Language selection

Rapport d'enquête maritime M10M0014

Chavirement et naufrage
du petit bateau de peche Craig and Justin
au large de Margaree Harbour (Nouvelle Écosse)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 1er mai 2010 vers 6 h 15, heure avancée de l'Atlantique, le petit bateau de pêche Craig and Justin, avec à son bord 4 membres d'équipage, chavire et coule à environ 1 mille marin à l'ouest-nord-ouest de Margaree Harbour (Nouvelle-Écosse). Trois membres de l'équipage sont rapidement secourus par des bateaux de pêche qui se trouvent dans les parages. Un des membres de l'équipage périt noyé.

Renseignements de base

Fiche technique du navire

Nom du navire Craig and Justin
Numéro officiel 826789
Port d'immatriculation Sydney (Nouvelle-Écosse)
Pavillon Canada
Type petit bateau de pêche
Jauge brute 14,63
LongueurNote de bas de page 1 11,72 m
Construction 2003, Hardwick (Nouveau-Brunswick)
Propulsion Un moteur diesel (321 kW) couplé à un réducteur à inversion de marche entraînant une seule hélice à pas fixe
Équipage 4 personnes
Propriétaire enregistré Les Moineaux Fisheries Inc., Chéticamp (Nouvelle-Écosse)

Renseignements sur le bateau

Le Craig and Justin était un bateau de pêche de style Northumberland qui servait à pêcher le crabe et le homard. La timonerie et les emménagements étaient sur l'avant du bateau, et le compartiment moteur se trouvait au-dessous du pont de travail étanche à l'eau. La porte de la timonerie était à tribord. On accédait au compartiment moteur en passant par une écoutille du pont de travail.

Photo 1. Craig and Justin (avec l'autorisation de Briand Marine Surveys)
Photo 1 - Craig and Justin (avec l'autorisation de Briand Marine Surveys)

Sous le pont de travail, la coque en composite verre-résine était divisée par 2 cloisons transversales qui délimitaient, à partir de l'avant, les emménagements, un espace mort servant pour le rangement et le compartiment moteur (voir l'annexe A).

Deux réservoirs de carburant diesel étaient fixés aux côtés bâbord et tribord du compartiment moteur, à l'arrière. Il y avait un réservoir d'eau douce dans la partie avant du bateau. Deux pompes de cale submersibles à fonctionnement automatique se trouvaient dans le compartiment moteur. La cale pouvait aussi être asséchée par la pompe de service général, alimentée par le moteur et actionnable à distance. Le bateau était équipé d'un système d'alarme en cas d'envahissement des cales.

Le pont de travail était étanche à l'eau et était entouré d'un pavois massif formant un puits. Le pavois était percé de 2 sabords de décharge du côté bâbord, 3 du côté tribord et 2 autres dans le tableau arrière. Peu de temps après la livraison du bateau, en 2003, on a équipé tous les sabords de décharge de plaques coulissantes verticales qui pouvaient obstruer presque complètement l'ouverture du sabord et qui ne laissaient qu'un petit espace dans la partie inférieure des sabords. En 2008, les plaques coulissantes du sabord de décharge avant de chaque côté ont été remplacées par des plaques fixes ayant un motif en dents de scie dans la partie inférieure, qui réduisaient de moitié la surface de décharge des sabords (voir l'annexe B). L'ouverture du conduit d'échappement du moteur était alignée avec l'axe central du tableau arrière, sous les sabords de décharge. Le conduit d'échappement était conçu de sorte à prévenir l'envahissement du compartiment moteur lorsque son ouverture était submergée.

Photo 2. Pont de travail avec épontilles transversales (avec l'autorisation de Briand Marine Surveys)
Photo 2 - Pont de travail avec épontilles transversales (avec l'autorisation de Briand Marine Surveys)

Le pont de travail était muni de trois épontilles transversales qui délimitaient des aires de stockage (voir la photo 2). Des petits trous avaient été percés dans les épontilles transversales pour permettre l'écoulement de l'eau entre les aires de stockage. On avait fixé aux épontilles des couvercles amovibles qui se rendaient jusqu'au tableau arrière, et sur lesquels on pouvait arrimer les casiers et les engins de pêche.

De nombreux bateaux de pêche de style Northumberland sont des bateaux non pontés dont la flottabilité est déterminée en grande partie par le volume de la coque étanche à l'eau jusqu'à la hauteur des plats-bords. Le Craig and Justin avait toutefois été construit comme bateau ponté. À cet égard, l'incorporation d'un pont de travail étanche à l'eau et l'addition de sabords de décharge au niveau du pont en ont fait un bateau dont la flottabilité et la stabilité dépendaient en grande partie de la flottabilité créée par le volume de la coque étanche à l'eau qui se trouvait sous le pont, de la position des sabords de décharge et de leur capacité d'évacuer l'eau accumulée sur le pont. Le Craig and Justin disposait de l'équipement de navigation et de l'équipement électronique qu'on trouve habituellement à bord de la plupart des petits bateaux de pêche modernes, et notamment d'un radiotéléphone à très haute fréquence (VHF) avec fonction d'appel sélectif numérique Note de bas de page 2.

Déroulement du voyage

Le 30 avril 2010, l'équipage du Craig and Justin charge des casiers à homard sur le bateau en préparation pour l'ouverture de la saison de pêche au homard, qui a lieu le lendemain. Par le passé, le bateau a transporté au maximum 225 casiers, mais comme on prévoit des conditions météo et une mer favorables pour le lendemain, l'équipage charge 275 casiers Note de bas de page 3 à bord du bateau (voir l'annexe A). Le bateau gîte légèrement sur bâbord, a une assiette positive, et la moitié environ de l'ouverture de son conduit d'échappement dans le tableau arrière se trouve sous l'eau. Les plaques coulissantes des 5 sabords de décharge les plus près de l'arrière sont fermées.

Le 1er mai 2010 à 6 h Note de bas de page 4, le bateau, avec à son bord 1 capitaine Note de bas de page 5 et 3 membres d'équipage, part de Margaree Harbour (Nouvelle-Écosse) pour se rendre aux lieux de pêche au homard situés à environ 1 mille marin en direction ouest-nord-ouest. Aucun des membres de l'équipage ne porte un gilet de sauvetage ou une combinaison d'immersion. Vers 6 h 05, l'équipage met à l'eau la première série de 5 casiers, en commençant par les casiers placés le plus près de la poupe. Initialement, 2 membres de l'équipage se tiennent debout sur le plat-bord arrière et mettent les casiers à l'eau en attendant qu'un espace soit dégagé sur le pont. Après que l'équipage a mis à l'eau la première série de casiers, le bateau progresse lentement vers l'emplacement suivant. Quelques minutes plus tard, pendant que le bateau vire lentement sur bâbord en prévision de la mise à l'eau d'une nouvelle série de casiers, il s'incline subitement sur bâbord. Comme le bateau prend de plus en plus de gîte, le capitaine essaie d'émettre un message de détresse sur les ondes du radiotéléphone VHF, mais il ne peut que transmettre le mot « Mayday » à quelques reprises avant que le bateau chavire à 6 h15. Les membres de l'équipage se retrouvent à l'eau alors qu'ils ne portent que des vêtements légers; toutefois, 2 des membres de l'équipage parviennent à s'agripper à la coque. Le radeau de sauvetage est resté arrimé à son berceau, sur le toit de la timonerie.

Plusieurs bateaux de pêche qui se trouvent dans les parages ont capté le message de détresse du capitaine et peuvent apercevoir la coque renversée du Craig and Justin. Environ 7 minutes après le chavirement du Craig and Justin, les bateaux arrivent sur place et viennent secourir l'équipage. Trois survivants sont secourus. Le quatrième membre de l'équipage, qui s'est initialement agrippé à la coque, est retrouvé noyé. Les survivants sont traités pour hypothermie dans un hôpital de la région.

Par la suite, le bateau coule aux environs de la position suivante : 46°27′05″ N, 061°08′04″ W (voir l'annexe C).

Avaries subies par le bateau

Le bateau a été renfloué ultérieurement, mais il a été déclaré perte totale, en raison des avaries considérables qu'avait subies sa coque (voir la photo 3).

Photo 3. Le Craig and Justin après son renflouement
Photo 3 - Le Craig and Justin après son renflouement

Dommages à l'environnement

Le naufrage a causé un déversement de polluants, mais les polluants se sont rapidement dissipés du fait de l'évaporation et de l'action du vent et des vagues.

Certification du bateau

Comme le Craig and Justin était un petit bateau de pêche dont le tonnage brut n'excédait pas 15 tonneaux, la réglementation n'exigeait pas qu'il soit inspecté par Transports Canada (TC), et il n'avait donc pas été inspecté. De plus, comme il n'y avait pas d'obligation de présenter des données sur la stabilité du bateau aux fins d'approbation, aucune donnée n'a été soumise.

Brevets et certificats du personnel

Le capitaine du Craig and Justin était titulaire d'un brevet de capitaine de pêche de troisième classe depuis 1995, et d'un certificat de fonctions d'urgence en mer. Il avait 25 ans d'expérience dans le domaine de la pêche et il était le capitaine du Craig and Justin depuis 2003, soit l'année où il a fait l'acquisition du bateau qui venait d'être construit.

Deux des membres de l'équipage avaient de l'expérience dans le domaine de la pêche : l'un d'eux était un pêcheur à la retraite qui avait plus de 40 ans d'expérience, alors que l'autre comptait 8 ans d'expérience. Le troisième membre de l'équipage n'avait pas d'expérience dans le domaine de la pêche et n'était à bord que pour cette sortie seulement. Aucun des 3 membres de l'équipage n'avait une formation sur les fonctions d'urgence en mer, et la réglementation n'exigeait pas qu'ils suivent cette formation Note de bas de page 6.

Conditions météorologiques

Le jour de l'événement, une très légère brise soufflait du sud, la mer était calme, la température de l'air était de 2,9 °C et la visibilité était maximale. La température de l'eau était d'environ 1 °C ou 2 °C.

Équipement de sauvetage

L'équipement de sauvetage du Craig and Justin comprenait 4 gilets de sauvetage (rangés dans les emménagements), 1 radeau de sauvetage pour 4 personnes et 1 bouée de sauvetage. Le radeau de sauvetage était arrimé au toit de la timonerie par une saisine munie d'un croc à échappement. La bosse du radeau de sauvetage n'était pas attachée à un point fixe du bateau.

Après l'accident, le BST a fait un sondage portant sur 73 petits bateaux de pêche des régions de Chéticamp, de Margaree Harbour et d'Inverness, en Nouvelle-Écosse, pour connaître les arrangements d'arrimage des radeaux de sauvetage. Le sondage a révélé que, sur les 40 bateaux qui avaient un radeau de sauvetage à bord, il y en avait 23 dont le radeau n'était pas arrimé au moyen d'un dispositif permettant au radeau d'émerger librement. Les 17 autres radeaux de sauvetage étaient munis d'un dispositif de largage hydrostatique, mais il n'y en avait que 10 qui étaient arrimés correctement.

Photo 4.Casier à homard du Craig and Justin
Photo 4 - Casier à homard du Craig and Justin

Chargement du bateau

Quand le bateau a quitté le port, il transportait 275 casiers à homard empilés en 9 rangées de hauteur variable. Les 5 rangées du devant reposaient directement sur le pont, et les 4 dernières étaient déposées sur les couvercles des aires de stockage (voir l'annexe A).

Comme chaque casier à homard pesait environ 33 kg, le poids total des casiers était d'environ 9,08 tonnes. Les cordages des casiers avaient un poids approximatif de 0,36 tonne.

Les réservoirs de carburant étaient pleins, chacun contenant environ 0,56 tonne de carburant diesel. Le réservoir d'eau potable était vide.

Flottabilité et stabilité du bateau

Après l'événement, le BST a réalisé une inspection à l'état lège et un essai de stabilité sur un bateau similaire au Craig and Justin. En tenant compte de différences mineures entre les 2 bateaux, on a déterminé le déplacement lège et le centre de gravité du Craig and Justin. On a aussi préparé un modèle informatique de la coque du bateau à partir des mesures prises du côté bâbord de la coque, lequel était demeuré intact après l'événement, et on a fait des calculs pour évaluer la stabilité du Craig and Justin au moment de l'événement.

Les résultats des calculs concordaient avec l'état du Craig and Justin au moment du départ, alors qu'il était chargé. Compte tenu du franc-bord limité et du fait que les 5 sabords de décharge les plus près de l'arrière étaient à peu près bloqués, on a fait d'autres calculs pour connaître l'effet de l'accumulation d'eau dans le puits du pavois Note de bas de page 7. Les résultats de ces calculs sont résumés dans le tableau 1 ci-après :

Tableau 1. Résumé des résultats des calculs pour différentes conditions de chargement et d'envahissement
Condition Assiette à l'arrière
(en m)
Gîte sur bâbord
(en degrés)
Franc-bord par rapport au bas des sabords de décharge de bâbord (mm)Note de bas de page 8 Franc-bord minimum par rapport au sommet du pavois (en mm) Notes
Av Ar
Conditions de départ avec 225 casiers 0,72 0,33 95 82 698 Chargement maximum précédent; partie inférieure du conduit d'échappement immergée à 100 mm sous l'eau
Conditions de départ lors de l'événement avec 275 casiers 0,77 0,52 43 20 640 Partie inférieure du conduit d'échappement immergée à 162 mm sous l'eau
+ 1 % d'eau accumulée dans le puits Note de bas de page 9 0,80 0,98 18 −8 610 Sabord de décharge bâbord arrière immergé
+ 5 % d'eau accumulée dans le puits 0,89 2,24 −59 −99 518 Tous les sabords de décharge bâbord immergés
+ 25 % d'eau accumulée dans le puits 1,26 10,25 −484 −577 6 Pavois arrière immergé

Modifications apportées au bateau

TC encourage les propriétaires et les capitaines de bateaux de pêche dont la jauge brute est inférieure à 15 tonneaux à tenir un registre des modifications apportées à leur bateau et à demander l'aide d'un expert-conseil maritime si ces modifications sont susceptibles d'entraîner un changement appréciable des conditions de sécurité et de stabilité du bateau Note de bas de page 10. Quand le propriétaire du Craig and Justin a modifié les sabords de décharge en 2008, il n'a pas suivi cette façon de procéder.

Normes de stabilité des petits bateaux de pêche

Bateaux pontés et non pontés

Pour un bateau, la capacité de rester à flot et de rester droit sur l'eau dans toutes les conditions de charge et d'exploitation est un élément fondamental de la sécurité. Il est donc essentiel que le bateau conserve des réserves de flottabilité et de stabilité suffisantes et empêche l'eau d'entrer et de s'accumuler sur le pont ou à l'intérieur de la coque. Il faut aussi maintenir un franc-bord et une hauteur d'envahissement suffisants et un drainage adéquat. Pour assurer la sécurité en mer, on doit prendre ces facteurs en considération aux étapes de la conception et de la construction des bateaux pontés et non pontés, et pendant leur exploitation.

Dans le cas d'un bateau ponté, la flottabilité et la stabilité dépendent principalement du volume de la coque étanche à l'eau qui se trouve sous le pont Note de bas de page 11. Quand le pont est fermé par un pavois formant un puits, les ouvertures pratiquées dans le pavois, ou les sabords de décharge, devraient avoir la taille nécessaire, être en nombre suffisant et être placés aux endroits requis pour que l'eau accumulée puisse s'égoutter librement et rapidement par-dessus bord, de façon à éviter l'effet de carènes liquides. Les réserves de flottabilité et de stabilité sont calculées en fonction du franc-bord mesuré à la position du point d'envahissement le plus bas. Par conséquent, la réduction du franc-bord ou du point d'envahissement a pour effet de réduire la réserve de flottabilité et de stabilité et conséquemment réduire la marge de sécurité.

Dans le cas d'un bateau non ponté, la flottabilité et la stabilité sont assurées par la coque étanche à l'eau, laquelle va jusqu'au sommet du plat-bord. Les bateaux de ce type sont vulnérables à l'envahissement par les hauts lorsque les vagues passent par-dessus les bords du navire; pour atténuer ce risque, on peut faire en sorte que le bateau navigue seulement sur des eaux relativement calmes, incorporer des dispositifs intégrés de flottaison afin d'accroître la capacité de survie du bateau et prévoir des moyens efficaces pour évacuer l'eau embarquée. Comme dans le cas des bateaux pontés, la réduction du franc-bord ou de la hauteur du point d'envahissement a pour effet de réduire la réserve de flottabilité et de stabilité de même que la marge de sécurité.

Bien des bateaux de pêche de style Northumberland sont munis d'un plat-bord ou pavois massif percé de petites ouvertures de drainage ou de dalots par lesquels l'eau accumulée sur le pont de pêche s'égoutte; pour cette raison, ils correspondent à la définition d'un bateau non ponté. Bien que la forme de la coque du Craig and Justin ait été similaire à celle de ces derniers bateaux, étant donné qu'il avait un pont étanche à l'eau entouré d'un pavois massif incorporant des sabords de décharge Note de bas de page 12, il avait les attributs d'un bateau ponté. En conséquence, quand on a immatriculé le Craig and Justin en 2004, on a indiqué qu'il s'agissait d'un « bateau de pêche ponté », on a mesuré le tonnage jusqu'à la hauteur du pont de travail et on a déterminé que le tonnage brut était de 14,63 tonneaux.

Normes canadiennes

Actuellement, il n'y a pas au Canada de normes ou de réglementation spécifiques qui précisent le tirant d'eau et le franc-bord à respecter quand on charge du poisson ou des agrès de pêche à bord de petits bateaux de pêche jaugeant moins de 15 tonneaux de jauge brute, comme le Craig and Justin. Par conséquent, ces bateaux de pêche n'ont pas de ligne de charge ou de limites de charge à ne pas dépasser, de sorte que la limite de chargement dépend du jugement des exploitants.

Organisation maritime internationale

En juin 2010, le Comité de la sécurité maritime (CSM) de l'Organisation maritime internationale (OMI) a formulé des recommandations de sécurité devant s'appliquer aux bateaux de pêche pontés neufs de moins de 12 m de longueur et aux bateaux de pêche non pontés neufs Note de bas de page 13. Ces recommandations comprenaient des normes d'évaluation de la stabilité. On a utilisé ces normes pour déterminer la stabilité du Craig and Justin au moment où il a quitté le port avec son chargement — à la fois dans sa configuration de bateau ponté, et dans une configuration théorique de bateau non ponté. Les résultats de l'évaluation, résumés au tableau 2, indiquent que, dans la configuration de bateau ponté transportant 275 casiers, le bâtiment ne respectait pas tous les critères de stabilité et il n'aurait pu transporter que 171 casiers au maximum. S'il avait été considéré comme étant un bateau non ponté qui respecte tous les critères, il aurait pu transporter 275 casiers au maximum.

Tableau 2. Évaluation de la stabilité du Craig and Justin en fonction des normes de l'OMI relatives aux bateaux pontés et non pontés
Description des critères Note de bas de page 14 Craig and Justin avec à son bord 275 casiers et une charge de carburant à 95 % de sa capacité
Bateau ponté Note de bas de page 15 Bateau non ponté
Valeur exigée Valeur calculée Valeur exigée Valeur calculée
Hauteur métacentrique (GM) initiale (en m) 0,35 1,70 0,35 1,70
Bras de levier de redressement à 30˚ (en m) 0,20 −0,13 s/o s/o
Surface sous la courbe du bras de levier de redressement à 30˚ ou envahissement (m-radians) 0,055 0,004 s/o s/o
Surface sous la courbe du bras de levier de redressement de 30˚ à 40˚ ou envahissement (m-radians) 0,090 −0,034 s/o s/o
Surface sous la courbe du bras de levier de redressement à 40˚ ou envahissement (m-radians) 0,030 −0,031 s/o s/o
Installation de compartiments de flottabilité acceptables, répartis de façon que le bateau reste à flot, en assiette nulle, s'il est envahi par l'eau s/o s/o Installation de compartiments de flottabilité, de façon que le bateau reste à flot, en assiette nulle, s'il est envahi par l'eau Non vérifié
Nombre maximum de casiers si tous les critères sont respectés 171 275

Sécurité des bateaux de pêche

Le 16 mars 2010, le Bureau a publié sa Liste de surveillance, dans laquelle on indique les 9 questions de sécurité critiques qui ont fait l'objet d'enquêtes du BST et qui posent les plus grands risques pour la sécurité des Canadiens. Les pertes de vie à bord de bateaux de pêche sont une de ces questions de sécurité. Compte tenu d'un taux moyen de 12 pertes de vie par année entre 2005 et 2009, le Bureau est préoccupé au sujet des modifications apportées aux bateaux et des répercussions que ces modifications peuvent avoir sur la stabilité; de l'utilisation et de la disponibilité de l'équipement de sauvetage; de la surveillance réglementaire; de l'impact des plans et des pratiques de gestion des ressources halieutiques; et de l'absence d'une culture de sécurité et d'un code de pratiques recommandées. La Liste de surveillance a aussi mis en évidence le fait que l'industrie devait adopter des pratiques et procédures d'exploitation sûres et en faire la promotion, de façon que les exploitants de bateaux de pêche aient de meilleures connaissances en matière de sécurité.

Analyse

Chavirement du bateau

Lors du dernier voyage du Craig and Justin, plusieurs facteurs ont influé sur la réserve de flottabilité et de stabilité du bâtiment. Premièrement, en raison du poids combiné des 275 casiers à homard, des cordages et du carburant, le bateau portait une lourde charge et gîtait sur bâbord et, par conséquent, sa réserve de flottabilité et son franc-bord étaient très réduits. De plus, comme des casiers à homard étaient empilés en hauteur sur le pont de travail et par-dessus les couvercles des aires de stockage, le bateau avait une assiette positive et un centre de gravité élevé, ce qui a réduit davantage sa stabilité.

Même si les prévisions météorologiques annonçaient un temps favorable et une mer peu agitée, en raison de la hauteur limitée du franc-bord, l'eau a envahi le pont en passant par les sabords de décharge sous l'effet de la houle naturelle ou des mouvements du bateau. En fait, tandis que le bateau manœuvrait pour se rendre sur les lieux de pêche, l'eau a dû s'infiltrer à l'intérieur du puits formé par le pavois en passant par les 2 sabords de décharge avant, lesquels n'étaient pas complètement bloqués. Cette eau a pu s'écouler vers l'arrière en passant par les trous de drainage dans les épontilles transversales, et a dû s'accumuler dans le puits, étant donné que les sabords de décharge arrières étant obstrués par les plaques coulissantes.

L'équipage n'a pas dû se rendre compte que l'eau s'accumulait sur le pont, en raison de la présence des casiers et des couvercles sur les aires de stockage. Par ailleurs, d'après les résultats de l'évaluation de la stabilité, il aurait suffi d'une petite quantité d'eau pour que le pont et les sabords de décharge soient submergés. Par la suite, l'envahissement du pont a dû se faire progressivement, jusqu'à ce que le bateau n'ait plus aucune stabilité et chavire.

Respect des normes de stabilité

Quand le Craig and Justin a quitté le port le jour de l'événement, il transportait environ 50 casiers de plus que le nombre maximal (225) de casiers qu'il avait transportés par le passé. Les résultats de l'évaluation de la stabilité montrent que le franc-bord du bateau était minimal avec un chargement de 225 casiers, et qu'il a diminué encore avec 50 casiers supplémentaires à bord du bateau (voir le tableau 3 ci-après).

Tableau 3. Franc-bord par rapport au pont de travail
Nombre de casiers Franc-bord moyen par rapport au pont de travail
Chargement maximal précédent 225 89 mm
Chargement lors de l'événement 275 32 mm
Différence 50 57 mm

Les tableaux 4a et tableaux 4b comparent le nombre de casiers qu'on a chargé à bord du bateau le jour de l'événement avec le nombre maximal de casiers qui aurait été permis si le bateau avait été conforme aux normes de stabilité recommandées par l'OMI. La comparaison montre que, si le Craig and Justin avait été un bateau non ponté (en supposant l'absence de sabords de décharge dans le pavois et l'ajout de compartiments de flottabilité appropriés), on aurait considéré qu'il répondait aux normes de stabilité. Par contraste, avec sa configuration véritable de bateau ponté, on aurait dû réduire considérablement le nombre de casiers qu'on pouvait charger à bord (c'est-à-dire jusqu'à 171 casiers) pour que le bateau se conforme à cette même norme. Avec le chargement qu'il portait, le Craig and Justin n'était pas conforme aux normes recommandées par l'OMI.

Tableau 4a. Réduction du nombre de casiers transportés pour que le bateau respecte les normes applicables à un bateau non ponté
Configuration théorique – Bateau non ponté Chargement lors de l'événement Chargement type
Nombre réel de casiers 275 225
Nombre maximal de casiers pour se conformer aux normes de stabilité 275
Réduction du nombre de casiers pour se conformer aux normes de stabilité Aucune réduction Aucune réduction
Tableau 4b. Réduction du nombre de casiers transportés pour que le bateau respecte les normes applicables à un bateau ponté
Configuration réelle – Bateau ponté Chargement lors de l'événement Chargement type
Nombre réel de casiers 275 225
Nombre maximal de casiers pour se conformer aux normes de stabilité 171
Réduction du nombre de casiers pour se conformer aux normes de stabilité 104 (38 %) 54 (24 %)

Modifications apportées au bateau

Souvent, des modifications qui sont apportées aux bateaux de pêche et qui peuvent nuire à la sécurité ne font pas l'objet d'une évaluation menée par un consultant maritime ou un inspecteur de TC.

Dans le cas présent, on a modifié les 2 sabords de décharge les plus près de l'avant du Craig and Justin après la livraison initiale du bateau, et on n'a pas fait faire une évaluation des effets que cette modification pouvait avoir sur la sécurité. Même si cela n'a pas eu d'incidence importante lors de cet événement, il se peut que les propriétaires de navires ne soient pas bien au fait des implications que ces modifications peuvent avoir sur la sécurité tant que les modifications n'ont pas été évaluées adéquatement.

Normes de stabilité applicables aux petits bateaux de pêche

Lors de cet événement, le franc-bord insuffisant et les réserves de flottabilité et de stabilité insuffisantes du Craig and Justin ont été des facteurs contributifs majeurs à l'accident. De plus, l'enquête a permis de déterminer que, même dans des conditions de chargement maximal typiques, le bateau ne satisfaisait pas aux normes reconnues de l'OMI. Actuellement, au Canada, les petits bateaux de pêche dont la jauge brute est inférieure à 15 tonneaux n'ont pas à être évalués en matière de stabilité et du franc-bord, et il n'y a aucune directive ou ligne directrice permettant d'établir le franc-bord minimum qui doit être conservé une fois que le bateau est chargé de poisson ou d'engins de pêche Note de bas de page 16. En l'absence de telles normes ou lignes directrices, il se peut très bien que les pêcheurs continuent d'exposer leurs bateaux à des risques sans le savoir.

Radeau de sauvetage

En situation d'urgence, un dispositif d'attache qui doit être activé manuellement peut faire en sorte que des radeaux de sauvetage ne se déploient pas si, comme cela s'est passé lors de l'événement, les membres de l'équipage n'accèdent pas rapidement à l'équipement de sauvetage. Le dispositif d'attache du radeau de sauvetage comprenait un mécanisme de dégagement rapide ― un croc à échappement ― qui devait être actionné manuellement, faute de quoi le radeau de sauvetage ne pouvait pas se déployer. Toutefois, vu la vitesse à laquelle le bateau a chaviré, les membres de l'équipage n'ont pas eu le temps de mettre à l'eau le radeau de sauvetage.

Si l'on manque de temps pour déployer manuellement un radeau de sauvetage durant une situation d'urgence, surtout à bord de petits bateaux comme le Craig and Justin, il est impératif que le radeau de sauvetage soit attaché par une saisine reliée à un dispositif de largage hydrostatique, ou qu'il soit placé dans des chantiers profonds et ne soit pas retenu par une saisine, de façon que le radeau émerge librement si le bateau coule. De plus, la bosse du radeau de sauvetage doit être reliée à un maillon faible qui est conçu pour céder, de façon que le radeau de sauvetage ne soit pas entraîné sous l'eau avec le bateau.

Quand on met le radeau de sauvetage à l'eau manuellement, on doit sortir toute la longueur de la bosse pour gonfler le radeau. Quand le radeau est déployé automatiquement, la bosse est étirée sur toute sa longueur au moment où le bateau coule, et le radeau de sauvetage se gonfle avant que le maillon faible se brise. Pour que le radeau de sauvetage se gonfle automatiquement, on peut équiper le radeau d'un dispositif de largage hydrostatique qui s'active quand il atteint une profondeur maximale de 4 m. Un radeau de sauvetage placé dans des berceaux profonds et relié à un maillon faible donnerait le même résultat. En l'absence de dispositifs de dégagement libre pour fixer les radeaux de sauvetage, les chances de survie en mer sont compromises dans les cas où l'équipage n'a pas le temps de déployer l'équipement à la main.

Vêtements de flottaison individuels et protection thermique

Souvent, le chavirement d'un petit bateau de pêche se fait rapidement, au point que les membres de l'équipage doivent souvent abandonner le bateau sans avoir le temps d'endosser des vêtements de protection thermique et des gilets de sauvetage. Lors de cet événement, les membres de l'équipage portaient des vêtements légers et n'ont pas eu le temps de récupérer les gilets de sauvetage qui étaient rangés dans les emménagements, avant d'entrer dans l'eau froide. Il s'ensuit qu'ils ne disposaient d'aucune protection contre le froid et qu'ils ont dû s'efforcer de garder la tête hors de l'eau ou s'agripper à la coque renversée jusqu'à l'arrivée des secours. On convient généralement que des personnes qui sont immobiles dans de l'eau à 2 °C ou 3 °C et qui portent un gilet de sauvetage de modèle standard et des vêtements légers pourraient être alertes pendant environ 15 minutes. Après cette période, elles s'affaibliraient et ne seraient plus en mesure de s'aider elles-mêmes. Le temps de survie prévu dans de l'eau à 2 °C ou 3 °C est d'un peu plus de 1 heure. Passé ce délai, la victime mourra probablement d'hypothermie.

Le gilet de sauvetage de modèle approuvé qu'on doit transporter à bord des bateaux de pêche doivent répondre à des normes de flottabilité rigoureuses et faire en sorte qu'une personne inconsciente qui se retrouve dans l'eau ait la figure vers le haut. Par contre, les gilets de sauvetage de ce type sont encombrants quand on les porte pour travailler, et peuvent poser un risque quand on travaille avec des engins de pêche. Inversement, les vêtements de flottaison individuels (VFI) assurent une certaine liberté de mouvement, et des versions approuvées par TC sont disponibles sur le marché. Les VFI devraient servir uniquement à garder une personne à flot dans l'eau et ne sont pas censés remplacer un gilet de sauvetage approuvé; il ne sont d'ailleurs pas conçus pour remplacer un gilet de sauvetage. Ni les gilets de sauvetage ni les VFI n'assurent une protection thermique.

Des vêtements de travail qui n'offrent pas une flottabilité ou une protection thermique raisonnable font en sorte que les chances de survie d'une personne qui se retrouve soudainement dans l'eau sont réduites.

Radiobalises de localisation des sinistres

En cas de chavirement ou de naufrage, il est essentiel d'alerter les autorités et de demander de l'aide dans les meilleurs délais, de façon que les efforts de sauvetage débutent le plus tôt possible.

Bien que cela n'ait pas été un facteur lors de cet événement, le Craig and Justin n'avait pas à son bord une radiobalise de localisation des sinistres (RLS), et la réglementation n'exigeait pas qu'il en soit équipé. Le bateau a chaviré si rapidement que le capitaine a eu à peine le temps d'émettre un message de détresse. Toutefois, s'il n'y avait pas eu d'autres bateaux dans les parages, une RLS aurait pu transmettre automatiquement un message d'alerte aux autorités de recherche et sauvetage (une fois que la RLS aurait atteint la profondeur maximale de 4 m à laquelle le dispositif de largage hydrostatique s'activerait et libérerait la RLS). Des événements antérieurs ont démontré que les RLS peuvent contribuer à sauver des vies Note de bas de page 17.

Après l'enquête sur le naufrage du petit bateau de pêche Brier Mist Note de bas de page 18, le Bureau a recommandé que :

Le ministère des Transports exige que les petits bateaux de pêche qui effectuent des voyages côtiers aient à leur bord une radiobalise de localisation des sinistres ou tout autre équipement approprié à dégagement hydrostatique qui se déclenche automatiquement, avertit le système de recherche et sauvetage, transmet périodiquement la position et est muni d'un dispositif de localisation directionnelle.
Recommandation M00-09 du BST

En réponse à la recommandation du Bureau, TC a indiqué qu'il continuait d'appuyer et d'encourager l'utilisation volontaire de RLS à bord de tous les bateaux pour lesquels cet équipement n'est pas obligatoire. En outre, TC a mené une évaluation des risques pour déterminer s'il serait nécessaire d'utiliser des moyens d'alerte plus efficaces à bord de petits bâtiments commerciaux, y compris les bateaux de pêche qui ne sont pas encore tenus d'avoir à leur bord une RLS ou une radio VHF avec fonction d'appel sélectif numérique. L'étude a identifié certains scénarios où le niveau de risque est jugé inacceptable. En mars 2010, TC a signalé qu'il pourrait recommander des exigences supplémentaires en matière d'équipement en RLS, à l'occasion des consultations sur la modification du Règlement sur la sécurité de la navigation, dans le cadre de l'initiative de réforme de la réglementation. Le travail de TC se poursuit, et on n'a pas décidé de la date à laquelle les modifications seront publiées dans la partie I de la Gazette du Canada. Le Bureau a estimé que la réponse de TC dénotait une intention satisfaisante.

Lorsqu'il est impossible de transmettre un message de détresse et qu'il n'y a pas de dispositif automatique permettant d'alerter les autorités d'une situation d'urgence, il se peut qu'on perde un temps précieux avant de pouvoir mettre en œuvre les opérations de sauvetage.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. En raison du chargement que le bateau transportait, son centre de gravité était élevé et son franc-bord était insuffisant pour empêcher que l'eau s'accumule sur le pont de travail au gré des vagues et des mouvements du bateau sur l'eau.
  2. Une petite quantité d'eau s'est accumulée, ce qui a fait en sorte que le pont et les sabords de décharge ont été submergés. L'envahissement du pont s'est ensuite fait progressivement, jusqu'à ce que le bateau n'ait plus aucune stabilité et chavire.

Faits établis quant aux risques

  1. En l'absence de normes ou de lignes directrices concernant le franc-bord minimum qui doit être conservé une fois que le bateau est chargé de poisson ou d'engins de pêche, il se peut très bien que les pêcheurs continuent d'exposer leurs bateaux à des risques sans le savoir.
  2. En l'absence de dispositifs de dégagement libre pour attacher les radeaux de sauvetage, les chances de survie en mer sont compromises dans les cas où l'équipage n'a pas le temps de déployer l'équipement manuellement.
  3. Lorsqu'il est impossible de transmettre un message de détresse et qu'il n'y a pas de dispositif automatique permettant d'alerter les autorités d'une situation d'urgence, il se peut qu'on perde un temps précieux avant de pouvoir mettre en œuvre les opérations de sauvetage.
  4. Des vêtements de travail qui n'offrent pas de flottabilité ou de protection thermique font en sorte que les chances de survie d'une personne qui se retrouve soudainement dans l'eau sont réduites.
  5. Si les modifications apportées aux bateaux ne font pas l'objet d'une évaluation adéquate des implications qu'elles peuvent avoir sur la sécurité, les équipages et les bateaux peuvent être exposés à des risques accrus.

Autre fait établi

  1. Compte tenu de sa configuration de bateau ponté et du chargement qu'il transportait, le Craig and Justin ne satisfaisait pas aux normes de stabilité recommandées par l'Organisation maritime internationale (OMI).

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A – Profil du bateau et chargement de casiers à homard

Photo 5. Profil du bateau et chargement de casiers à homard
Photo 1. Profil du bateau et chargement de casiers à homard
Profil du bateau et chargement de casiers à homard
Rangée Colonne x rang Casiers
1 - 5
2 6 x 5 30
3 6 x 6 36
4 6 x 7 42
5 6 x 7 42
6 6 x 2 12
7 6 x 6 36
8 6 x 6 36
9 6 x 6 36
Total 275

Annexe B – Sabords de décharge

Photo 5. Sabord de décharge avec plaque en dents de scie, vu de l'extérieur du bateau
Photo 1. Sabord de décharge avec plaque en dents de scie, vu de l'extérieur du bateau
Photo 6. Sabord de décharge avec plaque coulissante, vu de l'intérieur du bateau
Photo 1. Sabord de décharge avec plaque coulissante, vu de l'intérieur du bateau

Annexe C – Croquis des lieux de l'événement

Annexe C – Croquis des lieux de l'événement
Annexe C -