburant que contenait l'avion et le nombre de passagers à bord, de sorte qu'il puisse transmettre ces renseignements au personnel de la tour de Halifax, qui les fournirait aux Services de lutte contre les incendies d'aéronefs de Halifax. SR 111 a indiqué au contrôleur de « rester à l'écoute » dans l'attente d'une réponse.
À 1 h 17 min 19 s, l'avion se trouvait au FL297, et les aérofreins étaient complètement déployés. La vitesse de descente est passée à 4 000 pi/min, puis est descendue à environ 3 500 pi/min à 1 h 19 min 28 s. À 1 h 17 min 20 s, les cartes d'approche aux instruments pour l'aéroport de Halifax n'étaient pas à portée de la main des pilotes pour leur donner des renseignements immédiatement utilisables à propos de la piste, des altitudes minimales de sécurité et des détails sur l'approche réglementaire. Un carillon d'appel s'est fait entendre dans la cabine quelques secondes plus tard. Le commandant de bord a indiqué au maître de cabine qu'il y avait de la fumée dans le poste de pilotage, que l'équipage de cabine devait se préparer pour l'atterrissage à Halifax prévu dans environ 20 minutes à une demi-heure et qu'il s'apprêtait à exécuter une liste de vérifications. Le ton de la voix du commandant ne semblait pas indiquer que la situation était assez critique pour qu'il faille déclarer une urgence; cependant, le commandant a précisé qu'il fallait informer les passagers de l'atterrissage immédiat de l'avion.
Lorsque le pilote automatique est embrayé, les deux pilotes peuvent sélectionner la vitesse voulue à l'aide d'un sélecteur rotatif. Selon les intervalles d'échantillonnage du FDR, on sait que la vitesse sélectionnée indiquée est passée de 292 nœuds (KIAS) à 310 KIAS entre 1 h 17 min 16 s et 1 h 18 min 20 s. Au cours de cette période, plus précisément à 1 h 17 min 38 s, le commandant de bord a indiqué au copilote qu'il ne devait pas descendre trop vite (il faisait probablement référence à la vitesse sélectionnéeNote de bas de page 106 et non à la vitesse de descente de l'avion). Il se peut que le copilote ait momentanément choisi une vitesse plus élevée, puis qu'il l'ait ramenée à 310 KIAS. À environ 1 h 19 min 24 s, on a une fois de plus augmenté la vitesse sélectionnée pour la porter à 320 KIAS. La vitesse indiquée maximale admissible en exploitation (repère zébré) était de 365 KIAS; au cours du vol, la vitesse indiquée de l'avion est demeurée inférieure à cette valeur.
À 1 h 18 min 17 s, SR 111 a reçu instruction de passer à la fréquence de l'ACC de Moncton (119,2 MHz). Le copilote, qui était toujours aux commandes de l'appareil, a également été affecté aux communications radio. SR 111 a été autorisé à descendre à 3 000 pi, mais le copilote a indiqué au centre de Moncton qu'il préférait descendre à une altitude intermédiaire d'environ 8 000 pi pendant que l'on préparait la cabine en vue de l'atterrissage.
À 1 h 19 min 12 s, le contrôleur a demandé aux pilotes s'ils souhaitaient obtenir les vecteurs radar pour la piste 06 de l'aéroport de Halifax. Le copilote a demandé qu'on lui fournisse les données les plus récentes sur le vent. Le contrôleur n'a pas communiqué ces données, mais il a répété que la piste 06 était la piste en service et a demandé s'il devait commencer à guider SR 111 au radar. SR 111 a accepté les vecteurs radar pour la piste 06 et le contrôleur a indiqué à SR 111 de virer à gauche sur un cap de 030°.
Le porte-documents renfermant les cartes d'approche pour l'aéroport de Halifax était rangé dans la bibliothèque de bord sous le poste de l'observateur de droite, endroit non accessible aux pilotes depuis leur siège. Le commandant de bord tentait depuis un certain temps de communiquer directement avec un agent de bord. À 1 h 19 min 27 s, un agent de bord a pénétré dans la cabine de pilotage et mis le porte-documents à portée de la main du commandant de bord.
À 1 h 19 min 37 s, le contrôleur a informé SR 111 que l'approche aux instruments pour la piste 06 était une approche sur faisceau arrière. Il a fourni la fréquence du radiophare d'alignement de piste et a informé les pilotes que l'avion se trouvait à 30 milles du seuil de la piste 06. L'avion franchissait le FL210 en descente, et le copilote a informé le contrôleur qu'il lui faudrait plus de 30 milles. SR 111 a reçu pour consigne de virer sur un cap de 360° afin de perdre de l'altitude.
À 1 h 20 min 14 s, le maître de cabine a annoncé aux passagers que l'avion se poserait à Halifax dans 20 à 25 minutes. Les pilotes ont convenu qu'une descente rapide était justifiée en cas d'épaississement de la fumée. Le copilote a demandé au commandant de bord s'il consentait à effectuer une approche sur faisceau arrière pour la piste 06 et a précisé qu'il s'agirait de l'approche la plus rapide et qu'il en résulterait un atterrissage contre le vent. Le copilote a également fait allusion au largage de carburant et a demandé au commandant de bord ses préférences quant à l'endroit et au moment du largage. Le commandant de bord a semblé donner son accord; toutefois, sa réponse verbale à ces interrogations a été interrompue par une activité physique comportant un étirement, ce qui laisse croire qu'il cherchait à récupérer quelque chose qui était hors de portée, peut-être une liste de vérifications ou une carte d'approche.
À 1 h 21 min 20 s, le contrôleur a demandé qu'on lui indique le nombre de personnes et la quantité de carburant à bord. Le copilote a répondu que l'avion contenait 230 tonnes de carburant; il s'agissait là en réalité de la masse brute courante de l'avion, et non de la masse du carburant seul. Il n'a pas indiqué le nombre de personnes à bord. Il a demandé au contrôleur s'il était possible de larguer du carburant à cet endroit en descente. En guise de réponse, le contrôleur lui a demandé si SR 111 était en mesure de virer vers le sud, ou s'il souhaitait demeurer plus près de l'aéroport. Le copilote a indiqué au commandant de bord que le contrôleur préférait que le largage de carburant ait lieu plus au sud et lui a demandé s'ils devaient larguer du carburant ou continuer et atterrir. Compte tenu de leur compréhension de la situation en cours, les pilotes ont décidé de virer vers le sud pour larguer du carburant. Le copilote a informé le contrôleur qu'un virage à gauche ou à droite vers le sud était acceptable. Le contrôleur a donné instruction à SR 111 de virer à gauche sur un cap de 200°, a demandé aux pilotes de lui indiquer le moment où ils seraient prêts à larguer du carburant et les a informés qu'environ 10 milles les séparaient de la côte. Il a de plus précisé qu'ils se trouvaient toujours à moins de 25 milles environ de l'aéroport. Le copilote a avisé le contrôleur qu'ils demeureraient à 10 000 pi et le contrôleur les a autorisés à maintenir cette altitude. À 1 h 22 min 21 s, les aérofreins ont été rentrés au moment où l'avion franchissait 12 550 pi en descente. La vitesse de descente a été réduite à 1 000 pi/min, puis augmentée à 2 000 pi/min jusqu'à la mise en palier de l'avion à une altitude comprise entre 10 150 et 10 300 pi.
À 1 h 22 min 33 s, le copilote a demandé au commandant de bord s'il était en train d'exécuter les procédures d'urgence prévues dans la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air. Le commandant a répondu par l'affirmative. À 1 h 22 min 37 s, selon le FDR, la vitesse indiquée (IAS) sélectionnée a été réduite de 320 à 249 KIAS. Cette intervention est conforme aux exigences réglementaires applicables, selon lesquelles la vitesse indiquée doit être réduite à une valeur maximale de 250 KIAS lorsqu'un avion vole à 10 000 pi ou moins. À 1 h 22 min 41 s, la vitesse indiquée a commencé à diminuer à partir de la valeur initiale de 320 KIAS.
À 1 h 22 min 48 s, le commandant de bord a fourni des conseils relativement au système de gestion de vol au moment où le copilote y « entrait » l'aéroport de Halifax afin d'obtenir de l'information comme la longueur des pistes et des données d'approche aux instruments. À 1 h 23 min, moment où la vitesse indiquée avait été réduite à 306 KIAS, le copilote a demandé au commandant de bord s'il consentait à une légère réduction de la vitesse. Le commandant a répondu qu'il était à exécuter les procédures de la liste de vérifications et a demandé au copilote d'agir au mieux.
À 1 h 23 min 22 s, la vitesse indiquée s'est stabilisée à 300 KIAS et n'est jamais descendue à la valeur de 250 nœuds sélectionnée précédemment. (On a probablement fait passer la vitesse indiquée sélectionnée à 300 KIAS avant 1 h 23 min 22 s puisque, selon le FDR, cette vitesse était de 300 nœuds à 1 h 23 min 41 s.) À 1 h 23 min 30 s, le contrôleur a donné instruction aux pilotes de virer sur un cap de 180° et les a informés qu'ils se trouvaient à environ 15 milles de la côte. Le copilote a confirmé que l'on maintenait l'appareil à une altitude de 10 000 pi. À environ 1 h 23 min 51 s, peut-être en considération de l'information selon laquelle la côte se trouvait encore à 15 milles, on a porté la vitesse sélectionnée à 320 nœuds, ce qui témoigne d'un désir de commencer le largage de carburant le plus tôt possible.
À 1 h 23 min 45 s, le commandant de bord a mentionné le commutateur CABIN BUS et a demandé une confirmation, laquelle a été donnée par le copilote. Le réglage de ce commutateur à la position OFF constitue le premier élément de la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue (voir l'Annexe C – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue). Lorsqu'on règle le commutateur CABIN BUS à la position OFF, les ventilateurs de recirculation sont arrêtés; à la suite de cette manœuvre, la circulation d'air au-dessus de la partie avant du plafond passerait d'une circulation prédominante vers l'arrière en direction des ventilateurs à une circulation prédominante vers l'avant en direction du poste de pilotage.
À 1 h 23 min 53 s, le contrôleur a informé SR 111 que l'avion demeurerait à moins de 35 à 40 milles de l'aéroport au cas où il faudrait atterrir rapidement. Le copilote a acquiescé et a demandé au contrôleur d'indiquer le moment où le largage du carburant pourrait commencer.
Jusqu'à cet instant, aucune défaillance n'avait été enregistrée par le FDR et rien n'indiquait qu'une défaillance de système avait été déclarée par les pilotes. De plus, aucune trace de fumée n'avait été signalée dans la cabine.
1.18.8.5 Défaillances de systèmes multiples
À partir de 1 h 24 min 9 s et pendant les 92 secondes qui ont suivi, le FDR a enregistré un certainnombre de défectuosités techniques associées à la défaillance de systèmes de bord, comme l'indiqueront les rubriques suivantes du rapport. Les deux enregistreurs de vol et les radios VHF (communications avec les ATS) ont cessé de fonctionner à environ 1 h 25 min 41 s. Près de la fin de cette période de 92 secondes, on a indiqué que quelque chose brûlait dans le poste de pilotage. On estime que l'on faisait alors référence au plafond du poste de pilotage.
1.18.8.6 Débrayage du pilote automatique
À 1 h 24 min 9 s, le FDR a enregistré un débrayage du pilote automatique 2. Il serait normal que l'écran principal de vol (PFD) du commandant de bord soit affiché sur le DU 1, et que celui du copilote se trouve sur le DU 6. Le débrayage du pilote automatique serait signalé de la façon suivante sur les écrans principaux de vol : le message « AP 2 » normalement de couleur cyan, qui indique que le pilote automatique 2 est en service, serait remplacé par un message « AP OFF » clignotant de couleur rouge et les fenêtres latérales et verticales deviendraient des boîtes clignotantes rouges. Un signal d'avertissement sonore se ferait également entendre; ce signal d'avertissement a été entendu à partir de 1 h 24 min 9 s sans interruption jusqu'à ce que le CVR cesse d'enregistrer.
À 1 h 24 min 18 s, le commandant de bord a noté le débrayage du pilote automatique, événement aussitôt confirmé par le copilote. À 1 h 24 min 25 s, le copilote a informé l'ACC de Moncton qu'il fallait maintenant piloter l'appareil manuellement et a demandé qu'on réserve à SR 111 un bloc d'altitudes compris entre 11 000 et 9 000 pi. Le contrôleur a réservé à SR 111 les altitudes comprises entre 5 000 et 12 000 pi.
Bien que les paroles des pilotes ne dénotent aucune tentative de supprimer le signal sonore, les pilotes auraient dû, conformément à leur formation, faire une telle tentative. Il n'est pas possible d'établir s'ils ont tenté d'embrayer le pilote automatique 1; toutefois, le signal sonore n'a pas cessé, et le pilote automatique 1 ne s'est pas embrayé. Si l'équipage a tenté d'embrayer le pilote automatique 1 et que ce dernier était indisponible, on peut en conclure que l'incendie avait déjà endommagé le circuit associé au pilote automatique 1 et le circuit permettant la suppression du signal sonore. Le circuit d'alimentation électrique du système de vol automatique (AFS) 2 est alimenté par le bus 3 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur E-07 situé sur le tableau de distribution avionique. L'un des fils de ce disjoncteur est relié aux interrupteurs de débrayage du pilote automatique du volant. La perte d'alimentation dans ce fil (p. ex., à la suite de dommages causés par l'incendie) provoquerait le débrayage du pilote automatique et aurait pour effet de rendre infructueuse toute tentative de suppression du signal sonore.
Si le pilote automatique 1 n'a pu être embrayé, on peut en conclure que son mode armement était invalidé. Une défaillance du pilote automatique 1 aurait, après deux minutes, fait s'allumer des voyants annonciateurs, ce que les pilotes auraient probablement remarqué. Les pilotes n'ont jamais mentionné que des voyants annonciateurs associés au pilote automatique 1 s'étaient allumés. Par conséquent, si le pilote automatique 1 est tombé en panne, la défaillance serait survenue dans les deux minutes précédant le débrayage du pilote automatique 2 et l'affichage du message d'alerte « AP 2 OFF » sur l'écran principal de vol. Le circuit d'alimentation électrique de l'AFS 1 est alimenté par le bus 1 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur C-07 situé sur le tableau de distribution avionique.
1.18.8.7 Alertes d'altitude
Le CVR a enregistré une tonalité d'alerte d'altitude à 1 h 24 min 38,4 s et une autre à 1 h 24 min 41,6 s. Pendant ce temps, le sélecteur d'altitude de l'avion était réglé à 10 000 pi.
Alors qu'il était sur le point de franchir une altitude de 10 000 pi en descente, l'avion a commencé à reprendre de l'altitude. Les données du FDR indiquent que le copilote avait réglé le calage altimétrique sur son altimètre à 29,80 po Hg, alors que le commandant de bord avait laissé le sien à la valeur standard de 29,92 po Hg, soit la valeur requise lorsqu'un avion vole à plus 18 000 pi. Le seuil d'alerte de l'avertisseur d'altitude est de 150 pi. Compte tenu de ces deux valeurs de calage altimétrique différentes, un écart d'altitude d'environ 100 pi aurait existé entre les deux altimètres. Les calculateurs de commandes de vol auraient chacun produit une tonalité d'alerte d'altitude à la suite du dépassement de leurs seuils respectifs, ce que l'on a pu constater sur l'enregistrement du CVR.
1.18.8.8 Déclaration de l'urgence
À partir de 1 h 24 min 35 s, et par intermittence jusqu'à 1 h 25 min 27 s, un entretien a eu lieu par ligne terrestre entre l'ACC de Moncton et la FSS de Halifax, au cours duquel l'ACC a avisé la station du largage de carburant prévu. La communication de cette information, mesure conforme aux pratiques courantes, visait à s'assurer que l'on informe les autres avions de l'endroit du largage de sorte qu'ils évitent de se trouver dans les environs.
À 1 h 24 min 42 s, le commandant de bord a communiqué avec l'ACC de Moncton pour déclarer une urgence. Dans un message radio simultané, le copilote a accusé réception de l'autorisation pour SR 111 de voler à une altitude comprise entre 12 000 et 5 000 pi et il a indiqué que les pilotes déclaraient une urgence à l'heure zéro-un-deux-quatre (1 h 24). Cette déclaration d'une « urgence » par SR 111 a coïncidé avec l'échange de renseignements par ligne terrestre entre le superviseur de l'espace aérien inférieur de l'ACC de Moncton et la FSS de Halifax.
À 1 h 24 min 53 s, le commandant de bord a communiqué avec l'ACC de Moncton et a indiqué que SR 111 commençait à larguer du carburant et devait se poser immédiatement. À 1 h 24 min 57 s, le contrôleur a répondu qu'il communiquerait avec les pilotes seulement lorsque l'avion aurait parcouru environ deux milles, ce à quoi le copilote a répondu « Roger » à 1 h 25 min 1 s. À 1 h 25 min 2 s, le copilote a répété que SR 111 déclarait une urgence; le contrôleur a accusé réception de ce message à 1 h 25 min 5 s.
1.18.8.9 Utilisation de lampes de poche par l'équipage de cabine
À 1 h 24 min 46 s, l'équipage de cabine a indiqué qu'il y avait une panne de courant dans la cabine et que l'on continuait de préparer cette dernière à l'atterrissage à l'aide de lampes de poche. La panne de courant correspondait au réglage à la position OFF du commutateur CABIN BUS du poste de pilotage, intervention prévue dans les procédures de la Swissair et abordée par les pilotes à environ 1 h 23 min 45 s.
1.18.8.10 Perte de l'amortisseur de lacet inférieur A
À 1 h 24 min 54 s, le FDR a enregistré la défaillance de l'amortisseur de lacet inférieur A, probablement due à une panne d'alimentation électrique du circuit. Il est possible que cette défaillance soit passée inaperçue pour l'équipage. En effet, bien que cette défaillance ait en principe été signalée par le message « YAW DMP LWR A OFF » sur la page d'état EIS, l'équipage devait afficher cette page pour en prendre connaissance. On ignore s'il l'a fait ou non.
Le circuit de commande de l'amortisseur de lacet inférieur A est alimenté par le bus 1 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur C-11 situé sur le tableau de distribution avionique. Le circuit de commande de l'amortisseur de lacet inférieur B, qui est aussi alimenté par le bus 1 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur C-12 situé sur le tableau de distribution avionique, n'était pas tombé en panne au même moment. On peut donc en conclure que le bus 1 de 28 V c.c. était toujours sous tension. Il est probable que le disjoncteur C-11 s'était déclenché ou qu'un fil de son circuit avait subi un court-circuit ou s'était dénudé, peut-être sous l'effet de la chaleur.
1.18.8.11 Perte des paramètres du calculateur de commandes de vol 1
À 1 h 24 min 57 s, le canal A du FCC-1 a perdu son alimentation principale, et dans les 15 secondes (à 1 h 25 min 12 s), le FCC-1 a cessé d'envoyer de l'information au FDR. La perte du canal A du FCC-1 ferait disparaître du DU 1 certaines données non essentielles au vol, affichées sur le PFD du commandant de bord, mais n'aurait aucune incidence sur le PFD du copilote sur le DU 6. Le copilote était aux commandes de l'appareil. En pareilles circonstances, le voyant principal d'avertissement s'allumerait et des indications de défaillance et divers messages s'afficheraient l'écran d'affichage des indications moteur et des alertes (normalement le DU 3), un témoin lumineux s'allumerait sur le tableau de commande d'affichage du système, et des voyants lumineux s'allumeraient sur le tableau du système de vol automatique.
Le canal A du FCC-1 est alimenté par le bus 1 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur C-17 situé sur le tableau de distribution avionique.
1.18.8.12 Perte du bus c.a. d'urgence de gauche
Compte tenu de la perte du calculateur de données aérodynamiques 1, du module électronique d'affichage 1 et du réchauffeur Pitot du commandant de bord, qui sont tous alimentés par le bus c.a. d'urgence de gauche, on a conclu que la perte de ce bus était survenue à 1 h 25 min 6 s. La présence de marques d'arc électrique sur le fil d'alimentation du bus c.a. d'urgence de gauche vient étayer cette hypothèse. Cet arc électrique aurait provoqué le déclenchement du disjoncteur c.a. d'urgence de gauche B1-136 commandé à distance, ce qui aurait entraîné le passage des bus c.a. et c.c. d'urgence de gauche à leur source d'alimentation d'urgence, la batterie et le convertisseur statique. Par la suite, plusieurs anomalies et défaillances sont survenues, lesquelles ont été enregistrées sur le FDR. Une brève explication des pertes de système résultantes est fournie ci-après.
1.18.8.13 Perte de l'altitude, de la vitesse indiquée et de la température totale
Entre 1 h 25 min 6 s et 1 h 25 min 7 s, les paramètres altitude-pression, vitesse préétablie et température totale sont devenus fixes, comme on peut le constater sur l'enregistrement du FDR. Au bout d'environ sept secondes, une séquence « aucune mise à jour des données » s'est amorcée, ce qui indique que les données du FDR n'ont pu être mises à jour à partir des données de l'ADC-1.
Le mode C du transpondeur de l'avion, qui fournit l'altitude de l'avion au radar de l'ATC a cessé d'émettre à 1 h 25 min 6 s. Cette fin d'émission coïncide avec la panne de l'ADC-1. Les données en mode A (identification de l'avion) du transpondeur étaient toujours disponibles, ce qui indique que le transpondeur n'était pas en panne.
L'ADC-1 est alimenté par le bus c.a. d'urgence de gauche par l'intermédiaire du disjoncteur F-04 situé sur le tableau de distribution supérieur.
1.18.8.14 Perte du module électronique d'affichage (DEU) 1
À 1 h 25 min 6 s, les données du DEU 1 ont été perdues; un passage au DEU 3 est survenu après 1 h 25 min 14 s. En temps normal, les données enregistrées sur le FDR sont reçues par l'intermédiaire du DEU 1. En cas de perte de ce module, les données figent pendant huit secondes, puis le module est automatiquement remplacé par le DEU 3 comme source de données.
Le DEU 1 est alimenté par le bus c.a. d'urgence de gauche par l'intermédiaire du disjoncteur F-03 situé sur le tableau de distribution supérieur. La perte du bus c.a. d'urgence de gauche se traduirait par l'effacement des écrans d'affichage 1 et 3 du commandant de bord; par la suite, la perte du DEU 1 ferait apparaître un « X » rouge sur l'écran d'affichage 2.
1.18.8.15 Changement de la valeur du paramètre « Retract to Transit » relatif aux becs de bord d'attaque
Entre 1 h 25 min 6 s et 1 h 25 min 14 s, les capteurs B du module électronique du détecteur de proximité des becs de bord d'attaque sont passés de l'état « cible proche » à l'état « cible éloignée », à la suite de la perte de l'alimentation électrique de ces capteurs.
Les capteurs B sont alimentés par le bus 1 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur E-09 situé sur le tableau de distribution avionique. La perte d'alimentation à ce disjoncteur n'aurait aucune incidence sur le fonctionnement des dispositifs d'affichage du poste de pilotage.
1.18.8.16 Changement de la valeur du paramètre « TR Advisory to Standby » relatif au TCAS
Swissair a pour pratique d'utiliser le transpondeur ATC-1 pour les vols dont le numéro est un nombre impair et le transpondeur ATC-2 pour ceux dont le numéro est un nombre pair. Lorsque l'ATC-1 ne reçoit plus de données d'altitude de l'ADC-1, le système de surveillance du trafic et d'évitement des collisions (TCAS) passe en mode d'attente (comme l'a enregistré le FDR) et demeure dans ce mode tant que l'ATC-2 dispose de données sur l'altitude. Le TCAS capte le signal du transpondeur ATC-2, mais ne l'utilise pas à moins que l'option ATC-2 soit sélectionnée sur le tableau de commande ATC. Le message « TCAS STBY » s'afficherait sur l'écran principal de vol (PFD) et sur les écrans d'affichage de navigation (ND), et un message « ATC XPDR1 FAIL » s'afficherait sur l'écran d'affichage des indications moteur et des alertes même si l'ATC-1 transmettait toujours des données en mode A. Si l'ATC-2 ne pouvait lui fournir de données aérodynamiques, le TCAS passerait en mode « OTHER » et le message « TCAS FAIL » s'afficherait sur le PFD et les ND. Le mode « OTHER » du TCAS est un paramètre qui est normalement enregistré, mais qui ne figurait pas sur le FDR de SR 111.
On peut donc en conclure que l'ADC-2 fonctionnait toujours à ce moment.
1.18.8.17 Perte de l'alimentation du réchauffeur Pitot du commandant de bord
Entre 1 h 25 min 6 s et 1 h 25 min 14 s, l'alimentation du réchauffeur Pitot du commandant de bord a été coupée. Le réchauffeur est alimenté par le bus c.a. d'urgence de gauche par l'intermédiaire du disjoncteur F-05 situé sur le tableau de distribution supérieur.
Une telle perte d'alimentation fait normalement s'allumer le voyant principal d'avertissement et apparaître diverses indications et alertes sur le SDCP, l'EAD et le SD.
1.18.8.18 Perte de réception VHF 1
À 1 h 25 min 5,6 s, SR 111 a reçu par l'intermédiaire du poste VHF 1 un message d'une durée de moins d'une seconde en provenance de l'ATC, qui a été enregistré par le CVR. Le message suivant en provenance de l'ATC, qui commence à 1 h 25 min 16 s, n'a pas été enregistré par le CVR. Un autre message en provenance de l'ATC, qui commence à 1 h 25 min 40 s, a bien été reçu, et il a été enregistré pendant environ 0,2 seconde.
Seule une perte de signal VHF peut expliquer le fait que le CVR n'enregistre pas une communication en provenance de l'ATC. Cette perte de signal peut être due à une coupure de l'alimentation de l'émetteur-récepteur VHF 1 ou à une diminution de sa tension au-dessous d'un seuil minimal établi. Comme le signal audio a été rétabli brièvement avant la fin de l'enregistrement, on en a conclu que la tension de l'émetteur-récepteur avait diminué au-dessous du seuil minimal en vigueur. On a déterminé que la tension de coupure à laquelle l'émetteur-récepteur aurait cessé de fonctionner était d'environ 13 V.
L'émetteur-récepteur VHF 1 est alimenté par le bus d'urgence de 28 V c.c. de gauche par l'intermédiaire du disjoncteur D-08 situé sur le tableau de distribution supérieur.
1.18.8.19 Panne intermittente sur le canal P1 du CVR
À 1 h 25 min 6 s, l'alimentation électrique de 28 V c.c. du module de gestion des signaux audio (AMU) 1 a commencé à fluctuer à environ 12 V c.c. sans toutefois devenir nulle. Au même moment, le canal audio (P1) d'entrée du commandant de bord associé à l'AMU 1 a commencé à présenter des pannes intermittentes ainsi que des phénomènes d'atténuation et de distorsion.
1.18.8.20 Perte des canaux audio du CVR
De 1 h 25 min 6 s à 1 h 25 min 34 s, le canal P1 a fonctionné de façon intermittente. Par ailleurs, le canal audio du copilote, l'interphone de la cabine et le microphone d'ambiance du poste de pilotage ont continué à fonctionner normalement jusqu'à 1 h 25 min 41,4 s, lorsque l'enregistrement du CVR s'est arrêté.
À 1 h 25 min 16 s, l'ACC de Moncton a autorisé SR 111 à larguer du carburant sur sa trajectoire actuelle, et lui a demandé de l'aviser lorsque cette opération serait terminée. Cette communication n'a pas été enregistrée par le CVR de l'avion; il est donc fort probable qu'elle n'ait pas été entendue dans le poste de pilotage. À 1 h 25 min 40 s, l'ACC de Moncton a envoyé un deuxième message autorisant SR 111 à larguer du carburant. Une portion d'une durée de 0,2 seconde au début de ce deuxième message a été enregistrée par le CVR 1,4 seconde avant qu'il cesse de fonctionner.
1.18.8.21 Perte des écrans d'affichage du copilote
À 1 h 25 min 16 s, le copilote a indiqué au commandant de bord que tout ce qu'il faisait c'était de piloter l'avion, et rien d'autre. À 1 h 25 min 20 s, le commandant a fait allusion à quelque chose qui était déjà en train de brûler, et le copilote a parlé d'un atterrissage. À 1 h 25 min 33 s, le copilote a dit que tout était noir de son côté, et il a également parlé de vitesse et d'instruments de secours. Le copilote faisait probablement allusion au fait que ses trois écrans d'affichage (DU 4, DU 5 et DU 6) ne fonctionnaient plus, ce qui signifie qu'ils avaient tous perdu leur propre source d'alimentation. Ces trois écrans d'affichage sont alimentés par le bus c.a. d'urgence de droite, qui se trouvait toujours sous tension, par l'intermédiaire de trois disjoncteurs (F-29, F-30 et F-31) situés sur le tableau de distribution supérieur. Il est donc probable que les trois disjoncteurs se soient déclenchés ou que l'intégrité du câblage ait été compromise.
1.18.8.22 Perte de l'amortisseur de lacet supérieur A
À 1 h 25 min 34 s, le FDR a enregistré la défaillance de l'amortisseur de lacet supérieur A, qui avait probablement été causée par une panne d'alimentation électrique du circuit. Il est possible que cette défaillance soit passé inaperçue pour l'équipage. En effet, bien que cette défaillance ait en principe été signalée par le message « YAW DMP UPR A OFF » sur la page d'état du système de visualisation électronique, l'équipage devait afficher cette page pour en prendre connaissance. On ignore s'il l'a fait ou non.
Le circuit de commande de l'amortisseur de lacet supérieur A est alimenté par le bus 3 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur E-11 situé sur le tableau de distribution avionique.
Le circuit de commande de l'amortisseur de lacet supérieur B, qui est aussi alimenté par le bus 3 de 28 V c.c. par l'intermédiaire du disjoncteur E-12 situé sur le tableau de distribution avionique, n'était pas tombé en panne au même moment. Ce phénomène indique que le bus 3 de 28 V c.c. était toujours sous tension, mais que le disjoncteur E-11 s'était déclenché ou qu'un arc électrique s'était formé dans le circuit, peut-être sous l'effet de la chaleur.
1.18.8.23 Arrêt de l'enregistreur de données de vol
Entre 1 h 25 min 39,8 s et 1 h 25 min 40,2 s, le DFDAU a amorcé une séquence de redémarrage à chaud à la suite d'une panne d'alimentation. Il s'est resynchronisé et a pu enregistrer d'autres données valides pendant encore 1,3 seconde avant que le FDR cesse de fonctionner.
Le DFDAU et le FDR sont alimentés par le bus 3 de 115 V c.a. par l'intermédiaire du disjoncteur D-31 situé sur le tableau de distribution avionique. Le redémarrage à chaud a été provoqué par l'apparition temporaire d'un court-circuit ou l'ouverture temporaire du circuit.
1.18.8.24 Perte du CVR
À 1 h 25 min 41,4 s, le CVR a cessé de fonctionner; cette défaillance est attribuée à une panne d'alimentation électrique. Le CVR est alimenté par le bus c.a. d'urgence de droite (phase C) par l'intermédiaire du disjoncteur F-20 situé sur le tableau de distribution supérieur.
1.18.8.25 Possibilité de communication VHF en provenance de SR 111
À 1 h 25 min 46 s, l'ACC de Moncton a enregistré un fragment inintelligible d'une communication qui aurait pu provenir de SR 111.
1.18.8.26 Rétablissement du mode C du transpondeur
À 1 h 25 min 50 s, l'ATC a pu recevoir de nouveau jusqu'à 1 h 26 min 4,1 s les données en provenance du mode C du transpondeur. La communication des données du mode C du transpondeur a été interrompue lorsque l'ADC-1 est tombé en panne à 1 h 25 min 6 s. Si le commandant de bord avait sélectionné DEU-Auxiliary, le DU 2 aurait été reconfiguré comme PFD, et les paramètres de données aérodynamiques afficheraient des « X » en rouge. Pour rétablir les données aérodynamiques, il aurait fallu qu'il passe de l'ADC-1 à l'ADC-2. Les données aérodynamiques auraient été rétablies, et l'ATC aurait alors pu recevoir l'émission en mode C.
1.18.8.27 Perte du transpondeur
Le radar a enregistré les derniers signaux de mode A et de mode C du transpondeur à 1 h 26 min 4,1 s. La défaillance est attribuée à une perte de l'alimentation du transpondeur ATC-1 qui serait survenue après cette heure. Le transpondeur ATC-1 est alimenté par le bus 1 de 115 V c.a. (phase A) par l'intermédiaire du disjoncteur B-21 situé sur le tableau de distribution avionique.
Arrêt du moteur 2
D'après les dommages subis par le moteur 2, sa puissance était nulle au moment de l'impact. Selon les enregistrements de la mémoire permanente du FADEC, le moteur avait été arrêté au moyen du commutateur FUEL alors que l'avion se trouvait à environ 1 800 piNote de bas de page 107 et qu'il se déplaçait à une vitesse vraie d'environ 227 nœuds. En général, lorsque les pilotes décèlent une défaillance, ils pourraient arrêter le moteur si celui-ci risquait d'être endommagé gravement, ou si l'avion risquait d'être endommagé indirectement, ou encore si la sécurité en cours de vol risquait d'être compromise. Cependant, au cours des moments précédant leur arrêt, les enregistrements du CVR et du FDR n'indiquent aucun problème mécanique lié aux moteurs ni ne font état de l'intention des pilotes d'arrêter le moteur 2.
Trois indications du FADEC ont révélé une perte du paramètre TRA (angle du résolveur de la manette des gaz) pour le moteur 2. En pareil cas, le moteur 2 aurait dû basculer en mode de poussée fixe et maintenir sa puissance au dernier rapport de pression validé (poussée affichée). On a établi que la poussée affichée correspondait à un régime ralenti de vol. Dans des conditions normales, on ne demande pas à l'équipage de conduite d'arrêter un moteur en marche en raison du seul fait que la poussée affichée correspond à un régime ralenti de vol; toutefois, l'équipage doit prendre cette mesure lorsqu'elle s'inscrit dans le cadre d'une opération planifiée comme un atterrissage imminent.
Le fil d'alimentation électrique de la boucle de détection d'incendie A du moteur 2 montre des signes évidents de dommages causés par des arcs électriques. Ces dommages seraient à l'origine de la perte d'alimentation dans le circuit de la boucle de détection d'incendie A. Ce problème est signalé en pareil cas par l'apparition du message « FIRE DET 2 FAULT » à l'écran et d'une indication d'alerte (jaune) de niveau 1 à l'EAD, mais il ne provoque pas l'émission d'une fausse alarme d'incendie. La production d'un court-circuit ou l'ouverture du circuit ne feraient s'allumer aucun voyant du panneau supérieur. L'équipage n'a jamais fait allusion à des indications d'alerte. De plus, on a établi que les arcs électriques s'étaient formés plus tard, une fois l'incendie déclaré.
Si les dommages causés par l'incendie avaient provoqué la mise à la masse du fil de masse du circuit d'éclairage de la poignée coupe-feu et du commutateur FUEL associés au moteur 2, les voyants correspondants se seraient allumés. Le fil de masse du circuit d'éclairage traversait une zone où l'on a décelé des dommages causés par l'incendie et dans laquelle il s'était formé des arcs électriques. On n'a pas récupéré le fil de masse; les hypothèses concernant son état n'ont donc pu être confirmées. Les dommages causés par l'incendie sur le fil de masse ont peut-être fait s'allumer des voyants de la poignée coupe-feu ou du commutateur FUEL associés au moteur 2, ce qui aurait amené les pilotes à arrêter le moteur 2. Selon la liste de vérifications de Swissair en cas d'incendie dans le moteur, l'équipage de conduite doit d'abord ramener la manette des gaz à IDLE, et ensuite mettre le commutateur FUEL à OFF. La manœuvre liée au commutateur FUEL semble correspondre à l'événement enregistré par le FADEC.
Il s'agit des derniers événements enregistrés avant l'impact, qui s'est produit à 1 h 31 min 18 s.
1.18.9 Renseignements obtenus des témoins
1.18.9.1 Généralités
Immédiatement après l'accident, le groupe des crimes graves de la GRC a depêché quatre équipes d'enquêteurs dans la région touchée par l'événement. Les enquêteurs du BST ont travaillé en étroite collaboration avec ce groupe pour obtenir des renseignements des personnes qui avaient vu ou entendu l'avion avant son accident.
1.18.9.2 Entrevues avec les témoins
Des enquêteurs du BST et de la GRC ont interrogé plus de 200 témoins auriculaires et oculaires éventuels et recueilli 88 déclarations liées à l'événement. Les enquêteurs du BST ont étudié les déclarations préliminaires enregistrées par la GRC et ont mené leurs propres entrevues avec les personnes qui avaient dit avoir vu ou entendu l'avion pendant les derniers moments de son vol. La plupart des témoins se trouvaient dans les environs de Blandford, de l'île East Ironbound Island, de Tancook Island, d'Indian Harbour et de Peggy's Cove. Cependant, personne n'avait vu l'avion percuter la surface de l'eau.
Des représentants de la loi et des enquêteurs en matière de sécurité ont effectué des entrevues auprès des membres du personnel de New York qui avaient participé aux tâches liées à la sécurité, à la préparation avant le vol ainsi qu'à l'affectation et au suivi de l'avion en question. Des enquêteurs du BST et de la GRC ont également interrogé le personnel associé aux entreprises en cause à Zurich.
1.18.9.3 Résumé des renseignements obtenus des témoins auriculaires et oculaires
Les enquêteurs ont recueilli les témoignages de 72 personnes disant qu’elles avaient vu ou entendu l’avion pendant les moments précédant l’accident. Tous les témoins affirment que l’avion volait normalement puisque son inclinaison de virage était légère et que sa ligne de vol présentait un angle faible. De nombreux témoins ont évoqué le bruit des moteurs.
Plusieurs témoins ont rapporté avoir vu des lumières blanches, rouges et vertes qui brillaient à l’extérieur de l’avion. Dans la majorité des cas, on a dit que la lumière blanche était continue (non clignotante) et qu’elle était plus brillante que les lumières de couleur qui, elles, clignotaient. Un témoin a indiqué avoir vu des flammes bleues sur le côté gauche de l’avion, devant l’aile gauche. Quatre témoins ont dit avoir senti une odeur de carburant, de kérosène ou d’huile après le passage de l’avion. Trois autres témoins ont indiqué avoir perçu une sensation de vapeur d’eau retombant du ciel après le passage de l’avion. Par ailleurs, un témoin à baie St. Margaret et un autre à Blandford ont rapporté avoir vu une traînée de brume sèche en forme de triangle à l’arrière de l’avion. À la lumière des témoignages oculaires, on estime que l’avion était passé au-dessus de Blandford/Bayswater à une altitude de 2 000 à 5 000 pi AGL.
Personne n’avait vu l’avion percuter la surface de l’eau, et personne n’a signalé d’incendie à la suite de l’accident. Plusieurs témoins se souviennent d’avoir entendu un dernier bruit ressemblant à un coup de tonnerre, bref et très intense, qui fut suivi d’un silence. Ce bruit a été entendu à environ 10 h 30, heure avancée de l’Atlantique (1 h 30 UTC).
1.18.10 Signalement d'anomalies dans la cabine
1.18.10.1 Signalement d'odeurs inhabituelles
Au cours du premier vol qui avait suivi une inspection de maintenance régulière, soit environ trois semaines avant l'accident de SR 111, on avait signalé une odeur inhabituelle à proximité de la porte G1 dans la cabine de l'avion immatriculé HB-IWF, lequel effectuait alors le vol 178 de Swissair (SR 178). L'endroit d'où provenait l'odeur se situe au-dessous d'une zone où l'on avait détecté des dommages causés par la chaleur dans l'épave de SR 111. Selon les renseignements donnés par des membres de l'équipage, cette odeur ressemblait à celle d'un appareil électrique qui aurait surchauffé ou à celle d'un gaz ou d'un produit chimique inconnu. Cet incident avait été signalé verbalement à un technicien d'entretien aussitôt après le vol; cependant, l'inspection que celui-ci avait effectuée par la suite n'avait révélé aucune anomalie. On a avancé l'hypothèse que des résidus d'insecticide auraient été laissés sur place après les travaux de maintenance régulière qui avaient été exécutés avant le vol ou que des émanations se seraient échappées des soutes pendant le vol. Selon le manifeste du fret, l'avion transportait des solvants considérés comme matières dangereuses dans sa soute avant; toutefois, aucun déversement ni perte de marchandises n'avait été signalé. On n'a pas identifié l'origine de l'odeur qui avait été détectée à bord de SR 178 23 jours avant l'accident de SR 111. On n'avait pas signalé non plus d'autres odeurs au cours des 50 vols effectués par la suite par l'avion immatriculé HB-IWF. Aucun élément ne permet de relier à l'accident de SR 111 l'événement qui avait été signalé précédemment pour SR 178.
À deux occasions bien distinctes, on avait signalé une odeur de brûlé dans un autre avion MD-11 de Swissair, qui était immatriculé HB-IWH. Le 11 juillet 1998, un passager avait décelé une odeur de brûlé dans l'avion HB-IWH assurant le vol 111 de Swissair. L'odeur avait été signalée après le repas, dans la zone du siège passager 14H. Par ailleurs, le 18 août 1998, un passager avait décelé une odeur de brûlé dans l'avion HB-IWH assurant le vol 264 de Swissair.
L'odeur avait été signalée avant le décollage dans la zone du siège passager 18J, qui est située dans la partie centrale de la cabine. Le maître de cabine n'avait pas pu déceler l'odeur, mais il avait rapporté l'incident à l'équipage de conduite.
Les enquêteurs ont évoqué un lien possible entre les vols effectués par l'avion HB-IWH en juillet 1998 et en août 1998; pour le même avion (HB-IWH), on avait signalé une odeur de brûlé dans une zone couvrant quatre rangées de passagers (sièges 14H et 18J respectivement).Cependant, ils n'ont pu établir avec certitude un lien entre les deux événements puisque l'on n'a jamais pu déterminer l'origine de l'odeur détectée sur le vol du mois d'août 1998 et parce que le passager qui avait décelé l'odeur sur le vol du mois de juillet 1998 n'avait signalé l'incident au BST que plusieurs mois plus tard.
1.18.10.2 Procédures de signalement et de consignation des anomalies (DIT1-125)
On a effectué une recherche dans la base de données contenant les rapports de cabine des avions MD-11 de Swissair pour savoir si des odeurs inhabituelles avaient été signalées pour l'avion HB-IWF et pour d'autres avions MD-11 depuis 1997; cette recherche a permis de mettre au jour un seul rapport à cet égard. Toutefois, en vertu des procédures en vigueur au moment de l'incident, l'équipage de cabine ne savait pas exactement quand il devait produire un document écrit (rapport de cabine) sur les anomalies signalées, tandis que l'équipage de conduite décidait lui-même de consigner ou non les anomalies que lui rapportait l'équipage de cabine. S'il le jugeait utile, le commandant de bord consignait les incidents rapportés dans le carnet de route, de manière qu'ils puissent ultérieurement faire l'objet d'une vérification de maintenance. L'événement faisant l'objet de ce rapport n'avait pas été consigné dans le livret de route et il n'a donc pas été possible d'identifier l'origine des odeurs inhabituelles signalées.
1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces
La présente section donne une description des techniques propres à l'enquête sur l'accident du vol 111 de Swissair, de même que des caractéristiques de ces techniques et des raisons pour lesquelles on les utilise.
1.19.1 Processus de suivi des pièces produites
1.19.1.1 Bases de données sur l'épave physique
Des débris de l'avion ont été récupérés sur les lieux de l'écrasement et transportés jusqu'aux installations des Forces canadiennes à la 12e Escadre Shearwater (Nouvelle-Écosse). L'avancement des opérations de récupération a été surveillé par le relevé du poids de toutes les pièces récupérées en pourcentage du poids structural total de l'avion. Les débris récupérés ont été triés et classés en fonction de l'endroit où ils se trouvaient dans l'avion et de leur importance éventuelle pour l'enquête. Les débris jugés moins importants ont été regroupés avec d'autres débris analogues correspondant à leur emplacement dans l'avion, et rangés dans de grandes caisses. Les débris jugés significatifs pour un examen prioritaire ont été photographiés et se sont vu attribuer un numéro de pièce produite unique; une description textuelle sommaire a été établie à propos de chaque pièce. Ces données ont été introduites dans une base de données intitulée Pièces justificatives et Rapports III qui a été utilisée par la GRC pour la gestion des cas; les renseignements de base sur ces pièces ont été mis à la disposition de la GRC et du BST et ont fini par être importés dans une base de données distincte sur les enquêtes sur la sécurité constituée par le BST. Les caisses d'entreposage contenant les débris triés et jugés moins importants pour l'enquête ont également été entrées dans la base de données comme pièces accessoires, afin de permettre leur suivi et leur éventuelle extraction, le cas échéant. La base de données sur les pièces et les rapports a permis aux enquêteurs de visionner les photographies et les descriptions des pièces à propos de chaque débris important, et de produire des rapports sommaires en fonction de ces données.
Une base de données distincte a été constituée pour stocker les descriptions des pièces et les données relatives au câblage de l'avion.
1.19.1.2 Contrôle des documents
Les dossiers à l'appui de l'enquête se sont vu attribuer un numéro de contrôle avant d'être inscrits dans une base de données de contrôle électronique des documents. Une page couverture, appelée « page-résumé », a été établie à propos de chaque document devant faire l'objet d'une lecture optique pour être converti en un format électronique. La page-résumé servait à identifier le contenu du document et elle donne suffisamment de détails pour faciliter la recherche documentaire.
Le logiciel de gestion de cas SUPERTextMDNote de bas de page 108, qui réunit techniques d'imagerie, recherche sur du texte intégral et base de données structurée, et qui permet la consultation sur du texte intégral, a servi de système de gestion de documents. Des éléments du logiciel ont servi à numériser et à traiter les dossiers au moyen de la reconnaissance optique des caractères et à organiser les dossiers. Les utilitaires de recherche SUPERTextMD ont permis aux utilisateurs d'extraire les documents à l'aide de divers critères de recherche, notamment les recherches par mot clé, et de visionner ou d'imprimer des images de qualité supérieure à partir de ces documents.
1.19.1.3 Base de données photographiques
Une base de données photographiques a été constituée pour archiver le gros volume d’images numériques et de photos 35 mm prises par la GRC et les enquêteurs du BST. La base de données a été indexée pour autoriser des recherches souples par numéro de pièce, sujet, date, endroit et divers autres paramètres.
1.19.2 Instruments d'analyse des données
1.19.2.1 Panoramas photographiques et modèles objets
Des panoramas et des modèles objets de diverses pièces de l'avion ont été créés à partir d'une série de photographies statiques selon divers angles. Des objets modèles ont été créés par rotation d'un objet par paliers de 10 degrés devant un appareil photo fixe. On a créé les panoramas en fixant l'objet et en faisant pivoter l'appareil photo. Dans les deux cas, les logiciels de « montage »Note de bas de page 109 ont servi à regrouper les photographies multiples pour créer une image bidimensionnelle de l'objet. D'autres utilitaires logiciels ont permis aux enquêteurs de visionner ces rendus d'image au moyen d'un navigateur Web courant, de faire pivoter les images par voie électronique sur un plan bidimensionnel et de naviguer entre les objets.
1.19.2.2 Analyse de conception assistée par ordinateur
Des dessins CAO de l'avion en trois dimensions ont été reçus de l'avionneur.
Des modèles CAONote de bas de page 110 de la structure de l'aéronef ont été établis et rapprochés des données sur les pièces récupérées. Grâce à des plugiciels d'extension de navigateur InternetNote de bas de page 111, on a pu visionner ces dessins CAO au moyen d'un navigateur Web courant. Ces outils ont permis d'analyser le cheminement et l'orientation spatiale de diverses pièces, d'analyser les courbes de température, d'étudier la circulation de l'air dans l'avion et d'élaborer des scénarios de propagation de l'incendie.
1.19.2.3 Accès intégré aux données électroniques
Une application logicielle PRODOCsNote de bas de page 112 a été mise au point par le BST afin de fournir un seul point d’accès aux données de l’enquête provenant de la base de données Pièces justificatives et Rapports III de la GRC, de la base de données de recherche en SUPERText des documents sur copie papier, de la base de données photographiques et de la base de données sur le câblage. Ce logiciel permet également d’établir des liens avec d’autres outils, ressources et applications connexes, notamment la base de données sur les accidents du Groupe technique de recherches sur la sécurité cabine, les notes techniques, les panoramas photographiques et les modèles objets, les schémas CAO bidimensionnels et tridimensionnels et les vidéoclips de diverses activités d’enquête.
1.19.3 Reconstruction partielle de l'avion
Un cadre métallique grandeur nature des 10 m (33 pi) avant du fuselage de l'avion a été fabriqué par la Direction mécanique du ministère des Transports et des Travaux publics de Nouvelle-Écosse. Les parties identifiées de la structure principale, les panneaux de revêtement et les gaines de conditionnement d'air ont été redressés, les cassures ont été appariées et recousues avec du fil métallique et installées sur la structure de reconstruction. (Voir Figure 19.) Les offices 1, 2 et 3 ont été partiellement reconstruites sur des treillis métalliques distincts et placés dans la structure reconstruite. Des morceaux des sièges du poste de pilotage, du revêtement du plafond du poste et des tableaux de distribution supérieurs ont été rassemblés avant d'être mis en place dans la structure de reconstruction.
Les données extraites de la reconstruction matérielle ont été intégrées à un modèle informatique tridimensionnel de la partie avant du fuselage de l'avion. Le cadre de reconstruction et le modèle informatique ont servi à déterminer la gravité et les limites des dégâts causés par l'incendie, ainsi que les endroits où l'incendie aurait pu prendre naissance, à clarifier les relations spatiales entre les composants et à illustrer l'incidence de ces relations sur la progression de l'incendie. Ces mêmes instruments ont servi à évaluer l'inflammabilité des matériaux et à déceler d'autres manquements à la sécurité.
1.19.3.1 Reconstruction sur maquette des plafonds du poste de pilotage et de la cabine avant
Les gaines de conditionnement d'air, les câbles électriques et les composants identifiés reconstruits dans la cabine avant et dans le plafond du poste de pilotage reconstruits ont été assemblés en une vaste maquette pour tenter d'offrir une vue en plan du tracé des dommages et permettre de mieux comprendre l'orientation spatiale relative des éléments. (Voir Figure 27.) Grâce à un cadre en bois et à des matériaux en plexiglas transparent, on a réussi à reconstruire des sections qui autrement auraient été invisibles à l'oeil nu une fois installées dans la maquette de reconstruction principale. La maquette de table a servi à évaluer les dommages causés par la chaleur.
1.19.3.2 Gaines de conditionnement d'air
Toutes les gaines de conditionnement d’air récupérées avaient été grandement endommagées et déformées. Bien des gaines de l’espace inoccupé avant avaient été endommagées par la chaleur; il a donc été important de les reconstruire pour savoir où l’incendie avait pris naissance et comment il s’était propagé. Les centaines de morceaux endommagés par la chaleur ont été redressés, et les cassures ont été appariées et recousues avec du fil métallique fin. Étant donné que seuls de courts tronçons de gaine ont pu être reconstruits, il a fallu consulter les plans de l’avionneur et des techniciens experts du transporteur et de l’avionneur pour savoir où placer exactement les tronçons reconstruits des gaines dans la structure de reconstruction.
1.19.4 Analyse des endroits endommagés par des arcs électriques sur les fils
Vingt morceaux de fils électriques de l'avion en question présentaient des zones de cuivre fondu correspondant aux caractéristiques résultant d'arcs électriques. L'amorçage d'arcs électriques peut survenir lorsque l'isolant qui protège un fil électrique est endommagé, exposant du même coup le conducteur. L'arc provoque des températures suffisamment élevées pour qu'un incendie se déclare. Autrement, un incendie en cours peut brûler l'isolant du câble et exposer le conducteur. Un amorçage d'arc se produit si le conducteur entre en contact avec un matériau conducteur, comme une structure en métal ou un autre conducteur exposé d'un potentiel électrique différent. On a cherché à déterminer si les amorçages d'arc électrique survenus à bord de SR 111 étaient le fait d'un incendie déjà en cours ou si, au contraire, ils avaient dégagé l'énergie nécessaire pour enflammer des matériaux inflammables à proximité.
1.19.4.1 Spectroscopie Auger
La spectroscopie Auger est une technique scientifique qu'on a utilisée pour tenter de faire la différence entre les arcs électriques susceptibles d'avoir provoqué un incendie et les arcs résultant d'un incendie en cours. Cette technique part du principe que les sous-produits de combustion sont piégés dans le cuivre fondu durant la production d'un arc électrique. Un microspectromètre Auger à balayage capable d'une spectroscopie à haute résolution sert à analyser la chimie des réactions de surface et proches de la surface des lieux de fusion du cuivre et à déceler la présence de sous-produits de combustion dans le cuivre qui s'est resolidifié. L'absence de sous-produits de combustion dans le cuivre qui s'est resolidifié à un lieu de fusion peut indiquer la production d'un arc électrique survenu en l'absence de contaminants d'incendie au voisinage immédiat de l'arc, et indiquer que l'arc a déclenché un incendie. Cette même méthode permet d'examiner la surface fondue du cuivre resolidifié sans qu'il soit nécessaire de détruire l'échantillon.
1.19.4.2 Analyse par faisceaux d'ions focalisés et par microscopie électronique à transmission
Les spectrophotomètres Auger fournissent généralement une indication de la présence et de la quantité d'éléments précis à la surface du cuivre fondu à la suite d'un arc électrique. On a acquis une connaissance du profil élémentaire vertical, de la morphologie et de la porosité de certains lieux de production d'arcs en associant les techniques de la spectroscopie Auger au décapage par faisceaux d'ions focalisés (FIF) et à l'examen au microscope électronique à transmission (MET).
Les lieux d'arcs dignes d'intérêt particulier ont été répertoriés à l'occasion de l'analyse de surface par spectroscopie. Ultérieurement, de minces tranches verticales ont été extraites de ces endroits au moyen d'un canon ionique au gallium. On s'est servi d'un micromanipulateur pour faire passer les tranches de la chambre FIF au MET. On a ensuite recueilli des photomicrographies à haute résolution pour déterminer l'homogénéité verticale, la porosité, la granularité et la stratification de chaque échantillon. Puis on a procédé à une autre analyse MET pour déterminer le profil de profondeur élémentaire de certaines tranches.
1.19.4.3 Microtomographie à rayons X
On a pris des clichés aux rayons X des morceaux de fil récupérés qui présentaient une fusion du cuivre caractéristique de la production d’un arc électrique. Un microtomographe à rayons X à transmission équipé d’un manipulateur d’objets de précision a servi à produire des images bidimensionnelles de la microstructure interne du fil selon diverses orientations. Grâce à un logiciel de reconstruction tomographique, on a pu établir une image tridimensionnelle de la microstructure interne du fil en combinant les images successives en plan aux rayons X. Les clichés microtomographiques qui en ont résulté ont fourni un registre tridimensionnel permanent de la morphologie des échantillons de fil originaux. On peut ensuite évaluer des caractéristiques comme la porosité, l’ampleur de la fusion et de la solidification, la production d’arcs simples ou multiples et les inclusions. Ces données peuvent servir à orienter les décisions au sujet de techniques d’analyse plus approfondies.
1.19.5 Éprouvettes de référence de température
Pour permettre d'évaluer la température atteinte par les centaines de pièces endommagées par la chaleur, divers gabarits thermiques ou éprouvettes de référence de température ont été produits dans un laboratoire à atmosphère contrôlée. Ces éprouvettes se composaient d'échantillons représentatifs des matériaux utilisés dans la fabrication du MD-11, peints conformément aux directives originales du constructeur. Chaque éprouvette de température a été chauffée à une température fixe pendant un délai précis. Les éprouvettes de référence de température ont été produites par paliers de 50 °F pour des températures variant de 300 à 1 100 °F (149 à 593 °C), et pour des durées d'exposition de 10, 20 et 30 minutes. Chaque éprouvette a été caractérisée par un ternissement du fini de la peinture indicatrice de la température de cuisson et de la durée d'exposition. On a également déterminé l'effet d'une immersion dans l'eau de mer des échantillons ainsi chauffés; à la plupart des températures, l'effet sur le ternissement était négligeable.
Des centaines de morceaux de la structure de l'avion et des gaines de conditionnement d'air présentaient des signes de dommages causés par la chaleur. Les morceaux récupérés ont été comparés aux éprouvettes de température fabriquées avec des matériaux identiques afin qu'on puisse déterminer la température approximative et la durée d'exposition. Ces données ont servi à établir le profil de chaleur et la répartition de la température dans l'espace inoccupé de l'avion endommagé par l'incendie.
À titre de comparaison, on a procédé à l'analyse métallurgique des éprouvettes de température et des morceaux d'avion récupérés les plus chauds pour évaluer de façon plus précise les températures atteintes d'après l'effet de la chaleur sur la microstructure des divers échantillons.
1.19.6 Analyse par microprogrammation de la parole
Il existe un rapport étroit entre l'emploi du langage et le comportement humain. On a analysé les communications verbales entre les pilotes dans le poste de pilotage et entre les pilotes et l'ATC pour aider à évaluer la coordination des membres d'équipage, la charge de travail et la résolution de problèmes face à la situation. On a peaufiné un protocole de microprogrammation de la parole extrait de la documentation universitaire et on l'a utilisé pour classer des segments des communications verbales afin d'en extraire des données pertinentes et de les analyser. Les communications entre les membres du personnel navigant technique ont été segmentées en unités de pensée verbale (UPV), chaque UPV représentant une communication verbale traitant d'une seule pensée, intention ou action. Neuf formes d'élocution et sept descripteurs qualitatifs ont servi à classer chaque UPV et à évaluer la pertinence et l'adéquation de la communication. Ce même codage a servi en outre à analyser la répartition entre les deux pilotes de la concentration sur les tâches, mesurée par l'intermédiaire des communications verbales.
1.19.7 Détection de carburant au moyen d'un système aéroporté de détection de fluorescence environnementale au laser
Un avion de télédétection, exploité par le Centre de technologie environnementale d'Environnement Canada, a été utilisé pour tenter de retrouver du carburant aviation qui pourrait avoir été délibérément largué par l'équipage de SR 111 alors qu'il manoeuvrait en vue d'atterrir à l'aéroport de Halifax. Cet avion de télédétection était équipé d'un système aéroporté de détection de fluorescence environnementale au laser (LEAF). Ce capteur recueille des données de fluorescence sur diverses surfaces en milieu marin et terrestre en projetant un faisceau laser à la surface de la terre. Certains composés, dont les hydrocarbures aromatiques polycycliques que l'on trouve dans les huiles de pétrole, absorbent et réémettent l'énergie laser sous forme de bandes de fluorescence. Peu de composés dans l'environnement affichent cette même propriété. En outre, différentes classes d'hydrocarbures émettent une fluorescence selon des intensités différentes et présentent des traces spectrales différentes, ce qui signifie qu'il est possible d'identifier chaque classe d'huile de pétrole. Cette technique a permis de repérer du carburéacteur Jet A, le type même qui se trouvait dans les réservoirs de l'avion en question, à proximité de la trajectoire suivie par SR 111. Même si la trace spectrale du carburant a été comparée à un échantillon de carburant prélevé dans le réservoir à carburant de l'aéroport JFK qui avait servi à l'avitaillement de SR 111, la technique LEAF n'a pas permis d'établir si le carburéacteur Jet A détecté au sol provenait effectivement de SR 111.
1.19.8 Analyse des moteurs de l'avion
1.19.8.1 Installation de radiologie industrielle pour évaluer la position des composants internes
Durant l'enquête sur les moteurs de l'avion, il a fallu déterminer la position du distributeur à tiroir dans le boîtier du bloc de commande hydraulique du système d'inversion de poussée. La première option consistait à démonter le bloc. Toutefois, au cours d'une telle opération, on risque de modifier la position du distributeur à tiroir et, compte tenu de la corrosion qui s'était installée en raison du séjour dans l'eau de mer, le démontage aurait été difficile. C'est pourquoi on a fait transporter le bloc vers une installation de radiographie industrielle à la base des Forces canadiennes Shearwater, où il a été radiographié aux rayons X. L'analyse du film radiographique a permis de déterminer facilement la position du distributeur dans le boîtier du bloc de commande hydraulique. Lorsqu'il a fallu démonter l'ensemble, on a commencé par prendre une radiographie pour illustrer l'emplacement interne des composants à des fins de référence. Cette même technique a servi à visionner le mécanisme de verrouillage du système d'inversion de poussée qui bloque les vérins.
1.19.8.2 Détermination du réglage de puissance d'après les dispositifs de dosage de carburant moteur
L'examen extérieur du dispositif de dosage de carburant a permis d'établir que la position de repos des secteurs dentés était différente sur les trois dispositifs, ce qui est indicatif de différents débits de carburant à chacun des trois moteurs au moment de l'impact. L'examen physique des dommages causés aux moteurs s'est révélé lui aussi compatible avec différents réglages de puissance. Les dispositifs de dosage de carburant ont été transportés chez leur fabricant pour être démontés et examinés sous la surveillance des enquêteurs du BST. L'objectif était d'établir un lien entre la position des secteurs dentés des dispositifs de dosage de carburant et celle du doseur de carburant et le débit de carburant. Au cours de l'examen, on a mesuré la position du tiroir du doseur de carburant par rapport à celle du manchon et on l'a comparée aux plans du constructeur afin de déterminer le débit de carburant d'après ces mesures. Ces données, ainsi que celles provenant d'autres parties des moteurs, ont contribué à déterminer le niveau de poussée approximatif des moteurs au moment de l'impact.
1.19.8.3 Détermination du niveau de poussée des moteurs au moyen des actionneurs d'aubages fixes de stator
Le sous-système de commande de l'aubage fixe de stator à calage variable permet de régler au maximum le débit compresseur en réglant l'aubage directeur d'entrée du compresseur haute pression (HP) de même que les aubages fixes des 5e, 6e et 7e étages du compresseur HP sur leurs positions programmées en réponse aux commandes du FADEC. À la mise en route d'un moteur, les aubages fixes de stator à calage variable peuvent être en position ouverte jusqu'à environ 15 % de N2, après quoi elles se ferment. À des vitesses de rotation supérieures à environ 40 % de N2, les aubes fixes de stator à calage variable sont modulées pour s'ouvrir à mesure qu'augmentent N1 et N2, et elles sont entièrement ouvertes au décollage et à la montée initiale. Les aubes fixes de stator se déplacent en fonction de N1, de N2 et de Tt2.
Les trois stators à calage variable ont été transportés chez le constructeur pour être démontés et examinés sous la surveillance des enquêteurs du BST. On a mesuré depuis le centre de la face du piston jusqu'à la surface du boîtier arrière de l'actionneur. Cette mesure a servi à déterminer la position du piston par rapport à sa course complète. Les résultats de ce calcul ont ensuite été interprétés pour fournir le réglage de poussée réacteur. Cette donnée, conjuguée à d'autres renseignements de base provenant des dispositifs de dosage de carburant et des vannes de décharge, a permis d'établir les réglages de poussée approximatifs des réacteurs de SR 111 au moment de l'impact.
1.19.8.4 Détermination du réglage de poussée moteur au moyen des vannes de décharge
Les trois vannes de décharge 2.5, une provenant de chacun des moteurs, ont été démontées et examinées à l'usine du fabricant sous la direction des enquêteurs du BST. On a mesuré la distance entre la surface de fixation du boîtier et l'extrémité du piston pour déterminer la position « tel qu'il a été reçu » du piston. Cette mesure indique la position du piston par rapport à la position complètement déployée, et elle reflète donc le pourcentage de sa course complète. Ce pourcentage reflète la poussée des réacteurs en nombre de tours/minute à la vitesse de rotation corrigée du rotor basse pression. Ces valeurs, utilisées parallèlement à d'autres renseignements de base, ont aidé à déterminer les niveaux de poussée approximatifs au moment de l'impact.
À l'examen visuel des six vannes de décharge 2.9, on a cherché à savoir si les vannes étaient ouvertes, fermées ou coincées en position à cause de l'impact. Ces données, parallèlement à d'autres renseignements de base, ont contribué à déterminer la poussée des moteurs au moment de l'impact.
1.19.8.5 Analyse des anomalies du FADEC
Le régulateur automatique à pleine autorité redondante (FADEC) est une source de données stockées particulièrement utile pour enquêter sur les accidents dans lesquels le FDR a cessé de fonctionner prématurément, comme ce fut le cas vers la fin du vol SR 111. Ces données peuvent être extraites à partir de la mémoire permanente à l’usine du fabricant du FADEC. Si la référence temporelle saisie sur la mémoire permanente peut être rapprochée avec exactitude du temps réel, les anomalies moteur stockées dans la mémoire permanente peuvent aider à déterminer l’état du moteur pendant les phases d’enchaînement d’un accident. Si le FADEC est alimenté et que la mémoire permanente n’enregistre que des anomalies dans la cellule et aucune dans les moteurs, on peut en déduire qu’il n’y a pas eu d’anomalies moteur. Les anomalies cellule, en particulier celles qui ont un rapport avec les composants qui fournissent des données au FADEC, peuvent aider à déterminer le mode de commande des moteurs au moment de l’accident. Les anomalies cellule stockées peuvent aider à établir l’état de la cellule durant le vol en question. Or, l’analyse des anomalies stockées dans le FADEC a déterminé le mode de commande des moteurs de SR 111 et a également fourni certaines données de référence sur l’altitude et la vitesse relative de l’avion durant les dernières minutes du vol.
1.19.9 Restauration et extraction de données de la mémoire permanente
Bien des ensembles remplaçables en première ligne contenaient de l'information dans leur mémoire permanente qui aurait pu être utile à l'enquête, d'autant plus que les enregistreurs de bord avaient cessé de fonctionner près de six minutes avant l'impact. Aucun des LRU dignes d'intérêt (calculateur de commandes de vol, calculateur de données aérodynamiques, etc.) n'a été récupéré intact. Par contre, on a récupéré des centaines de cartes de circuit qui avaient subi des dommages variables; bon nombre des composants avaient été partiellement ou entièrement arrachés des cartes. Étant donné que les puces mémoire ne portent pas de marques particulières, il a été très difficile, et parfois même impossible, de reconnaître des puces spécifiques sur les cartes. Honeywell, fabricant de la plus grande partie de l'avionique du MD-11, a apporté une aide technique pour tenter d'identifier ces dispositifs de stockage à mémoire permanente. Les enquêtes sur les accidents seraient facilitées si les fabricants des mémoires permanentes les rendaient plus faciles à distinguer, soit par chromocodage, soit par d'autres marques.
Sur les centaines de cartes de circuits imprimés examinées, une seule carte du calculateur de commandes de vol contenait encore un microcircuit EEPROM. Celui-ci était endommagé, essentiellement par la corrosion, et il a fallu recourir à des techniques hautement spécialisées pour le reconstruire, notamment la technique FIF dont on a parlé précédemment. À cause d'une adresse coincée, il a fallu extraire la mémoire en deux étapes. À la deuxième étape, on a réparé l'adresse coincée et la moitié des données restantes a pu être récupérée.
Les données extraites ont été confiées à Honeywell pour qu'elle en fasse la validation et l'interprétation. Les données contenaient une représentation en code ASCII du contenu de la mémoire EEPROM d'entretien que contenait le processeur 1A de l'unité centrale de l'un des deux calculateurs de commandes de vol à bord de l'avion. On ignore où se trouvait le calculateur : à gauche plutôt qu'à droite ou calculateur 1 plutôt que calculateur 2.
L'évaluation des données a révélé que trois anomalies avaient été décelées à bord de SR 111, le 3 septembre 1998 à 1 h 24 min UTC, à une altitude de 11 328 pi et à une vitesse de 321 nœuds. Il s'agissait de AOA-B TST (angle d'attaque-test B), AOA INV (angle d'attaque non valide) et FLAP POS INV (position des volets non valide). Les trois anomalies ont un rapport avec une perte de puissance; toutefois, étant donné qu'on n'a pas pu déterminer la position du calculateur de commandes de vol, il est impossible d'attribuer les anomalies à une girouette d'angle d'attaque ou à la synchronisation des volets.
1.19.10 Recours à la modélisation informatique de l'incendie
Pour compléter l'enquête sur l'incendie, il est nécessaire de mieux comprendre les effets, ou l'absence d'effet, de nombreuses variables. Le BST a décidé de pousser plus avant son enquête sur l'incendie en intégrant à un modèle informatique les connaissances acquises des essais de tenue au feu menés à la section de la sécurité incendie des aéronefs, au William J. Hughes Technical Center de la FAA, à Atlantic City (New Jersey). Au moyen du modèle informatique, d'autres travaux ont permis d'analyser la dynamique de l'incendie par des techniques de modélisation de champ d'un incendie.
Les modèles de champ se fondent sur une approche qui divise la zone à surveiller en un grand nombre de petits volumes élémentaires. Chacun de ces volumes est systématiquement analysé par paliers afin qu'on puisse déterminer un ou des effets globaux. Cette approche fait appel à de très nombreux calculs complexes, mais elle fournit des résultats supérieurs comparativement aux autres techniques, comme les modèles de zone, qui adoptent une approche beaucoup plus simpliste par rapport au nombre et à la taille des volumes élémentaires analysés. Dans l'accident de SR 111, des facteurs comme des configurations géométriques complexes de la cellule et des gaines ont nécessité une analyse de champ de l'incendie plutôt qu'une analyse de zone.
2.0 Analyse
L'enquête sur l'accident du vol 111 (SR 111) de Swissair a été complexe, et le repêchage de l'épave a été très long avant que l'on puisse procéder à un examen détaillé et à une évaluation des questions techniques. Pour permettre l'évaluation de la zone endommagée par le feu et déterminer les éventuels manquements à la sécurité, il a fallu reconstruire une partie de la section avant de l'appareil. On a constaté que les importants dégâts causés par l'incendie en vol et l'impact avec le plan d'eau avaient masqué ou détruit une bonne part de l'information que contenaient beaucoup des pièces de cette section. Toutefois, grâce à un examen détaillé, à la reconstruction et à l'analyse des pièces et des matériaux récupérés, on a élaboré des scénarios d'incendie possibles. La structure de reconstruction ainsi que des renseignements sur l'évaluation de la circulation de l'air, les propriétés des matériaux et la chronologie des événements ont permis de comprendre comment et où les matières inflammables avaient pu s'enflammer et comment l'incendie s'était propagé.
Le temps écoulé entre le moment où l'odeur inhabituelle a été décelée pour la première fois dans le poste de pilotage et le moment où l'avion a percuté le plan d'eau n'a été que de 20 minutes environ; par conséquent, on a mis surtout l'accent sur la détermination des indices à la disposition de l'équipage et sur les facteurs influençant leur évaluation de la situation à bord.
La présente partie analyse et confirme bon nombre des manquements à la sécurité relatifs aux matériaux, aux équipements et aux procédures qui se sont dégagés de l'enquête, et elle examine les données dont le Bureau a tenu compte pour formuler les conclusions de la partie 3 du présent rapport.
2.1 Renseignements généraux
SR 111 a quitté New York pour un vol régulier, et il était piloté par un équipage qualifié conformément aux règlements et aux procédures applicables. Les documents indiquent que l'avion était équipé, entretenu et exploité conformément à la réglementation des Joint Aviation Authorities (JAA).
Rien dans les dossiers n'indiquait que les membres de l'équipage de conduite de SR 111 auraient souffert de problèmes de santé antérieurs qui auraient pu influer sur leur comportement. Avant le départ, selon l'information recueillie, les pilotes étaient frais et dispos et de bonne humeur. L'équipage avait bénéficié des heures de repos réglementaires, de sorte que la fatigue n'a pas été considérée comme un facteur dans le présent accident.
En un point de l'itinéraire de vol, une défaillance a produit une source d'inflammation qui s'est propagée à des matières inflammables se trouvant à proximité et a déclenché un incendie en vol. L'incendie s'est propagé et il a gagné en intensité pour finalement causer la perte de l'avion et de vies humaines. Voici les principaux facteurs dont il faut tenir compte dans le présent accident :
- la condition ayant produit la source d'inflammation;
- les matières inflammables présentes qui ont pris feu et qui ont entretenu et propagé l'incendie;
- les défaillances de matériaux subséquentes qui sont attribuables à l'incendie et qui l'ont aggravé;
- l'absence d'équipement de détection d'incendie qui aurait permis à l'équipage de repérer précisément la source de l'incendie et d'évaluer avec certitude la gravité de la fumée initiale;
- l'absence de procédures appropriées de lutte contre les incendies en vol, nécessaires à une intervention efficace en cas de fumée ou d'incendie.
Même si les données confirment que les incendies en vol se soldant par des accidents mortels sont rares, bon nombre des facteurs susmentionnés ne sont pas propres au modèle d'avion, à la compagnie aérienne ou à l'équipage en question.
On a signalé que tout l'équipement de navigation au sol était en bon état de service et qu'il fonctionnait normalement. Les services de lutte contre les incendies d'aéronef de l'aéroport international de Halifax étaient sur un pied d'alerte et ils ont réagi en plaçant rapidement les véhicules d'intervention en position sur le terrain d'aviation.
L'impact à haute vitesse avec le plan d'eau et la destruction de l'avion n'ont pas permis de récupérer tous les éléments et tous les composants de la structure de l'avion. Cependant, on a réussi à récupérer l'équivalent en poids de 98 % de la masse structurale de l'avion. Toutes les extrémités des plans de l'avion ont été retrouvées dans la zone principale des débris au fond de l'océan, ce qui indique que l'avion était intact au moment où il a percuté le plan d'eau.
L'intervention de recherche et de sauvetage a été rapide et exhaustive. Les opérations de secours qui ont exigé la participation de multiples ministères et organismes gouvernementaux de même que celle des habitants des environs, ont été orchestrées avec rapidité et efficacité.
Les politiques, les procédures et les pratiques en matière de sécurité de Swissair, en vigueur à l'aéroport international John F. Kennedy (JFK) relativement au vol SR 111, ont été examinées par les enquêteurs de la Gendarmerie royale du Canada et du Bureau de la sécurité des transports du Canada. Aucune lacune n'a été découverte. La sécurité de l'avion et des passagers n'a pas été un facteur dans le présent accident.
Tous les débris de l'avion ont été récupérés et examinés par les experts en incendie et en explosifs de la GRC. Ils n'ont découvert aucun élément appuyant l'hypothèse de la présence d'un engin explosif ou d'un dispositif incendiaire, ou de toute autre activité criminelle à bord.
La coordination entre les pilotes et l'équipage de cabine correspondait aux procédures et à l'entraînement en vigueur à la compagnie. Les communications de l'équipage indiquaient que la situation n'avait pas été considérée comme une situation d'urgence avant les six dernières minutes environ du vol; toutefois, peu après le début de la descente vers Halifax, de rapides préparatifs de la cabine en vue d'un atterrissage imminent étaient en cours.
2.2 Capacité d'enregistrement des données de bord
2.2.1 Généralités
Beaucoup plus de données auraient pu être facilement accessibles si l'équipement d'enregistrement des données de bord avait été meilleur. L'amélioration de la quantité et de la qualité des renseignements enregistrés peut raccourcir de beaucoup la durée d'une enquête et augmenter les possibilités de repérer les manquements à la sécurité.
2.2.2 Enregistreur de la parole dans le poste de pilotage
2.2.2.1 Durée de l'enregistrement
Les 30 minutes d'enregistrement offertes par l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) à bord de SR 111 n'ont pas suffi à fournir la quantité de données nécessaires à l'analyse de tous les facteurs contributifs de l'accident ou de facteurs qui auraient pu mener à l'identification d'autres manquements à la sécurité. Des enregistrements audio plus longs peuvent fournir les renseignements de base supplémentaires permettant d'évaluer la pertinence et l'importance des événements, d'isoler l'information directement liée à l'événement en cause et de résoudre des questions relatives à l'enquête plus rapidement. En l'absence d'enregistrements audio, le même genre d'évaluation par d'autres moyens peut nécessiter beaucoup de temps et de ressources. Une capacité d'enregistrement du CVR d'au moins deux heures aurait permis d'effectuer une évaluation plus rapide et probablement plus approfondie des événements qui s'étaient produits plus tôt pendant le vol. Par exemple, l'enquête aurait été grandement facilitée si on avait disposé de données CVR pour l'analyse des événements antérieurs, comme la période de 13 minutes d'interruption des communications à très haute fréquence (VHF).
Les JAA ont adopté le règlement JAR-OPS 1.700 qui exige que les avions de la catégorie transport certifiés après le 1er avril 1998 soient dotés d'un CVR offrant une capacité d'enregistrement de deux heures. Cependant, le MD-11 avait été certifié en 1991; par conséquent, en vertu du règlement JAR-OPS 1.710, seule une capacité d'enregistrement de 30 minutes était exigée pour SR 111. La réglementation des États-Unis et le Canada n'exigent toujours qu'une capacité d'enregistrement de 30 minutes pour les CVR des avions de la catégorie transport.
2.2.2.2 Source d'alimentation électrique des enregistreurs
Si le CVR avait été équipé d'une source d'alimentation indépendante lui permettant de fonctionner même après la perte de l'alimentation électrique de l'avion, l'information additionnelle obtenue aurait pu favoriser une compréhension beaucoup plus approfondie des circonstances avec lesquelles l'équipage avait dû composer pendant les dernières minutes du vol, et il aurait été possible d'évaluer beaucoup mieux les manquements à la sécurité.
Dans un avion où le CVR et le FDR sont alimentés par le même bus d'alternateur, les enregistreurs cesseraient de fonctionner en même temps si le bus d'alternateur était mis hors circuit. Même si l'exigence actuelle stipulant que les enregistreurs soient alimentés par le bus disponible le plus fiable semble prudente en principe, elle laisse les deux enregistreurs vulnérables à la panne de leur point d'alimentation commun. L'alimentation des enregistreurs par des bus distincts avec séparation du câblage et des disjoncteurs respectifs assurerait qu'au moins un des enregistreurs continue d'être alimenté en cas de perte d'un bus et, par conséquent, améliorerait les chances que d'autres renseignements utiles puissent être enregistrés.
2.2.2.3 Clarté de l'enregistrement CVR
Certaines parties de l'enregistrement par le microphone d'ambiance du poste de pilotage du CVR, qui auraient pu être importantes pour l'enquête, ont été difficiles à déchiffrer. L'expérience acquise avec de nombreux autres enregistrements CVR indique qu'il est beaucoup plus facile de déchiffrer la bande lorsque l'équipage de conduite utilise les micros-rails. La meilleure qualité de l'enregistrement permet de gagner beaucoup de temps pendant l'enquête, ainsi que d'améliorer la précision de la transcription et la probabilité de cerner et de confirmer les manquements à la sécurité. Actuellement, il n'existe aucune exigence réglementaire relative à l'utilisation des micros-rails pendant toutes les phases du vol; il n'y a pas non plus de pratique normalisée au sein des lignes aériennes.
2.2.3 Exploitabilité des renseignements de l'enregistreur de données de vol d'accès facile
Comme c'est le cas avec la plupart des enregistreurs de données de vol d'accès facile (QAR), celui du SR 111 a enregistré considérablement plus de données que ne l'a fait l'enregistreur de données de vol (FDR). La bande du QAR a été endommagée à un point tel qu'elle est devenue inutilisable. Par conséquent, on n'a pu recueillir de données provenant de cette source par ailleurs potentiellement très intéressante. Les paramètres enregistrés sur le QAR de SR 111 auraient été quatre fois plus nombreux que ceux enregistrés sur le FDR. Certains de ces paramètres portaient sur les températures dans certaines zones dissimulées et les tensions électriques des divers systèmes de bord. Ces renseignements, s'ils avaient été enregistrés sur le FDR protégé en cas d'écrasement, auraient été bien utiles à l'enquête, car ils auraient fourni des détails importants sur la source d'inflammation et la propagation de l'incendie en vol.
Les FDR numériques modernes, installés dans un milieu protégé en cas d'écrasement, sont techniquement aptes à enregistrer toutes les données QAR provenant de diverses sources dans l'avion; cependant, aucune réglementation n'exige que les FDR modernes enregistrent les données QAR.
2.2.4 Enregistrement des images
Même s’il n’est pas nécessaire d’enregistrer des images dans le poste de pilotage en vertu de la réglementation, il est techniquement possible de faire un tel enregistrement et de le protéger en cas d’écrasement. Les images enregistrées fourniraient des renseignements supplémentaires intéressants sur les faits et gestes de l’équipage, les défaillances d’équipement, les réglages, les sélections, les données de vol affichées, l’endroit où se produit de la fumée et d’autres éléments qui permettraient de reconstituer les faits avec plus de certitude. Ces renseignements pourraient être utilisés pour déterminer le cours des événements plus rapidement et plus efficacement et ainsi définir les manquements à la sécurité avec plus de fiabilité.
Une grande partie de la communication dans un poste de pilotage est non verbale. Sans enregistrement des images, il faut recueillir les bribes d’information et faire des déductions en tentant d’établir des liens entre celles-ci à partir d’observations faites pendant l’examen des débris et des enregistrements du CVR et du FDR. Même si les renseignements recueillis avec ces appareils sont inestimables, les enregistrements ne fournissent bien souvent qu’une information partielle et imprécise. Souvent, cette information ne fournit pas de contexte aux événements ou pas assez de détails aux fins d’une enquête de sécurité efficace et efficiente. L’enregistrement d’images à bord de SR 111 aurait permis d’obtenir d’autres renseignements très utiles et fourni plus de précisions pour la compréhension de la séquence des événements.
2.2.5 Radiobalises sous-marines de détresse – supports de fixation
Les brides de fixation des radiobalises sous-marines de détresse (ULB) des enregistreurs de bord sont demeurées fixées aux enregistreurs; cependant, les radiobalises ont été endommagées à un point tel qu'elles se sont presque détachées. Si les ULB s'étaient détachées des enregistreurs, il aurait peut-être été plus difficile, voire impossible, de récupérer les enregisteurs. La réglementation en vigueur n'exige pas que les brides de fixation des ULB respectent les mêmes niveaux de protection en cas d'écrasement que les autres composants des enregistreurs de données.
2.3 Vulnérabilité des matériaux au feu – normes de certification
2.3.1 Inflammabilité des matériaux
La lacune la plus grave liée aux événements qui ont conduit à l'accident a été la présence de matériaux inflammables qui ont favorisé le déclenchement de l'incendie et sa propagation. Les essais effectués pendant l'enquête ont démontré que plusieurs matériaux qui se trouvaient dans la zone endommagée par la chaleur étaient inflammables même s'ils étaient conformes aux normes réglementaires relatives à l'inflammabilité. Le matériau de recouvrement à base de poly(éthylène téréphtalate) (PET) métallisé des matelas d'isolation thermique et acoustique (matelas isolants) utilisés dans l'avion était inflammable, et il a constitué la principale source de matières combustibles qui ont alimenté l'incendie. En outre, le matelas isolant recouvert de PET métallisé a fort probablement été le premier matériau à prendre feu. On a aussi déterminé que d'autres matériaux présents dans la zone des dommages causés par l'incendie étaient combustibles et avaient contribué à la propagation et à l'intensité de l'incendie. Ces matériaux étaient des embouts en élastomère de silicone, des dispositifs de fermeture à bouclettes de nylon, des mousses, des adhésifs et différents types de bandes adhésives pour joints utilisées pour la construction, l'installation et la réparation des matelas isolants.
Les procédures d'essai de certification exigées en vertu des normes sur l'inflammabilité en vigueur au moment de l'accident n'étaient pas assez strictes ou exhaustives pour représenter fidèlement la gamme complète des sources d'inflammation possibles. Les procédures ne reproduisaient pas non plus le comportement des matériaux installés avec d'autres matériaux, ou à divers endroits et selon diverses orientations, comme c'est couramment le cas dans les avions et dans des environnements opérationnels réalistes. En l'absence de normes adéquates, des matériaux ont été approuvés pour une installation à bord d'aéronefs même s'ils étaient inflammables et qu'ils pouvaient propager la flamme.
Deux facteurs principaux ont modelé les normes sur l'inflammabilité en vigueur au moment de l'accident.
- La démarche adoptée par la Federal Aviation Administration (FAA) au milieu des années 1970 visait à concentrer ses efforts de prévention des incendies dans deux domaines particuliers : l'amélioration des matériaux de revêtement d'intérieur de cabine et l'élaboration de normes plus strictes pour les matériaux qui se trouvent dans des zones désignées comme zones de feu.
- Les risques d'incendie dans les autres zones ont été jugés moins prioritaires. On a considéré que les zones dissimulées non désignées comme zones de feu présentaient moins de risques d'incendie, puisqu'on a jugé qu'elles étaient exemptes de la combinaison des deux éléments nécessaires à un incendie : une source d'inflammation potentielle et des matières inflammables.
Les incendies au sol qui mettaient en cause le matériau de recouvrement des matelas isolants au (PET) métallisé et non métallisé et qui ont incité McDonnell Douglas à réévaluer ses essais d'inflammabilité sur les matelas isolants n'ont pas amené les organismes de réglementation à élaborer des mesures d'atténuation. Des essais effectués par les fabricants, l'administration de l'aviation civile de Chine (CAAC) et la FAA ont démontré que ces matériaux pouvaient s'enflammer et brûler; cependant, le suivi effectué par la FAA sur cette question ne comprenait pas de mesures obligatoires pour atténuer la menace potentielle d'incendie que représentaient ces matériaux. Bien que McDonnell Douglas ait cessé d'utiliser les matelas isolants recouverts de PET métallisé dans ses avions de série et qu'elle ait publié un bulletin de service dans lequel elle recommandait que les exploitants les remplacent par un matériau différent, ni la FAA ni d'autres autorités de navigabilité aérienne n'ont exigé son retrait des avions en service jusqu'à la divulgation par le Bureau de la sécurité des transports (BST) de recommandations en matière de sécurité à la suite de l'accident de SR 111.
En 1996, dans ses enquêtes sur deux incendies en vol distincts, la CAAC a signalé que l'inflammabilité de ces matériaux constituait un problème de sécurité. Cependant, d'autres enquêtes sur des incendies à bord d'avions mettant en cause les matelas isolants recouverts de PET métallisé portaient davantage sur la source d'inflammation que sur la matière inflammable. Ces enquêtes n'ont pas mis en relief les problèmes de sécurité que posaient les matières inflammables.
Finalement, la tenue au feu en service des matelas isolants recouverts de PET métallisé utilisés dans les avions a poussé la FAA à mettre en place un programme de recherche visant à évaluer le problème et à élaborer un essai spécifique d'inflammabilité pour les matériaux d'isolation thermique et acoustique. Après plus de deux années de recherche, la FAA a proposé d'adopter un essai plus strict intitulé Radiant Panel Test (RPT) (essai au panneau radiant). Dans cet essai, les matériaux sont exposés à un incendie en vol plus réaliste qui exige réellement un degré d'inflammabilité « zéro ». La validation de cet essai a confirmé que les matelas isolants recouverts de PET métallisé sont très susceptibles de propager la flamme lorsqu'ils prennent feu à partir d'une petite source d'inflammation. À la lumière de ces résultats, la FAA a publié des consignes de navigabilité, visant les aéronefs immatriculés aux États-Unis, qui précisaient qu'il fallait déterminer si des matelas isolants recouverts de PET métallisé sont installés et à quels endroits, et remplacer les matelas isolants recouverts de PET métallisé par de nouveaux matelas isolants. Ces consignes précisaient en outre que les mesures qu'elles imposaient visaient à assurer que les matelas isolant recouverts de PET métallisé soient retirés du fuselage. Même si ces consignes visaient seulement les aéronefs immatriculés aux États-Unis, la plupart des autres autorités de réglementation dans le monde emboîtent le pas à la FAA et adoptent ses consignes de navigabilité.
Alors que les matelas isolants recouverts de PET métallisé sont reconnus comme les plus vulnérables, l'étude a également démontré que beaucoup d'autres matériaux d'isolation thermique et acoustique n'avaient pas satisfait aux exigences de l'essai au panneau radiant. De plus, les consignes de navigabilité exigeant le retrait des matelas isolants recouverts de PET métallisé comprennent une mise en garde spécifiant que d'autres matériaux de recouvrement, même s'ils s'enflamment plus difficilement, brûlent de la même manière que les matériaux recouverts de PET métallisé. Le BST a exprimé ses inquiétudes au sujet des caractéristiques d'inflammabilité d'autres matériaux qui ont été approuvés en vertu des mêmes procédures d'essai utilisées pour certifier le PET métallisé. Bon nombre de ces matériaux de recouvrement se sont révélés inflammables au cours d'essais subséquents.
La plupart des équipages d'avion ne sont pas conscients du fait que, dans certaines conditions, un incendie peut se propager beaucoup de matières inflammables situées dans des endroits dissimulés de l'avion et s'étendre rapidement. Si les pilotes avaient su que des matières inflammables étaient présentes dans l'espace inoccupé du MD-11, leur évaluation de la source de l'odeur et de la fumée en aurait peut-être été influencée.
2.3.2 Questions relatives à la contamination
Plusieurs MD-11 de Swissair ont fait l'objet d'inspections visant à découvrir des contaminants potentiellement inflammables à l'endroit où l'on croit que l'incendie s'est déclaré; peu de contamination, voire aucune, n'a été observée à cet endroit. On a déterminé par des essais que les matériaux liés au déclenchement de l'incendie à bord de SR 111 étaient inflammables lorsqu'ils étaient neufs au moment de leur installation; par conséquent, on a écarté la contamination comme facteur dans le déclenchement de l'incendie.
Bien que ce ne soit que par intuition qu'on estime que la présence de contaminants à la surface d'un matériau pourrait avoir un effet néfaste sur ses caractéristiques d'inflammabilité, il convient de mener d'autres essais pour quantifier le risque.
2.3.3 Systèmes de bord non protégés contre les incendies
Avant l'accident de SR 111, les organismes de réglementation et les constructeurs ne percevaient que des risques mineurs d'incendie en vol ailleurs que dans les zones situées à l'intérieur de la cabine et dans les zones désignées comme zones de feu. Par conséquent, les normes de certification ne tenaient pas compte des conséquences éventuelles d'un bris ou d'une défaillance d'un système de bord attribuable à un incendie dans des zones comme les espaces inoccupés. En raison de cette lacune, les systèmes ont été installés de telle manière qu'une défaillance d'un composant à cause d'un incendie pouvait aggraver ce dernier.
En cas d'incendie, le bris d'un système, comme le circuit hydraulique, le circuit d'oxygène ou le système de ventilation, pourrait considérablement aggraver l'incendie en augmentant la quantité de matières combustibles, en alimentant le feu en oxygène, ou encore en modifiant la circulation d'air dans la zone. Pour la certification d'un avion, on installe habituellement des protections contre ce genre de défaillance après avoir effectué une analyse de sécurité des systèmes mettant en évidence les dangers éventuels. L'analyse de sécurité des systèmes par zone qui a été menée sur le MD-11 dans la zone où l'incendie s'est déclaré à bord de SR 111 n'avait pas porté sur les dangers découlant de défaillances de circuits ou de composants attribuables à un incendie en cours. La réglementation n'exigeait pas que ce type de danger soit compris dans l'analyse de sécurité des systèmes. Le bris d'un embout en élastomère d'une gaine de conditionnement d'air et, peut-être, la défaillance d'un capuchon en aluminium du circuit d'alimentation en oxygène de l'équipage de conduite auraient contribué à l'aggravation de l'incendie en vol.
2.4 Détection et extinction d'incendies à bord de l'avion
Les gros avions de transport sont conçus selon des normes qui exigent la présence de systèmes intégrés de détection et d'extinction incendie seulement dans les zones désignées comme zones de feu, soit près des moteurs et des groupes auxiliaires de bord, et dans des zones de feu potentielles comme les toilettes et les soutes. Autrement dit, seules les zones représentant des risques d'incendie reconnus venant de la présence combinée de sources d'inflammation potentielles et de matières combustibles sont visées par la réglementation exigeant l'installation de systèmes de détection et d'extinction incendie. D'autres endroits, comme les zones dissimulées se trouvant au-dessus du plafond du poste de pilotage et les espaces inoccupés de la cabine du MD-11, ont été reconnus comme présentant un risque d'incendie, car ils contiennent aussi des matières combustibles et des sources d'inflammation potentielles. La FAA était consciente de la présence de matières combustibles et de sources d'inflammation potentielles dans ces endroits; cependant, elle a jugé que le risque d'incendie était mineur. Les normes actuelles n'exigent pas que ces endroits soient dotés de systèmes intégrés de détection de la fumée ou du feu ni de systèmes d'extinction. Par conséquent, la détection de la fumée ou du feu, ailleurs que dans les zones désignées comme zones de feu et les zones de feu potentielles, dépend entièrement de la perception sensorielle de l'équipage. Dans des endroits comme les espaces inoccupés, la circulation normale de l'air et des systèmes de filtration de l'air très performants peuvent isoler les odeurs ou la fumée et, par conséquent, en retarder considérablement la détection.
Dans le cas du MD-11, aucune disposition réglementaire n'exigeait l'installation d'équipement d'extinction incendie intégré ailleurs que dans les zones désignées comme zones de feu et les zones de feu potentielles. La présence de panneaux d'accès ou d'autres moyens d'accès permettant de lutter contre les incendies dans les endroits dissimulés n'était pas non plus obligatoire. Sans équipement d'extinction intégré ni accès aux zones habituellement inaccessibles aux membres de l'équipage, il est très difficile d'intervenir efficacement pour lutter contre un incendie qui se serait déclaré à ces endroits. Même si l'équipage de SR 111 avait pu repérer la source de la fumée plus tôt, il lui aurait été très difficile d'accéder aux espaces inoccupés où l'incendie s'était déclaré. Au moment où l'équipage a pu repérer exactement le foyer d'incendie, soit dans les quelques dernières minutes du vol, il est fort peu probable que quelqu'un ait pu accéder à l'espace inoccupé et éteindre l'incendie ou, du moins, en diminuer l'intensité, à l'aide d'extincteurs manuels. On ne sait s'il y a eu une tentative en ce sens.
Au début, l'équipage ne s'est même pas rendu compte qu'il y avait de la fumée dans l'espace situé au-dessus du plafond du poste de pilotage et dans l'espace inoccupé de la cabine. Une fois la fumée décelée dans le poste de pilotage, il y a eu échange de communications entre les pilotes et l'équipage de cabine. Cependant, aucune mention de fumée dans la cabine ne figure sur l'enregistrement précédant le moment où le CVR a cessé de fonctionner. S'il y avait eu de la fumée dans la cabine, on se serait attendu à ce que l'équipage de cabine relaye cette information aux pilotes.
Le recours aux sens pour la détection d'un incendie n'a pas suffi, car l'emplacement et l'étendue de la fumée et de l'incendie n'ont pas été perçus par l'équipage de l'avion jusqu'à ce que l'incendie ait pris des proportions incontrôlables pour les moyens du bord. Les membres d'équipage étaient extrêmement désavantagés dans leur capacité à lutter contre l'incendie en raison de l'absence d'équipement de détection et d'extinction d'incendie dans la zone du feu.
2.5 Mesures de lutte contre les incendies en vol
Au moment de l'accident du vol SR 111, l'industrie de l'aviation (constructeurs, organismes de réglementation, exploitants et associations) ne traitait pas la question de la protection contre les incendies en vol comme un « système » de mesures interreliées; c'est-à-dire qu'il n'y avait aucune exigence concernant l'évaluation globale des différentes mesures de défense contre les incendies. Une telle évaluation examinerait les liens entre l'équipage, les procédures, les matériaux et l'équipement, et tiendrait compte de la façon dont les différents éléments pourraient se conjuguer aux fins de la prévention, de la détection, de la maîtrise et de l'extinction des incendies. Selon une telle approche, des éléments distincts feraient l'objet d'une évaluation conjointe uniforme qui examinerait les normes d'inflammabilité des matériaux, l'accès aux zones dissimulées, l'équipement de détection et de suppression de fumée ou d'incendie, les procédures d'urgence concernant l'équipage et la formation.
Aucune initiative d'envergure n'a été établie pour évaluer toutes ces composantes conjointement ni pour évaluer les liens existant entre elles en vue de l'élaboration de mesures de lutte contre les incendies améliorées, coordonnées et exhaustives. Il y avait un manque d'intégration des diverses mesures potentielles de lutte contre les incendies en vol.
Les leçons tirées des accidents liés à des incendies en vol ont entraîné divers changements aux procédures de vol et à la conception de l'équipement des avionsNote de bas de page 113. Toutefois, les changements visant à fournir des mesures plus efficaces de lutte contre les incendies ont généralement constitué des initiatives isolées plutôt que des initiatives pleinement intégrées et exhaustives. L'industrie a déployé des efforts considérables pour former les équipages des avions et pour leur donner les moyens de réagir à certains types d'incendie en vol (p. ex. incendies facilement accessibles dans la cabine). Ces efforts n'ont pas permis de préparer adéquatement les équipages à déceler et à localiser des incendies en vol dans des endroits dissimulés et à y accéder pour les supprimer d'une façon rapide, coordonnée et efficace.
2.6 Préparation et formation de l'équipage
2.6.1 Lutte contre les incendies en vol
La formation reçue par l'équipage de SR 111 était conforme aux normes de l'industrie; cependant, elle ne l'a pas préparé à reconnaître ni à combattre l'incendie en vol. La formation reçue par le pilote mettait l'accent sur la suppression de la menace posée par la fumée dans l'avion, qu'elle provienne du système de conditionnement d'air ou du système électrique, au moyen des listes de vérifications fournies. Aucun intervenant de l'industrie de l'aviation n'avait prévu que l'équipage d'un avion pourrait un jour être confronté à un incendie dans l'espace inoccupé d'un avion. Les membres de l'équipage n'ont en outre pas reçu de formation leur permettant de se rendre compte de la vitesse à laquelle un incendie en vol peut se transformer en une situation incontrôlable. Les formations à l'aide d'un simulateur tendaient plutôt à privilégier un résultat positif à des événements liés à la fumée; de façon générale, les décisions prises par les pilotes pendant l'exercice de simulation entraînent une disparition rapide de la fumée. Les procédures enseignées et la formation du pilote étaient généralement fondées sur la prémisse que la source d'inflammation potentielle peut être neutralisée avec succès au moyen des procédures qui permettent de l'isoler. Peu d'éléments exploraient la possibilité qu'un incendie puisse avoir déjà commencé à faire des ravages avant que la fumée soit détectée, ou qu'une fois qu'un incendie avait commencé à faire des ravages, il ne soit pas isolé ou éliminé au moyen des procédures de la liste de vérifications existante.
Au moment de l'accident de SR 111, on s'attendait au sein de l'industrie à ce que les membres d'un équipage soient en mesure de faire la distinction, selon un niveau de certitude élevé, entre de la fumée provenant d'une défaillance du système de conditionnement d'air et de la fumée provenant d'une défaillance du système électrique. Chez Swissair, on croyait qu'une fois que les pilotes auraient fait cette distinction, et qu'ils seraient certains que la fumée provenait du système de conditionnement d'air, il conviendrait qu'ils choisissent la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air. Cependant, il est faux de supposer que les organes sensoriels d'une personne lui permettent de faire clairement la distinction entre la fumée liée à une défaillance électrique, à une défaillance du système de conditionnement d'air ou à des sous-produits de la combustion d'autres matériaux.
Les membres des équipages de conduite de Swissair s'entraînaient en même temps que les membres des équipages de cabine, et la formation suivie était conforme aux normes de l'industrie en ce qui concerne l'extinction d'incendies faciles d'accès dans la cabine, comme des incendies dans les offices ou les toilettes. La formation sur la lutte contre les incendies ne comportait aucune partie traitant de la lutte contre les incendies dans le poste de pilotage, le compartiment avionique ou les endroits dissimulés derrière les panneaux ou au-dessus du plafond du poste de pilotage ou de la cabine. En général, on s'attend à ce que les pilotes ne quittent pas leur poste pour combattre un incendie à l'extérieur du poste de pilotage. Cette attente est conforme aux normes de l'industrie, qui stipulent que l'équipage de cabine doit combattre l'incendie de façon à permettre aux pilotes de continuer à piloter l'avion.
Les membres de l'équipage de conduite avaient été formés à réagir aux urgences d'une façon mesurée, proportionnelle à la menace perçue. On s'attendait à ce que les pilotes de SR 111 réagissent à l'apparition de fumée en vérifiant l'alimentation, en vérifiant les performances de l'avion, en analysant la situation et en prenant les mesures appropriées, et en élaborant et en exécutant un plan d'action fondé sur leur évaluation de la situation. Bien que cet élément ait été abordé et mis en relief lors des séances d'entraînement en simulateur respectives, aucune formation ni instruction particulière n'avait été fournie au sujet de la nécessité d'exécuter de toute urgence une liste de vérifications et de confirmer, par tous les moyens possibles, le type et la gravité d'une situation où de la fumée ou des émanations étaient présentes.
Les membres de l'équipage de cabine avaient été entraînés à localiser et à éteindre des incendies en vol, mais leur formation se limitait aux endroits de l'avion faciles d'accès. Cette formation ne préparait pas les membres de l'équipage de cabine à combattre un incendie faisant rage dans l'espace inoccupé ou dans d'autres endroits dissimulés de l'avion. De plus, les membres de l'équipage de cabine n'avaient reçu aucune formation portant spécialement sur la lutte contre les incendies dans le poste de pilotage ou dans le compartiment avionique.
2.6.2 Déroutements d'urgence en vol
Les pilotes de Swissair avaient ordre, par l'entremise de l'information fournie dans le Swissair General/Basics: Flight Crew Manual, d'atterrir à l'aéroport d'urgence le plus proche en cas de fumée persistante de source inconnue. Cette instruction n'indiquait pas qu'un déroutement d'urgence devait être commencé immédiatement, ni que toute fumée devait être traitée comme une situation d'incendie en vol en l'absence de preuve du contraire. Par conséquent, en présence de fumée, on s'attendait à ce que l'équipage catégorise la fumée, choisisse la liste de vérifications appropriée et déroute l'avion si la situation le justifiait.
Les pilotes de SR 111 ont rapidement procédé à l'évaluation de la situation et ont décidé de se dérouter, même si, d'après les indices perçus, la situation ne pouvait pas être catégorisée comme une situation d'urgence.
2.7 Questions relatives aux listes de vérifications
2.7.1 Choix de listes de vérifications de Swissair pour isoler la fumée
Le fait qu'il y avait deux listes de vérifications d'urgence plutôt qu'une pour isoler la fumée a fait l'objet d'un examen visant à évaluer si le fait de choisir entre deux listes de vérifications avait pu avoir une incidence sur l'issue du vol. Pour que cette situation ait pu avoir une incidence, il faut supposer que les pilotes auraient réagi différemment si les procédures de Swissair n'avaient tenu que sur une seule liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine électrique, du système de conditionnement d'air ou d'origine inconnue. Les pilotes avaient déterminé que la fumée provenait du système de conditionnement d'air et ils n'avaient pas jugé qu'elle posait une menace suffisante pour justifier l'utilisation de la liste de vérifications correspondante. Il semble donc peu probable que les pilotes aient utilisé une liste de vérifications unique plus tôt.
Le fait d'offrir un choix entre deux listes de vérifications d'urgence en cas de fumée pour isoler la source de la fumée présuppose qu'il est possible de déterminer avec certitude le type de fumée dont il est question. L'accident de SR 111 démontre que les organes de perception sensorielle des personnes ne permettent pas toujours d'évaluer avec certitude le type de fumée.
2.7.2 Délestage électrique en cas d'urgence
Les pilotes ont d'abord déterminé que la fumée provenait du système de conditionnement d'air. Après quoi, rien n'indique qu'ils aient immédiatement commencé à exécuter quelque liste de vérifications que ce soit. Même s'ils avaient commencé immédiatement avec la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue, cela n'aurait probablement pas eu d'influence sur l'incendie, étant donné qu'on croit que ce dernier s'était déjà propagé avant que la fumée apparaisse dans le poste de pilotage. Cependant, dans certaines circonstances, la mise hors tension rapide des systèmes électriques pourrait prévenir un incendie par le retrait de la source d'inflammation avant que toute matière combustible puisse prendre feu.
Il n'existe aucune exigence réglementaire concernant les avions de la catégorie transport obligeant qu'ils soient conçus de façon à permettre l'utilisation d'une procédure fondée sur une liste de vérifications pour mettre hors tension tous les systèmes électriques, sauf les systèmes électriques essentiels, afin d'éliminer une source d'inflammation potentielle. Les listes de vérifications qui sont utilisées pour le délestage électrique, comme la liste en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue du MD-11, sont conçues pour isoler un composant défectueux générant de la fumée ou des émanations. Les mesures associées aux listes de vérifications pouvaient prendre jusqu'à 30 minutes ou plus, selon que le composant défectueux était désactivé plus tôt ou plus tard dans la procédure de la liste de vérifications.
Il n'existe aucune exigence réglementaire sur la durée d'exécution des listes de vérifications conçues pour les situations relatives à des odeurs ou à de la fumée. Les 20 à 30 minutes qui sont généralement requises pour exécuter la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue du MD-11 pourraient permettre à une défaillance électrique qui génère de la fumée et une énergie thermique grandissante de se transformer en source d'inflammation. Pour contribuer efficacement à prévenir le début d'un incendie, une procédure fondée sur une liste de vérifications doit supprimer rapidement la source d'inflammation avant que l'incendie devienne auto-entretenu.
2.7.3 Autres questions relatives aux listes de vérifications
Les écarts relevé en ce qui concerne la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d’émanations d’origine inconnue étaient susceptibles de poser des problèmes. Cependant, le seul lien direct qui pourrait être établi avec le scénario de SR 111 était l’absence d’éclairage dans la cabine, du fait que l’éclairage d’urgence de cette dernière s’est éteint lorsque les pilotes ont actionné le commutateur CABIN BUS. Le fait de devoir travailler dans une cabine non éclairée peut avoir ralenti l’équipage de cabine qui s’affairait à préparer l’avion en vue d’un atterrissage d’urgence, et ce en l’obligeant à utiliser des lampes de poche. Toutefois, un interrupteur d’éclairage d’urgence de la cabine était installé au poste d’agent de bord normalement occupé par le maître de cabine. L’utilisation de cet interrupteur aurait rétabli l’éclairage d’urgence et éliminé la nécessité d’utiliser temporairement des lampes de poche. On ne sait pas si cet interrupteur d’éclairage d’urgence de la cabine a été utilisé.
Rien n’indique que les décisions prises par les pilotes aient été influencées par l’absence d’instructions dans la liste de vérifications sur le port du masque à oxygène. On ne sait pas si les pilotes auraient entamé un déroutement d’urgence plus tôt s’ils avaient eu à leur disposition une seule liste de vérifications combinée dont l’un des premiers éléments aurait porté sur les préparatifs en vue d’un atterrissage dans les plus brefs délais. On n’a pas pu déterminer si la taille de la police de caractères utilisée pour la liste de vérifications ou si des reflets provenant de la liste de vérifications ont nui à sa lecture par les pilotes, bien que l’une ou l’autre de ces conditions pourrait nuire à la capacité de l’équipage de conduite de bien lire la liste de vérifications, surtout dans un environnement enfumé ou mal éclairé.
Un examen de plusieurs listes de vérifications a démontré que les listes n’insistaient pas assez pour que toute quantité de fumée dans un avion soit traitée comme une menace d’incendie grave. Par exemple, ni la liste de vérifications de Swissair ni la liste de vérifications en cas de fumée d’origine inconnue de McDonnell Douglas n’indiquaient que les préparatifs en vue d’un atterrissage d’urgence éventuel devraient être envisagés immédiatement au moment de l’apparition de fumée d’origine inconnue. Plutôt, dans les deux listes de vérifications, l’atterrissage d’urgence constitue le dernier élément de la liste. De même, les instructions de Swissair fournies aux équipages de conduite à ce sujet prévoyaient l’atterrissage de l’avion à l’aéroport d’urgence le plus proche en cas de fumée d’origine inconnue « persistante ».
2.7.4 Révisions et approbations des listes de vérifications
Les représentants de Swissair ont consulté McDonnell Douglas lorsqu'ils ont décidé de conserver deux listes de vérifications en cas de fumée pour le MD-11 et de réviser les listes de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue; toutefois, aucune approbation formelle des modifications n'avait été exigée par l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) suisse.
2.8 Aspects relatifs à la maintenance et à l'assurance qualité
Au cours de l'enquête, l'état de la maintenance de l'avion a été évalué au moyen de l'examen des dossiers de maintenance de ce dernier et des politiques, des procédures et des pratiques de SR Technics.
Les dossiers de l'avion en question indiquent que les travaux de maintenance requis avaient été effectués et que la maintenance de l'avion avait été faite conformément aux procédures de maintenance approuvées et aux normes de l'industrie. Bien que plusieurs anomalies liées à la « tenue des livres » aient été trouvées, la méthode globale de tenue des dossiers était appropriée.
L'état de l'épave de SR 111 n'a pas permis de déterminer entièrement l'état de l'avion avant l'accident. Par conséquent, les enquêteurs ont inspecté plusieurs avions MD-11, dont ceux de la flotte de Swissair, et ils ont utilisé l'information obtenue au cours de ces inspections pour faciliter l'évaluation des sources d'inflammation possibles. Pendant ces inspections des MD-11, un certain nombre d'anomalies ont été consignées relativement à l'installation et à la maintenance du système électrique, dont l'usure par frottement des fils, un serrage incorrect des connexions de borne, et un manque d'uniformité dans l'acheminement des fils. On a jugé qu'aucune de ces anomalies n'avait eu d'incidence sur la sécurité immédiate du vol. Certaines anomalies étaient attribuables au constructeur de l'avion, et d'autres, aux installations subséquentes et à la maintenance permanente.
Le programme d'assurance qualité de SR Technics satisfaisait aux exigences réglementaires. Il comprenait une approche polyvalente fondée sur la formation, l'analyse des tendances, la fiabilité et des audits structurés. Le nombre et les types d'anomalie découverts pendant l'enquête, qui comprenait un examen des conclusions des divers audits internes et externes, laissent croire que si la conception du programme d'assurance qualité était appropriée, son application ne garantissait pas suffisamment la détermination et la réduction systématiques des problèmes de sécurité éventuels.
La présentation de l'organisme de maintenance de SR Technics exigeait que tous les employés reçoivent une formation leur permettant d'assumer personnellement la responsabilité de la qualité de leur travail; c'est-à-dire qu'on s'attendait à ce que les employés accomplissent correctement leur travail et réalisent une auto-inspection après chaque « étape du travail ». Lorsqu'une tâche était effectuée pour laquelle les conséquences d'une erreur présentaient un risque pour les personnes ou le matériel (déterminé par une équipe d'évaluation des risques), une deuxième inspection devait être réalisée. Les superviseurs devaient veiller à ce que le programme d'assurance qualité soit suivi, et inspecter le travail accompli dans leur sphère de compétence à des fins de contrôle de la qualité. Les employés avaient reçu des instructions générales en matière d'assurance qualité ainsi qu'une formation de familiarisation sur la documentation, les politiques et les procédures, mais ils n'avaient pas reçu (la présentation de l'organisme de maintenance n'en parlait pas non plus) de formation précise sur l'application uniforme du programme d'assurance qualité. La principale tâche des personnes qui participaient aux activités d'assurance qualité quotidiennes était la maintenance de l'avion. Des éléments indiquent que ces personnes avaient traité certaines des diverses irrégularités et anomalies techniques comme des problèmes de fiabilité plutôt que comme des manquements à la sécurité potentiels. Même si les exigences réglementaires étaient respectées, certains aspects du programme d'assurance qualité n'étaient pas appliqués de façon uniforme.
Un examen après l'-accident par SR Technics de son propre programme d'assurance qualité a permis de déterminer qu'un point faible du programme était le fait qu'il dépendait du discernement des employés. Cette observation ne figurait dans aucune des conclusions des audits internes précédents. Bien que le discernement joue un rôle dans n'importe quel programme d'assurance qualité, il semble que le programme de SR Technics dépendait trop de la capacité des employés de cerner les manquements à la sécurité potentiels tout en continuant d'essayer de satisfaire à des objectifs de rendement.
Bien que le programme d'assurance qualité de SR Technics ait prévu un processus de suivi pour les questions relatives à la sécurité, l'application du programme était telle qu'on manquait parfois des occasions de cerner des questions potentielles liées à la sécurité; par conséquent, aucun suivi axé sur la sécurité n'était effectué dans ces cas. Par exemple, les anomalies relatives aux liseuses de carte avaient été traitées comme un problème de fiabilité; elles n'avaient pas été considérées comme un risque pour la sécurité aérienne.
L'enquête n'a pas tenté d'établir une comparaison directe entre le programme d'assurance qualité de SR Technics et les programmes d'assurance qualité mis en œuvre par d'autres exploitants. Cependant, de l'information a été obtenue d'un rapport d'examen de programme national de la FAA dans lequel on examinait les organismes de maintenance de neuf des plus grandes lignes aériennes des États-UnisNote de bas de page 114. Les observations de ce rapport portent à croire que les insuffisances cernées dans le programme d'assurance qualité de SR Technics ne sont pas un cas isolé. La FAA a conclu que, bien que l'état actuel des programmes d'assurance qualité obligatoires de ces neuf lignes aériennes ne présentait pas de conditions dangereuses, chacune d'entre elles pourrait tirer avantage de l'examen de son programme d'assurance qualité et de l'adaptation de celui-ci en fonction du modèle optimisé de la FAA pour le programme de système de surveillance et d'analyse continues (CASS). De même, l'analyse du programme d'assurance qualité de SR Technics n'a pas permis de cerner des préoccupations immédiates en matière de sécurité aérienne ni des conditions dangereuses, même si le programme n'avait pas toujours été efficace en ce qui concerne la mise en évidence et la résolution des facteurs de risque.
Les observations relatives aux résultats de l'examen de programme national, réalisé par le bureau de l'inspecteur général du département des transports des États-Unis, ont fourni des données intéressantes pour la présente enquête. Le bureau de l'inspecteur général a conclu que, dans son survol des divers programmes CASS, la FAA avait surtout essayé de déterminer si le programme comportait tous les éléments requis, au lieu de chercher à savoir si le programme était efficace pour la détection des problèmes. Le bureau de l'inspecteur général a formulé diverses recommandations qui exigeraient la mise en œuvre d'une formation, d'une surveillance et d'une analyse améliorées du programme CASS. L'analyse des résultats des audits de SR Technics menés par l'OFAC a montré une tendance semblable.
La nature similaire des diverses conclusions des audits de l'OFAC indique que ce dernier avait concentré ses efforts sur le fait de s'assurer que le programme d'assurance qualité comprenne tous les éléments requis. Les conclusions tendaient à cerner des symptômes, plutôt que les facteurs sous-jacents apparaissant dans les conclusions récurrentes. De façon générale, chacun des audits contenait plusieurs conclusions qui remettaient en question la pertinence et la qualité de la formation offerte aux employés, ou la mise en oeuvre des pratiques et des procédures établies ainsi que la conformité à ces pratiques et procédures. L'OFAC a accepté les mesures correctives mises en oeuvre par SR Technics, mais il a formulé les mêmes conclusions lors des audits subséquents. On a aussi remarqué que, de façon générale, les conclusions de l'OFAC étaient comparables à celles des audits internes effectués par SR Technics.
2.9 Effet potentiel des champs rayonnés à haute intensité
La certification du MD-11 comprenait la tenue d'essais menés dans le but de démontrer que les systèmes de bord étaient protégés de façon acceptable contre les effets des champs rayonnés à haute intensité (CRHI). Les conditions dans lesquelles les essais ont été menés représentaient des intensités de champ rayonné qui excédaient largement les intensités de champ maximales produites par les radars commerciaux et militaires qui, selon les renseignements disponibles, fonctionnaient à proximité de l'avion en question. De la même façon, on ne peut démontrer aucune combinaison hypothétique d'émetteurs connus et de géométrie réaliste d'espacement en fonction de la distance dépassant les critères d'intensité de champ utilisés durant les essais relatifs aux CRHI en vue de la certification du MD-11.
Une fois que l'avion eut quitté l'espace aérien de l'aéroport JFK, les CRHI les plus importants dans lesquels SR 111 s'était retrouvé étaient situés aux environs de Barrington (Nouvelle-Écosse). L'intensité des CRHI près de Barrington, dans le voisinage de l'avion, était environ 100 fois plus faible que la valeur de pointe estimée de l'intensité de champ dans laquelle les avions se retrouvent en conditions normales d'approche et d'atterrissage à de grands aéroports bien équipés. Par conséquent, il est probable que l'environnement normal d'exploitation autour de l'aéroport JFK présentait les CRHI les plus intenses dans lesquels l'avion s'était retrouvé durant n'importe quelle partie du vol ayant mené à l'accident.
L'environnement normal des CRHI à l'aéroport JFK ne pose pas de risque pour l'aviation, comme en font foi l'arrivée et le départ sans incident de nombreux avions tous les jours, y compris les vols antérieurs effectués par l'avion en question. En outre, l'intensité de champ minimale requise pour l'induction d'une décharge électrique entre des conducteurs à nu (31 kilovolts par centimètre au niveau de la mer) est plus de 1 000 fois supérieure à l'intensité de champ maximale associée aux environnements normaux des CRHI aux aéroports, et environ 430 fois supérieure au pire environnement théorique des CRHI pour un avion commercial.
Des effets de résonance n'auraient pas pu produire des gradients de champ localisés d'une intensité suffisante pour provoquer l'induction d'une décharge électrique entre des conducteurs à nu. Le gain requis pour l'intensité de champ ambiante est d'environ trois ordres de grandeur (environ 1 000 fois plus élevé), tandis que le gain en résonance excède rarement un ordre de grandeur.
Les attributions des radiofréquences (RF) sont établies de telle sorte que les sources RF haute puissance autorisées ne causent pas de brouillage aux appareils radio ni aux radars des avions; par conséquent, il est peu probable que l'interruption des communications qui a duré 13 minutes ait été causée par du brouillage en provenance d'un émetteur CRHI. De toute façon, il n'existe pas, sur le plan technique, de lien possible entre le brouillage radio VHF induit par des CRHI et une décharge électrique pouvant causer l'inflammation de matières inflammables. Par conséquent, on a considéré que les CRHI n'avaient pas été un facteur dans cet accident.
2.10 Questions relatives aux Services de la circulation aérienne
Environ 15 minutes aprè;s le décollage, les communications radio avec l'avion ont été interrompues. Cette interruption des communications s'est poursuivie pendant environ 13 minutes, période pendant laquelle les contrôleurs de la circulation aérienne ont tenté à plusieurs reprises de communiquer avec l'avion sur la fréquence radio VHF attribuée. Aucune anomalie n'a été enregistrée sur le FDR, et aucune anomalie n'a été signalée par les pilotes. Aucune anomalie relative aux communications n'a été signalée par les autres avions ou organismes utilisant la même fréquence radio VHF. Aucune explication n'a été donnée par les pilotes et aucune question de suivi n'a été posée par les Services de la circulation aérienne (ATS) quant aux raisons de cette interruption de 13 minutes dans les communications.
Durant le vol, les pilotes de SR 111 et les différents contrôleurs se sont écartés à quelques reprises de la phraséologie radio standard; ces écarts n'ont joué aucun rôle dans l'accident.
La réaction du contrôleur face à la déclaration d'une situation d'urgence par les pilotes était conforme au fait qu'il avait traité dè;s le départ la situation comme une urgence. Tous les contrôleurs qui sont intervenus ont traité la situation comme une urgence même si le pilote, par le message Pan Pan, avait seulement signalé une situation nécessitant une priorité de communication.
Lorsque les pilotes ont déclaré une situation d'urgence, à part d'indiquer qu'ils devaient se poser immédiatement, ils n'ont pas demandé qu'on leur fournisse d'autres renseignements ni que le contrôleur prenne d'autres mesures. Pendant les 20 secondes qui se sont écoulées entre le moment où les pilotes ont pour la premiè;re fois déclaré une situation d'urgence et la derniè;re communication intelligible reçue de SR 111, les pilotes n'ont exprimé aucune demande concernant des mesures ou des services additionnels de la part des ATS.
Pendant le déroutement vers l'aéroport de Halifax, le contrôleur s'occupait exclusivement de SR 111 et il n'avait aucun autre avion sous son contrôle. Une partie de ses fonctions, comme le stipulent les procédures d'exploitation normalisées, consistait à assurer la coordination avec d'autres contrôleurs du centre de contrôle régional en vue de faciliter l'arrivée de SR 111. À 1 h 24 min 53 s, lorsque les pilotes ont indiqué qu'ils commençaient à larguer du carburant et qu'ils devaient atterrir immédiatement, le contrôleur était partiellement occupé à des activités de coordination et il n'a pas été en mesure de comprendre entiè;rement le contenu de la communication radio. Par conséquent, il n'a pas fourni aux pilotes d'autres renseignements, comme un cap radar vers l'aéroport international de Halifax. Le systè;me de communication radio de l'avion a cessé de fonctionner quelques secondes aprè;s cette communication, empêchant toute autre demande de la part des pilotes, ou toute communication de renseignements de la part du contrôleur au sujet des caps radar vers l'aéroport.
L'équipement de communication joue un rôle trè;s important pendant les situations d'urgence et ni le contrôleur ni les pilotes n'auraient pu savoir à l'avance que l'équipement de communication de SR 111 cesserait de fonctionner. Quoi qu'il en soit, les calculs des performances de l'avion montrent qu'en raison de la détérioration rapide des systè;mes de bord qui s'en est suivie et de la propagation de l'incendie, l'avion n'était pas en état de réussir son atterrissage à l'aéroport.
Au moment de l'accident, les contrôleurs de la circulation aérienne canadiens n'avaient pas reçu de formation spéciale sur les exigences générales d'exploitation d'un avion pendant des procédures anormales ou d'urgence, ni sur les procédures spéciales, comme le largage de carburant. Le contrôleur possédait de l'expérience dans les exercices de ravitaillement d'avions militaires, opérations pendant lesquelles certains systè;mes électriques de l'avion ravitaillé étaient coupés. Compte tenu de cette expérience, le contrôleur a supposé que l'absence de réponse radio à son autorisation de procéder au largage de carburant, et la perte subséquente de l'information concernant le transpondeur et l'altitude en mode C, étaient le résultat de procédures intentionnelles de délestage électrique exécutées par les pilotes.
Les mesures prises par le contrôleur n'ont joué aucun rôle dans l'accident.
2.11 Anomalies relatives au système ACARS et à l'interruption des communications VHF
On a évalué les anomalies du système d'échange de données techniques avion-sol en temps réel (ACARS) pour déterminer s'il y avait un lien avec la défaillance technique qui avait précédé l'incendie en vol. Le premier indice d'une anomalie dans le système ACARS avait été l'absence d'enregistrement du message de poursuite à environ 0 h 31 min 18 s, plus de 39 minutes avant la détection d'une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage (voir la rubrique 1.18.8.2).
Les deux messages de poursuite du système ACARS qui étaient attendus à environ 0 h 31 min 18 s et 0 h 41 min 18 s n'ont pas été enregistrés par les fournisseurs du système ACARS, mais l'information de mise à jour des comptes obtenue des messages subséquents du système ACARS montre que ces deux messages avaient été envoyés par l'avion. L'explication la plus plausible est que le système ACARS s'était raccordé à un autre réseau, comme ce serait le cas si le système initialement utilisé devenait saturé. Il n'y avait pas de données disponibles pour confirmer cette hypothèse.
Le système de communication du MD-11 est redondant, car il y a trois trajets de communications VHF. Il faudrait une panne complète de tout le système pour que la capacité de communication soit perdue. Ce pourrait être le cas s'il y avait défaillance du système audio à commande numérique, mais cette éventualité est peu probable, du fait que le système audio à commande numérique fonctionnait normalement une fois les communications rétablies. Le seul autre cas où il y aurait interruption complète du système de communication serait en cas de défaillance simultanée des neuf poussoirs d'émission, ce qui est considéré comme impossible. Par conséquent, il est très peu probable que l'interruption des communications ait eu lieu à cause d'une défaillance technique.
L'explication la plus plausible de l'interruption de 13 minutes des communications est que les pilotes auraient sélectionné une fréquence incorrecte durant la tentative de changement de fréquence entre 0 h 33 min 12 s et 0 h 33 min 21 s. La séquence de communication jusqu'à ce changement de fréquence a différé des changements de fréquence antérieurs et subséquents car, après la première instruction donnée par les ATS de passer à une fréquence différente en route, seule une communication tronquée inintelligible de courte durée a été entendue de SR 111. Toutefois, lorsque la nouvelle fréquence a été répétée par le contrôleur, SR 111 a immédiatement accusé réception de la façon normale en répétant la fréquence attribuée. Les opérations subséquentes de manipulation sur les radios VHF 1 et VHF 2 qui ont été enregistrées par le FDR durant l'interruption des communications sont conformes aux tentatives faites par les pilotes pour rétablir le contact radio. Comme les calages de fréquence ne sont pas enregistrés par le FDR, on ne sait pas quelle fréquence les pilotes tentaient d'utiliser.
Lorsque les pilotes ont fini par rétablir le contact, c'était sur une fréquence non attribuée, et les pilotes n'ont fait aucune mention d'un problème technique. Il n'y a rien qui fasse état de difficultés subséquentes de communications radio jusqu'à ce que les effets de l'incendie aient commencé à toucher d'autres systèmes de bord, environ 40 minutes plus tard.
La perte du système ACARS sur la radio VHF 3 à 0 h 47 min 6 s peut s'expliquer par le fait que les pilotes avaient fait passer le trajet VHF 3 du mode de communication des données au mode phonique afin d'utiliser cette radio pour les communications. Les données du protocole de transmission des messages du fournisseur du système ACARS indiquent que les pilotes avaient dû régler la radio VHF 3 au mode phonique à 0 h 47 min 6 s, lorsque le système ACARS est passé au mode de transmission par satellite; les pilotes ont alors remis la radio VHF 3 en mode de communication des données à 1 h 4vmin 14 s.
L'odeur dans le poste de pilotage de SR 111 a été décelée pour la première fois environ 37 minutes après le début de l'interruption des communications VHF et environ 24 minutes après le rétablissement des communications. Aucun lien n'a pu être établi entre les anomalies du système ACARS, l'interruption de 13 minutes des communications VHF et le déclenchement de l'incendie à bord de l'avion.
2.12 Montage des lampes de lecture (liseuses de carte) de l'équipage de conduite
Les défauts de conception de la liseuse de carte Hella présentaient des risques d'amorçage d'arc électrique en conditions de service normales. La rotation normale du boîtier de la lentille permettait un contact entre le capuchon protecteur isolant et le support; avec le temps, l'usage finirait par endommager le capuchon protecteur et ainsi exposer le contact ressort métallique servant de borne positive. Cette situation risquait de causer un amorçage d'arc électrique entre le contact ressort métallique exposé et le support. La conception de la liseuse créait aussi au moins trois autres occasions d'amorçage d'arc électrique, notamment pendant le remplacement de l'ampoule lors de l'entretien.
Aussi, les liseuses de carte du pilote et du copilote dans le MD-11 étaient situées dans des endroits exigus, près de matières combustibles ou en contact direct avec celles-ci, ce qui risquait d'aggraver les conséquences de tout amorçage d'arc éventuel. Les dommages causés par une surchauffe qui ont été relevés sur plusieurs matelas isolants recouverts de PET métallisé dans d'autres avions MD-11 donnaient une idée de l'accumulation de chaleur qui existait derrière les liseuses de carte. Une chaleur rayonnante combinée à une proximité immédiate augmenterait la probabilité que les matelas isolants recouverts de PET métallisé s'enflamment au cours d'un amorçage d'arc.
Les liseuses de carte n'ont rien à voir avec l'origine de l'incendie à bord de SR toutefois, les lacunes relevées dans la conception des liseuses de carte et leur montage à bord du MD-11 présentaient un risque inacceptable. Ces manquements à la sécurité sont en train d'être réglés par les mesures de suivi qui sont en cours (voir la rubrique 4.1.4).
2.13 Questions relatives aux disjoncteurs et aux fils électriques
2.13.1 Technologie en matière de disjoncteurs
Les câbles des blocs d'alimentation du réseau de divertissement de bord (RDB) endommagés par des arcs électriques étaient protégés par des disjoncteurs classiques du type utilisé dans le reste de l'avion et dans l'industrie de l'aviation. Deux des câbles des blocs d'alimentation (pièces produites 1-3790 et 1-3791) avaient subi des arcs électriques qui n'avaient pas déclenché leur disjoncteur correspondant. Il est fort probable que les disjoncteurs ne se sont pas déclenchés parce que les caractéristiques électriques des arcs se situaient à l'extérieur de la courbe de variation du courant en fonction du temps.
Les disjoncteurs classiques d'aéronef peuvent offrir une protection suffisante contre les courts-circuits francs, mais une protection limitée contre la gamme complète des amorçages d'arc.
L'industrie et le gouvernement sont engagés dans divers efforts de recherche et développement pour mettre au point un disjoncteur capable de détecter la gamme complète des amorçages d'arc connus, y compris les amorçages d'arc de courte durée qui se produisent souvent à l'extérieur de la courbe définie de variation du courant en fonction du temps des disjoncteurs classiques, et de réagir en conséquence. Le disjoncteur d'amorçage d'arc est conçu pour offrir une protection supérieure à celle qu'offre le disjoncteur thermique classique. Même si les nouveaux dispositifs de protection de circuit permettent de réduire les dommages dus à des arcs successifs le long des mêmes fils, l'arc électrique initial risque quand même d'occasionner l'inflammation de matières inflammables avoisinantes.
En théorie, s'il y avait eu à bord un disjoncteur d'arc électrique pour protéger les câbles des blocs d'alimentation du RDB, il aurait détecté les arcs initiaux qui ont touché les pièces produites 1-3790 et 1-3791, puis il se serait déclenché pour mettre le câble hors tension.
Même si les essais de certification relatifs aux disjoncteurs d'arc électrique se traduiront par de meilleures capacités de détection des amorçages d'arc et de meilleurs temps de réponse, dans leur version actuelle ils ne permettent pas de certifier que ces disjoncteurs pourront empêcher l'inflammation de matières inflammables par des amorçages d'arc. Compte tenu de la présence de matières inflammables dans la construction des avions, il serait prudent d'établir des critères de certification pour ces disjoncteurs en fonction d'une limite de l'énergie des arcs à un niveau inférieur à l'énergie requise pour l'inflammation de tout matériau susceptible d'être utilisé à bord d'un avion. Même si de telles normes d'essai ont déjà été intégrées à la certification des disjoncteurs d'arc électrique d'usage domestique, les exigences provisoires d'essai de certification relatives aux disjoncteurs d'arc électrique destinés aux aéronefs ne comprennent pas de tels critèresNote de bas de page 115.
2.13.2 Principes de réenclenchement des disjoncteurs
L'industrie de l'aviation et les organismes de réglementation ont pris des mesures pour passer en revue et uniformiser leur façon d'aborder le réenclenchement des disjoncteurs déclenchés. Les avionneurs ont publié des énoncés de principe, et la FAA a tenté d'uniformiser l'approche de l'industrie. Bien que ces initiatives aient fourni de l'information et suscité une prise de conscience dans certains secteurs de la communauté aéronautique relativement aux conséquences de réenclenchements inappropriés, elles sont d'une portée limitée et de nature transitoire. Le contexte réglementaire (réglementation proprement dite, avis, etc.) ne reflète pas les principes de réenclenchement acceptés à l'heure actuelle par l'industrie de l'aviation et ne met pas l'accent sur les conséquences découlant de réenclenchements inappropriés. La diffusion de tels renseignements dans des documents comme la circulaire consultative (AC) 43.13-1B ferait ressortir le caractère universel de la question et augmenterait les chances que l'approche convenant le mieux au réenclenchement des disjoncteurs déclenchés soit adoptée dans tous les secteurs de l'industrie de l'aviation.
2.13.3 Entretien des disjoncteurs
En raison, en partie, de la fiabilité inhérente des disjoncteurs, l’entretien préventif est rare et limité surtout à une inspection générale visuelle et à un nettoyage, le cas échéant. Lorsqu’un disjoncteur est défectueux, la défectuosité se limite généralement à l’une des deux causes suivantes : le disjoncteur se déclenche de façon intempestive, ou il ne se déclenche pas en cas de surintensité. Dans les deux cas, l’entretien se limite habituellement au remplacement du disjoncteur défectueux. Même si ces deux causes ne sont pas souhaitables, le non-déclenchement d’un disjoncteur signifie que le fil ou le câble auquel il est associé n’est pas protégé. L’analyse des disjoncteurs déclenchés montre que, dans certains cas, de longues périodes d’inactivité peuvent entraîner une modification des caractéristiques des disjoncteurs avec le tempsNote de bas de page 116.
D’après la FAA et la Society of Automotive Engineers, ce phénomène de vieillissement des disjoncteurs peut être évité par le déclenchement périodique du mécanisme des disjoncteurs. Malgré de telles recommandations, les programmes de maintenance des aéronefs ne comportent généralement aucune exigence d’essai périodique des disjoncteurs. Dans son récent bulletin publié sur le réenclenchement des disjoncteurs, la FAA n’a fait aucune mention du caractère adéquat des programmes d’entretien préventif des disjoncteurs mis en place par les divers exploitants. Le fait d’aborder la question du déclenchement périodique des disjoncteurs aiderait sont cohérents et optimisés afin d’assurer une fiabilité maximale des disjoncteurs. L’industrie de l’aviation doit adopter le concept des « meilleures pratiques » à l’égard de l’entretien des disjoncteurs et veiller à ce que les programmes d’entretien soient conçus comme il se doit.
2.13.4 Questions relatives à l’espacement des fils électriques
2.13.4.1 Exigences de la FAR 25.1353(b)
Du point de vue de l’espacement entre les fils, on n’a trouvé aucun lien entre la conception de l’acheminement des fils du MD-11 et la source d’inflammation ayant causé l’incendie à bord. Toutefois, comme les six câbles d’alimentation du bus d’alimentation sont acheminés ensemble à proximité du boîtier du tableau de commutation supérieur, la conception présente un risque accru de perte de tous les services alimentés par ces câbles en cas de défaillance en un seul point. On a établi que la perte des systèmes associés au câble d’alimentation du bus c.a. d’urgence de gauche était attribuable au fait que le câble avait été endommagé par l’incendie. La défaillance de ce câble s’était produite tard dans la séquence des événements, lorsque l’incendie faisait rage. Même si la perte des systèmes connexes aurait compliqué les défis importants auxquels les pilotes faisaient face et pu contribuer à la perte de contrôle de l’avion, il est probable que l’incendie, et non pas la perte des divers systèmes de bord, a constitué le facteur crucial dans l’issue finale. La conception du MD-11 est telle que, même si tous ces câbles étaient mis hors tension, il resterait une capacité limitée, mais suffisante pour permettre aux pilotes de conserver le contrôle de l’avion.
La Federal Aviation Regulations (FAR) 25.1353(b) stipule que les « câbles doivent être groupés, acheminés et espacés de telle sorte que les dommages aux circuits essentiels sont réduits au minimum en cas de défaillance des câbles porteurs de courant de grande intensité ». L’objectif consiste à réduire au minimum l’effet d’une défaillance d’un câble porteur de courant de grande intensité faisant partie du câblage d’un système essentiel. La formulation suppose qu’il ne faut prendre de telles mesures que lorsqu’un faisceau de fils contient à la fois un ou plusieurs fils de système essentiel et un ou plusieurs câbles porteurs de courant de grande intensité. Le document d’information ne précise pas quelles sont les mesures jugées acceptables pour que soient respectées les exigences de la FAR 25.1353(b). Ce paragraphe n’aborde pas non plus, du point de vue de l’espacement entre les fils, la question de l’acceptabilité du groupement ou de l’assemblage en faisceau des câbles d’alimentation censés faire partie du câblage de systèmes essentiels. De plus, l’interprétation de ce règlement est rendue encore plus difficile parce que plusieurs termes, comme « circuits essentiels », ne sont pas définis par l’organisme de réglementation.
Dans la conception des aéronefs, il n’est pas toujours possible de maintenir un espacement physique entre les fils, surtout dans le poste de pilotage où, typiquement, l’espace disponible pour les installations est exigu. Il n’y a pas de lignes directrices claires sur ce qui devrait constituer un autre moyen d’assurer la conformité à ces dispositions lorsqu’il n’est pas pratique ou possible de prévoir un espacement physique entre les fils. Dans le cas du MD-11, l’avionneur utilisait une gaine protectrice, qu’il considère capable d’offrir un niveau de sécurité équivalent à l’espacement physique. Comme il n’y a pas eu de cas problèmes signalés dans la flotte des MD-11 ou des DC-10 pendant bon nombre d’années de service, cette méthode a manifestement répondu aux besoins; toutefois, ni le constructeur du MD-11 ni la FAA n’ont quantifié l’efficacité d’une telle gaine protectrice.
L’absence d’indications claires dans le document d’information est mise en évidence par la difficulté de déterminer la conformité au sujet de l’acheminement des câbles d’alimentation des bus d’alimentation batterie et d’urgence du MD-11. Si la FAR 25.1353(b) s’applique aux fils en question, il n’est pas clair si les faisceaux de fils peuvent contenir à la fois le câblage des systèmes essentiels et les câbles porteurs de courant de grande intensité, même sur de courtes distances. Par exemple, le chemin de câbles situé à proximité du boîtier du tableau de commutation supérieur pourrait être considéré comme non conforme à la FAR 25.1353(b) parce qu’il n’y a pas d’espacement physique; toutefois, la FAA a jugé que cette installation était conforme. Le fondement de cette interprétation n’est pas clair, car aucune méthode n’est précisée pour fournir un autre moyen de se conformer à la FAR 25.1353(b) lorsqu’il n’est pas pratique ou possible de prévoir un espacement physique. Il conviendrait de passer en revue la réglementation et le document d’information à ce sujet.
2.13.4.2 Mélange de matériaux isolants de fils électriques
La FAA reconnaît que le mélange de fils électriques dont les matériaux isolants présentent différentes caractéristiques de dureté peut causer des dommages, surtout aux endroits où les vibrations sont fortes. Malgré l’absence de réglementation relative au mélange des matériaux isolants des fils, les AC 43.13-1B et 25-16 de la FAA donnent certaines indications. L’AC 43.13-1B est un guide général qui établit des pratiques, des techniques et des méthodes acceptables d’inspection et de réparation d’aéronef, tandis que l’AC 25-16 complète l’AC 43.13-1B en ce qui a trait aux défectuosités électriques et à la prévention des incendies.
L’AC 43.13-1B est claire pour ce qui est du mélange des fils, car elle stipule qu’il n’est pas recommandé « d’acheminer, à l’intérieur du même faisceau, des fils ayant des matériaux isolants différents ». L’AC 25-16 donne à penser qu’il y aurait lieu d’éviter de mélanger des fils dont la rigidité de l’isolant est « significativement différente ». Outre la différence de rigidité entre les fils, l’AC 25-16 précise qu’il faut tenir compte du facteur de rigidité entre le matériau isolant du fil et le matériau en contact avec l’isolant, comme des colliers et des guide-fils.
La FAA compte sur les avionneurs ou les ateliers de modification pour établir la compatibilité des matériaux au moyen d’essais ou d’antécédents d’utilisation satisfaisants. À cette fin, les essais de compatibilité des matériaux menés par Boeing ont permis de dresser un répertoire des fils et des matériaux isolants qui, de l’avis de l’avionneur, peuvent être utilisés à l’intérieur d’un même faisceau. Les faisceaux de fils du MD-11 fabriqués par Boeing ont été conçus et installés conformément à des normes acceptables de l’industrie de façon à réduire l’usure par frottement entre les fils et les dommages causés par les matériaux en contact avec l’isolant, comme des colliers. Même si des installations après construction, comme des systèmes de divertissement de bord (SDB), peuvent utiliser les mêmes fils que ceux dont se sert l’avionneur ou des fils de type similaire, la compatibilité entre les fils dépendrait de la qualité de l’installation.
2.13.4.3 Signalement d’anomalies relatives aux fils
Au moment de l’accident, rien n’obligeait à signaler les anomalies de câblage de façon distincte des autres anomalies. Par conséquent, dans de nombreux cas, les anomalies de câblage étaient attribuées à un composant ou à un ensemble remplaçable en première ligne à l’intérieur du système de bord connexe. En outre, il arrive souvent que les anomalies de câblage fassent l’objet de réparations sur place, sans que l’on comprenne bien toutes les conséquences de l’anomalie découverte. L’absence d’un code conjoint d’inspection de composants/systèmes de bord (codes améliorés de l’Air Transport Association) limitait l’élaboration de méthodes de collecte, de compilation et de surveillance des données relatives aux problèmes de câblage en vue de l’analyse des tendances. Bien que des renseignements plus précis sur les câblages soient maintenant consignés par les techniciens et les inspecteurs de la réglementation et que des données deviennent progressivement plus accessibles pour valider des lacunes potentielles dans les câblages, le manque de documents d’information qui prévalait auparavant pour signaler des défaillances liées aux fils n’a permis de disposer que de renseignements limités, ce qui continue d’être une entrave à l’évaluation de la nature et de l’étendue des manquements à la sécurité en ce qui concerne le câblage.
2.14 Réseau de divertissement de bord
2.14.1 Impact opérationnel de l'intégration du RDB
La conception technique du MD-11 est telle que tous les équipements « non essentiels » de la cabine doivent être alimentés par l'un des huit bus cabine. L'actionnement du commutateur CABIN BUS, situé dans le tableau de commutation supérieur du poste de pilotage, sert à isoler toute alimentation « non essentielle » de la cabine. Cette mesure est le premier élément qui figure dans la liste de vérifications d'urgence de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue à bord du MD-11, et elle permet à l'équipage d'évaluer si la fumée provient d'un composant associé aux bus cabine. Au cours de l'examen préliminaire de la documentation sur le RDB, on a déterminé que les blocs d'alimentation du RDB étaient branchés sur l'alimentation électrique de l'avion d'une manière qui n'était pas compatible avec la conception du délestage électrique d'urgence du MD-11.
La documentation montre que, initialement, l'intention était d'alimenter le système RDB à partir des bus cabine. Toutefois, les bus cabine n'offraient pas une alimentation suffisante pour les 257 sièges du RDB prévus à l'origine. C'est pourquoi on a utilisé le bus 2 de 115 V c.a. pour répondre à la plus grande partie des besoins en alimentation électrique du RDB.
L'alimentation du RDB à même le bus 2 de 115 V c.a. n'aurait pas constitué une condition dangereuse latente s'il y avait eu un dispositif de mise hors service du RDB (p. ex. un relais de commutation) lorsque le commutateur CABIN BUS était réglé sur OFF. Un autre moyen de se conformer au certificat de type du MD-11 aurait été de demander l'approbation par la FAA d'un supplément au manuel de vol contenant des directives à l'intention des pilotes sur la façon de mettre hors tension le RDB durant les procédures d'urgence. Toutefois, aucune de ces options n'a été envisagée, et le vice de conception n'a pas été décelé avant l'accident de SR 111. Par conséquent, les pilotes ne savaient probablement pas que le RDB demeurerait sous tension après la mise hors tension du bus cabine.
La conception de l'intégration de l'alimentation RDB-avion a constitué une condition dangereuse latente. Cependant, alors que l'incendie était en cours au moment où le commutateur CABIN BUS a été utilisé (13 minutes, 7 secondes après que l'odeur eut été décelée pour la première fois), aucun lien n'a été établi entre cette condition dangereuse latente et le déclenchement ou la propagation de l'incendie.
2.14.2 Surveillance par la FAA du projet de certification de type supplémentaire du RDB
En tant qu'atelier de modification désigné, Santa Barbara Aerospace (SBA) devait s'assurer que le RDB était conforme aux règlements en vigueur, et qu'il était intégré en toute sécurité à l'avion. Étant donné que SBA agissait pour le compte de la FAA, c'est à la FAA qu'incombait la responsabilité de s'assurer que SBA possédait le savoir-faire voulu pour exercer ses fonctions. Au moment où ce certificat de type supplémentaire (STC) était en cours d'approbation, les procédures suivies par la FAA pour surveiller la délégation de pouvoirs à un atelier de modification désigné pour la délivrance du STC ne garantissaient pas que les anomalies pouvaient être décelées et rectifiées.
Comme en témoigne le document d'analyse de la charge électrique utilisé dans le cadre des travaux préliminaires de conception et de développement du RDB réalisés par Hollingsead International (HI), on avait bien l'intention d'alimenter le RDB à partir du bus cabine. Tandis que les travaux de développement du RDB avançaient, HI a constaté que l'alimentation électrique provenant du bus cabine était insuffisante et elle a apporté des modifications aux plans pour alimenter le RDB à partir du bus 2 de 115 V c.a. Il n'a pas été possible de savoir quelle part des travaux de conception préliminaires réalisés par HI avait été communiquée à SBA. La lettre d'intention présentée par SBA à la FAA reflétait ce qui semblait être l'intention préliminaire de l'installation. Même si on pouvait s'attendre à ce qu'un changement aussi important fasse l'objet d'une modification, la lettre d'intention n'avait pas été modifiée pour refléter les modifications de conception. Aussi, l'examen auquel la FAA avait procédé pour s'acquitter de sa fonction de surveillance avait peu de chances de révéler de telles anomalies, car la FAA comptait être avisée de tout changement apporté à la portée du projet par l'atelier de modification désigné.
2.14.3 Conception du RDB et analyses nécessaires
Dans le cadre du processus de certification, le RDB devait faire l'objet d'une analyse de sécurité, conformément aux dispositions de la FAR 25.1309. Cette analyse évalue les dangers qui se rattachent à la fois au fonctionnement du système et aux modes de défaillance. Les efforts qu'exige une telle analyse varient d'une évaluation qualitative, comme une évaluation des risques fonctionnels reposant sur le jugement d'un ingénieur expérimenté, à une évaluation quantitative complexe, comme une analyse des effets des modes de défaillance, laquelle comporte une analyse numérique des probabilités. La criticité fonctionnelle du RDB, établie par le demandeur du STC dans sa lettre d'intention adressée à la FAA, avait été qualifiée de « non essentielle, non requise »Note de bas de page 117. Une telle catégorisation doit permettre la réalisation d'une analyse qualitative reposant sur le jugement préalable d'un ingénieur et sur l'expérience préalable satisfaisante.
D'après l'analyse qualitative réalisée par SBA, l'impact opérationnel de ce STC sur la charge de travail et les procédures dans le poste de pilotage avait été jugé minime ou inexistant pendant toute la durée du projet du RDB. Par ailleurs, les autres parties qui avaient pris part à la conception, à la certification, à l'installation, à l'essai et à l'exploitation du réseau avaient toutes présumé que la désignation « non essentielle, non requise » confirmait que, peu importe qu'il soit défectueux ou qu'il fonctionne normalement, le RDB n'aurait aucun effet préjudiciable sur le pilotage de l'avion. Voilà pourquoi les seuls essais auxquels on avait soumis le RDB avaient été l'essai de brouillage électromagnétique et de radiofréquences ainsi que l'essai de défaillance du système. Ni l'un ni l'autre de ces essais n'était nécessaire pour déterminer si le RDB était alimenté de telle sorte qu'il entraverait une procédure d'urgence critique, comme celle qui consiste à débrancher les services électriques dans la cabine.
La désignation « non essentielle, non requise » a sans doute créé un climat où les précautions et les défenses normales qui auraient permis de déceler le vice de conception ont été limitées; toutefois, il y a également des lacunes dans la FAR 25.1309 susceptibles de permettre à certains vices de conception critiques de passer inaperçus.
Les dispositions de la FAR 25.1309 stipulent qu'il faut procéder à l'analyse de sécurité d'un système de manière à vérifier l'impact de son fonctionnement en service normal et en cas de défaillance. La première étape de ce processus est une évaluation de criticité fonctionnelle qui se concentre en général sur les conséquences d'une défaillance du système. Lorsque la conséquence d'une défaillance de système est jugée « minime », comme c'est le cas de la plupart des installations de divertissement de bord, l'analyse de sécurité du système est jugée complète. Toutefois, si les conséquences de la défaillance d'un système sont jugées « mineures » ou « majeures », uniquement parce que le système est capable de fonctionner correctement et de tomber en panne sans conséquences graves, cela ne confirme pas que le système a été intégré à l'avion en toute sécurité.
En général, une analyse d'intégration quantitative ou détaillée est réservée à la FAR 25.1309 aux systèmes dont les modes de défaillance sont réputés avoir une incidence « majeure » sur la sécurité des vols et des atterrissages. Ce processus sert à classer officieusement un système donné comme étant soit « essentiel », soit « non essentiel »; c'est pourquoi le RDB installé à bord de la flotte de MD-11 de Swissair portait la désignation « non essentielle, non requise ». De ce fait, aucun minimum d'analyse d'« intégration » quantitative n'était requis par la FAR 25.1309 pour assurer la compatibilité entre le système et les procédures de certification de type de l'aéronef, comme le délestage d'urgence. Une telle analyse aurait permis de savoir si le système avait été intégré d'une manière conforme au certificat de type du MD-11.
2.14.4 Rôle du Groupe d’évaluation des aéronefs de la FAA/portée du STC
Le Bureau de certification des aéronefs de la FAA à Los Angeles a bénéficié de l’appui, lors de son examen du certificat de type supplémentaire du RDB, du personnel du Groupe d’évaluation des aéronefs (AEG) de la FAA, notamment des inspecteurs des normes de vol et de la sécurité aérienne qui connaissaient bien les opérations des transporteurs aériens, l’entraînement des équipages de conduite, la maintenance des aéronefs et la procédure de certification des aéronefs. Ces employés de l’AEG sont responsables de la certification et de l’évaluation des qualités opérationnelles des avions commerciaux neufs et modifiés. Même si la FAA délègue une bonne partie de ses responsabilités dans le cadre de la procédure de délivrance du STC, elle ne délègue pas la fonction de l’AEG. C’est pourquoi l’atelier de modification désigné (DAS) n’était pas habilité à prendre des décisions sur des STC dans le domaine des exigences opérationnelles ou des besoins de maintenance.
Dans le cas du STC ST00236LA-D, SBA a présenté une lettre d’intention dans laquelle elle déclarait que celui-ci n’aurait aucun impact sur la charge de travail de l’équipage de conduite. L’AEG a analysé la lettre d’intention et a confirmé cette conclusion. Étant donné que seul l’AEG est investi du pouvoir de tirer une telle conclusion, la présence d’une telle déclaration dans la lettre d’intention aurait dû attirer l’attention de la FAA sur le fait que SBA avait outrepassé son mandat en tant que DAS. Le fait que le RDB ait été qualifié de « non essentiel, non requis » a entraîné un relâchement de la vigilance et une délégation de fait de cette fonction de l’AEG.
Un étude réalisée par la FAA sur les STC de systèmes de divertissement de bord semblables « non essentiels, non requis » a révélé qu’environ 10 % d’entre eux avaient été conçus, installés et certifiés de telle manière que l’équipage de conduite était incapable d’en couper l’alimentation électrique sans entraver le fonctionnement de systèmes essentiels. Bien que l’ampleur de la participation de l’AEG à l’approbation de ces autres STC n’ait pas été déterminée, l’étude a révélé que le caractère incomplet de l’examen opérationnel précédant l’approbation du STC ST00236LA-D n’avait rien d’exceptionnel.
Étant donné que la fonction de l’AEG n’est pas déléguée, la FAA est responsable de la détermination de la conformité d’un STC sur le plan opérationnel et sur celui de la maintenance. Ainsi, l’AEG doit continuer de participer au processus et collaborer de près avec l’atelier de modification désigné pour donner l’approbation nécessaire.
2.14.5 Gestion du projet de STC relatif au RDB
La décision prise par Swissair de se porter acquéreur d'un système de divertissement de bord à la fine pointe de la technologie pour sa flotte de MD-11 était d'ordre purement commercial. La compagnie s'en était toujours remise à son fournisseur de services de maintenance des MD-11, SR Technics, pour qu'il gère les travaux de modification de ses MD-11. Toutefois, après la restructuration du Groupe SAir à l'issue de laquelle SR Technics était devenue une entité commerciale distincte, Swissair avait également la possibilité d'obtenir des services de modification auprès d'entrepreneurs autres que SR Technics. Pour le projet de RDB, Swissair avait décidé de conclure un contrat avec Interactive Flight Technologies (IFT) pour que cette société fournisse tous les services de conception, de certification et d'intégration nécessaires à l'installation du système. Étant donné que ce type de disposition n'était pas prévu dans le contrat qui liait SR Technics à Swissair, la compagnie aérienne avait conclu un contrat distinct avec SR Technics pour qu'elle fournisse à IFT tout l'appui nécessaire afin de lui permettre de réaliser la modification du RDB à bord de ses MD-11. C'est pourquoi même si Swissair considérait qu'IFT était le responsable global du projet de RDB, la compagnie avait toujours considéré que SR Technics était le seul organisme responsable du maintien de la navigabilité de sa flotte de MD-11.
IFT a respecté son entente contractuelle avec Swissair en sous-traitant d'importantes parties du projet de RDB. Bien que cette sous-traitance n'ait aucunement dégagé IFT de ses responsabilités de gestionnaire global du projet, elle a présenté une difficulté de gestion du fait qu'IFT n'avait pas l'expertise voulue pour vérifier les travaux de ses sous-traitants. Cette situation a été aggravée par le fait que le principal sous-traitant d'IFT, HI, avait lui-même sous-traité les services de certification du projet de RDB. Ainsi, la partie critique des responsabilités contractuelles d'IFT envers Swissair lui avait été soustraite à deux reprises, compliquant d'autant plus sa capacité de surveiller la délivrance d'un STC approuvé par la FAA.
En général, un entrepreneur principal choisit un sous-traitant en fonction de sa réputation et du fait qu'il est certifié par la FAA ou par une instance gouvernementale équivalente. On s'attend tout naturellement à ce qu'une entreprise certifiée soit en mesure d'exercer comme il se doit les fonctions qui lui ont été confiées et à ce qu'elle soit assujettie à un programme de surveillance efficace par l'instance gouvernementale compétente.
La FAA est l'instance suprême, et c'est pourquoi elle doit s'assurer qu'un projet de STC ne compromet pas le certificat de type d'un aéronef certifié sous sa compétence. En s'acquittant de cette responsabilité, la FAA s'en remet largement à son système de délégation à des DAS. La FAA tient le DAS responsable des services de certification de tout projet de STC. En même temps, la FAA ne s'attend pas à ce qu'un DAS exerce la même surveillance sur les entreprises qui exécutent des travaux dans le cadre d'un STC que celle qui serait exigée par la FAA dans la certification de ces entreprises. La FAA reconnaît que le DAS est en droit de s'attendre à ce qu'une entreprise certifiée par la FAA puisse faire preuve du niveau de rendement minimum exigé par la FAA, même si cette entreprise n'est pas tenue par contrat d'utiliser directement sa certification FAA dans le cadre d'un projet donné.
Le responsable du projet de RDB ne s'était pas conformé à la procédure de délégation type de la FAA. SBA n'était pas responsable du projet et ce n'est pas elle qui a assuré la gestion du projet. En revanche, SBA a agi comme sous-traitant de HI, ce qui, dans l'esprit de la FAA, équivaut à travailler sous l'autorité de SBA. Dans une large mesure, SBA s'était fiée à la réputation de certification de HI par la FAA pour s'assurer que le RDB avait été correctement conçu et intégré. Tout comme HI et IFT, SBA avait compté sur SR Technics pour ce qui est de l'assurance qualité pour chacune des installations du RDB. SBA avait certifié le RDB après avoir évalué les documents qui lui avaient été fournis par HI.
Tout ce qui précède explique que la structure de gestion du projet de STC du RDB n'ait pas permis de s'assurer que tous les éléments requis étaient présents pour la conception, l'installation et la certification d'un système compatible avec le certificat de type du MD-11.
2.15 Facteurs influençant la prise de décisions des pilotes relativement aux premiers signes d'odeur et de fumée
Les données disponibles relativement aux accidents d'aéronef causés par des incendies en vol montrent le peu de temps disponible pour réagir aux premiers signes d'incendie. Dans le cas de SR 111, les pilotes ont senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage à 1 h 10 min 38 s, et 20 minutes 40 secondes plus tard, l'avion s'abîmait dans l'océan.
Les pilotes faisaient face à un problème important lorsqu'ils ont tenté d'évaluer les premiers signes d'odeur et de fumée et d'y réagir. En effet, ils ne disposaient pas de dispositifs de détection qui auraient pu leur fournir des données précises sur la source de l'odeur et de la fumée. Ils ne pouvaient pas non plus distinguer avec certitude si l'odeur et la fumée provenaient du système de conditionnement d'air, si elles étaient d'origine électrique ou si elles étaient causées par un incendie de matériaux.
Au début, les pilotes n'ont senti qu'une odeur inhabituelle (voir la rubrique 1.18.8.3). Environ 20 secondes plus tard, à 1 h 10 min 58 s, ils ont remarqué une petite quantité de fumée qui pénétrait dans le poste de pilotage par derrière et au-dessus d'eux. Cette première fumée a disparu rapidement. Plus de deux minutes plus tard, ils ont confirmé que la fumée était réapparue, sans doute au même endroit. L'analyse des renseignements recueillis au cours de l'enquête indique que l'odeur et la fumée provenaient d'un incendie qui s'était probablement déclaré au niveau de la paroi arrière du poste de pilotage, au-dessus du plafond. L'évaluation des trajets empruntés par l'air en circulation dans le poste de pilotage expliquerait que de la fumée provenant de cet endroit pourrait s'infiltrer dans le poste de pilotage par un joint ou quelques trous entre le tableau de distribution avionique supérieur et le panneau de plafond, près du diffuseur d'air de plafond de droite. Si les pilotes ont cru que la fumée arrivait par ce diffuseur d'air, cela aurait raffermi leur conviction que la fumée et l'odeur provenaient du système de conditionnement d'air. Comme l'incendie s'était d'abord déplacé principalement vers l'arrière, dans la zone située au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine, la quantité de fumée pénétrant dans le poste de pilotage aurait été légère et intermittente. La fumée aurait aussi été considérablement diluée en se mélangeant à l'air du diffuseur.
Compte tenu du niveau de sensibilisation générale démontrée par d'autres pilotes lors des entrevues, les pilotes n'auraient sans doute pas été conscients de la présence d'une importante quantité de matières inflammables dans les espaces inoccupés de l'avion. De ce fait, il ne se seraient pas attendus à ce que ces endroits, ni aucun autre endroit dissimulé, représentent une menace d'incendie. Rien dans leur expérience ne pouvait les amener à envisager que la fumée puisse être associée à un incendie non maîtrisé, alimenté par des matières inflammables se trouvant au-dessus du plafond. Les normes en vigueur dans l'industrie au moment de l'accident étaient telles que d'autres équipages de conduite, confrontés au même scénario, auraient selon toute vraisemblance interprété de façon similaire les indices limités à leur disposition.
Sur la foi de données historiques, il est généralement accepté que de la fumée émanant d'un circuit de conditionnement d'air ne représente pas une menace immédiate à la sécurité des passagers ou de l'avion et qu'il est possible d'atténuer le problème en isolant le circuit. Compte tenu du fait que les pilotes évaluaient comme étant relativement faible le risque posé par la fumée, il semble que les pilotes n'aient vu aucune raison tangible de prendre plus de risques en tentant un atterrissage d'urgence immédiat. Ils ont plutôt établi des priorités qui comprenaient l'obtention des renseignements nécessaires à l'approche et à la préparation de l'avion pour un atterrissage en toute sécurité. Au début, la quantité de fumée qui pénétrait dans le poste de pilotage a dû être faible. Autrement, on se serait attendu à ce que les pilotes tentent d'isoler l'origine de la fumée en fermant les sources d'air conditionné. Les FDR ne donnent aucune indication que les pilotes ont exécuté quelque mesure que ce soit de la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air. Par contre, la première mesure de cette liste de vérifications, qui consiste à régler l'interrupteur ECON sur OFF, n'est pas un paramètre enregistré sur le FDR. La première mesure de la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue enregistrée par le CVR a été exécutée environ 13 minutes après que l'odeur eut été remarquée pour la première fois.
Les pilotes ont mis leur masque à oxygène environ cinq minutes après avoir senti l'odeur inhabituelle (voir la rubrique 1.18.8.4). On sait qu'avant de mettre leur masque à oxygène, les pilotes n'étaient pas incommodés par la fumée, et leurs yeux n'étaient pas irrités, ni leurs voies respiratoires. Les matériaux qui brûlaient auraient dégagé des vapeurs contenant des sous-produits de combustion nocifs et potentiellement toxiques. L'exposition à ces produits en concentrations suffisantes, surtout par inhalation, peut modifier le comportement et influencer le jugement.
2.16 Facteurs influençant la prise de décisions des pilotes lors du déroutement
Lorsque les pilotes ont entamé leur descente vers Halifax à 1 h 15 min 36 s, ils avaient évalué qu'ils avaient affaire à un problème de fumée dans le système de conditionnement d'air qui ne nécessitait pas une descente d'urgence. Compte tenu de la perception des indices limités à leur disposition, ils avaient pris des mesures pour préparer l'avion à une descente rapide, mais non à une descente et à un atterrissage d'urgence.
Les pilotes ne connaissaient pas bien l'aéroport international de Halifax et ils n'avaient pas leurs cartes d'approche à portée de la main. L'approche aux instruments sur faisceau arrière pour la piste 06 n'était pas préprogrammée dans leur système de gestion de vol. Les pilotes savaient qu'il leur faudrait prendre plus de temps pour se familiariser avec l'approche et l'atterrissage, et s'y préparer. L'équipage d'un avion qui les survolait leur a communiqué des renseignements météorologiques, mais ils ne connaissaient pas la longueur des pistes ni leur orientation. La pratique courante veut que l'équipage dispose des renseignements relatifs à la piste et à l'approche aux instruments pour mener à bien l'approche et l'atterrissage, surtout à un aéroport moins connu et de nuit.
En plus de ces situations propres à la gestion du vol, les pilotes savaient que les repas étaient en train d'être servis et qu'il faudrait un certain temps pour préparer la cabine en vue d'un atterrissage en toute sécurité. Compte tenu de la menace minimale que représentait pour eux, selon ce qu'ils savaient de la situation, de la fumée dans le système de conditionnement d'air, et du fait qu'aucune anomalie n'avait été signalée en provenance de la cabine, ils ont probablement jugé qu'il y avait plus de risques pour les passagers et l'équipage de cabine à exécuter une descente et un atterrissage d'urgence si la cabine n'était pas préparée et si l'avion n'était pas positionné en approche stabilisée pour l'atterrissage. On peut donc conclure que les pilotes auraient évalué les risques relatifs différemment s'ils avaient su qu'il y avait un incendie à bord.
Les pilotes savaient aussi que la masse de l'avion dépassait les limites maximales en surcharge à l'atterrissage dans des conditions non urgentes. Cette situation aurait posé des risques à leurs yeux, mais on peut supposer qu'elle ne les aurait pas empêchés de continuer en vue d'exécuter un atterrissage immédiat ni de larguer du carburant durant l'approche s'ils avaient été convaincus que l'avion était gravement menacé. En même temps qu'il déclarait une situation d'urgence, l'équipage de conduite a indiqué qu'il commençait à larguer du carburant, et il y a des indications attestant qu'il l'a fait.
2.17 Propagation de l'incendie
2.17.1 Sources d'inflammation potentielles – généralités
Rien n'indique que l'incendie se soit déclaré à l'extérieur de la zone endommagée par le feu qui a été reconstruite. La zone endommagée par l'incendie renfermait un grand nombre de fils et de câbles électriques, des appareils d'éclairage, une batterie d'éclairage d'urgence, deux offices alimentées à l'électricité, de nombreux connecteurs électriques modulaires et des mécanismes électriques d'ouverture et de fermeture des portes. Les essais ont révélé que les matériaux isolants recouverts de PET métallisé peuvent facilement s'enflammer sous l'effet d'un arc électrique; toutefois, le PET métallisé a tendance à s'écarter par retrait des sources de chaleur intense, comme celles qui peuvent résulter d'un chauffage par résistance à une connexion d'alimentation électrique ou de mise à la terre mal serrée. Diverses sources d'inflammation possibles, électriques et non électriques, ont été évaluées dans la zone endommagée par l'incendie. On a déterminé que la source d'inflammation la plus vraisemblable est l'amorçage d'un arc électrique à travers l'isolant ébréché d'un fil, ce qui a enflammé un matériau isolant recouvert de PET métallisé.
2.17.2 Câbles et fils endommagés par des arcs électriques
On a analysé chacun des arcs sur les 20 segments de câbles et de fils récupérés pour déterminer s'il avait pu être à l'origine de l'incendie ou si, au contraire, l'arc avait été amorcé par l'incendie. Pour cela, il a fallu déterminer le système auquel appartenaient les câbles et les fils endommagés par des arcs électriques et, si possible, l'endroit où il était installé dans l'avion.
On a déterminé que trois fils endommagés par des arcs électriques provenaient de systèmes de bord particuliers, et l'emplacement des arcs a été déterminé avec précision dans l'avion. Si l'un des trois fils avait été endommagé par un arc électrique, les pilotes auraient vraisemblablement remarqué une perte de fonction correspondante, ou la défaillance aurait été enregistrée sur le FDR. Rien n'indique que l'une ou l'autre de ces situations se soit produite.
Il y avait neuf fils endommagés par des arcs électriques pour lesquels il n'a pas été possible de déterminer l'emplacement exact dans l'avion. Pour plusieurs de ces neuf fils endommagés par des arcs électriques, l'amorçage d'arc a pu être raisonnablement lié à une des défaillances connues de systèmes qui avaient été enregistrées par le FDR au cours des 92 secondes qui s'étaient écoulées entre la première défaillance enregistrée et l'arrêt du FDR. Étant donné que les défaillances enregistrées sont survenues près de 14 minutes après qu'une odeur inhabituelle eut été décelée pour la première fois dans le poste de pilotage, on a pu déterminer que ces défaillances et les arcs électriques qui leur sont associés n'étaient pas directement liés à la source d'inflammation principale.
Les huit segments de câbles et de fils restants endommagés par des arcs électriques provenaient du RDB. Les différents câbles du bloc d'alimentation et le fil de commande ont été analysés pour qu'on puisse déterminer s'ils avaient participé à l'amorçage d'arc initial. La plupart des arcs qui ont endommagé les câbles et les fils du RDB étaient liés à des dommages causés par l'incendie; toutefois, l'arc situé à 9 centimètres (cm) (3,5 pouces (po)) de l'extrémité du morceau de câble (pièce produite 1-3791) de bloc d'alimentation du RDB n'a pu être attribué à des dommages causés par l'incendie. Quel que soit le guide-fils utilisé, selon l'emplacement des câbles et des fils décrit à la rubrique 1.14.11.2, cet arc se serait produit juste devant la référence de construction 383, au-dessus du plafond arrière droit du poste de pilotage, juste à l'extérieur de l'extrémité avant du guide-fils.
2.17.3 Circulation de l'air, propagation de l'incendie et emplacements possibles de la source d'inflammation
On a évalué les trajets suivis par l'air avant l'incendie pour déterminer les endroits possibles par lesquels l'odeur et la fumée avaient pu pénétrer dans le poste de pilotage, comme l'avaient remarqué les pilotes, sans qu'elles ne puissent être décelées dans la cabine. On a ensuite évalué chacun des endroits possibles pour déterminer si un incendie ayant pris naissance à cet endroit concordait avec les circonstances connues de l'incendie survenu à bord. Au nombre des facteurs examinés, il y avait la présence d'éventuelles sources d'inflammation et de matières inflammables; la probabilité que l'incendie ait pu se propager depuis cet endroit dans le délai que l'on sait, compte tenu de la quantité de matières inflammables à bord; la probabilité que la propagation de l'incendie depuis cet endroit ait pu entraîner l'enchaînement connu des anomalies des systèmes de bord, et la probabilité qu'un incendie se propageant depuis cet endroit ait pu provoquer les dommages causés par le feu qui ont été observés.
De tous les endroits possibles analysés, un seul, situé à droite près de la découpe dans la partie supérieure de la cloison arrière du poste de pilotage, juste en avant de la référence 383, cadrait avec l'ensemble des circonstances connues de l'incendie. De là, l'odeur et la fumée avaient pu pénétrer dans le poste de pilotage à un endroit précis où l'équipage de conduite avait pu penser que la fumée provenait du système de conditionnement d'air par le diffuseur de plafond droit. Au commencement, la fumée produite dans cette zone ne serait sans doute pas perçue ailleurs dans l'avion. Un incendie aurait pu se propager vers l'arrière depuis la zone située près de la référence 383 et, si l'on se base sur les caractéristiques connues de l'inflammabilité des matériaux et les trajets suivis par l'air décrits ci-après, le feu aurait pu regagner le poste de pilotage avec plus d'intensité après un certain temps. Cet enchaînement d'événements a pu se produire avant que le feu n'envahisse la cabine ou ne compromette les systèmes de bord.
Un incendie qui aurait pris naissance plus loin en avant dans le poste de pilotage sous les matelas isolants recouvrant les cadres, devant les fils et les faisceaux de fils qui traversent l'avion dans le sens de la largeur devant la référence 383, se serait sans doute propagé, dans un premier temps, sur une plus grande superficie du poste de pilotage. Si le feu avait pris naissance encore plus en avant, des défectuosités et des défaillances causées par le feu seraient sans doute survenues plus tôt, et les symptômes connexes auraient vraisemblablement été décelés plus rapidement par les pilotes pendant le déroulement de l'incendie et ils auraient probablement été captés par les enregistreurs. De plus, la fumée aurait sans doute pénétré dans le poste de pilotage par des orifices que les pilotes n'auraient vraisemblablement pas associé au système de conditionnement d'air. Le revêtement du plafond du poste de pilotage se prêtait par ailleurs à une pénétration rapide de l'incendie et à une fusion, dans la mesure où ce revêtement est fait d'une matière plastique thermoformable dont la température de formage est relativement basse.
De même, si le feu avait pris naissance plus à l'intérieur, au-dessous des matelas isolants recouvrant les cadres, près de l'axe de l'avion, il aurait essentiellement été limité aussi bien à gauche qu'à droite par les chemins de câbles installés dans le sens de la longueur. Ces chemins de câbles parallèles pénètrent dans le boîtier du tableau de commutation supérieur par des orifices ovales à l'arrière du boîtier. Les chemins de câbles auraient dû agir comme rideaux coupe-feu canalisant la propagation des flammes dans un couloir longitudinal. Comme on a pu l'observer durant les essais en vol, la fumée doit avoir été aspirée dans les ouvertures du boîtier du tableau supérieur avant de pénétrer dans le poste de pilotage par des passages, comme les fentes des poignées coupe-feu moteur dans le tableau supérieur. Là encore, la fumée qui aurait pénétré dans le poste de pilotage par ces orifices n'aurait sans doute pas été associée au système de conditionnement d'air. La même logique vaut également pour les incendies qui auraient pu prendre naissance à gauche de l'espace inoccupé du poste de pilotage. Ces facteurs excluent toute possibilité que l'incendie ait pu prendre naissance ailleurs dans les zones dissimulées du poste de pilotage.
2.17.4 Propagation de l'incendie à partir d'un amorçage d'arc près de la référence 383
2.17.4.1 Généralités
On a procédé à une évaluation détaillée pour déterminer si l'explication des conditions connues et des phénomènes survenus après coup restait valable si l'incendie avait pris naissance juste en avant de la découpe dans la partie supérieure de la paroi arrière droite du poste de pilotage, près de la référence 383.
2.17.4.2 Propagation initiale de l'incendie
Un amorçage d'arc juste en avant de la référence 383 près du devant des guide-fils longs de 102 cm (40 po) pourrait enflammer des matelas isolants recouverts de PET métallisé. L'inflammation des matelas isolants recouverts de PET métallisé à l'emplacement de l'arc, à la référence 383, aurait d'abord engendré une petite flamme rampante qui aurait dégagé une petite quantité de fumée, accompagnée d'une odeur relativement forte. La majeure partie de la fumée et de l'odeur aurait commencé par emprunter le trajet suivi par l'air qui est constamment aspiré dans l'espace attenant à la descente de câbles en échelle conduisant au compartiment avionique, où elle aurait été filtrée et évacuée à l'extérieur.
La petite flamme se serait lentement propagée sous les matelas isolants recouverts de PET métallisé situés par-dessus les cadres. Elle n'aurait pas pu se propager très loin en avant, avant d'être bloquée et réacheminée par une série de faisceaux de fils qui touchent les matelas isolants dans cette zone. Le feu ne se serait sans doute pas propagé vers le haut et en travers de la face inférieure des matelas isolants dans le sens contraire au débit d'air le long de la descente de câbles en échelle. Par ailleurs, certains fils et faisceaux de fils passent dans le plafond du poste de pilotage et agissent comme coupe-feu. L'incendie aurait pu se propager le long de la descente de câbles en échelle dans le sens de la circulation d'air; toutefois, le front de flamme aurait alors rencontré une série de supports de fils horizontaux qui auraient agi comme coupe-feu. Même s'il est possible que l'incendie ait pu contourner de tels obstacles, on n'a pas trouvé le moindre indice matériel attestant que l'incendie s'était propagé dans le compartiment avionique, car, en dehors d'une couche de suie, ce compartiment n'a pas été endommagé par l'incendie.
2.17.4.3 Odeur et fumée initiales dans le poste de pilotage
Si le front de flamme avait réussi à parcourir une distance relativement courte à l'intérieur avant de se propager essentiellement vers l'arrière, il est probable que l'odeur ou la fumée qui se seraient produites près de la référence 383 auraient momentanément été aspirées dans le poste de pilotage par les orifices et les espaces situés près du sommet du tableau de distribution avionique. Même si le front de flamme ne s'était pas propagé suffisamment à l'intérieur pour que cela se produise, il est probable que l'odeur et la fumée auraient pénétré dans le poste de pilotage par ces endroits peu de temps après le début de l'incendie. Cette situation se serait produite peu après que le feu aurait enflammé l'atténuateur de bruit recouvert de PET métallisé, juste à côté du rideau anti-fumée ou du matelas isolant entourant les gaines verticales. Au cours des essais, de la fumée projetée sur le devant du tableau de distribution avionique supérieur, près de la paroi arrière droite du poste de pilotage, a commencé par être aspirée vers le bas avant d'être de nouveau aspirée vers le haut, finissant par suivre un trajet en colimaçon vers les sièges de l'équipage de conduite.
La fumée aurait suivi un trajet relativement turbulent avant de parvenir jusqu'aux pilotes. Elle serait devenue plus diffuse et, au début, il est probable qu'elle aurait été peu visible. C'est pourquoi les pilotes auraient fort probablement décelé une odeur avant de voir de la fumée. L'endroit le plus probable où la fumée serait finalement devenue visible est à proximité du tableau de distribution avionique, près de la paroi arrière droite du poste de pilotage. La densité de la fumée aurait été la plus forte lorsqu'elle aurait pénétré pour la première fois dans le poste de pilotage. Le diffuseur de plafond droit aurait accéléré le mouvement de la fumée et facilité sa détection. La fumée se serait aussi trouvée à proximité du plafonnier, facilitant du même coup la détection des particules de fumée dans l'air.
2.17.4.4 Propagation de l'incendie vers l'arrière, à l'extérieur du poste de pilotage
Un petit front de flamme pouvait se déplacer vers l'arrière à partir du point où il avait pris naissance et franchir la cloison arrière du poste de pilotage par la découpe. Le cas échéant, le matériau mousse utilisé autour des guide-fils et des chemins de câbles à l'endroit de la découpe du poste de pilotage aurait fondu ou se serait enflammé en dégageant plus de fumée et une odeur plus forte.
Lorsque le petit front de flamme a franchi la paroi du poste de pilotage, il est probable que, pendant un court laps de temps, la fumée n'a plus pénétré en quantité suffisante dans le poste de pilotage pour être visible. Durant ce temps, la majeure partie de la fumée et de l'odeur aurait été aspirée vers le bas le long de la descente de câbles en échelle. Cette situation a dû changer dès que le feu a enflammé l'atténuateur de bruit recouvert de PET métallisé attenant au rideau anti-fumée, ou le matelas isolant entourant les gaines verticales. L'inflammation de ce matelas isolant aurait provoqué de la fumée et une odeur supplémentaires qui auraient fini par se diriger vers le voisinage du rideau anti-fumée. Des essais de circulation d'air démontrent que la fumée et l'odeur présentes à cet endroit peuvent également pénétrer dans le poste de pilotage par les orifices pratiqués dans le rideau anti-fumée.
Peu après l'inflammation de l'atténuateur de bruit recouvert de PET métallisé, il est possible qu'un petit front de flamme ait ébréché dans une certaine mesure l'embout de gaine de ventilation exposé de l'office 2. Cet embout en elastomère de silicone est attenant à l'extrémité avant de l'atténuateur de bruit, à côté de la paroi arrière du poste de pilotage, juste à côté du rideau anti-fumée. L'air aurait été immédiatement aspiré par cette brèche dans la gaine de ventilation de l'office, dès que l'embout aurait été brisé. Cet appel d'air aurait sans doute éteint le petit front de flamme qui se propageait à l'atténuateur de bruit dans le voisinage immédiat de cet embout. Au cours des essais des matelas isolants recouverts de PET métallisé, des courants d'air ont généralement éteint de petits fronts de flamme qui se propageaient sur des matériaux recouverts de PET métallisé.
Il est également probable que l'embout en élastomère de silicone qui brûlait se serait éteint en même temps, du fait de l'appel d'air subit et continu à l'endroit même où le feu avait pénétré initialement. La propagation de la flamme le long des matelas isolants recouverts de PET métallisé aurait pu néanmoins continuer ailleurs, car, au moment où l'embout de gaine de ventilation de l'office 2 s'était enflammé, la flamme se serait sans doute propagée sur une zone nettement plus importante, notamment sur la gaine verticale. L'appel d'air par l'embout de gaine de ventilation n'aurait sans doute pas été important, ne provoquant qu'un effet de courant d'air localisé. Aussitôt que le feu s'est intensifié dans la zone de la gaine verticale et s'est propagé à la paroi latérale droite du fuselage, l'embout de gaine de ventilation se serait sans doute rallumé ou aurait fondu, provoquant sa destruction complète. Il s'en serait suivi une plus rande brèche et un appel d'air plus important dans la gaine de ventilation. L'appel d'air et les sous-produits de combustion dans la gaine de ventilation auraient pu retarder le refoulement de la fumée et de l'odeur dans le poste de pilotage, de même que la détection rapide de l'incendie dans la cabine.
Les espaces d'air verticaux attenants à la gaine verticale centrale et entre la paroi arrière de la gaine verticale arrière et la paroi avant de l'encadrement de la porte D1 auraient dirigé les sous-produits de combustion brûlants et provoqué un effet de cheminée qui aurait produit une chaleur concentrée dans les endroits au-dessus de ces espaces d'air. Cet effet de cheminée aurait été accentué par l'espace clos de la partie inférieure recouverte de PET métallisé des gaines verticales. Des signes d'un effet de cheminée à haute température étaient visibles dans l'épave et ils correspondaient à ces emplacements.
La destruction complète de l'embout de la gaine de ventilation de l'office 2 causée par l'incendie aurait provoqué un important appel d'air dans le système de ventilation de l'office à cet endroit et aurait radicalement changé les trajets suivis par l'air. On a trouvé des traces de dommages liés à un incendie intense sur les gaines attenantes à l'emplacement de l'embout de gaine de ventilation. L'aspect général des dommages à cet endroit laisse croire que des sous-produits de combustion très chauds ont été aspirés derrière la descente de câbles en cascade, puis vers l'avant sous les gaines verticales et, finalement, dans le système des gaines de ventilation de l'office. Le flux de sous-produits de combustion brûlants entre la face inférieure de la gaine verticale arrière et le panneau de plafond CD 207 situé en dessous aurait créé un effet de chaleur convective important, localisé sur le panneau. On a trouvé des traces de dommages liés à l'incendie de cette nature sur un morceau du panneau de plafond CD 207. Ce morceau de panneau provenait vraisemblablement du panneau de plafond coulissant utilisé à l'emplacement de la porte D1. La chaleur subie par ce morceau correspondait à une exposition à une température de 593 °C (1 100 °F) pendant 10 minutes.
2.17.4.5 Feu ayant endommagé les câbles du bloc d'alimentation du RDB au-dessus de l'office 2
Les parties inférieures des cadres de fuselage aux références 401 et 410, entre le plan 15 droit et le plan 15 gauche, présentaient des dommages causés par une température élevée. En outre, des dommages localisés dus à une température élevée ont été constatés sur certains fils isolés au polyimide dans le chemin de câbles FDC, concentrés entre les références 401 et 410. Ce chemin de câbles est situé à proximité du guide-fils médian sur le plafond au-dessus de l'office 2. Ces dommages causés par la chaleur correspondent aux effets de cheminée localisés à haute température résultant de la présence d'un espace d'air vertical de chaque côté de la gaine verticale centrale, le long de sa face extérieure. Les sommets des deux panaches rencontrent le plafond aux références 401 et 410.
Lorsqu'on place le fil de commande du RDB et les câbles de bloc d'alimentation pour simuler le guide-fils extérieur, la disposition des câbles concorde avec le profil global des dommages, cinq fils endommagés par des arcs électriques s'alignant à peu près avec la référence 401. Ils cadrent aussi avec la fusion en premier du guide-fils recouvert d'éthylène-propylène fluoré et du matériau isolant recouvert d'ETFE à cet endroit, qui a entraîné de multiples amorçages d'arc fil sur fil. Ces arcs auraient sans doute déclenché les disjoncteurs connexes et sectionné les fils à l'emplacement de certains arcs, ouvrant ainsi le circuit électrique et mettant hors tension ces câbles d'alimentation.
2.17.4.6 Feu ayant endommagé le câble du bloc d'alimentation du RDB à l'extérieur de l'extrémité arrière du guide-fils
Des dommages causés par une forte chaleur concentrée ont été constatés directement au-dessus de la porte D 1, du déflecteur de rampe de la porte à battant D1 et au-dessus des faisceaux de fils voisins de la descente de câbles en cascade. Ces dommages se manifestaient sous la forme de coulisses sur une zone localisée du rail de la porte avant R1 qui est fixé à la partie inférieure des cadres de fuselage. Sur une pièce aussi solide, il faut une chaleur intense pendant une durée relativement longue pour créer des dommages de ce type. Les dommages causés par la chaleur intense à cet emplacement correspondent à un effet de cheminée qui a aspiré des sous-produits de combustion brûlants vers le haut où ils ont effleuré le plafond. L'emplacement des dommages causés par la chaleur sous forme de coulisses correspond à la zone située au-dessus du rayon intérieur du raccord coudé des gaines verticales. Une telle géométrie, combinée à d'autres facteurs, comme l'alignement d'un espace d'air vertical entre le côté arrière de la gaine verticale arrière et le panneau mural intérieur de la cabine, a été propice à la formation d'un panache de fumée alors que le matelas isolant recouvert de PET métallisé brûlait sur les gaines verticales. Parmi les facteurs qui corroborent l'apparition d'un tel phénomène, il faut mentionner la présence d'autres coulisses juste à côté du même endroit, sur les parties inférieures d'une lisse, entre les références 427 et 435, et à proximité le long des parties inférieures d'un cadre situé à la référence 442, entre le plan 15 droit et le plan 15 gauche. Il se serait produit un échauffement localisé supplémentaire dans la descente de câbles en cascade tandis que les sous-produits de combustion brûlants étaient aspirés sous les gaines verticales vers la gaine de ventilation de l'office 2.
Cet échauffement localisé expliquerait la disparition de l'étamage sur les trois câbles de bloc d'alimentation du RDB récupérés entre les références 420 et 427, juste derrière l'endroit où ils sortaient du guide-fils. À cet emplacement, le câble du bloc d'alimentation (pièce produite 1-3790) était endommagé par des arcs électriques sur chacun de ses trois fils de phase. Ce même câble avait été endommagé par des arcs électriques plus en avant à l'intérieur du guide-fils. Les deux emplacements d'arc électrique distincts sur ce câble laissent croire que l'incendie s'était propagé d'avant en arrière, avait commencé par amorcer un arc à l'avant sans déclencher le disjoncteur, puis un deuxième arc près de la descente de câbles en cascade, lequel avait déclenché le disjoncteur. L'absence d'arcs sur les deux autres câbles du bloc d'alimentation récupérés provenant de la descente de câbles en cascade, en particulier dans la zone où l'étamage avait disparu de ces câbles, correspond à la mise hors tension de ces deux câbles lorsque l'arc s'était amorcé sur la pièce 1-3790 à l'emplacement de la descente de câbles en cascade. Cette dernière observation correspond aussi à la mise hors tension préalable des deux autres câbles du bloc d'alimentation par le déclenchement de leurs disjoncteurs respectifs lorsque l'amorçage d'arcs multiples s'est produit dans le guide-fils. Ce dernier constat confirme le sens de propagation du feu d'avant en arrière.
2.17.4.7 Progression du feu – de la gaine verticale vers le côté gauche du fuselage et vers l'arrière
La combustion de quantités relativement importantes de matériau de recouvrement du matelas isolant au PET métallisé à proximité de la gaine verticale aurait dégagé une chaleur intense. Même si certains des sous-produits de combustion avaient continué d'être aspirés vers la descente de câbles en échelle et dans la gaine de ventilation ébréchée de l'office 2, la majeure partie de ces sous-produits aurait été aspirée vers le haut en panaches flottants brûlants. Ces sous-produits de combustion auraient formé une couche flottante brûlante le long de l'espace inoccupé supérieur, au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine.
Le rideau anti-fumée aurait d'abord empêché la majeure partie des sous-produits de combustion brûlants de se diriger vers l'avant dans l'espace inoccupé du poste de pilotage. Des fuites se seraient produites, qui auraient permis à certains sous-produits de pénétrer dans le compartiment de l'équipage de conduite. Ces mêmes sous-produits de combustion auraient été aspirés dans la descente de câbles des poignées coupe-feu moteur, où de la fumée se serait introduite à l'intérieur du poste de pilotage. On a constaté comme indice d'un tel phénomène la présence de suie sur certaines des surfaces intérieures des morceaux récupérés de l'enveloppe de la descente de câbles.
Les sous-produits de combustion brûlants auraient chauffé par rayonnement l'isolant du plafond et d'autres éléments, notamment ceux situés en dessous de la couche flottante brûlante. Le préchauffage et l'inflammation ultérieure d'autres matériaux se seraient produits, notamment l'inflammation du matériau de recouvrement du matelas isolant recouvert de poly(fluorure de vinyle) (PVF) métallisé et de la bande adhésive pour joints sur les gaines. Se serait alors enflammé l'embout en élastomère de silicone situé à l'extrémité de l'embranchement d'air conditionné se trouvant à environ 30 cm (12 po) derrière la porte du poste de pilotage, au-dessus des panneaux de plafond. Un bris de l'embout aurait provoqué la diffusion ininterrompue d'air conditionné, ce qui n'aurait qu'attisé l'incendie. Le signe que cet embout a bien été ébréché par le feu est la présence de dommages causés par une chaleur intense sur les parties récupérées de l'embranchement où se trouvait l'embout.
Le dégagement d'air conditionné hors de l'embranchement aurait dirigé l'air légèrement vers le haut et latéralement dans le sens de la largeur de l'avion, vers la chambre de tranquillisation de la gaine de ventilation de l'office 1, située à environ 46 cm (18 po) de l'embout d'extrémité. Cette aération par ventilation forcée n'aurait pas seulement refroidi l'air, mais elle aurait également entraîné avec elle des sous-produits de combustion brûlants. Un écoulement d'air chaud (effet de four à convection) se serait fait dans certaines zones le long des lignes de courant. En raison de la géométrie des gaines à cet endroit, l'écoulement se serait fait le long d'un chemin conique conduisant au sommet de la partie exposée de l'office 1. Comme signes d'un écoulement d'air chaud à cet endroit, il y avait la présence de coulisses sur les surfaces inférieures des lisses et des cadres à proximité, et les dommages causés par la chaleur au sommet de l'office 1. On a également constaté des dommages provoqués par une chaleur intense concentrée sur le côté interne des lisses, en face de l'embranchement.
Il est probable que le bris causé par le feu de l'embout en élastomère de silicone de l'embranchement a précédé la défaillance d'au moins un des deux raccords de tuyau flexible de la gaine de ventilation de l'office 1 et y a contribué. Ces tuyaux étaient faits d'un tissu en fibre de verre, qui était imprégné d'un matériau caoutchouteux de couleur rouge ressemblant à de la silicone. Le bris du ou des raccords de tuyau flexible aurait aspiré de l'air et des sous-produits de combustion dans la gaine de ventilation. Cette aspiration aurait attisé l'incendie. Ces raccords de tuyau flexible se seraient rompus durant l'incendie parce que les dommages causés par le feu le long du côté extérieur supérieur de l'office 1 à une hauteur qui correspond à l'un des raccords cessaient brusquement et qu'il y avait des dommages causés par une chaleur intense sur des morceaux de la gaine de ventilation, juste à l'extérieur de l'office 1.
Une chaleur intense dans les espaces inoccupés aurait probablement provoqué la fusion et le bris des attaches en nylon retenant les matelas isolants recouverts de PET métallisé intercalés entre les cadres et recouvrant ces derniers. Il en aurait résulté la chute de parties de matelas isolants ou de matelas isolants complets, exposant au feu une plus grande surface de matériaux recouverts de PET métallisé inflammable. La propagation et l'intensité de l'incendie en auraient été favorisées d'autant.
La couche flottante brûlante au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine se serait écoulée librement vers l'arrière en direction de l'empennage de l'appareil au-dessus du plafond de la cabine. Plusieurs de ces sous-produits de combustion auraient continué d'être aspirés par les prises d'air des ventilateurs de recirculation pendant le fonctionnement de ces systèmes. Après avoir franchi les prises d'air, les sous-produits de combustion se seraient dirigés vers plusieurs endroits dans la cabine. Les traces de suie découvertes sur des pièces comme les supports de fils de même que sur et dans les casiers porte-bagages situés à la référence 1780, indiquent que l'espace inoccupé au-dessus de la cabine a sans doute été envahi de sous-produits de combustion. Pas le moindre indice de fumée n'a été signalé dans la cabine avant l'arrêt des enregistreurs de vol.
2.17.4.8 Progression de l'incendie dans le poste de pilotage
Avant que les pilotes règlent le commutateur CABIN BUS sur OFF à 1 h 23 min 45 s, la circulation d'air au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine se serait sans doute fait principalement vers l'arrière, vers les prises d'air des ventilateurs de recirculation. De la fumée et des sous-produits de combustion se seraient dirigés vers le poste de pilotage. On a trouvé plusieurs dépôts de suie en divers endroits qui indiquent une telle infiltration. C'est vers ce moment que le feu aurait vraisemblablement ébréché l'embout en élastomère de silicone sur un court tronçon d'embranchement d'une gaine du système de conditionnement d'air, situé juste en arrière et au-dessus de la porte du poste de pilotage. Un important volume d'air conditionné aurait pénétré à cet endroit et aurait attisé l'incendie. L'écoulement d'air supplémentaire aurait accéléré rapidement la propagation de l'incendie, comme en témoignent les dommages provoqués par une chaleur intense observés sur les gaines avoisinantes et la structure de l'avion.
Le réglage du commutateur CABIN BUS sur OFF aurait arrêté les ventilateurs de recirculation et provoqué une inversion de l'écoulement d'air au-dessus du plafond suspendu de la partie avant de la cabine. L'écoulement d'air se faisant essentiellement vers l'avant, les sous-produits de combustion brûlants auraient été aspirés vers l'espace inoccupé au-dessus du poste de pilotage.
Il est probable que le rideau anti-fumée affaibli serait devenu complètement inefficace peu après le réglage du commutateur CABIN BUS sur OFF. Bien qu'il soit possible que ce rideau anti-fumée soit devenu inefficace plus tôt, c'est peu probable, car une telle situation aurait vraisemblablement entraîné une défaillance plus rapide du revêtement du plafond du poste de pilotage en plastique thermoformable, lequel fond à des températures relativement basses. Après le bris du rideau anti-fumée, les sous-produits de combustion brûlants auraient alors envahi librement l'espace inoccupé au-dessus du poste de pilotage. Le débit de remplissage aurait sans doute dépassé le débit d'évacuation, entraînant une accumulation rapide et importante de chaleur et de sous-produits de combustion. Les sous-produits de combustion brûlants auraient alors pénétré, envahi et rapidement chauffé les espaces d'air derrière le tableau de distribution avionique, le tableau de distribution supérieur et le boîtier du tableau supérieur. Les matelas isolants recouverts de PET métallisé et de PVF métallisé au-dessus du plafond du poste de pilotage auraient fourni à l'incendie d'autres matières combustibles. Il s'en serait suivi une augmentation de la quantité de fumée qui aurait pénétré dans le poste de pilotage par des passages, comme les fentes des poignées coupe-feu moteur et les diverses découpes dans le revêtement du plafond du poste de pilotage.
L'échauffement rapide des espaces d'air et des éléments électriques derrière les tableaux de distribution et dans d'autres ensembles aurait causé des défauts de fonctionnement aux systèmes de bord. La chaleur aurait déclenché par effet thermique plusieurs disjoncteurs, ce qui explique sans doute bon nombre des anomalies enregistrées par la suite. Par exemple, le débrayage du pilote automatique (AP) 2 était survenu environ 20 secondes après que le commutateur CABIN BUS eut été réglé sur OFF, suivi peu de temps après par une série d'anomalies de système qui ont été enregistrées.
Le côté droit du plafond du poste de pilotage se compose principalement de plusieurs panneaux d'aluminium qui, parallèlement à d'autres pièces métalliques comme les diffuseurs d'air conditionné, auraient empêché le feu et ses sous-produits de combustion de pénétrer dans le poste de pilotage. En revanche, le plafond du poste de pilotage à gauche se compose principalement de panneaux de revêtement qui ramolliraient, s'affaisseraient et fondraient sous l'effet d'une température élevée.
Tandis que le feu pénétrait dans l'espace inoccupé au-dessus du poste de pilotage, la chaleur aurait commencé par toucher les surfaces les plus exposées du revêtement du plafond, juste en avant de la porte du poste de pilotage, en arrière du diffuseur et dans la zone supérieure gauche. Très peu de matériaux de revêtement de ces endroits ont été identifiés dans l'épave. Les rares morceaux qui l'ont été, comme une partie du couvercle et de la charnière du porte-ampoules de rechange (situé dans le plafond à côté de la penderie du poste de pilotage), présentaient des signes de fusion. Plusieurs matériaux de revêtement auraient été entièrement consumés. Des morceaux de revêtement d'autres endroits étaient noircis et brûlés le long de certains bords. D'autres étaient fondus, et certains s'étaient liquéfiés jusqu'à ce que leur épaisseur ait été réduite à celle d'une feuille de papier.
Si l'on se fonde sur l'intensité de la chaleur, il est probable que le bris du revêtement du plafond s'est produit environ une minute après la défaillance du rideau anti-fumée. Le bris du revêtement du plafond correspond sans doute à l'heure où les pilotes ont déclaré l'urgence à 1 h 24 min 42 s. La majeure partie des dommages causés par le feu à la moquette du poste de pilotage était sans doute attribuable à la chute de morceaux de panneaux de plafond fondus. On peut penser qu'une importante quantité de fumée nocive et dense et de sous-produits de combustion brûlants aurait aussitôt pénétré dans le poste de pilotage par les ouvertures pratiquées dans le revêtement du plafond.
Dès le bris du revêtement du plafond, les brèches auraient progressivement pris de l'ampleur, permettant à une plus grande quantité de fumée nocive et dense et de sous-produits de combustion de pénétrer dans le poste de pilotage. La fumée aurait été aspirée par les ouvertures à côté des pédales de direction dans le compartiment avionique. La visibilité dans le poste de pilotage aurait alors été de plus en plus réduite.
Selon toute vraisemblance, le feu a ébréché l'embout en élastomère de silicone situé à l'extrémité d'un embranchement de gaine d'air conditionné, situé au-dessus de l'ensemble inférieur du revêtement du plafond du poste de pilotage à gauche, juste devant la penderie. La bande adhésive pour joints du revêtement isolant installé au-dessus de l'atténuateur de bruit recouvert de PVF métallisé qui maintient l'atténuateur en place au-dessus de l'embout est une source de matière combustible. Aussitôt que la bande adhésive s'est enflammée, l'atténuateur a été détruit et l'embout en silicone s'est enflammé peu de temps après. On a constaté des dommages causés par la chaleur et des signes de fusion sur les bords du revêtement récupéré provenant d'un endroit contigu à l'emplacement de l'embout. La défaillance de l'embout doit avoir entraîné l'expulsion continue d'air conditionné par l'embranchement au-dessus du revêtement du plafond, tout près des matelas isolants recouverts de PET métallisé intercalés entre les cadres et recouvrant ces derniers, ce qui aurait attisé l'incendie. Selon toute vraisemblance, le tuyau flexible conduisant à la buse d'air individuelle, près du centre du revêtement supérieur gauche du plafond du poste de pilotage a lui aussi été ébréché, provoquant un effet analogue.
Des parties d'un cadre du fuselage et de la gaine d'air conditionné situées près du tuyau flexible et de son raccord présentaient des dommages causés par une température intense. Les essais par calorimètre à côneNote de bas de page 118 indiquent qu'un matériau semblable à celui du tuyau flexible en question s'enflamme à un flux de chaleur de 25 kW/m2 (ce qui équivaut à peu près à une température d'équilibre en surface de 591 °C (1 095 °F)), et il est probable que le tuyau flexible n'aurait pas pu résister à des températures aussi élevées. On peut en dire autant du tuyau flexible de l'autre buse d'air individuelle située plus en avant dans le revêtement, à gauche du tableau de distribution supérieur. On a également constaté que le cadre du fuselage situé non loin de là avait été endommagé par une chaleur intense. La défaillance de l'embout en élastomère de silicone et des tuyaux flexibles des buses d'air individuelles a alimenté l'incendie en air conditionné, ce qui a sans doute contribué à une détérioration de l'environnement dans le poste de pilotage.
À mesure que les matériaux de recouvrement au PET métallisé étaient consumés, la nappe ouatée en fibre de verre à l'intérieur des matelas isolants a été exposée, avant d'être sérieusement roussie par les températures élevées et les flammes. L'évacuation forcée d'air conditionné tout près des matelas isolants a vraisemblablement dérangé et disséminé des particules de fibres de verre à partir des surfaces recouvertes de cendres et des endroits moins endommagés sous ces surfaces où le ruban adhésif a été endommagé.
Après les essais de combustion, on a observé la diffusion de nuages de petites particules chaque fois que les matelas isolants brûlés étaient dérangés ou qu'on les enlevait des appareils d'essai.
Le siège du commandant de bord était plus directement aligné sur la zone du revêtement du plafond du poste de pilotage qui a été ébréchée en premier. Un pourcentage plus élevé des sous-produits de combustion s'est écoulé directement vers le siège du commandant et a été aspiré dans le compartiment avionique par les ouvertures des pédales de direction du commandant de bord. La situation dans le poste de pilotage a continué de se dégrader à mesure que les systèmes vacillaient et tombaient en panne sous l'effet de l'incendie.
Finalement, de l'aluminium en fusion a commencé à s'égoutter sur le siège de l'observateur de droite, comme en témoigne la présence de dépôts d'aluminium resolidifié trouvés sur des morceaux de siège récupérés. Un dépôt d'alliage d'aluminium 2024 a été trouvé sur une vis du côté droit du socle du siège, de même que sur la ceinture abdominale droite. Il y avait également des traces d'autres dépôts d'aluminium juste à côté du dépôt d'alliage d'aluminium 2024 sur la ceinture. Il n'a pas été possible de déterminer le type d'alliage(s) sur ces traces, en raison de la quantité insuffisante de matériaux à analyser. Par ailleurs, un dépôt d'alliage d'aluminium 6061 a été trouvé sur le disjoncteur correspondant à ce siège, situé près de l'angle arrière droit du socle du siège.
Il n'a pas été possible de déterminer de manière concluante l'origine des dépôts d'aluminium; toutefois, les sources possibles d'où les dépôts d'alliage d'aluminium 2024 ont pu s'égoutter sur le siège de l'observateur de droite sont limitées. Si l'on suppose que l'intégrité du plafonnier et des diffuseurs en alliage d'aluminium 6061 n'a pas été compromise durant l'incendie, la seule grande brèche qui pouvait être pratiquée dans le plafond juste au-dessus du siège de l'observateur de droite se trouvait le long d'une zone rectangulaire étroite composée essentiellement de revêtement de plafond. Cette zone mesure environ 7,5 cm (3 po) de largeur sur 76 cm (30 po) de longueur. Des dommages causés par une chaleur intense sont manifestes sur des parties des morceaux récupérés des diffuseurs et des cadres du fuselage situés en contre-haut. La majeure partie du bord supérieur des morceaux du tableau de distribution avionique récupérés présentait également des dommages causés par une chaleur intense.
Une source possible connue d'alliage d'aluminium 2024 est le capuchon AN 929-6 situé sur la conduite d'alimentation en oxygène de l'équipage, à la référence 374. Le capuchon d'extrémité est situé au-dessus et juste à côté (à environ 2,5 cm (1 po)) de la section rectangulaire étroite décrite ci-dessus. Ce capuchon de conduite d'alimentation en oxygène est aligné verticalement sur le rebord droit du siège de l'observateur de droite, près de l'emplacement de la ceinture abdominale droite et du côté droit du socle du siège, lorsque le siège est orienté vers l'avant et que les appuis-bras sont à la verticale. Des coulisses ont été trouvées le long des bords inférieurs du cadre du fuselage, juste au-dessus de la référence 374, et à côté du capuchon, ce qui démontre que cet emplacement a été exposé à des températures élevées.
Les essais effectués sur le capuchon de la conduite d'alimentation en oxygène ont révélé qu'avant que le capuchon ne se mette à fuir ou se brise, il fallait qu'il soit exposé à des températures élevées pendant plusieurs minutes (voir la rubrique 1.14.13). Ces températures élevées étaient inférieures à la température à laquelle des signes de fusion externe étaient visibles sur le capuchon. C'est pourquoi si l'on prend l'heure à laquelle le commutateur CABIN BUS a été réglé sur OFF comme point de repère du moment où une chaleur intense a envahi l'espace inoccupé au-dessus du poste de pilotage (environ huit minutes trente secondes avant l'impact), le moment le plus probable où le capuchon a fondu correspond vraisemblablement aux dernières minutes du vol.
Si de l'oxygène pur s'était échappé du capuchon durant l'incendie, il aurait incontestablement intensifié l'incendie de façon rapide et spectaculaire. Il s'en serait suivi rapidement la défaillance complète du capuchon. Dans ce cas, il y aurait eu une perte de pression dans la conduite, ce qui aurait interrompu subitement l'alimentation des masques à oxygène des deux pilotes. De plus, la mise à l'air libre complète de la conduite aurait mené rapidement à l'embrasement général du poste de pilotage, ou à une conflagration intense, ou les deux. On a trouvé peu de traces matérielles de dommages causés par des températures élevées à l'intérieur du poste de pilotage; il est donc probable que, si cette situation s'était réellement produite, elle aurait duré très peu de temps et serait survenue immédiatement avant l'impact.
2.18 Défaillances techniques connues
Pour les pilotes, la première indication d'une défaillance liée aux systèmes a été le débrayage du pilote automatique à 1 h 24 min 9 s (voir la rubrique 1.18.8.6). Vingt-quatre secondes plus tôt, à 1 h 23 min 45 s, le commandant de bord avait réglé le commutateur CABIN BUS sur OFF. Ce réglage est la première mesure à prendre d'après la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue. Il semble que, jusque-là, les conditions à l'intérieur du poste de pilotage étaient telles que les pilotes avaient l'impression qu'ils étaient en présence de fumée provenant d'une source de conditionnement d'air.
Les essais relatifs à la circulation de l'air ont montré qu'une fois les ventilateurs de recirculation arrêtés, comme ce serait le cas lorsque le commutateur CABIN BUS est réglé sur OFF, la circulation de l'air dans l'espace inoccupé avant allait principalement en sens inverse, de sorte qu'au lieu d'aller vers l'arrière en direction des ventilateurs, une bonne partie de l'air se dirigeait vers l'avant dans l'espace inoccupé du poste de pilotage, puis vers le bas en passant du poste de pilotage au compartiment avionique situé sous ce dernier.
Entre le moment où le commandant de bord a réglé le commutateur CABIN BUS sur OFF, à 1 h 23 min 45 s, et le moment où les enregistreurs de bord ont cessé d'enregistrer, à 1 h 25 min 41 s, les effets de l'incendie dans le poste de pilotage ont commencé, ce qu'a confirmé la succession rapide des défaillances liées aux systèmes. Les conditions à l'intérieur du poste de pilotage ont aussi commencé à se détériorer rapidement, une quantité croissante de fumée, de chaleur et de flammes pénétrant dans le poste de pilotage par le plafond.
Les défaillances des systèmes qui se sont produites jusque-là doivent avoir réduit la capacité des pilotes à maîtriser l'avion et à naviguer, surtout qu'il faisait nuit, qu'il y avait de la fumée dans le poste de pilotage et qu'on se trouvait en conditions météorologiques de vol aux instruments. La perte du pilote automatique a alourdi la charge de travail des pilotes, et le fait d'entendre le klaxon d'avertissement doit avoir été troublant; le klaxon du pilote automatique a retenti jusqu'à ce que le CVR cesse de fonctionner. Le voyant d'avertissement principal doit s'être allumé au moment de la perte du canal A du calculateur de commandes de vol 1, à 1 h 24 min 57 s; on ne sait si les pilotes avaient réinitialisé le voyant d'avertissement principal. La perte du bus c.a. d'urgence de gauche à 1 h 25 min 06 s aurait, en partie, entraîné la perte des écrans d'affichage 1 et 3 du commandant de bord. L'écran d'affichage 2 afficherait un X rouge, et le voyant d'avertissement principal s'allumerait. Là encore, on ne sait pas si les pilotes avaient réinitialisé ce voyant mais, s'ils l'ont fait, la perte du réchauffage Pitot du commandant de bord, environ 10 s plus tard, l'aurait rallumé. Ces défaillances auraient été accompagnées d'un grand nombre d'alertes, de signaux et de messages d'anomalie. Le fait d'avoir à s'occuper d'un tel nombre de défaillances et de messages aurait créé de la confusion et de la distraction, et il aurait été difficile d'y faire face.
La perte des trois écrans d'affichage du copilote, à environ 1 h 25 min 30 s, aurait forcé ce dernier à se servir des instruments de secours pour maintenir l'orientation spatiale de l'avion (voir la rubrique 1.18.8.21). La transition aux instruments de secours aurait constitué un défi, à cause de la petite taille de ces instruments et de leur position les uns par rapport aux autres, surtout dans le contexte de la détérioration des conditions (épaississement de la fumée et hausse de la chaleur) dans le poste de pilotage.
À ce moment-là, même si le commandant de bord avait réussi à récupérer toutes les données de l'écran principal de vol, comme l'assiette, la vitesse, le cap et l'altitude de l'avion sur l'écran d'affichage 2, les écrans d'affichage 1 et 3 ne fonctionnaient plus, et il aurait été impossible de rétablir ces deux écrans. Même si les trois bus d'alternateur de 115 V c.a. fonctionnaient au moment de l'impact, les dommages causés par l'incendie aux bus de distribution, aux fils et aux câbles ainsi qu'aux disjoncteurs ont perturbé l'alimentation électrique à certains systèmes, si ce n'est à tous (si l'écran d'affichage 2 était perdu), qui fournissaient les données principales sur l'assiette, assuraient la navigation et les communications et exécutaient diverses autres fonctions. Par conséquent, les pilotes auraient eu à exécuter une multitude de tâches, dont bon nombre étaient hautement anormales, alors que les conditions se détérioraient rapidement dans le poste de pilotage.
2.19 Dernières minutes suivant l'arrêt des enregistreurs
Les cinq dernières minutes trente-sept secondes du vol, c'est-à-dire à partir du moment où les enregistreurs de vol ont cessé de fonctionner à 1 h 25 min 41 s, n'ont pas été enregistrées sur le FDR ou le CVR. Dans la mesure du possible, les événements ont été reconstitués au moyen des données du radar primaire au sol, des données de la mémoire permanente des régulateurs automatiques à pleine autorité redondante (FADEC), des enregistrements du contrôle de l'ATC, des déclarations des témoins et de l'examen de l'épave.
Une analyse des dommages causés par la chaleur, observés sur le poste de pilotage reconstruit, alliée au scénario probable de la propagation de l'incendie, démontre que l'incendie a gagné en intensité au cours des six dernières minutes du vol. La quantité de fumée et l'intensité de la chaleur et de l'incendie dans le poste de pilotage ont continué à augmenter.
À 1 h 25 min 50 s, soit environ huit secondes après l'arrêt des enregistreurs de bord, il y a des indications selon lesquelles les pilotes ont fait passer la source des données du calculateur ADC-1 au calculateur ADC-2 (voir la rubrique 1.18.8.26). Ils ont vraisemblablement agi ainsi pour tenter de rétablir certains instruments de vol perdus. L'examen des fils montre que le bus c.a. d'urgence de gauche qui alimentait l'ADC-1 avait subi un arc électrique, lequel aurait interrompu son alimentation, entraînant la perte de l'ADC-1. Lorsque les pilotes ont sélectionné l'ADC-2, celui-ci a provisoirement rétabli les données sur l'altitude du transpondeur en mode C, lesquelles indiquaient que l'avion se trouvait à 9 700 pi d'altitude. À 1 h 26 min 4 s, le transpondeur de l'avion a cessé d'émettre des données pour le reste du vol. Le radar de l'ATC a continué d'enregistrer la route suivie par l'avion sur le radar primaire jusqu'à ce que celui-ci disparaisse de l'écran radar environ 10 secondes avant de s'abîmer en mer.
Dans leur avant-dernier message à l'ATC, à 1 h 24 min 53 s, les pilotes ont déclaré qu'ils commençaient à larguer du carburant. D'après les comptes rendus des témoins, ils auraient amorcé le largage de carburant après l'arrêt des enregistreurs. Par ailleurs, le robinet d'isolement du réservoir auxiliaire a été trouvé fermé, ce qui est normal une fois le largage de carburant commencé. Les robinets vide-vite étaient fermés au moment de l'impact, indiquant que les pilotes avaient cessé de larguer du carburant.
Avant l'arrêt des enregistreurs, on entend les pilotes indiquer qu'ils doivent atterrir sans plus tarder. Malgré cela, l'avion a poursuivi sa route vers le sud, s'éloignant de l'aéroport et se dirigeant vers l'océan. Voilà qui donne à penser que la situation dans le poste de pilotage s'était rapidement détériorée, à tel point que les pilotes n'étaient plus en mesure de naviguer. Ils avaient sans doute perdu presque toute capacité de navigation électronique, et la quantité croissante de fumée pénétrant dans le poste de pilotage doit avoir progressivement obstrué la visibilité vers l'avant et empêché tout pilotage à vue, surtout la nuit dans une zone inconnue, une couverture nuageuse se trouvant à proximité.
L'avion a poursuivi sa descente en virant sur la droite alors qu'il survolait la localité de Blandford (Nouvelle-Écosse). Des témoins au sol ont affirmé avoir entendu un bruit ayant une fréquence de battement répétitif et émis à un rythme constant qu'il était possible d'entendre malgré le bruit strident des moteurs. C'est à peu près à ce moment que le moteur 2 a été coupé; toutefois, il a été impossible d'expliquer ce « battement répétitif ». Les témoins ont également affirmé avoir vu plusieurs feux de l'avion, signe qu'au moins certains des circuits électriques de l'appareil fonctionnaient encore. C'est ce qu'a confirmé l'examen de certains systèmes, comme les pompes carburant et les ventilateurs, dont les pièces tournantes présentaient des signes de fonctionnement au moment de l'impact. L'examen des pièces a montré que les trois bus d'alternateur étaient alimentés au moment de l'impact.
Peu de temps après avoir franchi le littoral de la Nouvelle-Écosse, l'avion a amorcé un virage sur la droite. Même s'il y a des signes que la fenêtre coulissante du commandant était probablement déverrouillée, il est impossible de savoir quand cette fenêtre a été ouverte, advenant qu'elle ait été ouverte. À un moment donné, les pilotes ont sorti les volets en fonction du réglage DIAL-A-FLAP présélectionné de 15°. Lorsqu'ils ont coupé le moteur 2 à environ 1 800 pi d'altitude, soit environ une minute avant l'impact, la vitesse vraie était d'environ 227 nœuds. La vitesse descensionnelle juste avant ce moment a été estimée à environ 2 000 pi par minute.
On ignore la raison pour laquelle le moteur 2 a été coupé avant l'impact. Une explication possible pourrait être le fait que l'équipage avait reçu une fausse indication d'incendie. Un court-circuit du fil de masse dans la poignée de l'extincteur 2 peut entraîner l'allumage des témoins de cette poignée et du commutateur d'alimentation en carburant du moteur 2. Le fil de masse n'a pas été identifié; toutefois, il se trouvait à un endroit fortement endommagé par la chaleur et le feu. On a constaté qu'un des livrets des listes de vérifications d'urgence du poste de pilotage a subi des dommages mineurs dus à la chaleur à la page décrivant la procédure en cas d'incendie moteur; toutefois, on ne sait si la liste de vérifications était en train d'être consultée au moment de l'arrêt du moteur. La fermeture du commutateur FUEL fait partie de cette procédure de vérifications.
L'environnement dans la cabine était sans doute beaucoup moins pénible que dans le poste de pilotage. Même si l'on a noté des traces de suie dans l'espace inoccupé situé derrière le principal foyer d'incendie, il n'y avait pas de signe de chaleur notable dans l'espace inoccupé situé derrière les sièges de première classe. Les panneaux de plafond dans la cabine ont une forte résistance au feu et à la pénétration de la chaleur et ils ont sans doute protégé la cabine contre les effets de l'incendie. De la fumée a sans doute pénétré dans la cabine durant les dernières minutes du vol, surtout dans la partie avant.
On ignore si les extincteurs à bord ont été utilisés pour lutter contre l'incendie. À l'examen, on a déterminé que, selon toute vraisemblance, aucun des deux extincteurs portatifs à poudre chimique de 5 livres installés dans la cabine n'avait été utilisé. On peut en dire autant de trois des six extincteurs portatifs au halon de 2,5 livres; toutefois, l'état de charge des trois autres extincteurs au halon n'a pu être déterminé en raison des dommages matériels qu'ils avaient subis. Si quelqu'un avait tenté de lutter contre l'incendie, on peut penser que le maître de cabine aurait participé à la tentative; or, le maître de cabine était assis au moment de l'impact et sa ceinture de sécurité était bouclée.
Un des passagers, qui était pilote, portait un gilet de sauvetage au moment de l'impact. Rien n'indique que quelqu'un d'autre ait revêtu son gilet de sauvetage, même s'il a été impossible de tirer des conclusions définitives dans la plupart des cas. On ignore si ce passager avait revêtu son gilet de sauvetage de son propre chef ou à la suite d'une consigne. S'il a revêtu son gilet de sauvetage de lui-même, c'est qu'il a dû être en mesure de discerner ou de déduire que l'avion se trouvait au-dessus de l'eau et qu'il risquait de faire un amerrissage d'urgence. Si, au contraire, il a suivi une consigne de l'équipage, c'est qu'un amerrissage forcé était prévu. En pareil cas, le maître de cabine aurait dû porter son gilet de sauvetage, ce qui n'est pas le cas; d'où la conclusion qu'aucune consigne n'avait été donnée en prévision d'un amerrissage forcé.
Au cours des dernières minutes du vol, à part de peut-être disposer d'un cap généré électroniquement sur l'écran d'affichage (DU) 2, les pilotes ne disposaient d'aucun instrument électronique pour se rendre jusqu'à l'aéroport, et ils auraient été contraints d'envisager d'autres solutions, comme un atterrissage forcé ou un amerrissage forcé. D'après l'examen de l'épave, on sait que l'incendie dans le poste de pilotage a laissé des traces de dommages causés par la chaleur dont la température était comprise entre 482 et 538 °C (900 et 1 000 °F) à l'avant du tableau de distribution avionique et sur la structure des diffuseurs d'air juste au-dessus du plafond du poste de pilotage. Il y avait des indications selon lesquelles un matériau en fusion s'était égoutté sur la moquette et le recouvrement du siège de l'observateur de droite. L'incendie était en train de gagner le siège du pilote depuis l'arrière du poste de pilotage. Les importants dépôts de suie et les dommages causés par la chaleur de certains des matériaux du poste de pilotage indiquent que la visibilité était considérablement réduite dans le poste de pilotage. Il a été impossible de déterminer si l'extincteur du poste de pilotage avait été utilisé.
Le siège du copilote était occupé au moment de l'impact; le siège du pilote était en position d'évacuation. Même si l'indicateur d'assiette de secours indiquait que l'avion était dans un piqué de 20° et une inclinaison latérale de 110° à droite au moment de l'impact, il a été impossible de déterminer si ces indications représentaient l'assiette réelle de l'avion au moment de l'impact. Les dommages structuraux étayent une position de piqué d'environ 20° et une inclinaison latérale de plus de 60° à droite. Si les pilotes n'étaient pas frappés d'incapacité et qu'ils tentaient toujours de reprendre le contrôle de l'avion, cette constatation porte à croire que, dans la dernière minute du vol, ils avaient perdu toute orientation par rapport à l'horizon. Cette situation n'aurait rien eu de surprenant, compte tenu de l'absence d'instruments de référence et du manque de repères visuels à l'extérieur de l'avion. Peu importe qu'il y ait eu une intervention du pilote au moment de l'impact, l'avion n'était pas en vol contrôlé.
2.20 Profils de descente d'urgence réel et théorique
2.20.1 Généralités
La présente section porte sur le profil de vol réel de SR 111 et le profil théorique optimal de descente d'urgence. Les calculs théoriques ont été effectués uniquement pour fournir une ligne de base de référence théorique, sans qu'on tienne compte des indices sur lesquels ont reposé les décisions prises par l'équipage de conduite. On n'a pas non plus tenu compte des facteurs défavorables qui auraient pu avoir de graves répercussions sur la capacité des pilotes à maintenir un profil de descente optimal et à faire atterrir l'apparei.
Consulter les documents d'information technique sur ce sujet.
2.20.2 Heure d'atterrissage la plus hâtive possible
Les calculs théoriques démontrent que, si une descente d'urgence avait été amorcée à partir du point optimal à 1 h 14 min 18 s, l'heure d'atterrissage la plus hâtive possible aurait été 1 h 27. Cette heure d'atterrissage n'aurait été possible que s'il n'y avait pas eu de défectuosités techniques ou un environnement malsain dans le poste de pilotage entravant la capacité des pilotes à piloter et à configurer l'avion pour en tirer les performances optimales. Tout écart par rapport à ces conditions « idéales » entraînerait une heure d'atterrissage plus tardive du fait que l'avion devrait effectuer des manœuvres supplémentaires hors de la route directe vers l'aéroport ou qu'il atteindrait l'aéroport à une altitude ou à une vitesse trop élevées pour pouvoir atterrir.
2.20.3 Effet des défaillances dues à l'incendie sur l'atterrissage
À 1 h 24 min 9 s, soit près de trois minutes avant l'heure d'atterrissage la plus hâtive possible, l'avion avait commencé à subir une succession de plus en plus rapide de défaillances de systèmes. Les pilotes ont déclaré une situation d'urgence à 1 h 24 min 42 s, soit un peu plus de deux minutes avant l'heure théorique d'atterrissage la plus hâtive possible. Plusieurs autres défaillances de systèmes, notamment la perte des écrans d'affichage du copilote et l'arrêt des communications avec les ATS, étaient survenues une minute plus tard (1 h 25 min 42 s), juste avant l'arrêt des enregistreurs de bord.
Au moment où les enregistreurs ont cessé de fonctionner, l'environnement dans le poste de pilotage se détériorait rapidement. L'incendie était en train de gagner tout le poste de pilotage depuis le plafond. Juste avant que les enregistreurs cessent de fonctionner, les pilotes avaient indiqué qu'ils devaient atterrir immédiatement; toutefois, ils avaient apparemment perdu la capacité de naviguer, car ils n'avaient pas mis le cap sur l'aéroport. À un moment donné au cours des cinq dernières minutes, les becs de bord d'attaque de l'avion sont devenus inutilisables. Si l'on se fonde sur les dommages causés par la chaleur aux fils et aux disjoncteurs connexes, il se pourrait que les déporteurs-sol automatiques, les servofreins et le dispositif antipatinage soient tombés en panne avant que l'avion puisse atterrir. Dans les circonstances, il aurait été impossible d'arrêter l'avion dans sa course sur la piste existante, même s'il avait réussi à atterrir.
Compte tenu de ces éléments, il est évident que, même si les pilotes avaient tenté un déroutement d'urgence d'une durée minimale à compter de 1 h 14 min 18 s, ils n'auraient pas réussi à maintenir le contrôle de l'avion le temps nécessaire pour atteindre l'aéroport et effectuer un atterrissage en toute sécurité.
2.20.4 Calculs théoriques sur la descente d'urgence
Par pure coïncidence, l'heure à laquelle il aurait fallu amorcer une descente d'urgence pour atteindre le profil théorique optimal de descente d'urgence afin d'atterrir à l'aéroport international de Halifax correspondait à l'heure réelle de la communication du message radio Pan Pan. Tout retard dans la descente signifierait que l'avion se trouverait au-dessus du profil idéal de descente. Durant la communication du message radio Pan Pan, le commandant de bord avait demandé un déroutement et avait proposé Boston. Ce n'est qu'une minute et vingt-cinq secondes plus tard que les événements suivants se sont déroulés : le contrôleur a proposé Halifax comme aéroport de déroutement, les pilotes ont évalué la situation et accepté Halifax et ils ont amorcé une descente rapide, mais non une descente d'urgence.
Pendant ce temps, l'avion volait dans la direction générale de l'aéroport international de Halifax à une vitesse supérieure à 8 milles marins (nm) à la minute. À partir du point d'amorce réel de la descente, les pilotes n'auraient pas été en mesure de positionner l'appareil pour qu'il atterrisse sur la piste 06 sans effectuer des manœuvres hors route pour perdre de l'altitude et ralentir à la vitesse appropriée. Dans le meilleur des cas, ces manœuvres supplémentaires auraient ajouté deux ou trois minutes au délai d'atterrissage. Vraisemblablement, les pilotes auraient dû effectuer une manœuvre comme un virage de 360° ou ils auraient dû atterrir sur une autre piste. Dans un cas comme dans l'autre, plusieurs minutes se seraient ajoutées à l'heure d'atterrissage la plus hâtive possible, et les effets de l'incendie auraient exclu toute possibilité d'un atterrissage en toute sécurité.
À environ 1 h 25 min, lorsque l'incendie à bord n'a plus fait l'ombre d'un doute dans le poste de pilotage, l'avion se trouvait à environ 25 nm de l'aéroport, à une altitude d'environ 10 000 pi et à une vitesse d'environ 320 nœuds. Il volait en direction sud, en éloignement de l'aéroport. Dans le meilleur des cas, à partir de ce point, il aurait fallu au minimum six minutes pour atteindre la piste.
Les calculs théoriques confirment qu'à partir de n'importe quel point situé le long de la trajectoire de vol après le début de la descente de l'avion, il n'aurait pas été possible pour les pilotes de conserver la maîtrise pendant le temps qu'il leur aurait fallu pour atteindre l'aéroport et effectuer un atterrissage.
2.21 Début de l'incendie
Une évaluation des renseignements disponibles indiquent que l'incendie s'est probablement déclaré dans un endroit relativement petit, situé au-dessus du plafond arrière droit du poste de pilotage, tout juste devant la paroi arrière du poste de pilotage, près de la référence 383. Bien que d'autres endroits potentiels aient été évalués, on n'a trouvé aucun autre endroit qui puisse expliquer de façon aussi complète les premiers signes d'odeur, puis la présence de la fumée et enfin la propagation de l'incendie. Les éléments suivants permettent d'étayer le fait que l'incendie s'est déclaré et propagé à partir de cet endroit précis :
- la présence de fils électriques comme sources potentielles d'inflammation et le matelas isolant recouvert de PET métallisé facilement inflammable;
- l'environnement connu du poste de pilotage et de la cabine;
- la durée pendant laquelle l'incendie s'est propagé à partir du moment où il a été décelé jusqu'à ce que se produisent les défaillances de divers systèmes de bord causées par l'incendie;
- les trajets suivis par la circulation de l'air;
- les types de dommages causés par la chaleur et l'incendie.
Là où l'incendie s'est probablement déclaré, l'amorçage d'arc d'un fil constitue la seule source d'inflammation plausible. Plusieurs faisceaux contenant des centaines de fils, dont les quatre câbles de bloc d'alimentation du RDB et le fil de commande de calibre 16 AWG, traversaient cet endroit (voir la rubrique 1.6.1.4). Selon toute probabilité, l'incendie s'est déclaré à la suite de l'amorçage d'arc d'un fil qui a enflammé des matelas isolants recouverts de PET métallisé situés à proximité. Ces matelas isolants recouverts de PET métallisé s'enflamment facilement et ils étaient largement utilisés à cet endroit (voir la rubrique 1.16.8).
De tous les fils et câbles qui se trouvaient à cet endroit, le seul fil endommagé par un arc électrique qui a pu être positionné à cet endroit avec une certaine précision était la paire de câbles 1-3791/1-3793 du bloc d'alimentation du RDB (voir la rubrique 1.14.11.2). Bien qu'il soit possible que d'autres fils se trouvant à cet endroit et qui n'ont pas été retrouvés aient aussi subi des amorçages d'arc, le seul amorçage d'arc connu à cet endroit est l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791, située tout juste devant la référence 383.
On a procédé à une évaluation pour déterminer si l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 était le résultat de dommages causés par l'incendie, ce qui signifierait qu'il ne serait pas l'événement déclencheur. Cette possibilité a été jugée peu probable. Pour que l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 soit considéré comme étant le résultat de dommages causés par l'incendie, ce dernier aurait dû se déclarer à partir d'un autre amorçage d'arc non lié à l'endroit en question, et l'incendie aurait eu besoin d'être entretenu suffisamment longtemps à cet endroit pour faire fondre et entamer l'isolant en ETFE du fil au point d'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791. Pour qu'un amorçage d'arc se produise à cet endroit, il fallait que le fil ébréché soit en contact avec une structure de l'avion mise à la masse ou un fil de potentiel électrique différent dont l'isolant aurait été entamé par le feu. Il est peu probable qu'un incendie ciblerait un seul fil (pièce produite 1-3791) pour entamer son isolant et entamer un autre fil voisin pour créer des conditions susceptibles de produire un arc électrique sans aussi entamer l'isolant d'au moins quelques-uns des cinq fils de la paire de câbles 1-3791/1-3793. Il est peu probable que l'isolant de ces cinq autres fils ait été entamé à cet endroit, puisque ces derniers ne présentaient aucun signe d'amorçage d'arc à ce même endroit.
Les parties avant des câbles de bloc d'alimentation 1-3790/1-3792 et le fil de commande de calibre 16 AWG n'ont pas été identifiés et il se peut qu'ils n'aient pas été retrouvés. Par conséquent, à l'endroit où l'amorçage d'arc avant s'est produit sur le câble 1-3790 du bloc d'alimentation, on ne sait si cet arc électrique s'est produit sur la paire de câbles 1-3790/1-3792 ou sur le fil de commande de calibre 16 AWG. Toutefois, comme ces deux câbles de bloc d'alimentation et le fil de commande de calibre 16 AWG ont par la suite subi des arcs électriques à des endroits situés à au moins 50 cm (20 po) plus loin vers l'arrière, tout amorçage d'arc qui se serait produit à l'avant n'avait pas entraîné le déclenchement du disjoncteur connexe.
Compte tenu du nombre de circonstances et d'événements improbables qui auraient été nécessaires, un scénario mettant en cause des dommages causés par un incendie menant à un amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 à la référence 383 ne peut se justifier.
Si l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 n'est pas le résultat de dommages causés par l'incendie, un autre scénario possible est que l'arc électrique se serait produit au même moment que l'amorçage d'arc déclencheur de l'incendie; c'est-à-dire qu'il aurait été associé à l'amorçage d'arc déclencheur de l'incendie, soit seul, en combinaison avec l'amorçage d'arc sur un ou plusieurs autres fils, soit comme dommage indirect lié à un amorçage d'arc sur un ou plusieurs fils voisins. Dans aucun de ces scénarios l'arc électrique n'a été suffisamment intense pour déclencher le disjoncteur connexe.
L'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 a fait l'objet d'une évaluation visant à déterminer s'il était lui-même l'élément déclencheur de l'incendie. Pour qu'il soit le seul élément déclencheur de l'incendie, il aurait fallu que le fil soit d'abord endommagé, par exemple à la suite d'une usure par frottement, à l'emplacement de l'arc électrique pour exposer le conducteur. Il aurait ensuite fallu que le conducteur exposé soit en contact avec la structure mise à la masse de l'avion pour que se produise un amorçage d'arc électrique. Même s'il avait été possible de positionner le segment de câble (pièce produite 1-3791) et, par conséquent, l'arc électrique avant de façon relativement précise, l'ampleur et la nature des dommages nécessitaient une interprétation. Cette interprétation admettait un petit nombre d'emplacements possibles pour le positionnement des fils, comme l'indique la rubrique 1.14.11.2. À l'extrémité avant de ces emplacements possibles, l'arc électrique était positionné de manière qu'il y ait contact avec le support de fils en aluminium. Toutefois, l'usure par frottement d'un fil en lui-même sur ce support ne produirait pas un arc électrique, puisque le support était isolé de la structure de l'avion par une entretoise en nylon et qu'il n'y aurait eu aucun chemin électrique vers la masse.
On a retrouvé de l'aluminium sur une perle en cuivre adhérant aux torons de fils, un peu à l'écart du point principal d'amorçage d'arc sur la perle d'arc électrique de la pièce produite 1-3791, ce qui porte à croire que l'arc électrique aurait pu avoir été causé par un contact avec de l'aluminium. Un amorçage d'arc avec le support en aluminium ne serait possible que si deux conducteurs exposés avaient été en contact avec le support. Il y aurait alors eu possibilité d'amorçage d'arc car l'aluminium est un bon conducteur d'électricité. Un tel scénario signifierait, par exemple, que deux fils de phase d'un câble de bloc d'alimentation se seraient usés séparément sur ce même support jusqu'à ce que leurs conducteurs soient exposés. Cette hypothèse ne peut être écartée; par contre, aucun autre renseignement ne permet de l'étayer. Le support n'a pas été identifié dans l'épave, ni les deux câbles de bloc d'alimentation qui restaient, le fil de commande de calibre 16 AWG ou d'autres fils de l'avion se trouvant à cet endroit qui auraient pu être en cause.
Un autre scénario d'amorçage d'arc ayant déclenché l'incendie mettant en cause l'amorçage d'arc avant de la pièce produite 1-3791 serait que l'arc électrique se serait produit directement à la suite du contact avec un autre fil de potentiel électrique différent. Ce pourrait être un fil de l'avion ou un autre fil du RDB. Dans un cas comme dans l'autre, les deux fils auraient dû être endommagés au point de l'amorçage d'arc pour que leurs conducteurs dénudés se touchent. Comme les fils RDB à la référence 383 étaient acheminés séparément et non dans un faisceau de fils existant, il est moins probable que les fils du RDB puissent avoir été en contact avec des fils de l'avion à l'endroit précis où l'incendie s'est déclaré; par conséquent, les fils les plus probables pour ce scénario seraient les autres fils se trouvant dans le faisceau des quatre câbles de bloc d'alimentation et le fil de commande de calibre 16 AWG. On sait que les autres fils de la paire 1-3791/1-3793 n'ont pas subi d'amorçage d'arc à cet endroit situé à l'avant. Toutefois, les fils d'une autre paire de câbles de bloc d'alimentation et le fil de commande de calibre 16 AWG à cet endroit n'ont pas été identifiés. Par conséquent, on ne peut écarter l'hypothèse que les fils de l'avion et les autres fils RDB aient pu être en cause.
Des dommages à deux fils ou plus dans un faisceau peuvent être causés par contact frottant avec la structure de l'avion, par des dégâts accidentels au cours de l'installation ou de l'entretien subséquent, ou par la présence de particules comme des rognures de métal qui pourraient couper l'isolant des deux fils et exposer leur conducteur. Une rognure de métal pourrait aussi agir comme conducteur. Dans un cas comme dans l'autre, l'amorçage d'arc qui a été produit sur tous les câbles de bloc d'alimentation et sur le fil de commande de calibre 16 AWG confirme que tout amorçage d'arc qui se serait produit près de la référence 383 n'a pas déclenché le disjoncteur connexe.
On a procédé à une évaluation pour déterminer si des dommages causés par l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 pourraient avoir été causés par des dommages indirects, soit des dommages dus à un amorçage d'arc sur d'autres fils se trouvant dans le voisinage immédiat selon une intensité suffisante pour entamer l'isolant d'au moins deux autres fils, y compris la pièce produite 1-3791. Pour que cette situation se produise, les fils de l'élément déclencheur auraient dû se trouver très proches de l'arc électrique avant sur la pièce produite 1-3791. Un amorçage d'arc d'une intensité suffisante pour endommager d'autres fils aurait vraisemblablement déclenché les disjoncteurs connexes. Aucun des disjoncteurs du RDB ne s'est déclenché au moment de l'amorçage d'arc déclencheur de l'incendie (un amorçage d'arc subséquent s'est produit sur tous les câbles de bloc d'alimentation et sur le fil de commande de calibre 16 AWG); par conséquent, si un tel amorçage d'arc s'est produit, les fils du RDB n'ont pas été touchés. Un tel amorçage d'arc initial aurait touché des fils de l'avion, mais il n'aurait causé aucun problème électrique observable par les pilotes et il n'aurait pas été enregistré par le FDR. Bien qu'on ne puisse écarter l'hypothèse que la pièce produite 1-3791 ait subi des dommages indirects, elle semble peu probable.
Il n'a pas été possible de déterminer comment l'isolant au point d'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 a d'abord été entamé, ni avec quoi ce fil est entré en contact, comme la structure ou un autre fil, pour causer l'arc électrique. Même si les renseignements disponibles indiquent que l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 s'est produit au moment de l'événement qui a donné naissance à l'incendie, et là où l'incendie s'est le plus probablement déclaré, il n'est pas possible de conclure que l'amorçage d'arc avant sur la pièce produite 1-3791 a été l'amorçage d'arc déclencheur de l'incendie. Selon toute vraisemblance, au moins un autre fil a été mêlé à cet amorçage d'arc initial; toutefois, il n'a pas été possible de déterminer s'il s'agit d'un ou de plusieurs fils du RDB, d'un ou de plusieurs fils de l'avion ou d'une combinaison des deux.
Un ou des amorçages d'arc sont à l'origine de l'incendie; toutefois, cet amorçage d'arc n'aurait pas menacé l'avion s'il ne s'était pas trouvé à proximité d'un matériau facilement inflammable. La présence d'importantes quantités de matières inflammables a permis à l'incendie de se propager et de gagner rapidement en intensité, ce qui a mené à la perte de contrôle de l'avion.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
Ces faits établis ont trait aux actes dangereux, aux situations dangereuses et aux manquements à la sécurité qui sont associés aux événements qui ont joué un rôle important dans l'accident ou y ont contribué.
- Les normes de certification de l'avion relativement à l'inflammabilité des matériaux étaient inadéquates en ce qu'elles permettaient l'utilisation de matériaux qui pouvaient s'enflammer et qui pouvaient alimenter et propager un incendie. Par conséquent, un matériau inflammable a propagé un incendie qui s'était déclaré au-dessus du plafond, sur le côté droit du poste de pilotage, près de la paroi arrière de ce dernier. L'incendie s'est propagé et a gagné rapidement en intensité au point de détériorer les systèmes de bord et l'environnement du poste de pilotage et, ultimement, de mener à la perte de contrôle de l'avion.
- Le matériau de recouvrement en poly(éthylène téréphtalate) (PET) métallisé des matelas d'isolation thermique et acoustique utilisés à bord de l'avion était inflammable. Le matériau de recouvrement a été vraisemblablement le premier matériau à s'enflammer et il a constitué la plus grande partie des matières combustibles qui ont contribué à la propagation et à l'intensité de l'incendie.
- Une fois enflammés, d'autres types de matériau de recouvrement de l'isolation thermique et acoustique présentent des caractéristiques de propagation de la flamme similaires aux matelas isolants recouverts de PET métallisé, et ils ne respectent pas les critères d'essai d'inflammabilité révisés qui sont proposés. Le matériau de recouvrement au poly(fluorure de vinyle) métallisé était installé dans l'avion HB-IWF et il a joué un rôle dans l'incendie en vol.
- Des embouts en silicone d'élastomère, des attaches à bouclettes de nylon, des mousses, des adhésifs et des rubans adhésifs de joints d'isolant thermique et acoustique ont contribué à la propagation et à l'intensité de l'incendie.
- Les disjoncteurs utilisés dans l'avion étaient similaires à ceux qui sont utilisés en général en aviation et ils n'étaient pas en mesure d'offrir une protection contre tous les types d'amorçage d'arc. L'incendie s'est fort probablement déclaré à la suite d'un amorçage d'arc.
- Un morceau de câble (1-3791) de bloc d'alimentation du réseau de divertissement de bord (RDB) présentait une zone de cuivre resolidifié sur un fil à la suite d'un amorçage d'arc. On a déterminé que cette zone se trouvait près de la référence de construction 383, à l'endroit où l'incendie s'est fort probablement déclaré. Cet amorçage d'arc est probablement associé au déclenchement de l'incendie; par contre, il n'a pas été possible de déterminer si le fil ayant subi l'amorçage d'arc a été l'élément déclencheur de l'incendie.
- Il n'y avait aucun dispositif intégré de détection et de suppression de fumée et d'incendie à l'endroit où l'incendie s'est déclaré et d'où il s'est propagé, et ce dispositif n'était pas requis par la réglementation. L'absence d'un tel dispositif a retardé la détection de l'incendie et a permis à ce dernier de se propager librement jusqu'à ce qu'il devienne incontrôlable.
- On se fiait à la vue et à l'odorat pour déceler et distinguer des odeurs et de la fumée provenant de différentes sources éventuelles. Cette confiance dans les sens s'est traduite par le fait qu'on a déterminé par erreur que l'odeur et la fumée initiales provenaient d'une source de conditionnement d'air.
- Aucun plan de lutte contre les incendies en vol n'était en place pour l'avion en question, et un tel plan n'était pas exigé par la réglementation. Par conséquent, l'équipage de l'avion ne disposait d'aucune procédure ni formation lui indiquant d'intervenir énergiquement pour localiser et éliminer la source de la fumée ou d'accélérer les préparatifs pour un atterrissage d'urgence possible. En l'absence d'un plan de lutte contre les incendies, l'équipage s'est concentré sur les préparatifs de l'avion en vue d'un déroutement et d'un atterrissage.
- Aucune exigence ne demande qu'il soit tenu compte d'une défaillance causée par un incendie lorsqu'on exécute l'analyse de la sécurité des systèmes qui est exigée pour la certification. La défaillance causée par l'incendie d'embouts en silicone d'élastomère installés sur des gaines d'air conditionné s'est traduite par l'apport d'une alimentation continuelle d'air conditionné qui a contribué à la propagation et à l'intensité de l'incendie.
- La perte des écrans d'affichage de vol primaires et l'absence de références visuelles extérieures ont forcé les pilotes à se fier aux instruments de secours pendant au moins une partie des derniers moments du vol. Dans l'environnement du poste de pilotage qui se détériorait, la position et la petite taille de ces instruments auraient rendu difficile la transition des pilotes vers ceux-ci pour continuer à conserver la bonne orientation spatiale de l'avion.
3.2 Faits établis quant aux risques
Ces faits établis recensent les risques pouvant compromettre la sécurité aérienne, mais dont on ne pouvait démontrer le rôle direct dans l'accident, ou qui ne sont pas liés au présent accident, mais qui ont néanmoins été découverts au cours de l'enquête.
- Bien que dans de nombreux types d'aéronef il y ait des endroits qui dépendent uniquement de l'intervention humaine pour la détection et l'extinction d'un incendie, il n'existe aucune exigence selon laquelle la conception de l'aéronef doive faciliter l'accès à ces endroits. L'absence d'un tel accès pourrait retarder la détection d'un incendie et compromettre dangereusement la lutte contre ce dernier.
- Dans les dernières minutes du vol, l'équipement électronique de navigation et les radios de communication ont cessé de fonctionner, laissant les pilotes sans aucun moyen précis d'établir leur position géographique, de naviguer vers l'aéroport et de communiquer avec le contrôle de la circulation aérienne.
- La réglementation n'exige pas que les aéronefs soient conçus pour permettre la mise hors tension immédiate de tous les systèmes électriques, sauf les systèmes essentiels, comme partie intégrante du processus d'isolement visant à éliminer des sources d'inflammation potentielles.
- La réglementation n'exige pas que les listes de vérifications servant à isoler la fumée ou les odeurs qui pourraient être liées à une surchauffe soient conçues pour être exécutées dans un délai qui réduise au minimum le risque qu'un incendie en vol soit allumé ou alimenté. Comme c'est le cas pour des listes de vérifications similaires dans d'autres aéronefs, l'exécution de la liste de vérifications propre au MD-11 pouvait prendre de 20 à 30 minutes. La durée d'exécution de ces listes pourrait permettre à des anomalies, comme des composants surchauffés, de persister au point de devenir des sources d'inflammation.
- La liste de vérifications de Swissair en cas de fumée et d'émanations d'origine inconnue ne demandait pas que l'éclairage d'urgence de la cabine soit allumé avant que le commutateur CABIN BUS soit réglé sur OFF. Même s'il y avait un interrupteur pour cet éclairage au poste du maître de cabine, on sait que pendant un certain temps l'équipage de cabine a utilisé des lampes de poche pendant les préparatifs pour l'atterrissage, ce qui peut avoir retardé les préparatifs.
- Ni la liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue ni celle de Boeing ne soulignaient la nécessité de commencer immédiatement les préparatifs pour un atterrissage en faisant état de cette mesure au début de la liste de vérifications. Faire figurer cette mesure à la fin de la liste de vérifications minimise l'importance d'anticiper que la présence de fumée d'origine inconnue dans un avion pourrait s'aggraver rapidement.
- L'examen de plusieurs avions MD-11 a révélé diverses différences dans le câblage qui pouvaient causer un amorçage d'arc. D'autres organisations ont découvert des différences semblables dans d'autres types d'aéronef. Ces différences dénotent une lacune au sein de l'industrie de l'aviation en ce qui a trait aux procédures d'installation, d'entretien et d'inspection des câbles.
- La conséquence de la contamination d'un aéronef sur le maintien de sa navigabilité aérienne n'est pas bien comprise par l'industrie de l'aviation. Divers types de contamination peuvent endommager l'isolant des fils, compromettre les caractéristiques d'inflammabilité des matériaux ou fournir un combustible qui permettra à un incendie de se propager. L'industrie de l'aviation n'a pas encore évalué les conséquences de la contamination sur le maintien de la navigabilité d'un aéronef et sur son exploitation sûre.
- Des dommages causés par la chaleur et plusieurs modes de défaillance par amorçage d'arc ont été découverts sur des liseuses de carte en service. Bien que l'incendie dans l'avion en question ne se soit pas déclaré dans le voisinage des liseuses de carte, la conception de ces dernières et leur installation près de matériaux combustibles présentaient un risque d'incendie.
- Il n'existe aucun document d'information indiquant comment se conformer aux exigences de la Federal Aviation Regulations (FAR) 25.1353(b) dans des situations où l'espacement physique ou spatial des fils n'est ni pratique ni faisable, comme dans les endroits exigus.
- Le capuchon en aluminium utilisé sur la conduite d'oxygène en acier inoxydable située au-dessus du plafond du poste de pilotage pouvait fuir ou se briser s'il était exposé aux températures qu'il a probablement subies au cours des dernières minutes du vol. De telles défectuosités aggraveraient l'incendie et pourraient épuiser la réserve d'oxygène destinée à l'équipage. Il n'a pas été possible de déterminer si c'est ce qui s'est passé lors du vol ayant mené à l'accident.
- Les grands avionneurs et d'autres intervenants de l'industrie de l'aviation ont reconnu et traité le manque de cohérence dans les pratiques relatives au réenclenchement des disjoncteurs. Malgré ces initiatives, le cadre réglementaire, comprenant les règlements et les documents consultatifs, n'a pas changé, ce qui crée le risque que les « meilleures pratiques » ne se maintiennent pas ou qu'elles ne soient pas appliquées de façon universelle dans toute l'industrie de l'aviation.
- La durée d'enregistrement obligatoire de l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) était insuffisante pour permettre l'enregistrement de données additionnelles et éventuellement utiles.
- Le CVR et l'enregistreur de données de vol (FDR) étaient alimentés par des bus électriques distincts; par contre, ces bus étaient eux-mêmes alimentés par le même alternateur. Cette configuration était autorisée par la réglementation. Les deux enregistreurs ont cessé de fonctionner à peu près au même moment à cause d'interruptions de courant causées par l'incendie. Des sources d'alimentation ndépendantes de l'avion pour chacun des enregistreurs auraient peut-être permis d'enregistrer plus de données.
- La réglementation n'exigeait pas que le CVR dispose d'une source d'alimentation électrique indépendante de l'alimentation électrique de l'avion. Par conséquent, lors de l'interruption de l'alimentation électrique de l'avion au CVR, des renseignements qui auraient pu être utiles n'ont pas été enregistrés.
- La réglementation et les normes de l'industrie n'exigeaient pas que les enregistreurs de données de vol d'accès facile (QAR) soient protégés en cas d'accident, et aucune exigence ne demandait que les données du QAR soient enregistrées sur le FDR. Par conséquent, des renseignements potentiellement utiles enregistrés par le QAR ont été perdus.
- La réglementation n'exigeait pas que les radiobalises sous-marines de détresse fixées au CVR et au FDR bénéficient de la même protection contre les accidents que d'autres composants des enregistreurs de données.
- La structure de gestion du projet de certification de type supplémentaire (STC) relatif au RDB n'a pas assuré que les éléments requis étaient présents pour la conception, l'installation et la certification d'un système comprenant des procédures de délestage électrique d'urgence qui soient compatibles avec le certificat de type du MD-11. Aucun lien n'a été établi entre la façon dont le système RDB a été intégré à l'alimentation électrique de l'avion et le déclenchement ou la propagation de l'incendie.
- Le processus d'approbation du STC de la Federal Aviation Administration (FAA) pour le RDB n'a pas assuré que l'atelier de modification désigné (DAS) employait du personnel possédant une connaissance suffisante de l'avion pour évaluer de façon appropriée l'intégration de l'alimentation électrique du RDB par rapport à l'alimentation électrique de l'avion avant d'accorder la certification.
- La FAA a délégué de facto une partie de la fonction de son groupe d'évaluation des aéronefs à l'atelier de modification désigné, même si le processus STC de la FAA ne comprenait aucune disposition à cet effet.
- La FAR 25.1309 exige qu'une analyse de sécurité soit effectuée pour chaque système installé dans un aéronef; toutefois, les exigences de la FAR 25.1309 ne sont pas suffisamment strictes pour assurer que tous les systèmes, quelle que soit leur utilisation prévue, sont intégrés à un aéronef d'une façon conforme au certificat de type de ce dernier.
- Les cartes d'approche pour l'aéroport international de Halifax se trouvaient dans la bibliothèque de l'avion, au poste de l'observateur, et non à la portée des pilotes. Récupérer ces cartes demandait du temps et de l'attention de la part des pilotes à un moment où ils devaient faire face aux multiples tâches associées au pilotage de l'avion et à la planification de l'atterrissage.
- Le programme d'assurance qualité de SR Technics était bien conçu et il satisfaisait aux normes requises, mais la formation et la mise en œuvre n'assuraient pas l'application systématique du programme pour que les dangers potentiels soient toujours cernés et réduits au minimum.
- Les procédures d'audit de l'Office fédéral de l'aviation civile suisse appliquées au programme d'assurance qualité de SR Technics n'ont pas assuré que les facteurs sous-jacents qui avaient donné lieu à la découverte d'anomalies et à la formulation d'observations similaires lors des audits avaient été réglés.
3.3 Autres faits établis
Ces faits établis mentionnent des éléments qui peuvent améliorer la sécurité aérienne, permettre de régler une question controversée ou clarifier une question ambiguë non résolue.
- La Gendarmerie royale du Canada n'a rien trouvé qui prouverait qu'un explosif, un dispositif incendiaire ou un acte criminel aient été à l'origine de l'incendie en vol.
- L'interruption de 13 minutes dans les communications à très haute fréquence (VHF) avait fort probablement été causée par une erreur de sélection des fréquences de la part des pilotes.
- Les pilotes ont pris une décision opportune en se déroutant vers l'aéroport international de Halifax. Compte tenu des indices limités à leur disposition, ils croyaient que même si un déroutement était nécessaire, l'avion n'était pas suffisamment menacé pour qu'ils déclarent une situation d'urgence ou qu'ils entament une descente d'urgence.
- L'équipage de conduite était formé pour larguer du carburant sans restrictions et pour poser l'avion en surcharge dans une situation d'urgence, le cas échéant.
- À partir de n'importe quel point le long de la trajectoire de vol de SR 111 après que l'odeur eut été décelée pour la première fois dans le poste de pilotage, les conditions liées à l'incendie dans le poste de pilotage auraient fini par empêcher l'exécution d'une approche et d'un atterrissage en toute sécurité à l'aéroport international de Halifax.
- Les anomalies liées au conditionnement de l'air ont toujours été perçues par les organismes de réglementation, les constructeurs, les exploitants et les pilotes comme ne présentant pas une menace immédiate et sérieuse à la sécurité de l'avion qui justifierait un atterrissage immédiat.
- Les mesures prises par les membres de l'équipage de conduite visant à préparer l'avion pour l'atterrissage, y compris leurs décisions relatives à la préparation de la cabine pour l'atterrissage et au largage du carburant, étaient en accord avec le fait qu'ils ne savaient pas qu'un incendie à bord était en train de se propager.
- Les contrôleurs de la circulation aérienne n'étaient pas formés sur les caractéristiques générales d'exploitation des avions en cas de situations anormales ou d'urgence, comme le largage de carburant.
- Les interactions entre les pilotes et les contrôleurs de la circulation aérienne n'ont eu aucun effet sur l'issue de l'accident.
- Le siège du copilote était occupé au moment de l'impact. Il n'a pas été possible de déterminer si le siège du pilote était occupé au moment de l'impact.
- Les pilotes ont coupé le moteur 2 au cours des derniers moments du vol. Il n'a pas été possible de confirmer la raison de cet arrêt de moteur; par contre, il est possible que les pilotes réagissaient au fait que la poignée coupe-feu de ce moteur et les voyants d'urgence de l'interrupteur FUEL s'étaient allumés. Il y avait des dommages causés par l'incendie dans le voisinage d'un fil qui, s'il avait été court-circuité à la masse, aurait fait s'allumer ces voyants.
- Lorsque l'avion a percuté le plan d'eau, le gyroscope de l'indicateur d'assiette de secours tournait toujours à haute vitesse; toutefois, l'instrument n'était plus sous tension. On ne sait pas si l'information affichée au moment de l'impact était bien celle de l'assiette de l'avion.
- La coordination entre les pilotes et l'équipage de cabine était conforme aux procédures de la compagnie et à la formation reçue. Les communications entre les membres d'équipage ne dénotaient pas une situation d'urgence jusqu'à six minutes environ avant l'accident; par contre, peu après le début de la descente à Halifax, des préparatifs rapides en vue d'un atterrissage imminent étaient en cours.
- Aucune fumée n'a été signalée dans la cabine par l'équipage de cabine à quelque moment que ce soit avant que l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) cesse de fonctionner; par contre, il est probable qu'un peu de fumée aurait été présente dans la cabine pendant les dernières minutes du vol. Aucun dommage causé par la chaleur ni aucun dépôt de suie n'ont été relevés dans la zone des sièges passagers, ce qui atteste que l'incendie était concentré au-dessus du plafond de la cabine.
- Il n'a pas été possible de déterminer si chaque siège passager était occupé. Les masques à oxygène des passagers étaient rangés au moment de l'impact, ce qui est conforme à la pratique normale en cas d'incendie en vol.
- Aucun lien technique plausible n'a été fait entre du brouillage électromagnétique/des champs rayonnés à haute intensité connus et une décharge électrique menant à l'inflammation des matières combustibles de l'avion.
- La réglementation n'exigeait pas l'enregistrement d'images dans le poste de pilotage même s'il est techniquement faisable de protéger l'enregistrement en cas d'accident. La confirmation de renseignements comme les indications des instruments de vol, la position des dispositifs de commutation et la détérioration des systèmes de bord n'a pu être complète sans ce type d'information.
- Des parties de l'enregistrement du CVR captées par le microphone d'ambiance du poste de pilotage ont été difficiles à déchiffrer. Lorsque les pilotes utilisent leur micro-rail, le déchiffrage des communications internes du CVR dans le poste de pilotage en est considérablement facilité; toutefois, l'utilisation des micros-rails n'est pas exigée par la réglementation pour toutes les phases du vol. De plus, il n'est pas courant pour les pilotes de porter un micro-rail à l'altitude de croisière.
- Des traces de surchauffe localisée ont été retrouvées sur le matériau du plafond de la cabine, autour des plafonniers d'allées et des lampes d'urgence. On a déterminé que ces appareils d'éclairage installés dans l'avion n'étaient pas à l'origine de l'incendie; toutefois, leur conception donnait lieu à une certaine détérioration des matériaux par la chaleur qui était pour la plus grande partie limitée à l'intérieur des appareils, près des ampoules.
- Au moment de l'accident, rien n'exigeait au sein de l'industrie de l'aviation que les anomalies relatives au câblage soient consignées et signalées de façon distincte pour faciliter l'exécution d'analyses de tendances valables permettant de cerner les conditions dangereuses liées aux anomalies du câblage.
4.0 Mesures de sécurité
Compte tenu des manquements à la sécurité relevés dans le cadre du présent accident, le Bureau a publié une série de communications relatives à la sécurité. Les initiatives entreprises par des tiers pour améliorer la sécurité ont aussi été relevées. La présente partie renferme les renseignements suivants :
- les mesures de sécurité prises — initiatives entreprises par les autorités réglementaires en aviation et par des tiers;
- les mesures de sécurité à prendre — recommandations que le Bureau juge nécessaires pour traiter les manquements à la sécurité systémiques présentant les risques les plus élevés;
- les préoccupations liées à la sécurité — questions pour lesquelles le Bureau a jugé que des recommandations n'étaient pas justifiées pour le moment, mais qui constituent un rappel à l'industrie et aux autorités réglementaires.
Les mesures portant sur les manquements systémiques à la sécurité sont communiquées aux organismes de réglementation gouvernementaux en aviation, à l'industrie de l'aviation et au public sous la forme de recommandations en matière de sécurité aérienne. Les manquements à la sécurité jugés comme présentant moins de risques sont communiqués sous la forme d'un avis de sécurité aérienne ou d'une lettre de sécurité aérienne. De plus, des communications officieuses avec diverses parties intéressées ainsi que des présentations publiques complètent les communications officielles du Bureau de la sécurité des transports (BST) du Canada en matière de sécurité.
4.1 Mesures prises
La présente section est organisée chronologiquement selon les communications relatives à la sécurité du BST. Chaque communication de sécurité est suivie par la mesure de sécurité connexe, prise par divers intervenants, Transports Canada, le National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis, la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis, Boeing, Swissair, SR Technics, et ainsi de suite.
4.1.1 Câblage du MD-11
4.1.1.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada
Le câblage de l'avion a suscité un intérêt immédiat et continu de la part de l'équipe d'enquêteurs. L'équipe a inspecté plusieurs avions MD-11 afin de cerner les zones potentielles d'amorçage d'arc ou les sources de production de chaleur. Ces inspections ont permis de découvrir des anomalies dans le câblage, lesquelles comprenaient des fils usés par frottement, coupés et fissurés. Des manques d'uniformité dans l'acheminement des fils et des faisceaux de fils ont aussi été découverts, ce qui a soulevé des préoccupations sur l'intégrité générale du câblage des MD-11. Même si l'équipe d'enquêteurs n'a pas été en mesure d'établir une relation directe entre les anomalies découvertes sur les câbles en service et les fils retrouvés dans l'épave du vol 111 de Swissair (SR 111), elle était néanmoins d'avis que les données justifiaient un examen plus poussé pour mieux définir le risque menaçant la flotte de MD-11. Par conséquent, le 22 décembre 1998, le BST a envoyé un avis de sécurité aérienne (980031-1) au NTSB relativement aux questions portant sur le câblage du MD-11.
4.1.1.2 National Transportation Safety Board des États-Unis
Peu après avoir reçu l'avis de sécurité aérienne 980031-1 du BST, le 11 janvier 1999, le NTSB a recommandé que la FAA exige une inspection de tous les avions MD-11 à la recherche d'anomalies dans le câblage (recommandation A-99-3 du NTSB accessible à www.ntsb.gov). Le NTSB a recommandé que l'inspection porte sur le tableau de distribution supérieur dans le poste de pilotage et sur le tableau de distribution avionique. L'inspection devait aussi permettre de vérifier si des connexions de fils étaient desserrées, si l'acheminement des fils était uniforme, si des fils de mise à la masse étaient brisés, s'il y avait de petits rayons de courbure pour les fils et si l'isolant des fils était usé par frottement ou fissuré.
4.1.1.3 Federal Aviation Administration des États-Unis
Au début de 1999, la FAA a répondu à la recommandation du NTSB en publiant une consigne de navigabilité sur les MD-11, exigeant que soient tenues des inspections visant à déterminer si des anomalies dans le câblage pouvaient causer un amorçage d'arc électrique. Ces amorçages d'arc pourraient causer un incendie ou de la fumée, ou les deux, dans le poste de pilotage ou la cabine. Compte tenu des résultats de ces inspections, la FAA a lancé un plan de mesures correctives en deux étapes visant le câblage du MD-11. La première étape comportait trois consignes de navigabilité traitant des sujets de préoccupation mis en relief dans l'avis de sécurité aérienne du BST. Par la suite, la FAA, travaillant étroitement avec Boeing, a lancé la deuxième étape, laquelle comprenait cinq lots de mesures correctives, chacun comprenant une série de consignes de navigabilité. Chaque consigne était fondée sur un bulletin de service sur les MD-11 produit par Boeing. Au 10 mai 2002, le plan des mesures correctives du câblage du MD-11 avait donné lieu à 41 consignes de navigabilité connexes et à des bulletins de service additionnels faisant l'objet d'un examen en vue d'un avis de projet de réglementation (NPRM).
Dans une initiative parallèle, la FAA a tiré profit des leçons apprises de l'enquête sur l'accident du vol SR 111 pour façonner son programme de formation interactive intitulé « Aircraft Wiring Practices » destiné aux ingénieurs de certification de la FAA, aux représentants techniques désignés et aux inspecteurs en matière de sécurité aérienne. De plus, la FAA a produit une aide didactique sur Internet intitulée « Aircraft Wiring Practices (Job Aid) » (accessible sur le site www.academy.jccbi.gov/AIRDL/wiringcourse).
En août 2001, la FAA a lancé le Programme amélioré de navigabilité aérienne pour les systèmes de bord (EAPAS), conçu pour traiter des réalités d'une flotte d'avions de transport vieillissante. Présentement, l'EAPAS porte surtout sur les câblages vieillissants. Les objectifs à court terme sont ceux qui sensibilisent au câblage vieillissant et qui mettent en œuvre des changements élémentaires aux programmes de maintenance et de formation. Les objectifs à long terme vont porter sur l'institutionnalisation de la gestion des câblages vieillissants.
Au cours de la présente enquête, la FAA a demandé que l'Air Transport Association (ATA) présente un nouveau sous-chapitre codé (97) pour les comptes rendus afin de faciliter un suivi plus précis des problèmes et anomalies propres au câblage.
4.1.1.4 La société Boeing
En plus d'appuyer intégralement le plan de mesures correctives du câblage du MD-11 de la FAA, Boeing a réagi à la nécessité d'obtenir une formation technique additionnelle relativement au câblage en mettant sur pied un cours d'inspection du câblage pour les organismes gouvernementaux et les lignes aériennes. De plus, ces initiatives se sont traduites par des améliorations du Standard Wiring Practices Manual (manuel des pratiques normalisées relatives au câblage) de Boeing.
4.1.1.5 Swissair
La nécessité d'améliorer la formation technique en ce qui a trait au câblage a aussi été reconnue chez Swissair. Par la suite, SR Technics a révisé son programme de formation des techniciens pour inclure des sujets comme la propreté, la manipulation, la protection et la mise à la masse des fils. Elle a aussi élaboré une série d'instructions techniques visant à respecter toutes les consignes de navigabilité pertinentes figurant dans le plan des mesures correctives du câblage du MD-11 de la FAA et a prescrit plusieurs inspections spéciales relativement au câblage.
4.1.1.6 Office fédéral de l'aviation civile suisse
Comme c'est la norme à l'Office fédéral de l'aviation civile (OFAC) suisse, toutes les consignes de navigabilité publiées par la FAA relativement au câblage du MD-11 ont été revues et publiées de nouveau sous la forme de consignes de navigabilité suisses.
4.1.2 Capacité d'enregistrement et alimentation électrique des enregistreurs de bord
4.1.2.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada
Des lacunes sur le plan de la capacité d'enregistrement des enregistreurs de la parole dans le poste de pilotage (CVR) et de l'alimentation électrique de l'enregistreur de données de vol (FDR) ont été relevées au cours de l'enquête sur cet accident et sur d'autres accidents d'aviation. Par conséquent, le 9 mars 1999, le BST a publié quatre recommandations en matière de sécurité aérienne (A99-01 à A99-04) à l'intention de Transports Canada et des Joint Aviation Authorities (JAA), portant sur la capacité d'enregistrement des CVR, l'alimentation électrique indépendante et l'utilisation de bus électriques distincts.
L'absence d'un enregistrement phonique et d'autres renseignements sonores peut nuire aux enquêtes de sécurité et retarder ou empêcher l'identification de manquements à la sécurité aérienne. Compte tenu de la nécessité d'obtenir de plus longues périodes d'enregistrements sonores pour déceler les événements déclencheurs des accidents d'aviation, et de la disponibilité de CVR ayant une capacité d'enregistrement de deux heures, le BST est d'avis que ces enregistreurs devraient être rendus obligatoires par les autorités réglementaires à travers le monde. Toutefois, il reconnaît également qu'une période de plusieurs années pourrait être raisonnablement nécessaire pour que les constructeurs et les exploitants mettent en œuvre cette modification. Par conséquent, pour les aéronefs nouvellement construits, le BST a recommandé que :
dès le 1er janvier 2003, tout CVR installé à bord d'un aéronef comme condition préalable à la délivrance d'un certificat de navigabilité d'origine soit tenu d'avoir une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures.
Recommandation A99-01 du BST (publiée le 9 mars 1999)
En outre, le Bureau croit que, moyennant un délai raisonnable, un programme de modification des avions déjà en service est tout à fait justifié. En conséquence, le BST a recommandé que :
dès le 1er janvier 2005, tous les aéronefs qui doivent être équipés d'un FDR et d'un CVR soient tenus d'être équipés d'un CVR d'une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures.
Recommandation A99-02 du BST
Lorsque l'alimentation électrique de l'avion allant aux enregistreurs de bord de l'avion SR 111 a été interrompue à 10 000 pi, le FDR et le CVR ont cessé de fonctionner. L'avion a continué à voler pendant environ six minutes sans que les données soient enregistrées. Cette absence d'enregistrement des données de bord a nui à l'enquête sur l'accident.
Grâce à des sources d'alimentation électrique indépendantes sans entretien, il est maintenant possible d'alimenter les nouveaux CVR à la fine pointe de la technologie ainsi que le microphone d'ambiance du poste de pilotage de façon indépendante par rapport à l'alimentation normale de l'avion pendant une période donnée advenant une interruption ou une perte des sources d'alimentation de bord allant au CVR. Par conséquent, pour améliorer l'enregistrement de l'information des CVR nécessaire aux fins de l'enquête sur un accident, le BST a recommandé que :
dès le 1er janvier 2005, tous les avions équipés de CVR d'une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures soient tenus d'avoir une source d'alimentation électrique indépendante, près du CVR ou à même l'enregistreur, pour alimenter le CVR et le microphone du poste de pilotage pendant 10 minutes, chaque fois que les sources d'alimentation électrique normale du CVR sont interrompues.
Recommandation A99-03 du BST(publiée le 9 mars 1999)
Au moment de l'accident, les FDR et CVR installés dans l'avion MD-11 étaient tous deux alimentés par le bus d'alternateur 3. La liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue (voir l'Annexe C h; Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue) nécessite l'utilisation du sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Ce sélecteur sert à couper l'alimentation à chacun des trois bus électriques à tour de rôle afin d'isoler la source de la fumée ou des émanations. La nature de cette procédure de dépannage exige que le sélecteur demeure dans chaque position pendant une période indéterminée, habituellement au moins quelques minutes. Lorsque le sélecteur SMOKE ELEC/AIR se trouve à la première position (3/1 OFF), le bus d'alternateur 3 est coupé, ce qui coupe simultanément le FDR et le CVR.
Le CVR et le FDR étant alimentés par le même bus d'alternateur, une défaillance de ce bus, ou l'invalidation intentionnelle du bus (p. ex., à la suite de mesures prises en cas d'urgence en fonction de la liste des vérifications), aura pour conséquence de couper l'alimentation électrique aux deux enregistreurs simultanément. Afin d'améliorer l'enregistrement de renseignements nécessaires à l'identification de manquements à la sécurité, le BST a recommandé que :
les enregistreurs de bord des avions tenus d'être équipés de deux enregistreurs de bord soient tenus d'être alimentés par des bus distincts.
Recommandation A99-04 du BST (publiée le 9 mars 1999)
4.1.2.2 National Transportation Safety Board des États-Unis
En même temps, le NTSB a publié les recommandations A-99-16 à A-99-18 à l'intention de la FAA, lesquelles renferment les mêmes éléments que les recommandations du BST. Le NTSB a aussi recommandé que les avions soient équipés de deux systèmes d'enregistrement combinés CVR/enregistreur numérique de données de vol (DFDR). Comme l'indique la rubrique 4.1.2.3, la FAA n'a pas encore pris de mesures sur des avis de projet de réglementation (NPRM) en réponse aux recommandations du NTSB. Au 25 juillet 2001, le NTSB considérait comme inacceptables les progrès réalisés en deux ans depuis que les recommandations avaient été publiées. Le NTSB continue de presser la FAA de donner suite de façon expéditive à ces recommandations, mais demeure sceptique quant au respect des dates établies pour parvenir à des mesures finales.
4.1.2.3 Federal Aviation Administration des États-Unis
La FAA a accepté l'esprit des recommandations du NTSB et a indiqué qu'elle lancerait un NPRM vers la fin de l'été 1999. En août 1999, la FAA a indiqué au NTSB qu'en raison de priorités plus urgentes, le NPRM serait retardé jusqu'à mars 2000. Répondant à une demande de mise à jour de la part du NTSB datée de juin 2000, la FAA a annoncé en avril 2001 que l'établissement de règles fondées sur les recommandations relatives au CVR et au FDR serait encore une fois retardé jusqu'à la fin de 2001. Au moment d'écrire ces lignes, la FAA indiquait que le NPRM serait déposé au printemps de 2003.
4.1.2.4 Transports Canada
Transports Canada a répondu aux recommandations du BST en ce qui a trait aux enregistreurs de bord et à l'alimentation électrique en indiquant que le ministère avait l'intention d'harmoniser sa position avec les JAA et de traiter des NPRM de la FAA lors d'une réunion appropriée du Conseil consultatif sur la réglementation aérienne canadienne. Par conséquent, le calendrier de mise en œuvre de Transports Canada dépend du calendrier de la FAA.
4.1.2.5 La société Boeing
Boeing a publié le 19 décembre 2001 le bulletin de service MD11-31-101 qui permet l'alimentation électrique des enregistreurs du MD-11 par des bus distincts. Une fois le bulletin de service incorporé, le CVR sera alimenté par le bus d'urgence de droite, et le bloc d'acquisition numérique des données de vol/DFDR, par le bus d'alternateur du moteur 1.
4.1.3 Matériaux d'isolation thermique et acoustique
4.1.3.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada
En août 1999, l'enquête sur l'accident du vol SR 111 avait révélé des dommages causés par un incendie dans le plafond, devant et à quelques mètres derrière la paroi du poste de pilotage. Il y avait des signes évidents qu'une source importante des matériaux combustibles qui avaient alimenté l'incendie était les matériaux des matelas d'isolation thermique et acoustique (matelas isolants). Des restes carbonisés de ce matériau, attribuables à l'incendie en vol, ont été retrouvés dans l'épave; l'incendie a été éteint lors de l'impact avec le plan d'eau.
Des lacunes relatives à la résistance au feu en service de certains matériaux d'isolation thermique et acoustique ainsi qu'aux critères d'essai utilisés pour certifier ces matériaux ont été relevées dans le cadre de la présente enquête et d'enquêtes sur d'autres accidents d'aviation récents. Par la suite, le BST a publié des recommandations (A99-07 et A99-08) portant sur les risques associés à l'inflammabilité des matelas isolants recouverts de poly(éthylène téréphtalate) (PET) métallisé et sur les critères d'essai à l'origine de la certification de ce matériau pour utilisation à bord des aéronefs.
Les antécédents en service, l'inflammabilité démontrée du matériau de recouvrement au PET métallisé et la découverte, dans l'épave, de restes de matelas isolants dont le matériau de recouvrement avait brûlé portent à croire que le matériau de recouvrement en PET métallisé a été une source importante de matériaux combustibles qui ont propagé l'incendie. Le BST considère que l'exploitation d'aéronefs équipés de matelas isolants munis d'un matériau de recouvrement en PET métallisé fait courir inutilement des risques. Par conséquent, le BST a recommandé que :
les autorités de réglementation s'assurent, de toute urgence, que des mesures suffisantes sont prises en vue de réduire ou d'éliminer le risque associé à l'utilisation, dans les aéronefs, de matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé.
Recommandation A99-07 du BST (publiée le 11 août 1999)
Un examen des incidents mettant en cause des matériaux de recouvrement autres que ceux ayant trait au film polyester à PET métallisé (p. ex., poly(éthylène téréphtalate) non métallisé) a révélé que les limites des critères d'essai de la Federal Aviation Administration (FAR) 25.853, annexe F, pourraient ne pas être restreintes à leur incapacité à identifier de façon précise et fiable les caractéristiques d'inflammabilité du matériau de recouvrement de type PET métallisé.
Le 14 octobre 1998, la FAA a affirmé que les critères d'essai utilisés pour certifier les caractéristiques d'inflammabilité des matériaux d'isolation thermique et acoustique étaient inadéquats, et elle s'est engagée elle-même à mener les recherches nécessaires en vue d'établir une norme d'essai plus complète. Au même moment, la FAA indiquait que du fait que les matériaux renfermant un film polyimide s'étaient bien comportés dans les essais d'inflammabilité préliminaires, ces matériaux seraient considérés conformes en vertu de la nouvelle réglementation. Tant que des critères d'essai d'inflammabilité adéquats ne sont pas disponibles, il n'est pas possible de déterminer si le film polyimide, ou d'autres matériaux, fournissent une protection suffisante contre la propagation d'un incendie. Les matériaux d'isolation thermique et acoustique sont installés dans un aéronef comme un tout, et comprennent des composants connexes comme du ruban adhésif, des attaches et des reniflards. Le BST était d'avis que les matériaux d'isolation thermique et acoustique utilisés dans les aéronefs devaient être évalués en fonction de critères d'essai d'inflammabilité plus pertinents, non à titre de composants individuels, mais plutôt comme partie intégrante d'un tout. Par conséquent, le BST a recommandé que :
les autorités de la réglementation valident, de toute urgence, les matériaux d'isolation thermique et acoustique utilisés à l'heure actuelle ou devant être utilisés dans les aéronefs, en fonction de critères d'essai d'inflammabilité plus rigoureux que ceux de l'annexe F de la FAR 25.853 et d'autres règlements semblables et plus représentatifs des performances en service actuelles du système.
Recommandation A99-08 du BST (publiée le 11 août 1999)
4.1.3.2 Federal Aviation Administration des États-Unis
La FAA a répondu à la recommandation A99-07 du BST en publiant deux NPRM (99-NM-161-AD et 99-NM-162-AD). Ces NPRM proposaient l'enlèvement des matelas d'isolation recouverts de PET métallisé de tous les aéronefs immatriculés aux États-Unis. La règle finale relative à ces propositions est venue en mai 2000 lorsque la FAA a publié deux consignes de navigabilité (AD 2000-11-01 et AD 2000-11-02, accessibles sur le site http://www.faa.gov), qui exigeaient l'enlèvement de tous les matelas isolants recouverts de PET métallisé. Ces consignes se fondaient sur des bulletins de service existants de McDonnell Douglas, lesquels demandaient le remplacement des matelas d'isolation recouverts de PET métallisé.
En réponse à la recommandation A99-08 du BST, la FAA a accéléré un projet visant à élaborer un essai d'inflammabilité amélioré aux fins de certification pour tous les matériaux d'isolation thermique et acoustique. Un NPRM (Dossier FAA-2000-7909; avis 00-09) avait été publié en septembre 2000, et la règle finale est en attente le temps qu'elle soit revue et rédigée à nouveau en langage clair. Dans l'intervalle, la FAA a publié le bulletin d'information 00-09 sur les normes de vol relatives à la navigabilité pour s'assurer que les exploitants couverts par les parties 121 et 125 du titre 14 du Code of Federal Regulations (CFR) ont établi des procédures pour l'inspection des matériaux d'isolation thermique et acoustique afin d'y repérer toute contamination lors des vérifications pendant la révision majeure.
4.1.3.3 Transports Canada
Bien qu'il n'y ait à l'heure actuelle aucun aéronef dans le registre d'immatriculation canadien qui soit construit avec des matelas isolants recouverts de PET métallisé, Transports Canada a mené une enquête pour confirmer qu'aucun aéronef immatriculé au Canada n'avait utilisé de matelas isolants recouverts de PET métallisé lors d'un programme de remplacement global. De plus, Transports Canada a travaillé avec Bombardier Inc., pour retirer les rubans adhésifs en PET métallisé de la spécification sur le Regional Jet série 700.
4.1.3.4 Swissair
Avant de publier les consignes de navigabilité de la FAA relatives aux matériaux d'isolation recouverts de PET métallisé, Swissair a travaillé avec Boeing pour repérer les zones de grands risques sur l'avion MD-11, et en mars 2001, elle avait remplacé volontairement des matelas isolants recouverts de PET métallisé sélectionnés. Dès la réception de l'AD 2000-11-02 de la FAA, Swissair a lancé un programme de remplacement complet des matelas isolants recouverts de PET métallisé sur sa flotte de MD-11. En date de janvier 2003, la consigne de navigabilité avait été exécutée sur 11 avions MD-11 appartenant auparavant à Swissair.
4.1.3.5 Office fédéral de l'aviation civile suisse
L'OFAC suisse a revu et publié de nouveau l'AD 2000-11-02 comme une consigne de navigabilité suisse portant le numéro 2000-414.
4.1.4 Lampes de lecture (liseuses de carte) des membres de l'équipage de conduite du MD-11
4.1.4.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada
Au cours d'une inspection du câblage d'un MD-11 effectuée comme partie intégrante d'un programme de remplacement des matelas isolants, on a remarqué qu'un matelas isolant était en contact avec la partie supérieure de la liseuse de carte encastrée, installée sur le côté droit du plafond du poste de pilotage. Le matériau d'isolation recouvert de PET métallisé portait des empreintes et avait subi des dommages mécaniques causés par l'arrière de la liseuse de carte, laquelle comprend une lampe halogène. Aussi, un des isolants de borne annulaire fixé à un conducteur qui était relié à la liseuse de carte présentait des dommages causés par la chaleur. L'examen de la liseuse de carte de gauche a permis de découvrir des dommages similaires mais de moins grande importance. Aucun dommage n'a été signalé pour les liseuses de carte du poste de l'observateur.
Cette découverte a donné lieu à l'inspection de 12 avions MD-11 additionnels, qui a révélé diverses anomalies, y compris des capuchons de protection fissurés, des réparations non conformes au manuel d'entretien du composant, une déformation par la chaleur, des signes d'amorçage d'arc et un ternissement attribuable à la chaleur.
À la lumière des risques d'inflammabilité identifiés qui étaient associés aux matelas d'isolation recouverts de PET métallisé, le BST a envoyé un avis de sécurité aérienne (A000008-1) au NTSB pour qu'il puisse examiner ces constatations préliminaires et les envoyer à la FAA.
Par la suite, l'enquête sur l'accident du vol SR 111 a révélé des modes de défaillance additionnels associés à l'installation de la liseuse de carte. Le 29 décembre 2000, le BST a publié une lettre de sécurité aérienne (A000061-1) mettant les parties au courant de ces développements.
4.1.4.2 National Transportation Safety Board des États-Unis
Le NTSB était d'accord qu'il fallait faire plus pour déterminer l'ampleur du problème et il a envoyé une lettre à la FAA l'encourageant à prendre toutes les mesures nécessaires pour régler les problèmes mentionnés dans l'avis de sécurité aérienne A00008-1 du BST.
4.1.4.3 Federal Aviation Administration des États-Unis
Compte tenu du bulletin de service alerte de Boeing (MD-11 33A069), la FAA a publié l'AD 2000-07-02, laquelle rendait obligatoire l'inspection périodique des lampes visées dans le poste de pilotage du MD-11. En janvier 2001, cette consigne de navigabilité avait été remplacée par l'AD 2000-26-15, qui exigeait des exploitants des avions visés, équipés des liseuses de carte comme partie intégrante des installations de couchettes de l'avion, d'inclure celles-ci comme faisant partie de l'inspection périodique originale. Le 15 mai 2001, la FAA a approuvé le bulletin de service 2LA005916-33-003 de Hella Aerospace comme un autre moyen de conformité. L'exécution de ce bulletin de service ne met pas fin à la consigne de navigabilité, elle change plutôt le cycle d'inspection le faisant passer de toutes les 700 heures à une fois par année. La consigne demeure en vigueur jusqu'à ce que la condition dangereuse liée à la liseuse de carte ait été éliminée.
4.1.4.4 Hella Aerospace
Hella Aerospace travaille actuellement avec Boeing à élaborer diverses améliorations de conception afin de régler les modes de défaillance de la liseuse de carte révélés au cours de l'enquête sur l'accident du vol SR 111. Les modifications de conception proposées comprennent des capuchons de protection de contact ressort renforcés pour réduire au minimum les risques de fissuration et de bris, l'utilisation d'éléments protecteurs sur le châssis pour éviter le contact métal sur métal, la relocalisation du porte-ampoules de rechange pour éviter tout contact avec l'interrupteur ON/OFF et une nouvelle forme pour les supports afin de réduire les risques de contact avec les cosses de borne. Comme mesure provisoire, Hella Aerospace a publié le bulletin de service SB 2LA005916-33-003, daté du 12 décembre 2000, lequel comprend un certain nombre de ces modifications. Hella Aerospace a fait savoir qu'une revue de conception couronnée de succès et effectuée en collaboration avec Boeing Engineering a eu lieu en août 2002. La documentation relative à la nouvelle conception des lampes de lecture de l'équipage de conduite a été envoyée à Boeing, et la production de la nouvelle série de liseuses de carte, fondée sur ces améliorations apportées au produit, a commencé en novembre 2002.
4.1.4.5 Office fédéral de l'aviation civile suisse
L'OFAC suisse a revu et publié l'AD 2000-07-02 comme la consigne de navigabilité suisse 2000-246 et l'AD 2000-26-15 comme la consigne de navigabilité suisse 2001-109.
4.1.4.6 Swissair
En juin 2001, SR Technics a publié l'instruction technique 217609.01 pour incorporer le bulletin de service 2LA005916-33-003 de Hella. Cette instruction modifie la lampe de lecture de l'équipage de conduite (liseuse de carte) pour améliorer sa protection contre les courts-circuits. Cette mesure peut être exécutée de diverses façons, notamment par le remplacement de la lampe halogène de 11,5 watts (W) par une ampoule à incandescence de 7,0 W. SR Technics a fait savoir que l'instruction technique avait été entièrement mise en œuvre à compter de mars 2002.
4.1.5 Lutte contre les incendies en vol
4.1.5.1 Bureau de la sécurité des transports du Canada
L'enquête sur l'accident du vol SR 111 a permis de cerner des manquements à la sécurité associés aux mesures de lutte contre les incendies en vol. Par la suite, le BST a publié cinq recommandations relatives à la sécurité aérienne (A00-16 à A00-20) qui cernaient les manquements à la sécurité liés à la lutte contre les incendies en vol. Les manquements à la sécurité qui avaient été identifiés augmentent le temps qui est nécessaire à l'évaluation et à la maîtrise de ce qui pourrait s'avérer une situation se dégradant rapidement et soulignent que les efforts des gouvernements et de l'industrie à reconnaître la nécessité de traiter un incendie en vol d'une façon systématique et efficace demeurent insuffisants.
Le BST est d'avis que le risque pour le public voyageur peut être réduit grâce à un réexamen de la désignation des zones désignées zones de feu afin de cerner les autres zones dans les avions qui devraient être équipées de moyens de détection et de suppression de fumée et d'incendie améliorés. Par conséquent, le BST a recommandé que :
les organismes de réglementation pertinents, de concert avec la communauté aéronautique, examinent la méthodologie régissant la détermination des zones désignées comme des zones de feu à l'intérieur des parties pressurisées des avions en vue de fournir de meilleurs moyens de détection et d'extinction des incendies.
Recommandation A00-17 du BST (publiée le 4 décembre 2000)
En plus de mettre en œuvre les autres éléments d'un plan de lutte contre les incendies complet, il est essentiel que les équipages de conduite se penchent, sans délai, sur la préparation de l'avion en vue d'un atterrissage possible à l'aéroport convenable le plus proche. Par conséquent, le BST a recommandé que :
les organismes de réglementation pertinents prennent des mesures pour assurer que les normes de l'industrie indiquent bien que lorsque des odeurs ou de la fumée de source inconnue sont décelées dans un avion, le plan d'action le plus approprié consiste à se préparer à atterrir le plus rapidement possible.
Recommandation A00-18 du BST (publiée le 4 décembre 2000)
Les données sur les accidents d'aviation révèlent qu'un incendie qui se propage de lui-même peut gagner en intensité en peu de temps. Par conséquent, les listes de vérifications relatives aux odeurs et à la fumée doivent être conçues de sorte que les procédures d'évaluation appropriées puissent être exécutées rapidement et de façon efficace. Le BST s'inquiète de ce que ce ne soit pas le cas à l'heure actuelle et il a recommandé que :
les organismes de réglementation pertinents s'assurent que les procédures des listes de vérifications d'urgence relatives à la présence d'odeur ou de fumée d'origine inconnue soient conçues pour être exécutées dans un délai permettant de minimiser les risques qu'un incendie se déclare en vol et se propage.
Recommandation A00-19 du BST (publiée le 4 décembre 2000)
Un incendie en vol qui n'est pas maîtrisé est une situation d'urgence complexe et grave. L'incendie peut provenir de diverses sources et peut se propager rapidement. Chaque seconde compte. Les équipages doivent bien connaître l'avion et ses systèmes, et ils doivent être entraînés à combattre n'importe quel type d'incendie rapidement et efficacement dans toutes les parties de l'avion, y compris celles qui ne sont pas faciles d'accès. Le Bureau croit que le manque de procédures détaillées de lutte contre les incendies en vol et le manque de coordination dans l'entraînement des équipages pouvant leur permettre d'utiliser ces procédures constituent un manquement à la sécurité. En conséquence, le BST a recommandé que :
les organismes de réglementation pertinents examinent les normes de lutte contre les incendies en vol, notamment les procédures, l'entraînement, l'équipement et l'accessibilité aux endroits comme les espaces inoccupés, pour assurer que les équipages sont en mesure d'intervenir rapidement et d'une manière efficace et coordonnée, et de lutter contre tout incendie en vol.
Recommandation A00-20 du BST (publiée le 4 décembre 2000)
Les « systèmes » de lutte contre les incendies en vol devraient comprendre toutes les procédures et tout l'équipement nécessaires à la prévention, à la détection, à la maîtrise et à l'extinction des incendies d'aéronef. Cette approche systémique comprendrait les normes sur l'inflammabilité des matériaux, l'accessibilité, le matériel de détection et d'extinction de la fumée et des incendies, les procédures d'urgence et l'entraînement. Tous ces éléments devront être examinés ensemble, et il faudra réévaluer les relations entre chaque mesure individuelle de lutte contre les incendies en ayant à l'esprit l'élaboration de moyens détaillés et efficaces pour lutter contre les incendies. Le BST est d'avis que l'on pourra lutter plus efficacement contre les incendies en vol lorsqu'on disposera de systèmes de lutte contre les incendies comprenant des éléments complémentaires. En conséquence, le BST a recommandé que :
les organismes de réglementation pertinents, de concert avec la communauté aéronautique, examinent la question de la lutte contre les incendies en vol dans son ensemble pour assurer que les équipages d'aéronef disposent d'un système dont les éléments sont complémentaires et optimisés en vue d'offrir le plus de chances possible de détecter et d'éteindre tout incendie en vol.
Recommandation A00-16 du BST (publiée le 4 décembre 2000)
4.1.5.2 Federal Aviation Administration des États-Unis / Transports Canada
La FAA et Transports Canada sont d'accord avec la position du BST en ce qui a trait à la lutte contre les incendies en vol, et ils ont indiqué qu'un examen des programmes existants est en cours. À la fin de cet examen, les deux organismes de réglementation, de concert avec les JAA, adopteront une approche harmonisée pour améliorer le système de lutte contre les incendies en vol. En date du mois de mars 2002, l'examen de programme contenait les activités suivantes :
- élaboration d'essais de tenue au feu pour les matériaux se trouvant dans les endroits inaccessibles;
- détermination des moyens les plus efficaces pour accéder aux zones dissimulées à des fins de lutte contre les incendies;
- détermination de la faisabilité de l'installation de systèmes de détection et d'extinction incendie dans les endroits inaccessibles;
- exploration de la faisabilité de l'installation de systèmes d'extinction par vaporisation d'eau ou d'azote;
- mise au point de systèmes de détection de fumée et d'incendie améliorés;
- mise au point de matériaux ultra résistants au feu pour l'aménagement intérieur;
- amélioration des outils permettant d'évaluer précisément le risque que présente le câblage d'un aéronef;
- mise au point d'une nouvelle technologie relative aux disjoncteurs pour éviter les effets dangereux des amorçages d'arc et des cheminements d'arc;
- élaboration de critères de certification pour des nouveaux capteurs de détection d'incendie.
4.1.5.3 La société Boeing
Boeing a publié à l'intention de tous les exploitants de MD-11 un bulletin d'opérations aériennes (MD-11-99-04) qui traitait des divers moyens de faire face à la fumée dans le poste de pilotage. Boeing a aussi créé un comité sur la fumée et les incendies pour étudier l'impact opérationnel de la fumée et d'un incendie sur chaque avion construit par Boeing.
4.1.5.4 Swissair
4.1.5.4.1 Listes de vérifications du MD-11
Swissair a publié le bulletin du manuel d'exploitation (AOM) 90/99 avisant ses équipages de conduite de MD-11 d'une révision de la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue (voir l'Annexe C – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue). Swissair a décidé de modifier la liste des vérifications pour s'assurer que l'interrupteur EMER LT est sélectionné avant que ne soit sélectionné le commutateur CABIN BUS. Cette modification tirait sa source d'un incident survenu lors d'un vol de Singapour à Zurich au cours duquel l'équipage de cabine a dû faire face à « une obsécuritéé complète dans la cabine » après que le commutateur CABIN BUS eut été utilisé. De par sa conception, l'éclairage d'urgence dans la cabine ne s'allume pas lorsque le commutateur CABIN BUS est réglé sur la position OFF, même si l'éclairage d'urgence est armé.
Pour permettre à ses équipages de gagner du temps lorsqu'ils suivent cette liste de vérifications, Swissair a aussi indiqué à ses équipages de conduite de MD-11 de passer directement à l'élément de la liste de vérifications relatif au sélecteur SMOKE ELEC/AIR, ce qui élimine par le fait même la nécessité d'évaluer les résultats d'une coupure de l'alimentation du bus cabine et la nécessité de rétablir l'alimentation de ce bus.
En mars 1999, après d'intenses pourparlers avec le constructeur de l'avion au sujet de la nouvelle révision, Swissair a effectué un vol d'essai à bord de l'avion immatriculé HB-IWR pour valider la nouvelle procédure de la liste de vérifications.
Swissair a publié le bulletin AOM 94/99 pour aviser ses équipages de conduite de MD-11 des renseignements supplémentaires relatifs à la présence de fumée ou d'un incendie en vol. Le bulletin reproduit le bulletin des opérations aériennes de Boeing MD-11-99-04, « Supplemental Information to MD-11 Flight Crews on Inflight Smoke/Fire Procedures » (Renseignements supplémentaires à l'intention des équipages de conduite de MD-11 relativement aux procédures en cas de fumée ou d'incendie en vol).
En 1993, le constructeur du MD-11 avait décidé d'éliminer la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air (voir l'Annexe B – Liste de vérifications de Swissair en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air) parce que tous les éléments de cette liste de vérifications figuraient dans la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue. Toutefois, à cette époque, Swissair avait décidé de conserver la liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air parce que cette liste constituait un moyen plus rapide d'isoler une source donnée de fumée ou d'émanations lorsqu'on savait qu'elle provenait du système de conditionnement d'air. Swissair considérait l'utilisation de cette liste de vérifications en cas de fumée dans le système de conditionnement d'air comme étant moins perturbante pour les systèmes de bord, comme les affichages de vol, les systèmes de communications et de navigation, que le recours à la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue, laquelle exige que les bus d'alternateur soient mis hors tension à tour de rôle.
Dans le bulletin AOM 94/99, Swissair informait aussi ses équipages de conduite de MD-11 d'une révision de ses procédures d'urgence ayant trait à la fumée et aux émanations. Swissair indiquait que « dans certaines circonstances, l'identification de la source de fumée pourrait être très difficile et que dans certains scénarios, dans lesquels le système de conditionnement d'air agit comme moyen de transport mais ne constitue pas la source de la fumée elle-même, cette situation pourrait mener à une interprétation erronée de l'origine de la fumée. » Pour être sur la même longueur d'ondes que le constructeur, ainsi que pour clarifier et accélérer le processus d'identification de la source de fumée, Swissair a décidé d'utiliser la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue dans toute situation où de la fumée ou des émanations sont présentes. Swissair a averti ses équipages de conduite que la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue « va mener à l'arrêt de systèmes de bord essentiels »Note de bas de page 119. De plus, Swissair a modifié la liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue pour indiquer aux équipages de conduite mdash; au début de la liste de vérifications plutôt qu'à la fin mdash; d'envisager un atterrissage ou un amerrissage d'urgence et le largage de carburant.
Swissair a publié le bulletin AOM 111/00 pour aviser ses équipages de conduite de MD-11 d'une révision de sa liste de vérifications en cas de fumée ou d'émanations d'origine inconnue. Le point OXYGEN MASKS (masques à oxygène) a été ajouté comme premier élément de cette liste de vérifications. Cet ajout ne représentait pas une modification des pratiques en vigueur chez Swissair, puisque l'enfilement du masque d'oxygène avait toujours été le premier élément mémorisé lorsqu'on faisait face à des situations dans lesquelles se produisait de la fumée lors de l'entraînement en simulateur.