Language selection

Rapport d'enquête aéronautique A13W0120

Panne moteur après le décollage et collision avec le relief
Buffalo Airways Ltd.
Douglas DC-3C, C-GWIR
Aéroport de Yellowknife, Territoires du Nord-Ouest



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le 19 août 2013, un Douglas DC-3C (immatriculé C-GWIR, numéro de série 9371) exploité par Buffalo Airways Ltd. effectue un vol régulier de passagers depuis Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest) à destination de Hay River (Territoires du Nord-Ouest). Après le décollage sur la piste 16 à 17 h 8, heure avancée des Rocheuses, un incendie se déclare dans le moteur droit. L'équipage effectue un arrêt d'urgence du moteur et un virage à droite à basse altitude vers la piste 10. L'aéronef percute un groupe d'arbres au sud-ouest du seuil de la piste 10 et se pose au sud de la piste avec son train d'atterrissage rentré. Les 21 passagers et 3 membres d'équipage évacuent l'aéronef; il n'y a aucun blessé. Il n'y a pas d'incendie après impact, et la radiobalise de repérage d'urgence de 406 MHz ne s'active pas.

Renseignements de base

Déroulement du vol

Le transporteur aérien Buffalo Airways Ltd. (Buffalo Airways) offre un service sur demande dont les passagers qui se présentent à l'aéroport sans réservation peuvent se prévaloir. Si la charge de passagers ou de marchandises dépasse la capacité d'un aéronef, l'entreprise peut mettre en service un aéronef additionnel. Le 19 août 2013, un second DC-3C (DC-3) a été ajouté au vol en cause, Buffalo 168 (BFL168), pour la liaison entre Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest) (CYZF) et Hay River (Territoires du Nord-Ouest) (CYHY).

Avant le départ, le vol BFL168 comptait 17 passagers ainsi que du fret, au hangar de Buffalo Airways. Les passagers s'étaient présentés à l'aérogare de Buffalo Airways où ils se sont enregistrés et ont déposé leurs bagages enregistrés. On n'a pesé ni les passagers, ni les bagages au comptoir d'enregistrement. À la suite de l'embarquement des passagers et du fret, 4 autres passagers de dernière minute sont montés à bord avec leurs bagages.

Au moment du départ, le plan de vol exploitation (OFP) n'était que partiellement rempli et ne comprenait ni le nombre de passagers à bord ni le poids du fret. L'équipage n'a reçu aucun manifeste de fret avant le départ.

À 17 h 8Note de bas de page 1, BFL168 a reçu l'autorisation de décollage du contrôleur de la tour de Yellowknife et a amorcé sa course au décollage sur la piste 16, à l'intersection des pistes 16/34 et 10/28 (annexe A). La distance de piste restante à partir de cette intersection est d'environ 5956 pieds.

À 17 h 10, le contrôleur de la tour a remarqué un important panache de flammes et de la fumée qui s'échappaient du moteur droit; il a communiqué cette observation à BFL168. Le contrôleur de la tour n'a reçu aucune réponse de BFL168. L'équipage de conduite de BFL168 rentrait le train d'atterrissage lorsqu'il a remarqué un incendie dans le moteur droit. Il a effectué un arrêt d'urgence du moteur, y compris la mise en drapeau de l'hélice droite. Alors que l'hélice droite était en transition vers la mise en drapeau, la manœuvre s'est interrompue avant qu'elle soit complète, et l'hélice s'est remise à tourner en moulinet. BFL168 a ensuite effectué un virage à droite à basse altitude pour tenter de se rendre à la piste 10 (annexe B). Le vol BFL168 a atteint une altitude maximale d'environ 180 pieds au-dessus du niveau du sol (agl)Note de bas de page 2.

Durant le virage, BFL168 a percuté un groupe d'arbres d'une hauteur d'environ 30 pieds qui se trouvait à 690 pieds au sud-ouest du seuil de la piste 10. L'endroit où l'aéronef a percuté le relief était à 400 pieds au-delà des arbres. Le sillon laissé par l'épave était parallèle à la piste 10 et au sud de cette dernière, et mesurait environ 330 pieds. Le train d'atterrissage et les volets étaient en position rentrée. Étant donné la vitesse relativement faible au moment de l'impact, la radiobalise de repérage d'urgence (ELT) ne s'est pas activée.

L'équipe de sauvetage et lutte contre les incendies d'aéronefs (SLIA) se trouvait déjà au sud de la piste 10 pour une opération de récupération de véhicule d'aérodrome sans lien avec l'événement. Le contrôleur de la tour a dirigé l'équipe SLIA vers les lieux de l'événement vers 17 h 18. Dès que l'aéronef s'est complètement immobilisé, l'agent de bord a commencé l'évacuation des 21 passagers par la porte arrière gauche. L'agent de bord est retourné à l'aéronef et a déplacé des tiroirs de l'office qui bloquaient l'accès au poste de pilotage, et a confirmé que l'équipage de conduite était sain et sauf. Les 3 membres d'équipage ont ensuite évacué l'aéronef. Par mesure de précaution, l'équipe SLIA a arrosé l'épave de produit ignifuge. L'équipage et les passagers, sains et saufs, sont demeurés sur place pendant environ 60 minutes sous la supervision de l'équipe SLIA. Ils ont ensuite été transportés à l'aérogare de Buffalo Airways.

Conditions météorologiques

Le message d'observation météorologique d'aérodrome (METAR) pour Yellowknife à 17 h indiquait : vents du 230° vrai (V) soufflant à 5 nœuds, visibilité de 15 milles terrestres (sm) avec averses aux alentours de l'aéroport, quelques nuages à 1000 pieds  agl, nuages épars à 4000 pieds agl (avec cumulonimbus), nuages fragmentés à 15 000 et à 24 000 pieds agl, température 17 °C, point de rosée 13 °C, calage altimétrique 29,28 pouces de mercure. L'élévation à l'aéroport de Yellowknife est de 675 pieds au-dessus du niveau de la mer. L'altitude-densité calculée était de 1800 pieds.

Équipages de conduite et de cabine

Les dossiers indiquent que l'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur.

Le commandant de bord était titulaire d'une licence de pilote de ligne valide et lors de l'événement, il occupait le siège de gauche comme pilote aux commandes (PF). Le commandant de bord avait accumulé environ 13 000 heures de vol, dont 4300 heures à bord d'un DC-3.

Le premier officier (FO) était titulaire d'une licence de pilote professionnel valide et occupait le siège de droite comme pilote qui n'est pas aux commandes (PNF). Le premier officier avait accumulé environ 500 heures de vol, dont environ 125 heures à bord d'un DC-3.

Comme cet aéronef était exploité en vertu de la sous-partie 705 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), un membre d'équipage de cabine était requis pour le vol en cause. L'agent de bord avait reçu la formation de l'entreprise en juin 2013; toutefois, le volet sur la gestion des ressources de l'équipage (CRM) n'avait pas été achevé, contrairement aux exigences de l'entreprise. L'agent de bord détenait également une licence de pilote professionnel.

Rien n'indique que la fatigue ait été un facteur dans l'événement à l'étude. L'horaire de travail de l'équipage prévoyait un temps de repos et de congé suffisant.

Aéronef

Fabriqué en 1942 et portant le numéro de série 42-23509, l'aéronef a été livré à l'origine comme avion de transport militaire C-47B (Dakota). La conversion de la désignation militaire à civile a exigé de faire les modifications indiquées à l'Aircraft Specification no A669 du certificat de type de la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis. Field Aviation Ltd. a réalisé ces modifications en février 1975, et la désignation de l'aéronef est devenue DC-3C-S1C3G, numéro de série 9371. Buffalo Airways en était propriétaire inscrit depuis 1994.

La conduite de cet aéronef exige 2 membres d'équipage. L'aéronef n'était pas doté d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR), et n'était pas tenu d'en avoir, selon la réglementation en vigueur. L'article 605.33 (1) du RAC stipule que tous les aéronefs multimoteurs turbopropulsés à l'égard desquels un certificat de type a été émis autorisant le transport de 30 passagers ou moins et dont la configuration prévoit de 20 à 30 sièges passagers doivent être dotés d'un enregistreur de données de vol. L'article 605.33 (2) du RAC stipule que tous les aéronefs multimoteurs turbopropulsés dont la configuration prévoit 6 sièges passagers ou plus et pour lesquels le certificat de type de l'aéronef exige 2 pilotes doivent être munis d'un enregistreur de la parole dans le poste de pilotage. Ces règlements ne s'appliquent pas aux aéronefs multimoteurs à moteurs à pistons. Transports Canada (TC) a indiqué que les enregistreurs modernes sont fondés sur la technologie numérique et que l'installation des capteurs nécessaires serait impossible. On a jugé que l'installation rétroactive de ces dispositifs sur des aéronefs à moteurs à pistons était trop complexe et qu'elle n'en valait pas la peine, puisque l'on prévoyait une diminution du nombre de ces aéronefs en service.

L'absence de FDR ou de CVR ne fait qu'accroître la complexité des enquêtes et prive les enquêteurs de renseignements essentiels afin de comprendre pourquoi et comment certains accidents se produisent. Ainsi, des lacunes de sécurité qui posent des risques pour les personnes, les biens et l'environnement peuvent passer inaperçues.

L'analyse après accident des renseignements enregistrés par un CVR a maintes fois confirmé la valeur de ces appareils pour accroître la sécurité de l'aviation commerciale. L'absence d'enregistrement de la parole dans le de poste de pilotage et de données de vol, dans le cadre d'une enquête, pourrait empêcher la détermination et la communication d'importantes lacunes de sécurité qui pourraient améliorer la sécurité des transports.

Masse et centrage

L'appendice C de la Norme 625 du RAC stipule que « Sous réserve des exigences d'un calendrier de contrôle de masse et de centrage à vide d'une flotte d'aéronefs, les gros aéronefs doivent être pesés à nouveau et faire l'objet d'un nouveau devis tous les 5 ans. » TC avait approuvé la section 4.13 – Weight and Balance Control [Contrôle de la masse et du centrage] du Manuel de contrôle et des politiques de maintenance (MCPM) de l'organisme de maintenance agréé (AMO) de Buffalo Airways pour consigner les modifications de masse et centrage des aéronefs déterminées par des calculs après chaque changement de la masse à vide. Le document MCPM ne fait état d'aucune fréquence des intervalles de pesée, et l'appendice A de la Norme 726 du RAC – Programme de contrôle de la masse à vide et du centrage de la flotte, n'offre aucune ligne directrice en matière de réglementation. Le programme de contrôle de masse et centrage autorisé par TC qu'utilisait Buffalo Airways était conforme à l'appendice C de la Norme 625 du RAC et n'exigeait pas que l'entreprise pèse de nouveau ses gros aéronefs et prépare de nouveaux devis tous les 5 ans, comme le stipule le règlement. La dernière pesée enregistrée de C-GWIR remontait à 1990.

Encadré 1. Définition de la vitesse minimale de contrôle

Vitesse minimale de contrôle en air libre (VMCA)Note de bas de page 3

Vitesse minimale à laquelle il est possible de conserver la maîtrise de l'avion à la suite d'une panne soudaine du moteur critique et de maintenir le vol rectiligne en braquant à fond la gouverne de direction et en ne dépassant pas 5 degrés d'inclinaison latérale.

NOTE : la (VMCA) pour un type d'aéronef donné est généralement déterminée dans les conditions suivantes :

  1. tous les moteurs fonctionnent à la puissance maximale au moment de la panne du moteur critique;
  2. l'avion est à la masse minimale et pratique pour le test et au centrage arrière maximal;
  3. le train d'atterrissage est rentré, les volets sont en position de décollage et l'hélice du moteur critique tourne en moulinet.

À une vitesse inférieure à la VMCA, l'avion fera un lacet et roulera du côté du moteur en panne. Nous n'insisterons jamais assez sur le fait que la reprise de la maîtrise de l'avion ne pourra se faire qu'en réduisant la puissance du moteur fonctionnel ou en augmentant la vitesse en changeant l'assiette de l'avion, ou les deux.

Cet aéronef avait une masse maximale au décollage certifiée (MCTOW) de 26 200 livres dans sa configuration passagers. Le jour de l'événement, l'aéronef était configuré pour transporter 28 passagers, soit le nombre maximal permis. Outre les 2 membres d'équipage de conduite dans le poste de pilotage, il y avait à bord 21 passagers et 1 agent de bord dans la cabine principale. De plus, le vol transportait du fret. La masse du carburant au départ était de 2707 livres, l'équivalent de 1702 litres.

Le plan de vol exploitation (OFP) comprend une section sur les calculs de masse et centrage. Le premier officier (FO) avait commencé les calculs pour le vol en cause, mais il ne les avait pas terminés avant le départ. Il arrivait couramment que l'on termine l'OFP et le calcul de masse et centrage en route. L'OFP indiquait 2 membres d'équipage pour un poids de 400 livres, des sièges passagers d'un poids de 546 livres et une charge de carburant au départ de 2707 livres. Les renseignements consignés à l'OFP inachevé indiquaient une masse au décollage de 21 844,2 livres. Aucune masse réelle au décollage n'avait été déterminée. La liste des passagers n'indiquait ni leur poids, ni celui de leurs bagages de cabine. Les passagers et leurs bagages n'ont pas été pesés au moment de l'enregistrement, ce qui va à l'encontre des procédures de l'entreprise. Un manifeste de fret distinct, qui n'a pas été remis à l'équipage de conduite de BFL168, indiquait un poids de fret de 1071 livres. Un examen des OFP remplis antérieurement pour d'autres vols a révélé l'utilisation de poids de passager que l'on avait ajustés pour faciliter les calculs de masse et centrage et maintenir ces valeurs en deçà des limites.

En utilisant les poids standard applicables de passagers comme l'exige le Manuel d'exploitation de la compagnie (COM), les données de l'OFP et le poids réel du fret, on a déterminé que la masse opérationnelle au décollage du vol en cause était de 27 435 livres, soit 1235 livres de plus que la masse maximale au décollage certifiée (MCTOW). Le centre de gravité à 25 % de la corde moyenne aérodynamique (MAC) se trouvait à l'intérieur des limites prescrites par l'avionneur.

Performances de l'aéronef

La vitesse de montée maximale à la puissance maximale sauf décollage (METO) à 26 200 livres ne doit pas être inférieure à 90 KIAS (vitesse indiquée en nœuds)Note de bas de page 4.

Selon le manuel de vol (AFM) du DC-3, avec 1 moteur inopérant et une puissance METO ou inférieure au moteur en marche, la vitesse minimale de contrôle en air libre (VMCA) est de 73 KIAS. À la puissance de décollage, la VMCA est de 76 KIAS.

D'après le tableau de performances de montée sur un moteur de l'AFMNote de bas de page 5, le DC-3, à une masse MCTOW de 26 200 livres avec un moteur inopérant dont l'hélice est en drapeau et le train d'atterrissage et les volets sont rentrés, devrait être en mesure de monter à un taux de 330 pieds par minute (pi/min). Les tableaux de performances font l'impasse sur lequel d'entre les 2 moteurs est inopérant, que ce soit le moteur critiqueNote de bas de page 6 ou le moteur non critique. Si le moteur tournait au ralenti dans cette même configuration, il serait possible de réaliser un taux de montée sur un moteur de 210 pi/min.

Une enquête sur un accident en Australie (rapport numéro 9401043) menée par le Department of Transportation, Bureau of Air Safety Investigation, en 1994, fait état d'essais de performance de montée du Dakota C47B. Ces essais avaient été réalisés pour déterminer si une augmentation de la masse MCTOW de 26 200 livres pouvait nuire à la performance de montée sur un moteur. Avec le moteur gauche inopérant et son hélice tournant en moulinet, les taux de montée à différentes masses étaient les suivants :

Tableau 1. Taux de montée avec le moteur gauche inopérant et son hélice tournant en moulinet
Masse Taux de montée
26 000 lbs 100 pi/min
28 000 lbs 0 pi/min
30 000 lbs ‒90 pi/min

Il est à noter que les valeurs de performance au tableau 1 sont fondées sur la pire condition de moteur inopérant. Une panne du moteur gauche (moteur critique) entraîne des mouvements de lacet et de roulis plus prononcés qui exigeraient des commandes de pilotage plus vigoureuses pour contrer ces forces. À la suite de telles commandes de pilotage, l'aéronef est exposé à une plus grande traînée, ce qui nuit à sa performance. À l'inverse, une panne du moteur non critique peut ne pas entraîner une aussi grande diminution de performance, mais réduira tout de même la performance de montée. L'annexe C illustre la relation entre la vitesse et l'altitude du vol en cause après la défaillance du moteur droit et le dévirage subséquent de l'hélice droite.

La sous-partie 705 du RAC exige que l'exploitant calcule la trajectoire nette de décollage (NTOFP). D'après l'article 705.57 (1) du RAC :

Il est interdit d'effectuer le décollage d'un avion dont la masse est supérieure à la masse qui est précisée dans le manuel de vol de l'aéronef et qui permet une trajectoire nette de décollage comportant une marge de franchissement d'obstacles d'au moins 35 pieds, mesurée verticalement, ou d'au moins 200 pieds, mesurée horizontalement, à l'intérieur des limites de l'aérodrome, et d'au moins 300 pieds, mesurée horizontalement, à l'extérieur de ces limites.

En outre, d'après la Circulaire d'information de TC sur la réglementation et les normes en matière de franchissement des obstacles avec un moteur en panne :

La trajectoire nette de décollage est la trajectoire brute de décollage réduite par les marges requises (0,8 % pour les avions bimoteurs de la catégorie transport) ou la réduction équivalente en accélération le long de cette partie de la trajectoire de vol au décollage où l'avion accélère jusqu'au vol en palier. La trajectoire nette de décollage doit permettre à l'aéronef de se trouver à une hauteur verticale d'au moins 35 pieds au-dessus de tous les obstacles à franchir dans une zone déterminéeNote de bas de page 7.

Malgré l'exigence dans le Manuel d'exploitation de la compagnie relative à la détermination de la trajectoire nette de décollage, ces calculs de performance n'avaient pas été faits.

Examen du moteur et de l'hélice

Le moteur à 14 cylindres en étoile en double rangée de Pratt and Whitney R1830-92 Twin Wasp était refroidi à l'air et comprenait un dispositif d'admission à surcompresseur à une vitesse. L'hélice était entraînée par un ensemble réducteur à engrenage planétaire qui réduit sa vitesse de rotation (tr/min) dans une proportion de 16:9. La puissance nominale au décollage du moteur R1830-92 est de 1200 chevaux (HP), et de 1050 HP quand il fonctionne à puissance maximale continue.

Les 14 cylindres comprennent chacun 2 pièces principales, le barillet et la culasse. Le barillet est en alliage d'acier forgé et comprend une bride pour le fixer au carter moteur et une partie filetée à l'extérieur pour l'assembler avec la culasse. La culasse est coulée en aluminium et usinée; elle comprend les soupapes d'admission et d'échappement ainsi que 2 douilles taraudées pour les bougies d'allumage. Pour monter la culasse sur le barillet, il faut d'abord la chauffer, puis la visser sur le barillet pendant qu'elle est chaude; elle se contracte en refroidissant, créant un resserrement d'environ 0,015 pouce.

Photo 1. Cylindre défaillant de C-GWIR
Photo du cylindre défaillant de C-GWIR

On a retrouvé le barillet et la culasse du cylindre no 1 du moteur droit de C-GWIR séparés par suite de la fracture du barillet à son joint fileté avec la culasse (photo 1). La culasse, le barillet et le piston ont été envoyés au laboratoire du BST pour y être examinés. On a découvert une crique de fatigue préexistante dans une rainure du filetage de la surface de contact extérieure du barillet. La cause de la crique de fatigue n'a pu être déterminée en raison des dommages subis après la rupture aux alentours de son point d'origine.

L'intervalle entre révisions (TBO) du moteur R1830-92 est de 1400 heures; au moment de la rupture du cylindre no 1, le moteur en cause avait accumulé 98,7 heures de vol depuis sa dernière révision. L'inspection de révision des cylindres comprend des vérifications visuelle et dimensionnelle suivies d'une inspection par essai non destructif (E.N.D.). On utilise les méthodes de liquide d'imprégnation ou d'essai magnétique à la limaille (Magnaflux) pour détecter les criques dans le barillet ou la culasse. Les inspections de révision déterminent si l'ensemble peut demeurer en service ou s'il doit être mis au rebut. Le cycle de vie du cylindre est illimité, pour autant qu'il satisfasse aux critères d'inspection. D'après son expérience antérieure avec ces cylindres révisés, l'entreprise s'attendait à 3 ou 4 cylindres défaillants par intervalle de révision. On découvrait la plupart des défauts au cours des inspections de maintenance et des essais de pression.

En cas de panne ou d'arrêt d'urgence d'un moteur d'un aéronef multimoteur, il est impératif de mettre en drapeau l'hélice du moteur inopérant afin de réduire au minimum la traînée durant le vol. Le dispositif de mise en drapeau du DC-3 permet de donner un angle de calage de 88° aux pales d'hélice, ce qui arrête sa rotation (en moulinet). Ce dispositif comprend une pompe à huile entraînée par un moteur électrique qui alimente l'huile sous pression au dôme d'hélice en passant par le régulateur d'hélice. Un bouton de drapeau (dans le poste de pilotage) active la pompe, qui envoie de l'huile sous pression sur la partie arrière d'un piston dans le mécanisme de changement de pas, ce qui met les pales en drapeau. Le contacteur d'arrêt automatique manométrique du régulateur d'hélice crée et commande un verrou électrique qui alimente un solénoïde pour tenir le bouton enfoncé. Lorsque le piston atteint la fin de sa course (mise en drapeau complète), la pression augmente à plus de 600 livres par pouce carré (lb/po²); le contacteur d'arrêt automatique manométrique libère alors le verrou, ce qui met le solénoïde hors tension et relâche le bouton pour couper l'alimentation au moteur de la pompe. Ainsi se termine le cycle de mise en drapeau. Si la pression d'arrêt de 600 lb/po² n'est pas atteinte, la pompe continue de fonctionner jusqu'à sa défaillance. Il n'y a pas de pompe de secours.

En cas de défaillance du moteur de la pompe avant que l'angle de calage atteigne la mise en drapeau complète, les pales d'hélice se déplaceront vers le calage de petit pas sous l'effet de la force centrifuge de l'hélice qui tourne et de la tension des ressorts du mécanisme de changement de pas. Une pression d'huile est nécessaire pour contrer ces forces. Il n'y a aucune indication visuelle pour aviser l'équipage de conduite de l'état de la pompe. Une surveillance de la rotation des hélices et de la position du bouton de drapeau est la seule façon de s'assurer d'un bon fonctionnement du dispositif.

Le dispositif de mise en drapeau est également conçu pour dévirer l'hélice. Dans des procédures normales, on peut dévirer l'hélice en tenant enfoncé le bouton de drapeau. Cela a pour effet de surpasser le contacteur d'arrêt automatique manométrique du régulateur d'hélice et permet à la pression de la pompe d'augmenter au-delà du réglage prédéfini de la soupape de distribution du dôme, qui distribue l'huile sous pression de l'autre côté du piston dans le mécanisme de changement de pas et pousse les pales vers le calage de petit pas. En vol, cette manœuvre aurait pour effet de faire tourner l'hélice grâce à l'écoulement d'air, ce qui aide la procédure de redémarrage.

Durant le vol en cause, l'équipage de conduite a arrêté le moteur et a actionné le dispositif de mise en drapeau. La rotation de l'hélice a ralenti, mais on a ensuite noté sa rotation en moulinet durant le reste du vol. Les marques d'impact sur l'engrenage conique du mécanisme de changement de pas et la position d'arrêt de la came tournante indiquent un angle de calage approximatif de 46° à l'impact. Le mécanisme de changement de pas est conçu de telle façon qu'il permet le fonctionnement normal à vitesse constante avec des angles de calage entre 18° et 48°. Il est nécessaire d'appliquer une pression sur le dispositif de mise en drapeau pour surmonter la résistance mécanique au-delà de 49° et empêcher toute mise en drapeau involontaire.

Les composants du dispositif de mise en drapeau ont été inspectés, et on a relevé une anomalie dans le moteur de la pompe électrique. Des tests subséquents réalisés sur ce dispositif ont montré que le moteur ne fonctionnait pas après l'impact. On a démonté le moteur, la pompe, le régulateur d'hélice et le relais, et ils ont été envoyés au laboratoire du BST aux fins d'analyse. Certaines défaillances de composants de ce dispositif feront en sorte que la pompe continuera de fonctionner et de faire basculer régulièrement l'angle de calage des pales entre la mise en drapeau et le calage de petit pas. La traînée excessive et changeante résultant d'une hélice tournant en moulinet rendrait difficile toute maîtrise de l'aéronef.

La Division des produits Douglas (DPD) de la Boeing Aircraft Company a émis un bulletin d'opérations aériennes (Flight Operations BulletinNote de bas de page 8) à propos de la procédure de mise en drapeau des moteurs des DC-3 à la suite d'un accident aux Pays-Bas causé par l'échec de la mise en drapeau d'une héliceNote de bas de page 9. Ce bulletin invitait les exploitants à communiquer à leurs équipages de conduite les détails de l'accident et à les informer qu'il est possible d'interrompre le fonctionnement défectueux du dispositif de mise en drapeau et de mettre l'hélice complètement en drapeau. Pour ce faire, il faut tirer sur le bouton de drapeau lorsque l'hélice atteint la mise en drapeau complète. Les équipages de conduite des DC-3 de Buffalo Airways étaient au courant de cette procédure.

Entreprise

Généralités

Établie en 1970, Buffalo Airways exerce des activités de taxi aérien (RAC 703) et de transport aérien (RAC 705) en vertu du certificat d'exploitation aérienne (AOC) 6576 émis par TC. L'entreprise compte environ 10 aéronefs dans sa flotte de transport aérien (RAC 705) et offre des services de passagers et de fret dans tout l'Arctique canadien. Le vol en cause effectuait un vol régulier en vertu de la sous-partie 705 du RAC.

Contrôle opérationnel

En tant qu'entreprise menant ses activités en vertu de la sous-partie 705 (entreprise de transport aérien) du RAC, Buffalo Airways utilise un Manuel d'exploitation de la compagnie (COM) qui guide les employés sur ses procédures normales et d'urgence. Ce COM est approuvé par TC. Le COM de Buffalo Airways comprend une partie qui décrit les procédures à suivre pour enregistrer les passagers et les marchandises. On doit demander aux passagers le poids des bagages de cabine qu'ils apportent à bord. Si le poids de ces bagages dépasse 8 livres, on doit les peser. On doit utiliser les poids standard des passagers, à moins qu'il soit évident qu'un passager ne correspond pas au poids standard d'après le tableau suivant :

Tableau 2. Poids standard des passagers
Homme adulte de 12 ans et plus Été 200 livres
Femme adulte de 12 ans et plus Été 165 livres
Enfant âgé entre 2 et 11 ans Été 75 livres
Nouveau-né âgé de moins de 2 ans Été 30 livres

On doit effectuer les calculs de masse et centrage pour chaque vol; le poids doit être en deçà des limites maximales de poids de l'aéronef et satisfaire aux exigences de performance indiquées dans le manuel de vol.

Les vols commerciaux doivent avoir un plan de vol exploitation (OFP) établi avant le départ. En outre, on doit avoir calculé la trajectoire nette de décollage (NTOFP).

En mars 2010, TC a reconnu Buffalo Airways comme étant une entreprise ayant un système de gestion de la sécurité (SGS). TC décrit un SGS comme « un processus explicite, global et proactif destiné à gérer les risques et intégrant les systèmes opérationnels et techniques à la gestion des ressources financières et humaines pour toutes les activités liées à un DAC [Document de l'Aviation civile] »Note de bas de page 10.

L'entreprise utilise des systèmes de comptes rendus par évaluations réactives et proactives des risques. Ces systèmes permettent à l'entreprise de cerner des problèmes qui pourraient l'exposer à des risques. Une fois que des problèmes ont été cernés et évalués, on peut mettre en œuvre à l'interne un plan de mesures correctives pour les aborder et les résoudre. Durant l'année avant l'événement à l'étude, ni l'un ni l'autre des programmes d'évaluation proactive ou réactive n'a cerné de problème lié au contrôle opérationnel, aux calculs de masse et centrage, ou encore au calcul de la performance des aéronefs.

Surveillance exercée par Transports Canada

La Division de l'aviation civile de Transports Canada est responsable de la surveillance réglementaire du secteur de l'aviation civile au Canada. En 2005, le RAC a été amendé pour exiger que les titulaires de certains DAC, notamment d'un certificat d'exploitation aérienne émis en vertu de l'article 705.07 du RAC, établissent un SGS, le gèrent et s'y conforment. En juillet et août 2009, TC a fait une première évaluation du SGS de Buffalo Airways visant à confirmer que l'exploitant avait développé et mis en œuvre un SGS. TC utilise divers moyens pour s'assurer que le SGS de détenteurs de certificat est conforme au RAC (annexe D).

TC mène des activités de surveillance à 2 niveaux : celui des systèmes et celui des processusNote de bas de page 11.

[traduction] La surveillance des systèmes se fait par des évaluations ou des inspections de validation de programme (IVP). Dans le cadre de ces activités, une équipe de surveillance examine les systèmes d'une entreprise pour comprendre comment ils se conforment aux exigences réglementaires. En fonction de cette analyse, on prépare et exécute un plan d'échantillonnage pour déterminer si l'entreprise se conforme à ses exigences réglementaires, et la mesure dans laquelle elle peut maintenir cette conformité en pratique. Le résultat d'une activité de surveillance des systèmes représente des constatations quant à la conformité ou la non-conformité. Une constatation de non-conformité à ce niveau vise à inciter l'entreprise à corriger ses systèmes de manière à les rendre conformes et à les maintenir ainsi.

TC s'occupe également de la surveillance des processus en procédant à des inspections de ces derniers.

[traduction] La surveillance des processus est beaucoup plus spécialisée que la surveillance des systèmes. Dans le cadre de ces activités, des inspecteurs de la Division de l'aviation civile de TC examinent les processus de l'entreprise afin de mieux les comprendre. Les inspecteurs peuvent alors esquisser le résultat d'un processus pour déterminer si ce dernier fonctionne ou non (est-ce que le processus atteint l'objectif visé?). Le résultat d'une activité de surveillance des processus peut être une constatation de conformité (ce qui met fin à l'inspection du processus) ou de non-conformité, ou encore le déclencheur d'une activité de surveillance des systèmes.

Activités de surveillance à Buffalo Airways

Avant la mise en œuvre des SGS, TC utilisait une combinaison d'inspections et de vérifications pour assurer la surveillance des exploitants. À cette époque, le cycle de vérification et d'inspection à Buffalo Airways consistait en un enchaînement perpétuel de constatations d'inspection faisant état de conditions dangereuses, de mesures prises par l'exploitant pour corriger ces conditions et, plus tard, de récurrence des mêmes conditions.

La première évaluation par TC du SGS de Buffalo Airways a eu lieu en 2009. Dans le cadre de son enquête sur l'événement à l'étude, le BST a examiné les activités de surveillance de TC et les réponses de l'entreprise à celles-ci durant les 3 années qui ont précédé l'événement (annexe E). Durant cette période, TC a mené 4 activités de surveillance qui ont consisté en 1 évaluation du SGS, 1 inspection des processus (IP) et 2 inspections de validation de programme (IVP). Chacune de ces 4 activités de surveillance était axée sur divers éléments obligatoires du SGS.

Les exploitants sont tenus de présenter à TC des plans de mesures correctives (PMC) pour toute constatation découlant d'une activité de surveillance de TC. Les PMC doivent présenter l'analyse par l'exploitant des causes sous-jacentes de la lacune ainsi qu'un plan d'action pour la corriger. Il incombe aux inspecteurs de TC d'évaluer les PMC. Les PMC acceptés sont évalués en fonction d'un suivi soit administratif, soit sur placeNote de bas de page 12 par TC, tandis que les PMC rejetés peuvent être renvoyés à l'exploitant pour révision ou servir de fondement pour un avis de suspension du certificat d'exploitation aérienne.

Le BST a également examiné les PMC présentés par Buffalo Airways. Dans ses soumissions initiales de PMC suivant l'IVP de décembre 2011, l'exploitant a exprimé son désaccord sur plusieurs constatations, demandé des précisions quant au fondement réglementaire des lacunes cernées par TC et remis en question de façon explicite la compétence et les intentions des inspecteurs de TC. TC avait rejeté ces premiers PMC en ajoutant que le processus PMC n'était pas le forum approprié pour des critiques répétées contre Transports CanadaNote de bas de page 13. Buffalo Airways a révisé ses PMC, que TC a par la suite acceptés. L'examen du BST a dépeint l'exploitant comme étant en conflit avec l'organisme de réglementation.

Après l'événement à l'étude, TC a réalisé 2 autres activités de surveillance : une inspection des processus (IP) portant sur les processus liés au contrôle opérationnel et à la remise en service technique, suivie d'une inspection de validation de programme (IVP) axée sur le système de contrôle opérationnel, étant donné les problèmes relevés par l'IP (annexe E). Ces activités de surveillance ont cerné et documenté les problèmes de contrôle de masse et centrage décrits précédemment.

Aux fins de l'examen du système de contrôle opérationnel de l'entreprise après l'événement, les inspecteurs de TC ont adapté les feuilles de travail de surveillance que l'on utilise habituellement pour les activités liées aux sous-parties 703 et 704, pour lesquelles un SGS n'est pas encore obligatoire. Lors de la surveillance de ces exploitants, TC emploie des IVP et des IP, mais insiste sur le contrôle opérationnel et d'autres systèmes que ces exploitants doivent avoir en place.

Culture de sécurité organisationnelle et système de gestion de la sécurité

On peut définir une culture de sécurité comme étant [traduction] « des valeurs (ce qui est important) et des croyances (la façon dont les choses fonctionnent) communes qui interagissent avec les structures et systèmes de contrôle d'une organisation pour donner lieu à des normes comportementales (notre façon de faire) »Note de bas de page 14. Quand on lie une culture de sécurité à la capacité d'une organisation de gérer le risque, les organisations se situent alors dans un continuum de communications de sécurité efficaces allant d'« extrêmement décourageant » à « extrêmement favorable »Note de bas de page 15.

La documentation que fournit TC aux exploitants pour les aider dans leur transition vers un SGS insiste sur l'importance d'une culture de sécurité pour la mise en œuvre efficace d'un SGS :

Une stratégie de mise en œuvre efficace de SGS impliquera des changements dans les processus et dans les procédures, et entraînera presque certainement un virage dans la culture de l'organisme. […] Chaque organisme a une culture, bonne ou mauvaise, sûre ou dangereuse, et cette culture se retrouve dans le mode d'exploitation de tout l'organisme. Habituellement, le ton de la culture est donné du haut vers le bas. Si le gestionnaire supérieur responsable s'attache à gérer les risques relatifs à la sécurité, on retrouvera cette philosophie dans la gestion de tout l'organismeNote de bas de page 16.

Rapport du Bureau du vérificateur général

Au printemps de 2012, le Bureau du vérificateur général (BVG) a publié le rapport d'un audit qu'il a réalisé pour déterminer si TC avait géré de façon adéquate les risques associés à la supervision de son programme de sécurité de l'aviation civile.

Dans l'ensemble, le BVG a conclu que TC avait réalisé de réels progrès dans la transition vers une méthodologie de supervision qui cadre avec les SGS. Il a également conclu qu'il y avait encore du chemin à faire :

La haute direction doit maintenant voir en priorité à ce que le personnel applique les méthodes approuvées de manière uniforme et rigoureuse, à ce que les directions réalisent les examens voulus et assurent la supervision nécessaire, et à ce que soit mis en place un programme efficace d'amélioration continue. Sinon, Transports Canada n'aura pas l'assurance dont il a besoin que l'industrie de l'aviation fonctionne conformément au cadre réglementaire qui régit la sécurité de l'aviation civile au CanadaNote de bas de page 17.

Dans son rapport, le BVG a émis des recommandations quant au nombre d'activités de surveillance à mener, à la manière dont la surveillance doit être faite et documentée, et à la supervision par la direction des activités de surveillance. Le rapport n'a pas commenté l'objet des activités de surveillance, sauf pour noter qu'avec l'adoption d'un SGS, le rôle d'un inspecteur changeait de celui de vérificateur de la conformité à la réglementation, à celui d'évaluateur de systèmes, tout en procédant à des vérifications selon l'approche traditionnelle, si nécessaireNote de bas de page 18.

Liste de surveillance du Bureau de la sécurité des transports du Canada

La gestion de la sécurité et la surveillance figurent parmi les enjeux de la Liste de surveillance 2014 du BST, soit la liste des enjeux qui posent les plus grands risques au système de transport du Canada. Ce problème est énoncé de la façon suivante : « Certaines entreprises de transport ne gèrent pas leurs risques de sécurité de façon efficace, et Transports Canada ne parvient pas toujours, au moyen de ses pratiques de surveillance et de ses interventions, à les amener à changer leurs pratiques d'exploitation non sécuritaires ».

La Liste de surveillance a proposé plusieurs mesures pour corriger ces lacunes. Les entreprises qui possèdent un SGS doivent démontrer qu'il fonctionne bien, c'est-à-dire qu'il permet de cerner les dangers et que des mesures efficaces d'atténuation des risques sont mises en œuvre. Si les entreprises ne peuvent pas assurer une gestion de la sécurité efficace, Transports Canada doit non seulement intervenir, mais le faire de façon à changer les pratiques d'exploitation non sécuritaires.

Rapports de laboratoire du BST

Le BST a complété les rapports de laboratoire suivants dans le cadre de la présente enquête :

Analyse

L'aéronef était homologué, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. L'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur. La fatigue n'est pas considérée comme un facteur contributif à l'événement à l'étude. L'analyse portera donc sur les aspects mécaniques de la panne moteur, les pratiques d'exploitation de l'entreprise, le système de gestion de la sécurité, la culture de sécurité, et la surveillance exercée par Transports Canada (TC).

Rupture du cylindre et dispositif de mise en drapeau

La rupture du cylindre no 1 du moteur droit a été causée par une crique de fatigue préexistante située dans une rainure du filetage sur la surface de contact extérieure du barillet. La séparation de la culasse et de la tubulure d'admission qui s'en est suivie a pu entraîner une fuite de mélange suralimenté d'air et de carburant et d'huile moteur à l'intérieur du compartiment moteur, où l'allumage par étincelle du cylindre défaillant, ou des tuyaux d'échappement chauds à proximité immédiate, ont été la source de l'incendie moteur.

Le point d'origine de la crique de fatigue sur le cylindre défaillant était difficile d'accès et aurait été inobservable à l'inspection avant l'événement. La crique de fatigue n'avait pas percé la paroi du barillet, et il aurait fallu retirer le cylindre pour inspecter la face intérieure du barillet. Des vérifications de la pression différentielle du cylindre n'auraient pas non plus permis de détecter cette crique, étant donné que la culasse qui entoure le barillet aurait empêché la crique de s'ouvrir davantage. La fatigue est le mode de défaillance, et non sa cause. Les dommages à la surface au point d'origine de la crique de fatigue après la séparation étaient tels que la cause même n'a pu être déterminée.

La mise en drapeau de l'hélice d'un moteur inopérant est cruciale pour la performance d'un aéronef multimoteur, car elle réduit la traînée parasite en changeant l'angle de calage des pales vers le grand pas par rapport à la trajectoire de vol de l'aéronef. Dans la plupart des cas, l'hélice cesse de tourner. Une hélice qui n'est pas mise en drapeau, ou qui tourne en moulinet, induit une forte traînée parasite qui compromet la performance de l'aéronef.

Pour maintenir la vitesse indiquée égale ou supérieure à la valeur minimale de 90 KIAS (vitesse indiquée en nœuds), le vol Buffalo 168 (BFL168) a sacrifié la performance de montée et a tout juste réussi à maintenir une altitude constante. Les manœuvres de l'aéronef pour retourner à l'aéroport ont entraîné une perte d'altitude qui s'est soldée par une collision avec le relief.

Après l'activation du dispositif de mise en drapeau de l'hélice droite, cette dernière n'a jamais atteint la mise en drapeau complète à cause d'une défaillance du dispositif. Des essais menés après l'événement sur le dispositif de mise en drapeau de l'hélice ont montré que c'est probablement un palier grippé qui a causé la panne du moteur de la pompe à huile. L'activation du dispositif de mise en drapeau active le moteur de pompe qui tourne jusqu'à ce qu'il développe une pression d'huile suffisante pour déclencher le contacteur d'arrêt automatique manométrique, réglé à 600 livres par pouce carré (lb/po²), ce qui survient lorsque la mise en drapeau est complète. Le palier défectueux a probablement ralenti le moteur de sorte qu'il n'a pu développer une pression d'huile suffisante. Si la pression de déclenchement n'est pas atteinte et que l'équipage de conduite ne surveille pas le fonctionnement du dispositif de mise en drapeau, la pompe continue de fonctionner jusqu'à sa défaillance. Il n'y a pas de pompe de secours.

Performance et masse et centrage de l'aéronef

La procédure de l'entreprise pour maintenir des données de masse et centrage précises pour sa flotte était inefficace. Des écarts entre le devis de masse et centrage de la dernière pesée, en 1990, et les modifications subséquentes ne reflétaient pas la configuration réelle de l'aéronef. Le programme de contrôle de masse et centrage de Buffalo Airways, qui avait été approuvé par TC, n'exigeait pas que l'entreprise pèse de nouveau ses aéronefs tous les 5 ans, mesure qui est conforme à l'exception permise en vertu de l'appendice C de la Norme 625 du Règlement de l'aviation canadien (RAC).

Comme l'indique le manuel de vol de l'aéronef (AFM), la performance de ce dernier est fonction de sa masse. Lors de l'événement à l'étude, les calculs de masse et centrage complets et précis n'ont pas été faits avant le décollage. Comme le devis de masse et centrage de l'aéronef n'avaient pas été révisé depuis 1990, l'utilisation des poids réels des passagers et des marchandises n'aurait peut-être pas donné une masse au décollage exacte. Ainsi, l'équipage de conduite ne pouvait déterminer exactement les performances de l'aéronef durant un décollage normal. Comme l'a montré un rapport australien de 1994 sur l'accident mettant en cause un DC-3Note de bas de page 19, les aéronefs qui excèdent leur masse maximale au décollage certifiée (MCTOW) subissent une forte dégradation de leur performance de montée en cas de panne moteur avec une hélice qui tourne en moulinet.

En outre, l'entreprise n'avait aucun moyen de prouver que ses aéronefs pouvaient satisfaire aux exigences de performance du RAC relativement à la trajectoire nette de décollage (NTOFP), bien que son propre manuel d'exploitation comprenne cette exigence. Cette lacune exposait chaque vol à des risques.

Lorsque les entreprises ne suivent pas les procédures opérationnelles de leur propre manuel d'exploitation, elles risquent de ne pas être en mesure d'assurer la sécurité des vols.

Culture et système de gestion de la sécurité de l'entreprise

Un certain nombre de conditions ont fait que l'aéronef n'a pu prendre de l'altitude, entre autres la pratique d'exploiter des aéronefs en surcharge. La présente partie de l'analyse porte sur cette pratique; comment elle est devenue acceptable au sein de l'organisation et comment le système de gestion de la sécurité (SGS) de l'exploitant ne l'a ni relevée ni corrigée. Cette partie examine également comment la méthode de surveillance du SGS de l'exploitant utilisée par l'organisme de réglementation a réduit la probabilité que ce dernier puisse cerner cette pratique dangereuse dans le cadre de sa surveillance réglementaire.

Le SGS a pour but de promouvoir une gestion proactive des risques par les exploitants. La réglementation détermine les éléments et processus nécessaires d'un SGS, mais la mesure dans laquelle ils seront efficaces dépend de la culture de sécurité de l'organisation qui les met en œuvre. Tout comme les valeurs et les croyances animent les comportements individuels, la culture de sécurité organisationnelle détermine la mesure dans laquelle on utilisera les processus et éléments obligatoires. En particulier, il est peu probable qu'une culture de sécurité qui ne favorise pas un SGS dynamique comprenne des processus efficaces pour signaler les dangers.

Lors de l'événement à l'étude, l'aéronef a décollé sans que l'on ait fait les calculs de masse et centrage; on a déterminé par la suite que sa masse au décollage était supérieure à la masse maximale au décollage certifiée (MCTOW). L'enquête a révélé que cette pratique était courante, et que l'on faisait normalement les calculs de masse et centrage en route, sans renseignements précis et sans utiliser les poids standard ou réels des passagers, comme l'exige le Manuel d'exploitation de la compagnie (COM). Les équipages de conduite ne saisissaient peut-être pas toute l'ampleur des risques liés à l'exploitation d'aéronefs en surcharge, puisqu'ils ne calculaient pas la performance nette de décollage comme l'exigent le Règlement de l'aviation canadien (RAC) et le COM. Par conséquent, aucune évaluation du franchissement d'obstacle en cas de panne moteur durant le décollage n'avait été faite. Lorsque les adaptations de procédures réussissent, l'on a tendance à les adopter. Ainsi, il est probable que des vols antérieurs réussis avec des aéronefs en surcharge aient rassuré les équipages de conduite quant à leur performance future, sans égard à la performance de l'aéronef en cas de situation d'urgence. Étant donné que ni l'un ni l'autre des programmes d'évaluation proactive ou réactive n'a cerné de problème lié au contrôle opérationnel, aux calculs de masse et centrage, ou encore au calcul de la performance des aéronefs, et que la haute direction était au courant de la pratique qui consistait à ajuster les calculs de masse et centrage après le départ pour les maintenir en deça des limites, et qu'elle l'acceptait, il était fort peu probable que ces pratiques dangereuses auraient été signalées ou corrigées par l'entremise du SGS de l'entreprise.

Il y avait d'autres indications de l'opposition de la culture organisationnelle à un système qui exigeait de Buffalo Airways qu'elle adopte un rôle proactif dans la détermination des dangers et la réduction des risques. La réponse de l'entreprise aux lacunes relevées dans le cadre des activités de surveillance de TC fait état d'une relation hostile entre l'entreprise et l'organisme de réglementation. L'entreprise a réfuté les fondements réglementaires des constatations, a remis en question la compétence des inspecteurs de TC et a tout d'abord refusé d'assumer la responsabilité des lacunes constatées. Le portrait d'ensemble que dépeint la présente enquête est celui d'une organisation qui répondait aux exigences minimales de la réglementation, et encore, seulement lorsque l'organisme de réglementation l'y contraignait. La mise en œuvre d'un SGS dans une culture qui se contente seulement de se conformer à la réglementation a peu de chances d'être efficace. Le SGS de l'exploitant n'a pu ni relever ni corriger les pratiques opérationnelles dangereuses.

Surveillance exercée par Transports Canada

TC doit exercer une surveillance de toute une gamme d'exploitants qui ont des cultures de sécurité variées. C'est donc dire que TC doit adopter une approche de surveillance souple. Une telle approche doit prévoir des validations moins fréquentes des programmes et processus dans le cas d'exploitants qui ont fait preuve d'une gestion proactive du risque, et d'une surveillance plus fréquente visant à garantir à tout le moins un minimum de conformité à la réglementation dans le cas d'exploitants à l'autre extrémité de la gamme.

TC l'a compris et a fondé la planification de ses activités de surveillance sur une approche axée sur le risque qui prévoit une surveillance plus fréquente des entreprises qui, selon les évaluations de TC, posent les plus grands risques. D'après cette approche, c'est la fréquence de la surveillance qui change en fonction du profil de l'exploitant, tandis que l'objet des activités de surveillance demeure le même. Au cours des 3 années qui ont précédé l'événement à l'étude, TC a mené 4 activités de surveillance à Buffalo Airways, chacune d'elles ciblant divers éléments du SGS obligatoire. Les pratiques dangereuses notées dans l'événement à l'étude (aéronefs en surcharge et omission des calculs de performance requis) n'avaient pas été relevées, et il n'y avait aucune trace d'activités de surveillance qui auraient examiné tout particulièrement la conformité à d'autres parties du RAC ou des Normes de service aérien commercial (CASS). L'édition du document SUR-001Note de bas de page 20 en vigueur durant la majorité de la période visée par la présente enquête prévoyait des vérifications directes de la conformité, y compris des vérifications à l'aire de trafic et en vol, mais celles-ci ont été omises durant cette période, et la plus récente édition du document SUR-001 ne comprend aucune description de telles activités de surveillance additionnelles.

En principe, tout processus stipulé par la réglementation peut faire l'objet d'une inspection de processus (IP) ou d'une inspection de validation de processus (IVP). Des IP ciblées dans toute une gamme de domaines peuvent très bien faire ressortir un manque de conformité à la réglementation qui stipule ces processus. Par exemple, rien n'empêche TC de faire une IP axée sur le système de contrôle opérationnel ou le système de contrôle du chargement de l'exploitant. Toutefois, dans le cas de Buffalo Airways, toutes les activités de surveillance menées durant les 3 années qui ont précédé l'événement à l'étude ont porté sur des processus relatifs au SGS. Les activités de surveillance de TC n'ont pas cerné les pratiques d'exploitation dangereuses du transporteur en matière de calculs de masse et centrage et de la trajectoire nette de décollage. Par conséquent, ces pratiques dangereuses ont persisté.

Après l'événement, TC a mené 2 activités de surveillance qui ont nettement fait ressortir les lacunes du contrôle opérationnel. Aux fins de ces activités de surveillance, les inspecteurs de TC ont modifié leur approche en empruntant un outil servant à vérifier la conformité à la réglementation par l'examen du système de contrôle opérationnel de l'entreprise. On utilise normalement cette approche dans le cas d'entreprises qui ne sont pas encore tenues d'avoir un SGS.

Bien que la mise en place d'un SGS peut améliorer énormément la sécurité en encourageant les exploitants à adopter une approche systémique pour gérer la sécurité de façon proactive, l'organisme de réglementation doit néanmoins être assuré de la conformité à la réglementation existante, en particulier dans le cas d'exploitants qui sont peu enclins à faire plus que le minimum à ce chapitre. Pour évaluer la conformité à la réglementation (ce qui a pour effet d'atténuer suffisamment les risques), les inspecteurs doivent avoir des processus appropriés et vérifier minutieusement les procédures et pratiques d'exploitation en place.

La méthode courante de surveillance réglementaire porte presque exclusivement sur les processus SGS de l'exploitant et omet presque totalement la vérification de la conformité à la réglementation; une telle méthode risque d'être insuffisante pour corriger les pratiques et conditions dangereuses. Si TC n'adopte pas une approche équilibrée qui réunit des inspections de conformité et des vérifications des processus de gestion de la sécurité, les pratiques d'exploitation non sécuritaires risquent de passer inaperçues, ce qui accroît le risque d'accident.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Aucun calcul précis de masse et centrage au décollage n'a été terminé avant le départ; ainsi, la masse de l'aéronef dépassait sa masse maximale au décollage certifiée.
  2. La rupture du cylindre no 1 du moteur droit au cours du décollage était attribuable à une crique de fatigue préexistante qui a causé un incendie moteur.
  3. Après l'activation du dispositif de mise en drapeau de l'hélice droite, cette dernière n'a jamais atteint la mise en drapeau complète, probablement à cause d'un palier grippé dans la pompe du dispositif de mise en drapeau.
  4. L'hélice droite tournant en moulinet a accru la traînée qui, combinée au fait que l'aéronef était en surcharge, a nui à la capacité de l'aéronef de maintenir son altitude, et ce dernier a percuté le relief avant d'atteindre la piste d'atterrissage.
  5. Le système de gestion de la sécurité de l'exploitant n'a pu ni relever ni corriger les pratiques opérationnelles dangereuses.
  6. Les activités de surveillance de Transports Canada n'ont pas cerné les pratiques d'exploitation dangereuses du transporteur en matière de calculs de masse et centrage et de la trajectoire nette de décollage. Par conséquent, ces pratiques dangereuses ont persisté.

Faits établis quant aux risques

  1. Lorsque les entreprises ne suivent pas les procédures opérationnelles de leur propre manuel d'exploitation, elles risquent de ne pas être en mesure d'assurer la sécurité des vols.
  2. Si Transports Canada n'adopte pas une approche équilibrée qui réunit des inspections de conformité et des vérifications des processus de gestion de la sécurité, les pratiques d'exploitation non sécuritaires risquent de passer inaperçues, ce qui accroît le risque d'accident.
  3. L'absence d'enregistrement de la parole dans le poste de pilotage et de données de vol, dans le cadre d'une enquête, pourrait empêcher la détermination et la communication d'importantes lacunes de sécurité qui pourraient améliorer la sécurité des transports.

Autres faits établis

  1. Selon le Règlement de l'aviation canadien actuel, les aéronefs à moteurs à pistons de catégorie transport peuvent transporter des passagers sans être munis d'enregistreurs de données de vol et de la parole dans le poste de pilotage.
  2. La partie de la formation donnée à l'agent de bord qui portait sur la gestion des ressources de l'équipage (CRM) n'avait pas été achevée.

Mesures de sécurité

Mesures de sécurité prises

Buffalo Airways

L'entreprise exige désormais la pesée de chacun des passagers et de leurs bagages aux fins des calculs de masse et centrage avant le décollage. L'entreprise a également donné à forfait la création de cartes de trajectoire nette de décollage pour ses vols.

Le 25 février 2015, Transports Canada a approuvé une révision du Manuel d'exploitation de la compagnie de Buffalo Airways. Par suite de l'événement à l'étude, le transporteur a apporté les changements suivants :

De plus, Buffalo Airways a

Le présent rapport conclut l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication de ce rapport le . Le rapport a été officiellement publié le .

Annexes

Annexe A – Carte d’aérodrome de Yellowknife

Annexe A – Carte d'aérodrome de Yellowknife
Image de la carte de l'aérodrome de Yellowknife [disponible en anglais seulement]

Source : NAV CANADA, Canada Air Pilot (CAP 1) [disponible en anglais seulement]

Annexe B – Trajectoire de vol de C-GWIR

Annexe B – Trajectoire de vol de C-GWIR
Image de la trajectoire de vol de C-GWIR

Source : Google Earth, avec annotations du BST

Annexe C – Vitesse indiquée par rapport à l’altitude (données extrapolées)

Annexe C – Vitesse indiquée par rapport à l'altitude (données extrapolées)
Image de la charte profile de vitesse indiquée par rapport à l'altitude (données extrapolées)

[disponible en anglais seulement]

Annexe D – Définitions de la Division de l’aviation civile de Transports Canada [traduction]

Annexe D – Définitions de la Division de l'aviation civile de Transports Canada [traduction]
Terme Définition
Évaluation L’activité de surveillance qui sert à évaluer l’efficacité et le niveau de conformité au RAC [Règlement de l’aviation canadien].
DAC Document de l’Aviation civile
Plan de mesures correctives (PMC) Un plan que l’on présente en réponse à des constatations. Le PMC résume la façon dont l’entreprise propose de corriger les non-conformités à la réglementation qui ont été constatées et d’assurer une conformité continue.
Surveillance accrue Un processus pour surveiller étroitement une entreprise où l’on a constaté :
  1. des problèmes graves et systémiques qui ont entraîné des non-conformités aux exigences réglementaires, d’après les résultats d’une IVP ou d’une évaluation; ou
  2. des antécédents de non-conformité persistante ou une incapacité avérée de se conformer à la réglementation, constatés par des moyens autres qu’une IVP ou une évaluation.
Entreprise Le titulaire d’un ou de plusieurs DAC émis par la Division de l’aviation civile de Transports Canada sous la direction d’un seul gestionnaire supérieur responsable. Par exemple, une entreprise est titulaire d’un brevet d’organisme de maintenance agréé, d’un certificat d’exploitation aérienne, d’un certificat d’organisme de formation agréé et d’organisme d’approbation de conception. Le terme « entreprise » sert à dénoter que la surveillance vise l’entreprise au complet et non pas un particulier canadien.
Inspection de processus (IP) Un examen approfondi d’un processus d’une entreprise que l’on utilise pour produire un résultat qui permet de vérifier si ce processus fonctionne ou non.
Inspection de validation de programme (IVP) Un processus comprenant une recherche et un examen sur place d’un ou de plusieurs éléments d’un SGS (système de gestion de la sécurité) ou d’autres secteurs d’une entreprise soumis à la réglementation.
Surveillance Toutes les activités directement liées à l’évaluation par la Division de l’aviation civile de Transports Canada de la conformité d’une entreprise aux exigences réglementaires applicables, y compris les évaluations, les inspections de validation de programme et les inspections de processus.

Annexe E – Sommaire des activités de surveillance de Transports Canada

Activités de surveillance menées par Transports Canada à Buffalo Airways au cours des 3 années précédant l'événement

Annexe E – Sommaire des activités de surveillance de Transports Canada (1)
Date Type d'activité de surveillance Portée Constatations et observations
15 nov. 2010
au
26 nov. 2010
Évaluation du système de gestion de la sécurité (SGS)

Conformité à chacun des 6 éléments d’un SMS :

  • Plan de gestion de la sécurité
  • Documentation
  • Surveillance de la sécurité
  • Formation
  • Assurance de qualité opérationnelle
  • Préparatifs d’urgence
  • 10 mois après l’IVP précédente
  • 1 an et 4 mois depuis la première évaluation du SGS
  • A donné lieu à 1 constatation mineure, 8 constatations modérées et 3 constatations majeures (aucune ne posant un risque imminent à la sécurité)
24 août 2011 Inspection de processus (IP) S’assurer que l’organisation avait un système de surveillance de la sécurité (élément 3 du SGS).
  • Une constatation (non-conformité majeure) concernant les exigences en matière de formation, de sensibilisation et de compétences stipulées à l’article 107.03 du RAC. Parmi les exemples de non-conformité : l’entreprise avait présenté des modifications à son COM qui contrevenaient aux articles 705.25/55 du RAC.
  • Le plan de mesures correctives de l’entreprise portait sur un processus employé pour approuver les modifications au Manuel d’exploitation de la compagnie.
5 déc. 2011 Inspection de validation de processus (IVP) Déclaration du but de l’autorité convocatrice de TC non disponible. Les constatations indiquent une attention marquée sur divers éléments du SGS.
  • 13 mois après l’IVP précédente
  • Constatations en matière de :
    • gestion des dossiers;
    • délai pour achever les enquêtes sur les dangers, les accidents et les incidents;
    • formation, sensibilisation et compétence
    • assurance de la qualité de la gestion de la sécurité;
    • tenue d’audits internes.
10 déc. 2012 Inspection de validation de processus (IVP) Vérifier que l’organisation a un programme d’assurance qualité efficace et un système de surveillance de la sécurité (éléments 3 et 5 du SGS)
  • 12 mois après l’IVP précédente (8 mois avant l’événement)
  • 9 constatations, toutes relatives aux processus SGS :
    • examen du SGS par la direction;
    • documentation du SGS (2 fois);
    • processus réactifs du SGS;
    • processus proactifs du SGS;
    • gestion des risques
    • formation, sensibilisation et compétence
    • assurance de la qualité du SGS (2 fois)

Événement, 19 août 2013

Annexe E – Sommaire des activités de surveillance de Transports Canada (2)
Date Type d'activité de surveillance Portée Constatations et observations
3 sept. 2013
au
6 sept. 2013
Inspection de processus (IP) Processus liés au contrôle opérationnel et à la remise en service technique
  • 5 constatations :
    • contrôle de masse et centrage – article 605.86 du RAC
    • formation des agents de bord – article 705.109 du RAC
    • contrôle de masse et centrage – article 705.39 du RAC
    • programme de formation – article 705.124 du RAC (concernant le calcul de la trajectoire nette de décollage et les limites avec un moteur inopérant)
    • devoirs du titulaire de certificat – article 700.09 du RAC (gestionnaire des opérations qui a manqué à son devoir, compte tenu des constatations ci-dessus)
30 sept. 2013
au
4 oct. 2013
Inspection de validation de processus (IVP)

Inspection axée sur le contrôle opérationnel par l’entreprise à la suite des problèmes relevés par l’IP.

  • Feuilles de travail de contrôle opérationnel adaptées destinées aux exploitants 703 et 704 plutôt que d’utiliser des outils axés sur le SGS. Diveres constatation concernant les sous-sections 703 et 705 du RAC et les Normes de service aérien commercial (CASS)
  • 10 constatations (5 modérées, 5 majeures) :
    • surveillance du temps de service en vol (2 fois)
    • exécution des tâches par le gestionnaire des opérations (plan de vol exploitation non signé, suivi de la formation donnée par l’entreprise)
    • membres d’équipage qui exécutent des tâches sans la formation requise
    • tenue inadéquate des dossiers de formation des pilotes
    • préposés au suivi des vols non formés selon le programme de formation approuvé
    • vols autorisés sans conformité au RAC
    • incapacité d’établir la vérification de la trajectoire nette de décollage (article 705.57 du RAC)
    • incapacité de produire les dossiers de formation sur les routes empruntées  et les aérodromes desservis, et sur les pistes de fortune
  • Exploitant placé sous surveillance accrue – TC a fait état d’une importante et immédiate progression. Remplacement du gestionnaire supérieur responsable et correction des problèmes de contrôle opérationnel.
  • Une évaluation complète du SGS a eu lieu en mars 2014, et Buffalo Airways a été soustrait à la surveillance accrue.