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Rapport d'enquête aéronautique A10H0004

Sortie en bout de piste
de l'Embraer EMB-145LR N847HK
exploité par Trans States Airlines LLC
à l'Aéroport international MacDonald-Cartier
d'Ottawa (Ontario)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Un Embraer EMB-145LR (immatriculé N847HK, numéro de série 14500857), exploité par Trans States Airlines LLC et assurant le vol 8050 de United Express en provenance de l'aéroport international Washington Dulles, se pose sur la piste 07 de l'Aéroport international Macdonald-Cartier d'Ottawa à 14 h 30, heure avancée de l'Est, et sort en bout de piste. L'aéronef s'immobilise à 550 pieds au-delà de la fin de la piste 07 et à 220 pieds à gauche de l'axe de la piste. Le nez et le poste de pilotage sont endommagés lorsque la roue avant s'affaisse. Il y a 33 passagers et 3 membres d'équipage à bord. Deux membres d'équipage et 1 passager subissent des blessures légères.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Après avoir attendu au sol pendant 29 minutes, le vol 8050 de United Express (LOF8050), assuré par l'avion à réaction régional Embraer EMB-145LR, exploité par Trans States Airlines LLC (TSA), a décollé de l'aéroport international Dulles de Washington (KIAD) à 13 h 26Footnote 1 pour effectuer un vol régulier à destination de l'Aéroport international Macdonald-Cartier d'Ottawa (CYOW) (Ontario). À bord, il y avait 33 passagers, 2 pilotes et 1 agent de bord. Il s'agissait de la deuxième de 4 étapes que l'équipage devait faire ce jour-là. Le copilote était le pilote aux commandes.

Avant le début de la descente, l'équipage de conduite a reçu des renseignements sur les conditions météorologiques à Ottawa du service automatique d'information de région terminale (ATIS). Le message ATIS contenant l'information Yankee a été reçu à 14 h 05, et l'information Zulu à 14 h 14.

Le message ATIS contenait l'information Yankee suivante : information Yankee de l'Aéroport international d'Ottawa, conditions météorologiques à 13 h 36, vent du 100° magnétiques (M) à 8 nœuds, visibilité de 15 milles terrestres (sm), plafond avec nuages fragmentés à 2800 pieds au-dessus du sol (agl), plafond avec couvert nuageux à 5000 pieds agl, température de 18 °C, point de rosée de 13 °C et calage altimétrique à 29,90 pouces de mercure (po Hg); approche à l'aide du système d'atterrissage aux instruments (ILS) piste 07, atterrissages et départs pistes 07 et 04, atterrissage et attente à l'écart (LAHSO); avisez le contrôle de la circulation aérienne (ATC) si incapable; informez l'ATC que vous avez l'information Yankee.

Le message ATIS contenait l'information Zulu suivante : information Zulu de l'Aéroport international d'Ottawa, conditions météorologiques à 14 h, vent du 100 °M à 9 nœuds, visibilité de 15 sm, plafond avec nuages fragmentés à 2700 pieds agl, plafond avec couvert nuageux à 5000 pieds agl, température de 18 °C, point de rosée de 13 °C et calage altimétrique à 29,86 po Hg; approche ILS piste 07, atterrissages et départs pistes 07 et 04, LAHSO; avisez l‘ATC si incapable; informez l'ATC que vous avez l'information Zulu.

L'équipage a fait un exposé en prévision d'une approche ILS de la piste 07 à CYOW.

L'aéronef a été guidé par l'ATC vers une étape de base à environ 10 milles marins (nm) de l'aéroport. À 14 h 26, l'ATC a signalé à l'équipage que le vent soufflait du 160 °M à 10 nœuds avec rafales à 16 nœuds, et que la visibilité était de 10 sm avec pluie de faible intensité.

Pendant le dernier virage pour intercepter le radiophare d'alignement de piste, le contrôleur de l'aéroport a informé l'équipage qu'on avait entamé le processus de changement de la piste en service à la piste 14. On a donné le choix à l'équipage de poursuivre sur la piste 07 ou de passer à la piste 14. En raison du temps de vol plus long, du carburant supplémentaire qui serait nécessaire pour manœuvrer l'aéronef jusqu'à la piste 14 et du fait que l'aéronef était déjà établi en approche finale de la piste 07, l'équipage a décidé de continuer vers la piste 07.

La trajectoire d'approche finale a été interceptée à 7 nm de l'aéroport. L'aéronef a amorcé la descente finale au moment de l'interception de l'alignement de descente, à une position d'environ 4,7 nm du seuil, le pilote automatique accouplé au radiophare. À l'approche du repère d'approche finale, à 3,9 nm du seuil, le train d'atterrissage a été déployé, les volets ont été réglés à 22° en position d'atterrissage, et le pilote automatique a été débranché. À 14 h 28, la tour de contrôle a fourni à l'équipage des renseignements à jour sur le vent : 160 °M à 10 nœuds avec rafales à 16 nœuds. À environ 1000 pieds agl et à 2,9 nm du seuil, la vitesse indiquée en nœuds (KIAS) était stable à 150 nœuds. Peu de temps après, les essuie-glaces du pare-brise ont été activés, et l'équipage a indiqué qu'il avait la piste en vue.

Lorsque l'aéronef a franchi les minimums d'approche, soit 200 pieds agl et 0,3 nm du seuil, la vitesse indiquée était de 144 KIAS. L'aéronef a survolé le seuil de la piste 07 à 49 pieds agl, à une vitesse de 139 KIAS. Le toucher des roues de l'aéronef s'est effectué en douceur, et le microcontacteur de train s'est activé momentanément à 14 h 30 min 15 s, à 1740 pieds du seuil. À ce stade, le nez était encore dans les airs, et l'aéronef flottait. Deux secondes plus tard, à 2270 pieds du seuil et à une vitesse de 132 KIAS, le deuxième microcontacteur de train s'est activé, et la roue avant a touché le sol (annexe B). Les enregistrements vidéo captés au moment de l'atterrissage indiquent que la piste était mouillée.

Le copilote appuyait sur les pédales de frein au moment de l'activation du deuxième microcontacteur de train; tous les déporteurs sont sortis automatiquement après la prise de contact de la roue avant avec le sol. Le copilote a continué à freiner jusqu'à ce que les freins maximaux soient commandés. Sentant que la vitesse ne diminuait pas, le copilote en a informé le commandant de bord, qui a ensuite pris les commandes de l'aéronef et a lui aussi serré les freins au maximum. Le serrage des freins n'a pas permis de ralentir l'aéronef.

L'aéronef était sur l'axe de la piste jusqu'à 200 pieds approximativement avant l'extrémité de la piste, où il s'est déporté sur la gauche. L'aéronef a quitté la surface revêtue de la piste à une vitesse d'environ 62 KIAS. Il a poursuivi sa course sur la surface gazonnée sur une distance d'environ 120 pieds, où il y a ensuite eu une brusque dénivellation d'environ 2 pieds. Le train avant s'est affaissé vers l'arrière, mais l'aéronef a continué de déraper. Il s'est immobilisé à 550 pieds de l'extrémité de la piste et à 220 pieds à gauche de l'axe de la piste. L'agent de bord a entamé la procédure d'évacuation des passagers.

Tués et blessés

Il y avait 33 passagers et 3 membres d'équipage à bord. Deux des membres d'équipage et 1 passager ont subi des blessures mineures (tableau 1).

Tableau 1. Blessures
Équipage de conduite Passagers Tiers Total
Tués - -
Blessés graves
Blessés légers 2 1 3
Indemnes 1 32 33
Total 3 33 36

1.3 Dommages à l'aéronef

L'aéronef a été endommagé de façon importante après avoir quitté la piste.

1.4 Autres dommages

Au cours de l'accident, ni la piste ni la plate-forme antisouffle n'a été endommagé; 1 feu d'extrémité de piste a été endommagé.

1.5 Renseignements sur le personnel

1.5.1 Équipage de conduite

L'équipage de conduite à bord de l'aéronef comprenait 1 commandant de bord, 1 copilote et 1 agent de bord. Le commandant de bord et le copilote du vol LOF8050 détenaient chacun une licence de pilote de ligne des États-Unis. Les membres de l'équipage avaient été jumelés pendant 4 jours commençant le jour avant l'événement.

Les dossiers indiquent que l'équipage de conduite possédait les licences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol, conformément à la réglementation en vigueur (tableau 2).

Le commandant de bord et le copilote travaillaient pour TSA depuis approximativement 10 ans et 4 ans, respectivement. L'agent de bord travaillait pour TSA depuis environ 8 ans.

Tableau 2. Renseignements sur le commandant de bord et le copilote
Commandant de bord Copilote
Licence de pilote Pilote de ligne Pilote de ligne
Dernier examen médical 11 janvier 2010 15 février 2010
Heures de vol au total 11 400 3000
Heures de vol sur type 3645 2691
Heures de vol dans les 6 derniers mois 450 500
Heures de vol sur type dans les 30 derniers jours 70 79
Heures de service avant l'événement 5 5
Jours de repos avant le début du jumelage 8 3

1.5.2 Emploi du temps des pilotes dans les 72 dernières heures

Les habitudes de sommeil du commandant de bord variaient, mais la durée moyenne de sommeil signalée était de 6 à 7 heures de sommeil entre 21 h 30 et 8 h. Le 15 juin, le commandant de bord s'est réveillé à 5 h (4 h, heure locale) et a fait la navette par aéronef de son domicile à Sand Springs (Oklahoma) à Dallas (Texas), et ensuite à KIAD, où sa journée de service a débuté à 16 h 01.

Après avoir effectué 3 étapes, l'équipage a terminé sa journée de service à l'aéroport international de Greenville-Spartanburg (KGSP). La journée de service de l'équipage de conduite devait initialement se terminer à 22 h 38 à KGSP. Cependant, en raison des conditions météorologiques et des retards, les membres ne sont arrivés à l'hôtel à Greenville (Caroline du Sud) qu'à 0 h 30 le 16 juin.

Le commandant de bord a dormi de 2 h 30 à 6 h 30 le 16 juin 2010, et, après avoir pris l'autobus à 9 h, a commencé sa journée de service à 9 h 25. Le commandant de bord a volé de KGSP à KIAD, puis à CYOW. Ainsi, le commandant de bord a eu 4 heures de sommeil (soit de 2 à 3 heures de moins que d'habitude) au cours des 33,5 heures avant l'accident.

Le copilote a déclaré obtenir normalement 7,5 heures de sommeil léger en moyenne, interrompu de quelques périodes d'éveil dans la nuit. Le 15 juin, le copilote s'est réveillé à 4 h et a fait la navette de son domicile à Charleston (Caroline du Sud) jusqu'à KIAD. Le copilote a obtenu 4,5 heures de repos ininterrompu dans la salle de service de l'équipage de 7 h 30 à 12 h, a suivi le même horaire de travail que le commandant de bord, et est allé dormir à l'hôtel à Greenville (Caroline du Sud) à 2 h 30. Le copilote n'a pas dormi profondément; il s'est réveillé 2 fois pendant la nuit environ 15 minutes chaque fois. Le copilote s'est finalement réveillé et levé à 8 h, a pris l'autobus de 9 h et a commencé sa journée de service à 9 h 25. Le copilote a vraisemblablement eu 5 heures de sommeil au cours des 26,5 heures avant l'événement.

L'équipage a obtenu la période de repos minimale de 9 heures, ce qui comprend le temps pour se rendre à l'aéroport et en revenir. Ces horaires de travail respectent les règles liées aux heures de travail et de repos prévues à la section 121.471 des United States Federal Aviation Regulations (FAR). Néanmoins, l'enquête a permis de déterminer que les pilotes étaient préoccupés de subir les effets de la fatigue pendant la période de travail précédant l'accident.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

Tableau 3. Renseignements sur l'aéronef
Constructeur Embraer Inc.
Type et modèle EMB-145LR
Année de construction 2004
Numéro de série 14500857
Certificat de navigabilité Délivré le 10 février 2004
Total des heures/cycles de la cellule 14 782,3 heures/13 829 cycles
Type de moteur (nombre) Rolls Royce AE3007A1 (2)
Masse maximale autorisée au décollage 48 501 livres

1.6.1 Généralités

Les dossiers indiquent que l'aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance de la cellule ou un mauvais fonctionnement d'un système, que ce soit avant ou pendant le vol. En utilisant le poids réel des bagages et des poids normalisés pour les passagers, l'équipe d'enquête a calculé que la masse de l'aéronef à l'atterrissage était de 39 352 livres. La masse et le centre de gravité se trouvaient dans les limites prescrites pour un atterrissage avec volets réglés à 22° sur la piste 07.

L'aéronef EMB-145LR est un avion à réaction régional de 50 places construit par Embraer du Brésil. Tous les EMB-145LR sont équipés de déporteurs et d'un dispositif de freinage antipatinage pour ralentir et immobiliser l'aéronef. Au sol, avec la masse de l'aéronef reposant sur les roues, les 4 déporteurs se déploient tous automatiquement. Les déporteurs accroissent la traînée et aident le freinage en entraînant une perte de portance des ailes et le transfert de la masse de l'aéronef des ailes au train d'atterrissage. Tout a fonctionné normalement.

En option, l'EMB-145LR peut être équipé d'inverseurs de poussée. Environ la moitié de la flotte de 28 EMB-145 exploités par Trans State Airlines est équipée d'inverseurs de poussée; l'aéronef en cause ne l'était pas.

Il a été démontré que les inverseurs de poussée jouent un rôle important dans la réduction des distances accélération-arrêt sur pistes mouillées et contaminées, et qu'ils fournissent une force de freinage qui ne dépend pas du frottement sur piste. Lorsque le freinage à l'atterrissage est de mauvaise qualité sur une piste, l'effet des inverseurs de poussée peut faire toute la différence, et cet effet a contribué de façon positive au dossier de sécurité en matière d'accélération-arrêt de la flotte d'avions de catégorie transportFootnote 2, Footnote 3.

1.6.2 Circuit de freinage du EMB-145

Le circuit de freinage principal Hydro-Aire Mark V est constitué d'un frein à commande électronique entièrement numérique doté d'une fonction antipatinage. Les composants du circuit de freinage comprennent une unité de commande de freinage (BCU), des répartiteurs de freinage intérieur et extérieur, des transducteurs de pédales, des mécanismes de freinage, des transducteurs de pression et des transducteurs de vitesse de rotation des roues. La BCU contient tous les circuits nécessaires pour commander, surveiller et mettre à l'essai les composants du circuit de freinage. L'application de pression sur les pédales de frein par l'un ou l'autre des pilotes envoie un signal à la BCU, qui à son tour envoie un signal aux répartiteurs pour fournir du fluide hydraulique aux mécanismes de freinage en quantité proportionnelle à la pression exercée sur les pédales de frein. La commande de freinage par les pédales de frein est étagée. La première partie du mouvement des pédales donne très peu de pouvoir de freinage; la deuxième partie donne un freinage modéré; la troisième est celle qui en donne le plus. Lorsque les 2 pilotes appuient sur les pédales de frein au même moment, la pression de freinage est proportionnelle aux pédales les plus enfoncées. Les signaux de rétroaction de pression des transducteurs de pression permettent d'établir une corrélation étroite entre la pression de freinage commandée et celle qui en résulte.

Le circuit de freinage comporte aussi un dispositif de protection au toucher des roues, qui empêche l'actionnement des freins avant la mise en rotation des roues principales à l'atterrissage. L'actionnement des freins est possible 3 secondes après que la vitesse de rotation des roues atteigne 50 nœuds ou 3 secondes après la dernière activation du microcontacteur de train, selon la première éventualité.

Le système antipatinage module la pression hydraulique commandée par les pédales de frein, ce qui force les roues à fonctionner au coefficient de glissement critique ou presqueFootnote 4 lorsque le coefficient de frottement maximal est atteint. Le système n'exerce pas de pression sur les freins; plutôt, il relâche la pression pour éviter le dérapage. La BCU reçoit des signaux des transducteurs de vitesse de rotation des roues situés dans le moyeu de chacune des 4 roues principales. Lorsque l'un des signaux indique une vitesse qui est sous la moyenne de vitesse des signaux provenant des 3 autres roues, un état de dérapage est présumé, et la pression exercée sur le frein de la roue en question est relâchée. Lorsque la vitesse de la roue en cause revient à la vitesse moyenne des autres, la pression de freinage commandée est rétablie.

Les composants du circuit de freinage de l'aéronef ont été mis à l'essai par le fabricant des freins en présence des enquêteurs du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST). Rien n'indique qu'il y ait eu une défaillance du circuit de freinage ou un mauvais fonctionnement du système.

1.6.3 Pneus du train principal

La pression des pneus du train d'atterrissage principal a été vérifiée peu de temps après l'événement. La pression des pneus numéros 1, 2 et 3 était de 160 livres par pouce carré (lb/po²), et celle du pneu numéro 4 était de 158 lb/po², respectant en cela l'exigence de 160 lb/po², +/- 4 lb/po².

Un examen détaillé des pneus n'a révélé que des dommages mineurs (coupures et arrachements). Ce type de dommage est caractéristique de pneus ayant heurté des corps étrangers sur la piste ou au sol après une sortie de piste.

1.6.4 Performance de l'aéronef

Avant le départ, l'équipage a reçu des documents d'autorisation de vol du service de régulation des vols de la compagnie. Ces documents comprenaient tous les renseignements pertinents au vol, notamment les conditions météorologiques courantes et prévues, le vent en altitude,les avis aux navigants (NOTAM) et des données d'analyse d'aéroport et de piste.

Les documents d'autorisation de vol présentent les données de performance sous forme de masse de l'aéronef au décollage ou à l'atterrissage et toute autre restriction applicable. Le jour de l'événement, la masse maximale permise à l'atterrissage sur la piste 07 à CYOW, avec volets réglés à 22°, était de 42 549 livres. La masse à l'atterrissage calculée par l'équipage était de 39 262 livresFootnote 5, ce qui est bien en deçà des limites pour un atterrissage avec volets réglés à 22° sur la piste 07.

Le BST a demandé à Embraer d'effectuer les calculs des performances à l'atterrissage de l'aéronef. Embraer a basé ses calculs sur une configuration d'aéronef avec volets réglés à 22°, une vitesse de 139 KIAS à 49 pieds au-dessus du seuil, les renseignements pertinents sur la piste, les conditions environnementales au moment de l'événement et le même point de toucher des roues de 2270 pieds. En outre, Embraer a utilisé le coefficient de frottement de freinage sur piste mouillée unie indiqué à la partie 25 des FAR pour la distance d'accélération-arrêtFootnote 6. En n'utilisant que les freins et les déporteurs (la performance à l'atterrissage exclut l'utilisation d'inverseurs de poussée), l'aéronef aurait dû s'immobiliser à 6216 pieds du seuil, avec un peu moins de 1800 pieds de piste devant lui. Cependant, selon l'enregistreur des données de vol (FDR), la vitesse de l'aéronef en cause était toujours de 96 KIAS à ce stade précis.

1.6.5 Performance de freinage selon l'enregistreur des données de vol

L'activation de la fonction de freinage en vol a été enregistrée pendant la montée initiale après le décollage de KIAD du vol en question, indiquant que les répartiteurs de freinage fournissaient de la pression aux mécanismes de freinage individuels.

Les données du FDR indiquent que les roues du train d'atterrissage principal ont commencé à tourner approximativement ½ seconde avant la première indication du microcontacteur de train. Le copilote enfonçait ses pédales de frein lorsque le deuxième microcontacteur de train a été enregistré. Les paramètres de vitesse de rotation des roues indiquent qu'elles tournaient plus rapidement, les roues droites accélérant plus vite que les roues gauches.

Le copilote a continué d'enfoncer les pédales de frein lorsque le train avant a touché la piste. Environ 5 secondes après l'indication du deuxième microcontacteur de train, la position des pédales est passée momentanément à 86 %Footnote 7 de leur course maximale. À ce stade, les roues du train principal gauches accéléraient, et leur vitesse atteignait celle des roues du train principal droites, qui ralentissaient. À compter de ce moment-là, la vitesse de rotation des 4 roues principales a diminué au même rythme. La pression de freinage s'est activée lorsque la vitesse des roues est passée au-dessus de 50 nœuds. Les 4 valeurs de pression de freinage enregistrées sont entre 200 et 400 lb/po² approximativement, soit considérablement inférieures à la pression de freinage maximale possible de 3000 lb/po². Habituellement, la pression de freinage maximale varie entre 1000 et 2000 lb/po² à l'atterrissage, selon les conditions.

Les pédales de frein du copilote ont été enfoncées à 95 % de leur course maximale à 14 h 30 min 26 s, et sont demeurées à cette position presque jusqu'à l'extrémité de la piste. Le commandant de bord a commencé à serrer les freins à 14 h 30 min 26 s, à la suite des indications selon lesquelles l'aéronef glissait; les 2 pilotes serraient les freins à compter de ce moment jusqu'à ce que l'aéronef sorte en bout de piste. Sur les derniers 1500 pieds, le système antipatinage fonctionnait et tentait de moduler la pression de freinage (annexe I).

L'aéronef était à environ 600 pieds de l'extrémité de la piste, roulant à une vitesse sol de 82 nœuds, lorsque le système antipatinage a laissé la pression de freinage sur les roues du train principal augmenter. La pression de freinage a augmenté à une valeur située entre 600 et 750 lb/po² sur les roues principales gauches et à une valeur entre 300 et 500 lb/po² sur les roues principales droites, ce qui indique que les caractéristiques de frottement étaient meilleures à gauche qu'à droite. À ce stade, le cap de l'aéronef de 070 °M a commencé à diminuer à un rythme de quelque 6° par seconde. La force exercée sur la gouverne de direction par le commandant de bord a augmenté à près de 120 livres sur la pédale droite, pendant que celle exercée par le copilote sur la pédale droite a augmenté à environ 80 livres. Au même moment, on tournait le volant vers la droite d'environ 6 ou 7°. L'accélération latérale enregistrée indique une force d'accélération due à la gravité négative croissante, atteignant initialement environ -0,3 g. La force gFootnote 8 latérale négative était caractéristique d'un mouvement de dérapage avant vers la gauche alors que l'aéronef s'approchait de l'extrémité de piste. Le FDR n'a pas donné de paramètre qui permet de déterminer si la barre a été utilisée pour diriger l'aéronef vers la gauche de l'axe de la piste.

1.6.6 Coefficient de freinage de l'aéronef

Le coefficient de freinage est une mesure du frottement entre la piste et les pneus de l'aéronef pendant le freinage. Il est exprimé en chiffre de 0 à 1; plus il est élevé, plus le frottement est élevé. Le coefficient de freinage de l'aéronef en cause a été calculé à partir des données du FDR et des renseignements sur l'aéronef fournis par le constructeur. Ce calcul a été fait à la fois pour l'atterrissage qui a mené à l'événement et pour l'atterrissage précédent qui a eu lieu à KIAD.

Afin de comprendre le fonctionnement du circuit de freinage au cours de l'atterrissage précédent sur une piste sèche et au cours de l'atterrissage sur une piste mouillée qui a mené à l'événement, le coefficient de freinage calculé pour les 2 atterrissages a été comparé à la pression de freinage et à la position des pédales de frein. Au cours de l'atterrissage précédent, le coefficient de freinage et la pression de freinage ont augmenté à mesure que la position des pédales de frein augmentait. Lorsque la position des pédales de frein est passée de 5 à 50 % de leur course, le coefficient de freinage a augmenté de 0 à 0,3, et la pression de freinage a augmenté d'environ 200 lb/po² à quelque 900 lb/po². Ces valeurs de position des pédales de frein, de pression de freinage et de coefficient de freinage de l'aéronef étaient caractéristiques d'un aéronef qui se pose sur une piste sèche.

Dans le cas de l'atterrissage qui a mené à l'événement, la position des pédales de frein est passée de 0 % à 95 %, tandis que le coefficient de freinage et la pression de freinage sont demeurés constants à 0,07 et à 200 lb/po², respectivement. Ces valeurs sont bien inférieures à celles de l'atterrissage précédent.

On a comparé le coefficient de frottement de freinage de l'aéronef calculé pour la course au sol lors de l'événement au coefficient de frottement de freinage sur piste mouillée (ajusté en fonction d'un système antipatinage entièrement modulé) utilisé par Embraer en conformité avec le paragraphe 25.109(c) des FAR. Cette comparaison a permis d'établir que le coefficient de freinage de l'aéronef en cause était considérablement inférieur à celui prédit par les équations sur piste mouillée unie de l'alinéa 25.109(c)(1) des FAR.

On a également comparé les données du FDR de la course au sol lors de l'événement aux données d'essai du circuit de freinage obtenues de Honeywell pour la phase de la course au sol à l'atterrissage sur piste mouillée. L'essai a été effectué dans un aéronef de même configuration et dans les mêmes conditions que l'aéronef en cause. L'essai a permis d'établir que la qualité de freinage de l'aéronef en cause était comme prévu, et que le circuit de freinage de l'aéronef en cause fonctionnait correctement. L'essai a aussi indiqué que les coefficients de frottement de freinage étaient semblables pour les 2 atterrissages, et considérablement inférieur à celui prédit par les équations sur piste mouillée unie de l'alinéa 25.109(c)(1) des FAR.

En outre, des enquêtes menées par le National Transportation Safety Board (NTSB) sur  un certain nombre d'événements indiquaient que le coefficient de frottement de freinage sur piste mouillée durant l'atterrissage était considérablement inférieur à celui défini à l'alinéa 25.109(c)(1) des FAR.

1.7 Conditions météorologiques

1.7.1 Généralités

Le 16 juin 2010, une pluie de faible intensité avait été signalée dans les messages d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) de 11 h, 12 h et 13 h, mais pas dans l'observation de 14 h. Il avait recommencé à pleuvoir à CYOW à 14 h 18, et il pleuvait toujours après l'accident. Le message d'observation météorologique spéciale d'aérodrome (SPECI) de 14 h 18, diffusé à 14 h 26, signalait les conditions suivantes : vent du 150° vrai (V) à 12 nœuds, visibilité de 10 sm, pluie de faible intensité, ciel couvert à 2300 pieds agl, température de 16 °C, point de rosée de 13 °C et calage altimétrique de 29,86 po Hg.

1.7.2 Conditions météorologiques prévues

Une prévision d'aérodrome (TAF) pour CYOW, valide du 16 juin 2010 à 8 h au 17 juin à 8 h, a été émise le 16 juin à 7 h 38, et présentait les renseignements suivants : vent du 100 °V à 8 nœuds, visibilité de 6 sm et ciel couvert à 12 000 pieds agl; à compter de 11 h : vent du 100 °V à 10 nœuds, visibilité de 6 sm avec pluie de faible intensité, nuages épars à 3000 pieds agl et ciel couvert à 6000 pieds agl; à compter de 12 h : vent du 120 °V à 10 nœuds avec rafales à 20 nœuds, visibilité de 6 sm avec pluie de faible intensité et bruine, nuages épars à 800 pieds agl et ciel couvert à 3000 pieds agl; condition temporaire entre 8 h et 14 h : visibilité de 3 sm avec averses de pluie modérées, bruine et un ciel couvert à 2000 pieds agl.

Une TAF à jour pour CYOW, valide du 16 juin à 11 h au 17 juin à 8 h, a été émise le 16 juin 2010 à 10 h 44 : vent du 070 °V à 8 nœuds, visibilité de 6 sm avec pluie de faible intensité, nuages épars à 3000 pieds agl et ciel couvert à 6000 pieds agl; à compter de 12 h : vent du 120 °V à 10 nœuds avec rafales à 20 nœuds, visibilité de 6 sm avec pluie de faible intensité et bruine, nuages épars à 800 pieds agl et ciel couvert à 3000 pieds agl; condition temporaire entre 12 h et 14 h : visibilité de 3 sm avec averses de pluie modérées et bruine et un couvert nuageux à 2000 pieds agl; à compter de 14 h : vent du 120 °V à 10 nœuds avec rafales à 20 nœuds, visibilité de 6 sm et couvert nuageux à 2000 pieds agl; condition temporaire entre 18 h et 3 h le 17 juin : visibilité de 6 sm avec bruine et un ciel couvert à 800 pieds agl.

La TAF pour CYOW, valide du 16 juin à 14 h au 17 juin à 14 h, a été émise le 16 juin 2010 à 13 h 38 : vent du 090 °V à 12 nœuds, visibilité de 6 sm avec pluie de faible intensité, plafond de nuages fragmentés à 4000 pieds agl et ciel couvert à 6000 pieds agl; condition temporaire entre 14 h et 17 h : visibilité de 2 sm avec averses de pluie modérées et bruine et un ciel couvert à 700 pieds agl.

Toutes les TAF susmentionnées indiquent la possibilité de pluie à l'heure d'arrivée prévue du vol LOF8050.

1.7.3 Observations de contrôle en cas d'accident

Le bureau d'observation météorologique n'est pas branché au système de sonnerie d'alarme, et il n'a pas été immédiatement informé qu'un accident était survenu. Un des éléments de la liste de vérifications de la tour de contrôle exige que l'observateur du bureau météorologique soit informé d'un accident d'aéronefFootnote 9 afin qu'une observation météorologique de contrôle en cas d'accidentFootnote 10 puisse être effectuée immédiatement. Le personnel de la tour a oublié cet élément lorsque la liste de vérifications question-réponse en cas d'accident a initialement été effectuée. En conséquence, il n'y a pas eu d'observation de contrôle en cas d'accident avant 14 h 55, soit 25 minutes après l'accident.

1.7.4 Précipitation

La précipitation est caractérisée selon le type et l'intensité, qui est désignée comme faible, modérée ou forte. L'intensité est déterminée soit par une évaluation visuelle, soit par une mesure du taux. À CYOW, l'intensité de la précipitation est déterminée par une évaluation visuelle.

La quantité de pluie à CYOW est normalement mesurée et enregistrée par périodes de 6 heures pour satisfaire aux exigences d'observations synoptiquesFootnote 11; un pluviomètre ordinaire doté d'un entonnoir et d'un cylindre gradué est utilisé. L'observateur doit faire un relevé visuel de la quantité d'eau dans le cylindre de collecte.

L'Unité de gestion des eaux pluviales de la ville d'Ottawa maintient son propre système de mesure automatique d'eau de pluie à travers la ville, une partie duquel est située sur les terrains de CYOW dans le complexe où se trouve d'autre équipement météorologique. Le système est constitué d'un pluviomètre à auget basculeur, qui transmet des impulsions électroniques à un système d'enregistrement informatisé. Les données obtenues ne sont pas fournies au poste d'observation météorologique de l'aérodrome de CYOW.

À partir des données fournies par la ville d'Ottawa, le BST a déterminé que la quantité totale de pluie accumulée de 14 h 18 jusqu'au moment de l'atterrissage de l'aéronef était d'environ 2,0 mm. Un examen des données cumulatives de 5 minutes pour cette période révèle que l'intensité de la pluie était de 4,8 mm/heureFootnote 12 au cours des 5 premières minutes de précipitation, et qu'elle a augmenté à environ 7,2 mm/heure au moment de l'atterrissage du vol LOF8050. Selon le tableau à la section 3.9.5 du Manuel d'observations météorologiques de surface d'Environnement Canada (MANOBS d'EC) (annexe C), cette intensité serait équivalente à une averse de pluie modérée au moment de l'atterrissage de l'aéronef en cause.

Le début ou la fin de précipitations est un des critères figurant à l'alinéa 10.3.5.6[c] du MANOBS d'EC concernant l'émission d'une observation SPECI. Au moment de l'événement, cependant, selon le MANOBS d'EC, une fois que l'intensité de la pluie était signalée, il n'était pas obligatoire de signaler un changement d'intensité avant l'émission du prochain METAR. Dans le présent cas, de la pluie de faible intensité a été signalée dans l'observation SPECI de 14 h 18. Depuis novembre 2010, lorsque la modification 75 de l'Annexe 3 de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) est entrée en vigueur, un message SPECI doit être publié en cas d'apparition, de cessation ou de variation d'intensité de précipitations verglaçantes, de précipitations modérées ou fortes et d'orages (avec précipitations)Footnote 13.

1.8 Aides à la navigation

Il n'y avait aucune indication de panne des aides à la navigation au moment de l'approche et de l'atterrissage du vol LOF8050 sur la piste 07. Par mesure de précaution, l'approche ILS de la piste 07 a été interrompue peu de temps après l'accident, puis elle a été vérifiée et remise en service à 9 h 18, le 18 juin 2010.

1.9 Communications

Les communications entre le vol LOF8050 et les services de contrôle de la circulation aérienne canadiens étaient normales.

Initialement, l'équipage de conduite a eu de la difficulté à communiquer avec le personnel des opérations de TSA à Ottawa pour l'informer de l'heure d'arrivée du vol et recevoir d'autres instructions au besoin. La communication a seulement été établie après que l'aéronef a reçu des vecteurs de l'ATC et a effectué un virage 5 milles en finale pour la piste 07.

1.10 Renseignements sur l’aérodrome

1.10.1 Aéroport

CYOW est loué et exploité par l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa aux termes d’un bail de 60 ans accordé par Transports Canada (TC). Il y a 3 pistes : 07/25, 14/32 et 04/22. La piste en service pour les arrivées le jour de l’événement était la piste 07, une piste dont le code de référence est 4EFootnote 14. La piste mesure 8000 pieds de longueur sur 200 pieds de largeur, et la surface est asphaltée. La pente longitudinale est <1 % de la moyenne globale sur toute la longueur de la piste. L’élévation de la zone de toucher des roues est de 373 pieds asl. La piste 07/25 est dotée d’une plate-forme antisouffle en asphalte mesurant 150 pieds de longueur sur 200 pieds de largeur devant chaque seuil de piste.

La bande de la piste 07 mesure 1000 pieds de largeur et s’étend sur 200 pieds (60 m) à partir de chaque extrémité de la piste, avec une surface gazonnée. Ces dimensions respectent les normes de bande de piste de la publication de TC Aérodromes – Normes et pratiques recommandées (TP 312)Footnote 15.

1.10.2 Aire de sécurité d’extrémité de piste

La publication TP 312 définit une aire de sécurité d’extrémité de piste (RESA) comme suit :

Aire symétrique par rapport au prolongement de l’axe de la piste et adjacente à l’extrémité de la bande, qui est destinée principalement à réduire les risques de dommages matériels au cas où un avion atterrirait trop court ou dépasserait l’extrémité de piste.

Avant 1999, le Canada se conformait aux critères relatifs aux RESA décrits à l’Annexe 14 de l’OACI. En 1999, l’OACI a élevé la pratique recommandée prévoyant une RESA longue de 90 m au rang de norme, avec la recommandation suivante : « Il est recommandé que, dans la mesure du possible, l’aire de sécurité d’extrémité de piste s’étende à partir de l’extrémité de la bande de piste sur une distance d’au moins 240 m lorsque le chiffre de code est 3 ou 4 […] ». À la suite de ce changement de statut de la spécification de l’OACI, le Canada a fait connaître sa différence à l’OACI, en conformité avec la Convention de Chicago, stipulant que le Canada ne fournit pas de RESA, mais qu’il fournit une bande nivelée de 60 m au-delà de l’extrémité de la piste. Bien que la publication TP 312 recommande des RESA de 90 m, elles ne sont pas obligatoires. Au moment de l’événement, aucune piste à CYOW n’était dotée d’une RESA.

Si un aéroport décide d’installer une RESA, la publication TP 312 présente des directives supplémentaires concernant le nivellement, la dureté et les pentes voulues de la surface de la RESA. En ce qui concerne la pente longitudinale, la pratique recommandée limite la pente descendante à 5 % ou moins. Il est aussi précisé qu’elle devrait être progressive et ne pas présenter de changements brusques ni d’inversions de pente. De même, dans le cas des pentes transversales, la pente ascendante ou descendante ne devrait pas être supérieure à 5 %, et elle devrait être aussi progressive que possible.

À travers l’extrémité de la piste 07 à CYOW, au-delà de l’extrémité de la bande de piste, il y a une brusque dépression dans le sol, avec une pente descendante soudaine d’environ 9,5 %. La dépression mesure tout juste un peu plus de 0,8 m sur une longueur d’environ 8,5 m. L’aéronef en question est passé sur cette dépression, et le train avant s’est alors affaissé, ce qui a causé des dommages importants au-dessous du fuselage de l’aéronef. L’aéronef s’est immobilisé à environ 55 m au-delà de la dépression (annexe F).

À la suite d’une sortie en bout de piste d’un A340 d’Airbus à l’Aéroport international Lester B. Pearson-Toronto en 2005, le Bureau a émis la recommandation A07-06Footnote 16, qui stipule ce qui suit : « le ministère des Transports exige que toutes les pistes de code 4 soient pourvues d’une aire de sécurité d’extrémité de piste (RESA) de 300 m ou d’un autre moyen d’immobilisation des aéronefs offrant un niveau de sécurité équivalent. »

La plus récente réponseFootnote 17 de TC à la recommandation A07-06 mentionne que TC prévoit effectuer une évaluation des risques afin d’établir des critères de RESA aux aéroports canadiens. L’objectif déclaré de cette évaluation des risques est de collaborer avec l’industrie en vue d’établir la longueur des RESA au cas par cas. Aucune précision n’a été fournie par TC quant à la façon dont la longueur d’une RESA serait établie pour les pistes de code 4, comme le stipule la recommandation.

Il est probable que les résultats de cette évaluation des risques aient une incidence sur la version en vigueur de l’Avis de proposition de modification (APM) 2010-012Footnote 18 de TC, qui a été reporté à la suite d’une réunion du Comité de réglementation de l’Aviation civile (CRAC) le 12 janvier 2011. Cette approche entraînera d’autres retards et une période prolongée pendant laquelle le Canada ne se conformera pas aux normes internationales.

Comme l’évaluation des risques proposée pourrait aborder la question des exigences de RESA pour les pistes de code 4, si cette évaluation est complètement mise en œuvre, cela permettra de réduire, mais non éliminer, la lacune décrite dans la recommandation A07-06. Cette dernière réponse de TC a été évaluée par le Bureau comme « en partie satisfaisante »Footnote 19.

1.10.3 Piste préférentielle

En raison des procédures d’atténuation du bruit à CYOW publiées pour les aéronefs à turboréacteur, la piste 07/25 est utilisée un fort pourcentage du temps.

Les contrôleurs de la tour avaient à leur disposition un tableau indiquant la composante vent de travers maximale acceptable pour poursuivre l’exploitation d’une piste en particulier afin de les aider à choisir la piste la plus compatible avec les exigences opérationnelles. La piste 07/25 est la piste préférentielle lorsque la vitesse du vent est de 15 nœuds ou moins avec un vent de travers de 90°. Le vent au moment de l’atterrissage du vol LOF8050 a été signalé comme soufflant du 160 °M à 10 nœuds, avec rafales à 16 nœuds. La tour avait coordonné un changement à la piste 14, changement qui entrerait en vigueur après l’atterrissage du vol LOF8050, parce que la composante vent de travers, incluant les rafales, était supérieure à la valeur maximale indiquée dans le tableau.

1.10.4 Entretien des pistes

L’Administration de l’aéroport international d’Ottawa a mis en œuvre un programme d’évaluation de l’état des surfaces côté piste; ce programme comprend des relevés de l’état de la structure de la chaussée des aérodromes et des essais de frottement sur piste. L’état et la qualité de la surface de la piste sont évalués. Chaque jour, des inspections visuelles périodiques de l’aérodrome sont effectuées par les directeurs de service de l’aéroport, ainsi que le contremaître et le responsable de l’exploitation de l’aérodrome. Les comptes rendus de l’état de la surface pour le mouvement d’aéronefs ne sont normalement pas publiés pendant les mois non hivernaux. Il n’y a pas de directive précise dans la publication TP 312 exigeant que le personnel de l’aéroport effectue une évaluation de l’état de la surface des pistes immédiatement après le début des périodes de pluie ou pendant celles-ci.

Au fil du temps, la résistance au dérapage de la chaussée de la piste se détériore à cause de nombreux facteurs, notamment l’usure mécanique, l’action de polissage des pneus des aéronefs roulant ou freinant sur la surface de la piste ainsi que l’accumulation de contaminants. Les contaminants comprennent notamment les dépôts de caoutchouc, les particules de poussière, le carburéacteur, les déversements de produits d’hydrocarbures, l’eau, la neige, la glace et la neige fondante, qui peuvent tous entraîner une perte de frottement sur les surfaces de la chaussée des pistes. L’incidence de ces facteurs dépend directement du volume et du type de trafic aérienFootnote 20.

Des essais de frottement sur piste, effectués régulièrement, aident à déterminer si des mesures d’entretien correctives sont requises ou doivent être prévues pour restaurer les caractéristiques de frottement d’une piste. Des mesures de coefficient de frottement des pistes sont effectuées au moyen d’un véhicule de mesure du frottement de marque Saab doté d’un dispositif d’automouillage qui, selon les lignes directrices de TC, crée une couche d’eau de 0,5 mm sur la piste.

La publication TP 312 contient les normes suivantesFootnote 21, qui exigent que l’aéroport intervienne lorsque les valeurs de frottement moyennes pour une piste sont inférieures à des niveaux précisés.

9.4.2.4 Norme.—Des mesures correctives d’entretien doivent être prises (gras ajouté) lorsque :

9.4.2.5 Norme.—Des mesures correctives d’entretien doivent être envisagées (gras ajouté) lorsque :

  1. le coefficient de frottement moyen sur toute la piste est inférieur à 0,60; ou
  2. toute section de piste de 100 mètres ou plus de longueur a un coefficient de frottement moyen inférieur à 0,50.

L’Administration de l’aéroport international d’Ottawa effectue périodiquement des essais de frottement sur toutes les pistes par l’entremise d’un entrepreneur. Ces essais sont effectués au moins 3 fois par année pendant les mois non hivernaux. Les résultats des essais donnent de l’information sur les tendances. Le dernier essai de frottement effectué à CYOW avant l’accident a eu lieu en avril 2010 (annexe F). Le coefficient de frottement moyen sur toute la piste 07/25 était de 0,55Footnote 22, et le plus bas coefficient de frottement moyen sur une section de 100 mètres était de 0,44. Ces valeurs sont des moyennes de 4 mesures prises à 3 mètres le long de chaque côté de l’axe de piste. À la suite de ces résultats, l’Administration de l’aéroport a seulement prévu d’autres essais de frottement sur la piste 07/25 au cours des 2 mois suivants. La publication TP 312 ne prévoit pas de délai dans lequel des mesures correctives d’entretien doivent être prises.

Avant l’accident, aucune mesure corrective d’entretien n’a été prise. Un essai de frottement sur piste a été effectué le 25 juin 2010. Cet essai a révélé un coefficient de frottement sur piste moyen de 0,63, une amélioration de 14,5 % par rapport à l’essai d’avril. Le plus bas coefficient de frottement moyen sur une section de 100 mètres était de 0,47. L’enlèvement de caoutchouc a été effectué le 21 juillet 2010.

On a comparé les coefficients de frottement moyens depuis 2004 pour les pistes 07/25 et 14/32 (annexe F). Les relevés de frottement sur la piste 14/32 sont considérablement plus élevés que ceux de la piste 07/25. Les relevés au cours des 6 dernières années ont été assez stables pour la piste 14/32; cependant, dans le cas de la piste 07/25, les relevés de frottement indiquent une baisse lente, mais constante, pendant la même période.

L’enquête a déterminé que de nombreux pays utilisent une couche d’eau de 1,0 mm pour mesurer le coefficient de frottement sur piste, ce qui est recommandé par l’OACI; au Canada, la couche d’eau utilisée est de 0,5 mm. Les critères de seuil pour prendre des mesures correctives visant à restaurer les caractéristiques de frottement d’une piste (tableau 4) ont été élaborés au moyen d’un véhicule de mesure du frottement avec un pneu sans sculpture, gonflé à une pression de 210 kilopascals (kPa), roulant à une vitesse de 65 km/h.

Tableau 4. Critères de seuil pour la prise de mesures correctives visant à restaurer les caractéristiques de frottement, par organisation
Critères de seuil Valeurs de frottement minimales
TCFootnote 23 FAAFootnote 24 OACIFootnote 25
Moyenne de la piste – mesures correctives envisagées 0,60 0,60 0,60
Moyenne de la piste – mesures correctives doivent être prises 0,50 0,50 0,50
Moyenne la plus basse sur une section de 100 m - mesures correctives envisagées 0,40 0,60 0,60
Moyenne la plus basse sur une section de 100 m - mesures correctives doivent être prises 0,30 0,50 0,50

Chaque mois, d’avril à août 2011, l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa a effectué des essais de frottement sur la piste 07/25 en utilisant des couches d’eau de 0,5 mm et de 1,0 mm. Il y a eu 6 séries d’essais différentes, et les résultats ont été fournis pour les besoins de l’enquête. Selon les valeurs de frottement minimales pour la moyenne la plus basse sur une section de 100 m dans le tableau ci-dessus, des mesures correctives immédiates auraient été requises 5 fois sur 6 si on utilise les valeurs de l’OACI et de la Federal Aviation Administration (FAA). Cependant, si on emploie les critères de TC, les résultats de 2011 indiquent qu’aucune mesure corrective n’aurait été prévue ou prise.

En raison des résultats de ces essais, l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa a pris des mesures correctives et a diffusé un NOTAM signalant que la piste est glissante lorsqu’elle est mouillée. L’Administration de l’aéroport a aussi commandé l’enlèvement du caoutchouc à 2 reprises pendant la période d’essais et a engagé un service de retexturation pour traiter la surface asphaltée de la pisteFootnote 26.

1.10.5 Texture superficielle des pistes

La texture superficielle d’une piste est considérée comme le facteur principal du coefficient de frottement de freinage sur une piste mouillée. La surface d’une piste est constituée à la fois de macro-rugosités et de micro-rugosités (Figure 1 Footnote 27).

Figure 1. Microrugosité et macrorugosité de la surface d'une piste (en anglais seulement)
Figure of Microrugosité et macrorugosité de la surface d'une piste (en anglais seulement)

La macrorugosité est la texture grossière produite par les granulats ou par une texture appliquée artificiellement comme le rainurage. Sa fonction première est d’améliorer l’écoulement des eaux à grande échelle, réduisant ainsi la tendance des pneus d’aéronef à faire de l’hydroplanage dynamiqueFootnote 28.

La microrugosité est la texture des pierres individuelles et est difficilement perceptible à l’œil nu. On peut la sentir, mais elle ne peut pas être mesurée directement, et il s’agit d’un des facteurs les plus importants pour réduire hydroplanage visqueuxFootnote 29.

La dégradation de la microrugosité, causée par les effets de la circulation, les dépôts de caoutchouc et les intempéries, peut se produire assez rapidement comparativement au temps nécessaire pour la dégradation de la macrorugosité de la surfaceFootnote 30.

Le volume 1 de l’Annexe 14 de l’OACI et l’alinéa 3.1.4.4 de la publication TP 312 recommandent que la profondeur moyenne de la macrorugosité d’une surface neuve soit au moins égale à 1 mm, et ce, afin d’obtenir de bonnes caractéristiques de frottement lorsque la piste est mouillée. Même si une profondeur inférieure à 1 mm peut toujours assurer un bon écoulement, il faut opter pour une profondeur supérieure à la valeur minimale lorsqu’on construit une surface neuve, puisque l’usure normale entraînera une détérioration de la surface. La dernière reconstruction de la piste 07/25 avant l’événement a eu lieu en 1994. Les essais effectués à CYOW après l’accident indiquent que la profondeur de la macrorugosité sur la piste 07/25 variait de 0,418 mm à 1,262 mm, avec une moyenne de 0,928 mm.

1.10.6 État de la surface de la piste

Au chapitre 2 du volume 1 de l’Annexe 14 de l’OACI, il est recommandé :

[…] chaque fois qu’il y a de l’eau sur une piste, de donner une description de l’état de la surface de la piste, sur la moitié centrale de la largeur de celle-ci, en donnant, le cas échéant, une évaluation de la profondeur de l’eau, au moyen des termes suivants :

HUMIDE — la surface présente un changement de couleur dû à la présence d’humidité.
MOUILLÉE — la surface est mouillée mais il n’y a pas d’eau stagnante.
FLAQUES D’EAU — de nombreuses flaques d’eau stagnante sont visibles.
INONDÉE — de vastes nappes d’eau stagnante sont visibles.

La publication TP 312 stipule ce qui suit à l’alinéa 2.5.1.1 :

Norme — Des renseignements sur l’état de l’aire de mouvement et le fonctionnement des installations connexes seront communiqués aux organes appropriés des services d’information aéronautique, et des renseignements analogues, importants du point de vue opérationnel, seront communiqués aux organes des services de la circulation aérienne, afin de leur permettre de fournir les renseignements nécessaires aux aéronefs à l’arrivée et au départ. Ces renseignements seront tenus à jour et tout changement sera signalé sans délai.

Le terme « mouillé », lorsqu’il fait référence à l’état de la surface d’une piste, est utilisé dans de nombreuses publications, notamment le RAC et le Manuel d’information aéronautique de TC. Cependant, il n’y a pas de définition commune au Canada. NAV CANADA, dans son Manuel d’exploitation du contrôle de la circulation aérienne, définit une piste mouillée comme une piste « couverte d’une humidité suffisante qui cause un reflet, mais qui n’est pas « contaminée »Footnote 31. Le mot « contaminée » n’est pas défini. Un document présenté à la conférence de l’Association internationale des enquêteurs de la sécurité aérienne de 2009 déclare que « [traduction] les seuls renseignements qu’un pilote obtient sont basés sur l’hypothèse selon laquelle la profondeur de l’eau est inférieure à 3 mm lorsqu’on dit de la piste qu’elle est mouillée »Footnote 32. La profondeur de 3 mm d’eau semble être la ligne de démarcation généralement admise entre une piste mouillée et une piste contaminée. Selon le glossaire pilote-contrôleur du Manuel d’information aéronautique de la FAA, « [traduction] une piste est considérée comme contaminée lorsqu’il y a de l’eau stagnante, de la glace, de la neige, de la neige mouillée, du givre sous toute forme, d’importants dépôts de caoutchouc ou d’autres substances sur celle-ci »Footnote 33. TC n’a pas de définition du terme « piste contaminée ».

TC a élaboré un avis de proposition de modification, SPM 2005-034, à la norme 725.55 du RAC (Exigences générales – Exploitation des pistes), qui fait actuellement l’objet d’un examen juridique. Dans cette proposition de norme, les expressions « piste humide », « piste mouillée » et « piste contaminée » sont définies. Les définitions proposées de « piste humide » et de « piste mouillée » sont les suivantes :

Piste humide

  1. Une piste humide est considérée comme une piste mouillée.
  2. Une piste humide bien conçue, bien construite et dont le rainurage est maintenu en bon état […] est considérée comme une piste sèche.

Piste mouillée

  1. Une piste mouillée est recouverte d’une quantité suffisante d’humidité pour sembler réfléchissante, mais elle n’est pas « contaminée » […]
  2. Sur piste mouillée, le frottement au freinage est moindre que celui obtenu sur piste sèche.
  3. Sur une piste mouillée bien conçue, bien construite et dont le rainurage est maintenu en bon état […], le frottement au freinage est supérieur à celui obtenu sur une piste mouillée dont la surface est lisse.

Ni la publication TP 312 ni le manuel d’exploitation de l’Aéroport international d’Ottawa ne contiennent de directives précises sur la façon d’évaluer l’état de la surface d’une piste relativement à la quantité d’eau sur celle-ci. Les essais de frottement sur piste mouillée au moyen de décéléromètres ne sont pas effectués de façon opérationnelle en raison du manque de fiabilité et de la forte variation des mesures de frottement sur des surfaces purement mouillées.

Une pluie de faible intensité a recommencé à tomber approximativement 12 minutes avant l’accident, et le vent soufflait directement en travers de la piste 07 à 10 nœuds avec rafales à 16 nœuds. La piste n’était pas rainurée. Après qu’il eut commencé à pleuvoir, 1 seul aéronef a précédé l’aéronef en cause sur la piste 07. Il n’y a pas eu de compte rendu météorologique de pilote (PIREP) concernant le freinage avant l’accident. Aucun rapport sur l’état de la surface de la piste n’a été rempli après qu’il eut commencé à pleuvoir, et rien ne l’exigeait d’ailleurs. Des enregistrements vidéo de l’aire de trafic à proximité du hangar d’aviation de TC et de l’aire devant le poste d’incendie montraient des surfaces qui étaient mouillées et semblaient brillantes ou réfléchissantes. On a pu voir un épais brouillard d’eau pulvérisée à l’atterrissage du vol LOF8050 sur la piste 07. Le personnel du service de sauvetage et de lutte contre les incendies d’aéronef (SLIA) a noté que la piste, au moment de l’intervention initiale, était mouillée avec des flaques dans le voisinage du seuil de la piste 25.

1.10.7 Piste glissante lorsque mouillée

Les renseignements sur l’état de la surface de la piste sont importants, et sont nécessaires pour évaluer les facteurs influençant la performance à l’atterrissage. L’Annexe 14 de l’OACI et la publication TP 312 traitent de l’obligation pour les aéroports d’effectuer suffisamment d’essais et d’observations de la surface de la piste pour déterminer si, en fonction de leurs résultats, une piste devrait être désignée glissante lorsqu’elle est mouillée. L’exploitant d’aéroport devrait ensuite prendre les mesures nécessaires pour restaurer les niveaux de frottement au-dessus des niveaux minimums prévus par TP 312. S’il est établi qu’une piste est glissante lorsqu’elle est mouillée en raison de faibles niveaux de frottement, l’information doit ensuite être mise à la disposition du personnel navigant, de préférence avant l’étape de la planification du vol. L’Administration de l’aéroport international d’Ottawa n’a fourni aucun renseignement pour indiquer que la piste 07/25 devait être considérée comme glissante lorsque mouillée, et rien ne l’exigeait selon les critères de frottement minimums publiés dans TP 312.

En 2004, le BST a enquêté sur une sortie de piste mettant en cause le même modèle d’aéronef, également sans inverseurs de poussée, qui est sorti au bout de la piste 25 à l’atterrissageFootnote 34. Il y avait des averses de pluie intense à ce moment, et le plus récent METAR signalait un vent du 220 °V à 5 nœuds. Le BST a appris qu’un autre aéronef EMB-145 avait atterri sur la piste 07 à CYOW le 15 août 2010, sans inverseurs de poussée, avec des problèmes de freinage soupçonnés. L’équipage a senti qu’il n’y avait pas de capacité de freinage pendant le début de la course à l’atterrissage; toutefois, l’aéronef s’est immobilisé avant d’atteindre la voie de sortie rapide Foxtrot. Il y avait des averses de pluie de faible intensité, et un SPECI (12 minutes avant l’atterrissage) signalait des vents soufflant du 130 °V à 5 nœuds.

1.10.8 Pente transversale de la piste

La 3ème partie du Manuel de conception des aérodromes de l’OACI reconnaît qu’une piste convenablement bombée est un paramètre de conception critiqueFootnote 35. Il y est précisé :

Toute nouvelle piste devrait être conçue de façon à présenter un profil transversal uniforme conforme aux recommandations de l’Annexe 14 relatives à la pente transversale et un profil longitudinal aussi horizontal que possible. Une coupe transversale bombée à partir d’une crête centrale est préférable; si, pour une raison quelconque cela n’est pas possible, la pente uniforme devrait être soigneusement calculée pour tenir compte des vents dominants porteurs de pluie de façon à s’assurer que l’écoulement de l’eau de surface ne soit pas gêné par un vent soufflant à contrepente […] Un bon drainage est surtout nécessaire dans la zone de toucher des roues parce qu’un aquaplanage commencé à ce stade de l’atterrissage peut se continuer sur des nappes d’eau beaucoup moins profondes, plus loin le long de la piste.

Dans la publication TP 312, il n’y a pas de norme minimale ou maximale pour les pentes transversales de piste. Cependant, cette publication présente les pratiques recommandées suivantes :

3.1.2.8 Recommandation — Pour assurer un assèchement aussi rapide que possible, il est recommandé que la surface de la piste soit, si possible, bombée, sauf dans le cas où les vents de pluie les plus fréquents souffleraient transversalement et où une pente uniforme descendante dans le sens du vent permettrait un assèchement rapide. La pente transversale ne devrait pas être supérieure à :
– 1,5 % lorsque la lettre d’identification de la piste est C, D ou E;
[…] ni inférieure à 1 %, sauf aux intersections des pistes ou des voies de circulation auxquelles des pentes moins prononcées peuvent être nécessaires.

3.1.2.9 Recommandation — Dans le cas d’une piste à surface bombée, les pentes transversales devraient être symétriques de part et d’autre de l’axe de la piste.
Note — Sur les pistes mouillées, exposées à des vents traversiers, le problème de l’hydroplanage dû à un mauvais écoulement des eaux risque d’être aggravé.

3.1.2.10 Recommandation — Il est recommandé que la pente transversale soit sensiblement la même tout le long d’une piste, sauf aux intersections avec une autre piste ou avec une voie de circulation, où il conviendra d’assurer une transition régulière, compte tenu de la nécessité d’un bon écoulement des eaux.

Pour les derniers 6000 pieds de la piste 07, le bombé passe à gauche de l’axe de la piste, de sorte que 75 % ou plus de la pente transversale est du côté droit de la piste. À CYOW, pendant les périodes de pluie d’avril à septembre, le vent souffle principalement de la droite. Ceci est en direction opposée de la pente transversale, et cela pourrait entraîner une accumulation ou un écoulement plus lent de l’eau sur la piste 07.

La publication TP 312 reconnaît la valeur d’une pente transversale appropriée sur une piste afin de faciliter l’écoulement rapide de l’eau. Les pistes mouillées sont considérées comme un facteur contributif dans un grand nombre de sorties en bout de piste. Le profil transversal des premiers 1700 à 1800 pieds de la piste 07 est conforme aux recommandations publiées dans TP 312. Cependant, le reste de la piste 07, tel qu’il a été construit, n’est pas conforme aux pratiques recommandées minimales, comme suit :

1.10.9 Rainurage des pistes

Le rainurage réduit le risque d’hydroplanage tant dynamique que visqueux en fournissant un endroit (c.-à-d. des rainures) pour chasser l’eau sous les pneus.  Le rainurage s’applique aussi bien à la macrorugosité qu’à la microrugosité de la surface de la piste.

L’Annexe 6 de l’OACI définit une piste à couche de frottement rainurée ou poreuse (PFC)Footnote 36 comme une « piste en dur réalisée avec des rainures transversales ou une couche de frottement poreuse (PFC) de façon à présenter de meilleures caractéristiques de freinage lorsqu’elle est mouillée »Footnote 37. La publication TP 312 stipule que « la surface d’une piste en dur sera construite de manière à fournir de bonnes caractéristiques de frottement lorsque cette piste est mouillée »Footnote 38. Cependant, rien au Canada n’oblige que les pistes soient rainurées comme moyen de fournir de bonnes caractéristiques de frottement lorsqu’elles sont mouillées.

La Circulaire de la Sécurité des aérodromes (CSA) 2004-024 de TC, publiée en 2004, établit un lien entre l’hydroplanage et la possibilité bien connue d’une quantité d’eau excessive sur la piste. Il y est suggéré ce qui suit :

Si l’on estime que de telles conditions peuvent prévaloir à la surface ou sur un tronçon d’une piste pendant des périodes excessives, l’administration aéroportuaire peut envisager le rainurage de la piste comme option, afin de réduire la profondeur de l’eau à la surface ainsi que le risque d’hydroplanage [annexe G]. Cependant, au Canada, le rainurage des surfaces ne constitue pas une exigence s’appliquant aux chaussées, nouvelles ou existantes.

Aucune des pistes à CYOW n’est rainurée. Aucun grand aéroport civil au Canada n’est doté de pistes rainurées.

TC a indiqué que le rainurage des pistes n’est pas pratique au Canada, compte tenu des défis liés à l’entretien hivernal. On a mené une enquête limitée auprès d’aéroports de régions des États-Unis où on peut s’attendre à des conditions météorologiques semblables à celles de la région d’Ottawa. Des 23 aéroports étudiés, 18 étaient dotés de pistes rainurées, 2 de pistes revêtues d’une PFC et 3 de pistes sans traitement superficiel. Il y avait des pistes aussi bien en asphalte qu’en béton (annexe H).

En 1997, la FAA a publié la circulaire d’information 150/5320-12C, Measurement, Construction, and Maintenance of Skid-resistant Airport Pavement Surfaces, qui stipule ce qui suit à l’appui du rainurage de la chaussée :

[Traduction] Le rainurage était la première étape majeure pour accroître la sécurité de la surface des chaussées pour l’exploitation d’aéronefs par temps pluvieux […] un haut niveau de frottement pourrait être obtenu sur une chaussée mouillée en créant des rainures transversales très serrées sur la surface de la piste, ce qui permettrait de chasser l’eau de pluie sous les pneus d’un aéronef à l’atterrissage.

[Traduction] Le rainurage de toutes les pistes, desservant ou devant desservir des aéronefs à turboréacteurs, est considéré comme du travail de haute priorité lié à la sécurité et devrait être accompli initialement lors de la construction. De telles pistes existantes sans rainurage devraient être prévues dès que possible.

La circulaire d’information de la FAA AC 150/5200-30C, Airport Winter Safety and Operations, du 9 décembre 2008, stipule :

[Traduction] Les rainures créées dans la chaussée permettent de piéger les produits chimiques de dégivrage et d’antigivrage, d’en réduire la perte et de prolonger leur activité. Les rainures aident aussi à l’écoulement de l’eau de fonte et empêchent le regel. Certaines données empiriques indiquent que les rainures et les couches de frottement poreuses modifient les caractéristiques thermiques de la surface de la chaussée, probablement en réduisant la perte de chaleur rayonnante et en retardant la formation de glace. Le rainurage des chaussées ne semble pas avoir d’effets négatifs.

1.11 Enregistreurs de bord

1.11.1 Généralités

L’enregistreur de données de vol (FDR) à semi-conducteurs (SSFDR Honeywell, modèle 980-4700-042, no de série SSFDR-10741) et l’enregistreur de conversations de poste de pilotage à semi-conducteurs (SSCVR Honeywell, modèle 980-6022-001, no de série CVRE120-06900) ont été retirés de l’aéronef le jour même de l’événement, et envoyés au Laboratoire du BST pour téléchargement et analyse des données. La qualité des données des 2 enregistreurs était bonne. Le SSCVR contenait 2 heures d’enregistrements. Quelque 26 heures de données avaient été enregistrées par le SSFDR. Un certain nombre de paramètres enregistrés étaient d’un grand intérêt, notamment les paramètres de freinage comme les pressions de freinage, les vitesses de rotation des roues et les positions des pédales de frein.

Vitesse de rotation des roues par rapport à la vitesse sol

Lors de l’atterrissage qui a mené à l’événement, après la mise en rotation des roues, les vitesses de rotation des roues enregistrées étaient généralement de 20 à 25 nœuds de moins que la vitesse sol enregistrée. Bien qu’il faille s’attendre à certaines différences durant le freinage (p. ex. en raison du glissement des pneus ou de changements du rayon des pneus), la différence de 25 nœuds semblait excessive. Lors de l’atterrissage précédent à KIAD, la décélération et les pressions de freinage suggéraient un bon frottement entre les pneus et la piste, caractéristique d’un atterrissage sur une piste sèche. Lorsque les freins ont été momentanément desserrés à une vitesse sol de 73 nœuds, la décélération des roues s’est arrêtée. Cependant, il n’y a pas eu d’augmentation significative dans la vitesse de rotation des roues enregistrée par le FDR. Ceci suggère un comportement anormal, avec une différence de 11 nœuds demeurant entre les vitesses de rotation des roues et la vitesse sol enregistrée.

Les transducteurs de vitesse de rotation des roues génèrent un courant alternatif proportionnel à la vitesse de rotation des roues. Les signaux sont acheminés à la BCU aux fins de traitement, ce qui comprend la conversion en vitesse linéaire exprimée en nœuds par l’intermédiaire du convertisseur de vitesse, et sont transmis au FDR. La BCU n’utilise pas la vitesse linéaire pour moduler les pressions de freinage pendant l’intervention du système antipatinage, mais elle l’utilise plutôt pour activer et désactiver la fonction d’antipatinage.

Le constructeur de l’aéronef a indiqué que les données du FDR d’autres aéronefs EMB-145 montraient la même différence entre la vitesse de rotation des roues et la vitesse sol, suggérant qu’il s’agit d’une anomalie à l’échelle de la flotte. Les 4 transducteurs de vitesse de rotation des roues de l’aéronef en cause ont par la suite été soumis à des essais par le fabricant de la BCU, et ils fonctionnaient tous correctement. Il n’a pas été possible de déterminer la raison des données anormales de vitesse de rotation des roues. Même si les valeurs de vitesse de rotation des roues enregistrées par le FDR étaient suspectes, les données se sont quand même avérées utiles pour évaluer les tendances de vitesse de rotation des roues. Malgré l’absence d’exigence réglementaire relativement à l’enregistrement des données de vitesse de rotation des roues, ces renseignements peuvent être utiles pour établir le moment de la mise en rotation initiale des roues, la performance de freinage, le fonctionnement du système antipatinage, etc.

Photo 1. L'aéronef EMB-145LR après l'événement.
Photo of L'aéronef EMB-145LR après l'événement.

1.12 Renseignements sur l’épave et sur l’impact

Le fuselage avant de l’aéronef a été lourdement endommagé lorsque le train avant s’est affaissé peu de temps après la sortie de piste de l’aéronef. L’affaissement vers l’arrière du train avant a causé une déformation de sections du nez et du poste de pilotage et des dommages structuraux au fuselage avant (Photo 1).

1.13 Renseignements médicaux et pathologiques

Il est de pratique courante pour de nombreuses sociétés d’effectuer des tests de dépistage de drogues et d’alcool après tout accident lié au travail. La partie 120.109 des FAR exige que les employeurs effectuent des tests de ce type après un accident. Cependant, la partie 120.123 des FAR interdit expressément tout prélèvement d’échantillon ou test hors du territoire des États-Unis. À la suite de l’accident, la société a revu ses exigences et capacités en matière d’administration de tests de dépistage de drogues comme pratique usuelle, mais elle a décidé qu’elle n’était pas autorisée à faire passer ces tests parce que les pilotes étaient au Canada. Actuellement, aucun règlement au Canada n’oblige à faire passer des tests de dépistage de drogues et d’alcool à la suite d’un événement aéronautique. Les renseignements disponibles recueillis au cours de la présente enquête n’indiquent pas que des drogues ou de l’alcool ont été consommés ou ont joué un rôle dans l’événement.

1.14 Incendie

Il n’y a pas eu d’incendie avant ou après l’impact.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

1.15.1 Évacuation de l’aéronef

Lorsque l’aéronef s’est immobilisé, l’agent de bord a commencé la procédure d’évacuation. Les passagers ont emprunté la porte avant gauche principale de la cabine, la porte de sortie d’urgence avant droite du commissariat et les issues de secours sur l’aile gauche et l’aile droite. L’évacuation s’est déroulée rapidement et dans l’ordre, à l’exception du fait que plusieurs passagers ont emporté leurs bagages à main, même si l’agent de bord a crié à plusieurs reprises des instructions spécifiques avisant de laisser les bagages.

Cette insistance de la part des passagers à récupérer leurs bagages à main n’est pas unique à cet accident, comme le révèle la recommandation du BST sur les bagages à main (A07-07)Footnote 39. Tout retard dans l’évacuation en cas d’urgence peut présenter des risques importants pour la sécurité des passagers.

Les passagers ont été dirigés vers un lieu central, loin de l’aéronef, jusqu’à ce que l’aide arrive. En moins de 3 minutes après l’immobilisation de l’aéronef, les unités de SLIA sont arrivées sur les lieux. L’accident n’a causé que des blessures mineures aux 2 pilotes et à 1 passager. Le copilote, dont la jambe était coincée entre les pédales du palonnier et la partie inférieure du tableau de bord, a initialement eu de la difficulté à évacuer le siège droit du poste de pilotage.

1.15.2 Services de sauvetage et de lutte contre les incendies d’aéronef

L’Administration aéroportuaire de CYOW maintient une capacité d’intervention des SLIA de catégorie 8 (tableau 5).

Tableau 5. Capacité d'intervention des SLIA en fonction de la catégorie 8 d'aéronef
Catégorie d'aéronef Longueur hors tout de l'aéronef Largeur maximale du fuselage Quantité d'eau Quantité d'agents complémentaires Nombre minimal de véhicules de SLIA Capacité de décharge totale
8 Au moins 49 m, mais moins de 61 m 7 m 18 200 l 450 kg 3 7200 l/min

L’intervention du poste d’incendie de l’aéroport, situé à l’aérodrome, est en service 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Au moins 4 pompiers sont présents en tout temps.

L’unité de SLIA a reçu l’alarme, déclenchée par la tour de contrôle, à 14 h 30 min 46 s. Lorsque les 4 véhicules de SLIA sont arrivés sur les lieux, tous les passagers étaient hors de l’aéronef et regroupés près de l’avant de l’aéronef à droite.

Un abri temporaire a été érigé pour protéger les passagers de la pluie. Le commandant de bord, le copilote et 1 passager ont été traités pour des blessures mineures. On a demandé un autobus et une unité de soins médicaux d’urgence pour transporter les blessés à l’hôpital. Trois véhicules de SLIA ont été libérés à 17 h 45; le dernier est resté sur les lieux pour fournir une protection contre les incendies au personnel qui restait sur place.

1.16 Essais et recherches

Sans objet.

1.17 Renseignements sur les organismes et sur la gestion

1.17.1 Trans States Airlines LLC

L’entreprise Resort Air a été fondée en 1982 et a changé de nom à Trans States Airlines LLC en 1989; le siège social est situé à St. Louis (Missouri). TSA, qui exploitait initialement différents types d’aéronefs à turbopropulseur, a commencé à exploiter l’aéronef EMB-145 d’Embraer en 1998, et sa flotte compte environ 28 aéronefs. TSA est un transporteur aérien d’apport régional, exploité en vertu de la partie 121 des FAR, qui effectue des vols pour United Airlines et US Airways vers environ 39 destinations.

1.17.2 Formation et utilisation des volets par Trans States Airlines LLC

Le programme de formation initiale des nouveaux employés de TSA comprend :

La performance des aéronefs sur pistes mouillées et contaminées est abordée dans les modules sur la performance des aéronefs en général dans le cadre de la formation initiale et périodique. Les équipages de conduite prennent également connaissance des tableaux de performance des aéronefs qui se trouvent dans le volume 1 du manuel de formation au pilotage de TSA. Le plan de formation traite aussi de l’hydroplanage relativement à la performance au décollage et à l’atterrissage sur pistes contaminées. Les atterrissages de nuit sur une piste contaminée sont un des éléments du programme de formation initiale sur simulateur de TSA.

La formation en ce qui concerne l’utilisation de pistes rainurées et non rainurées, ou portant sur l’absence de pistes rainurées au Canada, n’est pas spécifiquement abordée dans le plan de formation. TSA ne fait pas de vérification de compétence en ligne particulière dans le cas des équipages de conduite qui volent au Canada.

Le levier de commande volets de tous les EMB-145 de TSA comporte 4 crans aux positions de 0°, de 9°, de 22° et de 45°. Il n’est pas possible de sélectionner de positions intermédiaires. Les volets augmentent la portance, ce qui entraîne une diminution de la vitesse de décrochage et permet de réduire la vitesse de toucher des roues. Ils augmentent aussi la traînée, permettant d’effectuer une approche à plus forte pente sans augmenter la vitesse indiquée. La traînée additionnelle a pour effet de raccourcir la course à l’atterrissage. Plus le réglage des volets est élevé, plus la vitesse est basse pour l’atterrissage.

Lorsque TSA a commencé à exploiter l’EMB-145 d’Embraer en 1998, les équipages étaient formés pour régler les volets à 45°, à moins que des volets réglés à 22° ne soient appropriés pour satisfaire à des exigences de performance particulières ou selon les besoins en cas d’urgence. Au moment de l’événement, les procédures d’utilisation normalisées de TSA indiquaient qu’un réglage de 22° était privilégié pour l’atterrissage. Cela permet une plus grande plage de vitesses, ce qui réduit la possibilité de dépasser la vitesse maximale volets sortis. En outre, une position réduite des volets crée moins de traînée, ce qui entraîne l’utilisation d’une poussée moins grande avec une diminution proportionnelle de la consommation de carburant. Le réglage des volets à 45° était toujours encouragé dans des circonstances où :

Trois autres exploitants du modèle EMB-145 ont été interrogés concernant le réglage des volets standard à l’atterrissage. Les volets à 22° étaient utilisés par 2 de ceux-ci de la même façon que TSA. Le troisième exploitant exigeait un réglage des volets à 45° comme position standard à l’atterrissage, à moins qu’il ne soit nécessaire de régler les volets à 22° pour respecter certains critères de performance ou les directives de l’index des procédures (QRH).

1.18 Renseignements supplémentaires

1.18.1 Approche et atterrissage

Les directivesFootnote 40 données aux équipages de conduite de TSA pour calculer la VAPPFootnote 41 précisent que la VAPP est égale à la VREFFootnote 42 plus la correction en fonction du vent. La correction en fonction du vent est considérée être la moitié de la composante vent de face plus la valeur rafales totale. Les vents à l’aéroport soufflaient du 160 °M à 10 nœuds avec rafales à 16 nœuds, ce qui indique un vent de face nul et une composante de rafales à 6 nœuds.

Les équipages de conduite ont accès à un tableau des vitesses caractéristiques à l’atterrissage (annexe D) ainsi qu’aux procédures d’utilisation normalisées dans le poste de pilotage. Ce tableau énumère les masses à l’atterrissage ainsi que les vitesses VREF pour les volets réglés à 22° et les volets réglés à 45°. La note au bas du tableau de TSA précise que la « correction vent = ½ vent de face + rafales totales », tandis que le manuel d’exploitation d’aéronef d’Embraer indique que la « correction vent = ­½ composante vent de face constant + rafales au-dessus du vent constant ». Pour une masse à l’atterrissage de 39 352 livres et les volets réglés à 22°, le tableau donne une VREF de 131 KIAS et une VAPP de 137 KIAS. La VAPP prévue par l’équipage était de 146 KIAS.

TSA fournit des directives dans le manuel d’exploitation générale, à la section 3-1, 8.5, intitulée Stabilized Approach (approche stabilisée), stipulant que « [traduction] […] l’aéronef doit être dans une configuration approuvée et doit maintenir la bonne vitesse d’approche et la bonne trajectoire de vol avant de descendre sous l’altitude minimale d’approche stabilisée ». L’altitude minimale d’approche stabilisée dans des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC) est définie comme 1000 pieds au-dessus de l’élévation de la zone de toucher des roues.

Le manuel d’exploitation générale précise aussi :

[Traduction] Chaque fois qu’une des conditions suivantes est dépassée lorsque sous « l’altitude d’approche stabilisée », une approche interrompue sera amorcée :

Les SOP de TSA (section 1, page 33, alinéa 4.2 – Landings), précisent en partie ceci :

[Traduction] Le facteur clé d’un atterrissage réussi est une approche stabilisée et une bonne coordination de la poussée/arrondi. À une masse et une VREF moyennes, l’aéronef survole la piste à plus de 150 pieds par seconde au cours de l’arrondi. Les arrondis de longue durée peuvent causer un atterrissage hors de la zone de toucher des roues (TDZ) et/ou un freinage brutal subséquent.

Lorsque l’aéronef est approximativement 200 pieds au-dessus de la zone de toucher des roues, le PF devrait […] réduire légèrement la poussée pour franchir le seuil de la piste à 50 pieds et à VREF.

Le point de toucher voulu est à l’intérieur des premiers 800 à 1500 pieds au-delà du seuil d’atterrissage. Le toucher des roues de l’aéronef doit se faire dans le premier tiers de la distance d’atterrissage disponible, mais jamais après avoir franchi plus de 3 000 pieds de la distance d’atterrissage disponible. Si ce n’est pas le cas, il faut effectuer une remise des gaz.

La Flight Safety Foundation, dans le cadre de son étude sur les accidents à l’approche et à l’atterrissage, a déterminé qu’une augmentation de 5 % de la vitesse d’approche finale entraîne une augmentation de la distance d’atterrissage de 10 % si un arrondi et un toucher des roues normaux sont effectués avec une décélération de l’aéronef au solFootnote 43. L’étude a également révélé qu’en prolongeant l’arrondi et en laissant l’aéronef flotter et éliminer l’excès de vitesse indiquée, la distance d’atterrissage pouvait aussi augmenter, parce que l’excès de vitesse doit être éliminé dans la transition entre le survol du seuil et le toucher des roues. Cette mesure utilise habituellement 3 fois plus de piste que la décélération au solFootnote 44.

1.18.2 Opérations sur piste mouillée

La publication générale GP145/1650 sur l’EMB-145 d’Embraer comporte des principes directeurs à l’intention des exploitants pour l’élaboration de leurs propres procédures d’utilisation. À propos de l’hydroplanage, on y trouve notamment ce qui suit :

[Traduction] Comme il est difficile d’atterrir à une vitesse inférieure aux vitesses critiquesFootnote 45 de la NASAFootnote 46, il est nécessaire d’utiliser certaines techniques d’atterrissage pour réduire au minimum les effets de l’hydroplanage, notamment :

La section 2 des procédures d’utilisation normalisées de TSA, Landing on Wet or Slippery Runways (page 69), donne des directives et indique notamment ce qui suit :

[Traduction] Les pistes mouillées peuvent causer l’hydroplanage de l’avion. Cela s’applique surtout aux pistes qui ne sont pas rainurées, ce qui est rare. Cela peut aussi s’appliquer aux pistes dont les rainures sont bouchées par de la glace sur les bords de la piste. Lorsqu’il y a hydroplanage, cela occasionne une perte importante de friction des pneus au point où il peut ne plus y avoir de rotation des roues.

Toujours appliquer le freinage maximal initialement lorsque l’atterrissage se fait sur une piste qui pourrait être glissante au cas où l’hydroplanage ou un dérapage deviendraient un facteur.

Prévoir les procédures et les vitesses d’approche : un arrondi et un toucher des roues bien planifiés et exécutés réduisent au minimum la distance d’atterrissage. Il est particulièrement important de ralentir à la VREF en franchissant le seuil lorsque l’état de la piste est moins qu’optimal. À chaque approche, il faut s’habituer à ralentir à la vitesse appropriée selon les procédures d’utilisation normalisées. Il faut envisager de régler les volets à 45° lorsque l’atterrissage se fait sur une piste mouillée non rainurée.

Il faut poser l’aéronef fermement sur l’axe de la piste et dans la zone de toucher des roues. Ne pas prolonger l’arrondi afin d’essayer d’atterrir en douceur.

La publication GP145/1650 d’Embraer recommande l’utilisation de la vitesse critique de la NASA et la rentrée des volets à l’atterrissage; cette information n’est pas comprise dans les procédures d’utilisation normalisées de TSA ni dans les manuels approuvés pour l’EMB-145 d’Embraer. En outre, il est recommandé dans GP145/1650 d’Embraer d’éviter un freinage excessif, tandis que les procédures d’utilisation normalisées de TSA et les manuels approuvés pour l’EMB-145 d’Embraer conseillent de freiner au maximum dès le départ lorsque l’atterrissage se fait sur une piste glissante pour éviter l’hydroplanage.

1.18.3 Utilisation d’un réglage des volets à 22° par rapport à un réglage des volets à 45°

La section 1 des procédures d’utilisation normalisées de TSA, Landing with Non-Standard Flap Settings (page 34, alinéa 4.2.C), stipule notamment ce qui suit :

[Traduction] Le réglage standard des volets pour un atterrissage est de 45° et de 22°. Le réglage privilégié pour la plupart des opérations normales est de 22°. Embraer considère comme « normal » le réglage des volets à 22° et à 45° (réf. bulletin d’exploitation Embraer 145-005/05). Le réglage des volets à 45° est recommandé si le freinage est dégradé, s’il y a de l’eau stagnante ou si la piste n’est pas rainurée et qu’elle est mouillée. La section sur les performances des documents de mise en route et les tableaux de vitesses d’atterrissage contiendront des données pour les 2 réglages. Les approches avec les volets à 22° exigent un respect strict de la VAPP et de la VREF parce que la configuration à faible traînée entraîne de faibles taux de décélération, et tout excès de vitesse au seuil peut causer un flottement et une course au sol plus longue.

1.18.4 Hydroplanage

L’hydroplanage, aussi appelé l’aquaplanage, survient lorsqu’une pellicule d’eau se trouve entre les pneus de l’aéronef et la surface de la piste, ce qui entraîne une perte de traction et empêche l’aéronef de répondre aux commandes telles que la direction ou le freinage. Un atterrissage à une vitesse supérieure aux vitesses de toucher des roues recommandées expose l’aéronef à un plus grand risque d’hydroplanage. Une fois que l’hydroplanage a débuté, il peut persister jusqu’à des vitesses beaucoup plus basses que la vitesse d’hydroplanage initiale minimale. En général, on distingue 3 types d’hydroplanage : dynamique, visqueux et dû à la dévulcanisation du caoutchouc.

L’hydroplanage dynamique et l’hydroplanage visqueuxFootnote 47 sont décrits comme suit :

[Traduction] L’hydroplanage dynamique est causé par l’augmentation de la pression hydrodynamique dans la zone de contact entre les pneus et le revêtement. Cette pression génère une force vers le haut qui soulève réellement les pneus de la surface. Lorsque les pneus et le revêtement sont complètement séparés, on dit qu’il y a hydroplanage dynamique total, et les roues cessent de tourner […] Habituellement, il n’y a hydroplanage dynamique total que pendant une averse de pluie violente. Il doit y avoir une couche d’eau d’une profondeur minimale sur la piste pour soutenir les pneus. La profondeur exacte de la couche d’eau ne peut être prédéterminée, car d’autres facteurs, comme la rugosité de la piste et la bande de roulement des pneus, ont un effet sur l’hydroplanage dynamique. Une piste et une bande de roulement lisses favorisent l’hydroplanage avec une couche d’eau moins importante. Même si la profondeur exacte de la couche d’eau nécessaire pour qu’il y ait hydroplanage n’a pas été déterminée avec précision, d’après une estimation prudente pour une piste moyenne, une couche d’eau de plus de 0,1 pouce (2,54 mm) peut provoquer un hydroplanage complet.

[Traduction] L’hydroplanage visqueux est plus courant que l’hydroplanage dynamique. Il peut survenir à des vitesses inférieures et en présence de couches d’eau moins importantes. Il y a hydroplanage visqueux lorsque la surface du revêtement de la piste est recouverte d’une mince couche d’eau que les pneus sont incapables de traverser, et que ces derniers perdent partiellement le contact avec le revêtement. Souvent, l’hydroplanage visqueux survient sur des pistes dont le revêtement est lisse ou qui comportent des dépôts de caoutchouc, habituellement dans la zone de poser, là où une mince couche d’eau peut réduire de façon importante le coefficient de frottement.

L’hydroplanage dû à la dévulcanisation du caoutchoucFootnote 48 est décrit comme suit :

Un hydroplanage dû à la dévulcanisation du caoutchouc survient lorsqu’une roue bloquée se met à glisser sur la piste et que cette situation génère suffisamment de chaleur pour transformer l’eau en une vapeur qui dévulcanise (fait fondre) le caoutchouc du pneu et le ramène à son état d’avant vulcanisation. Seul ce type d’aquaplanage laisse une marque sur la bande de roulement qui ressemble à une brûlure; un bout de caoutchouc dévulcanisé. Ce type d’aquaplanage est aussi reconnu pour laisser des marques de chauffage à la vapeur sur la piste dues à l’effet de nettoyage de la vapeur d’eau entre le pneu et la surface de la piste.

La documentation sur l’hydroplanage des pneus d’aéronef indique que, bien que l’hydroplanage dû à la dévulcanisation du caoutchouc est habituellement accompagné de marques de chauffage à la vapeur sur la piste, l’inverse n’est pas nécessairement vrai. C’est-à-dire que les marques de chauffage à la vapeur ne permettent pas d’établir avec certitude qu’il s’agit de ce type d’hydroplanage; des événements ont été signalés où de telles marques avaient été observées sur les pistes, sans qu’il y ait toutefois de zones de dévulcanisation sur les pneusFootnote 49,Footnote 50. Ce phénomène pourrait être dû à la différence de température entre la formation de vapeur d’eau et la dévulcanisation du pneu. À la pression atmosphérique normale, l’eau bout à 100 °C. La température de dévulcanisation du caoutchouc, cependant, est d’environ 204° à 316 °CFootnote 51. En conséquence, il existe une plage de températures dans laquelle il pourrait se former de la vapeur sous le pneu qui laisserait des marques sur piste, sans que le caoutchouc du pneu fonde. Des marques de chauffage à la vapeur ont été observées sur la piste, comme l’indiquent les photos prises peu de temps après l’événement (Photo 2).

Photo 2. Marques de chauffage à la vapeur observées à l'extrémité départ de la piste 07
Photo of Marques de chauffage à la vapeur observées à l'extrémité départ de la piste 07

La publication générale GP145/1650 sur l’EMB-145 d’Embraer comprend une section dans laquelle ces 3 types d’hydroplanage sont décrits. Ce document poursuit en décrivant la formule de calcul de la vitesse critique, ou la vitesse d’hydroplanage, de la NASA afin de calculer la vitesse d’hydroplanage des pneus. La formule de calcul de la vitesse critique de la NASA est égale à 9 fois la racine carrée de la pression des pneus. La pression des pneus du train principal de l’EMB-145LR est de 160 lb/po², ce qui donne une vitesse d’hydroplanage de 114 nœuds. Une deuxième formule est utilisée pour calculer la vitesse d’hydroplanage lorsqu’il pleut au moment du toucher des roues, et que celles-ci ne tournent pas encore. La formule change à 7,7 fois la racine carrée de la pression des pneus, ce qui donne 97 nœuds pour l’EMB-145LR. L’aéronef en cause s’est posé à 132 KIAS sur une piste mouillée.

1.18.5 Fatigue

La plupart des gens ont normalement besoin de 7,5 à 8,5 heures de sommeil continu par période de 24 heuresFootnote 52. Les recherches ont démontré de manière fiable qu’une perte de sommeil aiguë est cause de fatigue et de diminution du rendement. Par exemple, le fait de réduire la durée totale du sommeil d’une personne en deçà de ses besoins biologiques entraîne chez elle de la fatigueFootnote 53,Footnote 54, et lorsque la durée totale du sommeil est réduite à moins de 6 heures, le rendement est assurément diminué dû à la fatigueFootnote 55.

1.18.6 Autres événements sur la piste 07/25 de CYOW

Depuis l’an 2000, il s’est produit 3 autres sorties en bout de piste sur la piste 07/25 lorsque celle-ci était mouillée ou contaminée (annexe J). Selon l’annexe F, les résultats des essais de frottement de la piste 07/25 ont été inférieurs à ceux de la piste 14/32 depuis 2004; en raison de ces 3 sorties en bout de piste, le BST a décidé d’examiner la construction et l’entretien de la piste plus en détail.

1.18.7 Liste de surveillance du BST

En mars 2010, le BST a publié sa Liste de surveillance, détaillant les questions de sécurité sur lesquelles le BST a enquêté et qui présentent les risques les plus graves pour les Canadiens. Les accidents à l’atterrissage et les sorties en bout de piste constituaient, ensemble, 1 des 9 problèmes de sécurité cernés. Le nombre d’accidents à l’atterrissage et de sorties en bout de piste n’a pas beaucoup diminué depuis 2010, et le BST a une fois de plus souligné cette question dans sa Liste de surveillance en 2012. La Liste de surveillance du BST soulignait l’importance de disposer d’une « aire de sécurité » suffisante au-delà de l’extrémité de piste et de fournir rapidement des renseignements sur l’état de la surface des pistes aux pilotes.

1.19 Techniques d’enquête utiles ou efficaces

Sans objet.

2.0 Analyse

2.1 Introduction

Il est généralement reconnu qu’une piste mouillée peut être glissante et qu’une distance d’atterrissage supplémentaire peut être requise au-delà de celle nécessaire sur une piste sèche. Les efforts à l’échelle nationale et internationale visant à établir une corrélation étroite entre les mesures de frottement de la surface de pistes mouillées et l’efficacité de freinage des aéronefs n’ont pas abouti.

Aucune anomalie mécanique n’a été décelée sur l’aéronef. Un examen approfondi du circuit de freinage de l’aéronef a été effectué, et tout s’est avéré normal. Les pneus ont été examinés et ne montraient aucune zone de dévulcanisation. Les conditions de piste mouillée qui prévalaient, les marques de chauffage à la vapeur et la vitesse de l’avion qui ne diminuait pas indiquent que l’aéronef a fait de l’hydroplanage visqueux.

L’analyse portera principalement sur le coefficient de freinage de l’aéronef, les procédures opérationnelles, la fatigue et les caractéristiques de la piste.

2.2 Coefficient de freinage de l’aéronef

Le circuit de freinage de l’aéronef en cause fonctionnait correctement. Le fonctionnement du circuit de freinage pendant la course au sol lors de l’événement est caractéristique d’une situation où prévalent de mauvaises conditions de freinage. La décélération de l’aéronef était faible en raison du manque de force de freinage attribuable à l’hydroplanage visqueux. L’équipage de l’aéronef a senti cette faible décélération et a essayé de l’augmenter en serrant les freins à fond. Le système antipatinage, cependant, a réagi au faible coefficient de frottement en réduisant la pression de freinage pour empêcher le blocage des roues et empêcher l’aéronef de déraper.

Les calculs de performance d’Embraer ont été effectués en fonction du coefficient de frottement figurant à l’alinéa 25.109(c)(1) des United States Federal Aviation Regulations (FAR), et donnaient une distance d’atterrissage beaucoup plus courte que celle de l’aéronef en cause. Les données de l’atterrissage qui a mené à l’événement aussi bien que les données d’essai à l’atterrissage réel de Honeywell indiquaient un coefficient de frottement de freinage considérablement inférieur à celui prédit par les équations sur piste mouillée unie de l’alinéa 25.109(c)(1) des FAR. Ces résultats vont de pair avec les conclusions du National Transportation Safety Board (NTSB) pour les événements à l’atterrissage semblables.

2.3 Approche et atterrissage

Pendant l’approche, le vent a tourné du 100° à 8 nœuds au 160° à 10 nœuds avec rafales à 16 nœuds. On a donné le choix à l’équipage de poursuivre sur la piste 07 ou de passer à la piste 14. Pour différentes raisons, l’équipage a décidé de continuer l’approche vers la piste 07. Les tableaux de données d’analyse d’aéroport fournis dans les documents d’autorisation de vol étayent cette décision, puisque les conditions étaient à l’intérieur des critères de performance de l’aéronef.

Les procédures d’utilisation normalisées de Trans States Airlines (TSA) fournissent les critères d’une approche stabilisée et les conditions qui nécessitent l’exécution d’une approche interrompue. En conformité avec les procédures d’utilisation normalisées, l’équipage a choisi une VREF de 131 KIAS (vitesse indiquée en nœuds). Pour un atterrissage avec volets réglés à 22°, la correction vent minimale est de 5 KIAS, et la correction maximale est de 20 KIAS (annexe D). L’équipage a ajouté par erreur la correction vent minimale de 5 KIAS à la VAPP au lieu d’ajouter la composante vent de face qui, le cas échéant, était zéro. L’équipage a ensuite ajouté 6 nœuds (coefficient de rafale) pour une VAPP de 142 KIAS. L’équipage a ajouté 4 KIAS de plus pour compenser les conditions de rafale, ce qui a donné 146 KIAS (131+5+6+4), soit 9 nœuds au-dessus de ce qui est précisé dans les procédures d’utilisation normalisées. L’équipage a dû gérer cette vitesse supplémentaire pour franchir le seuil de la piste à la VREF prévue de 131 KIAS. L’aéronef a franchi le seuil de la piste à 139 KIAS, soit 8 nœuds au-dessus de la vitesse calculée pour la masse à l’atterrissage de l’aéronef. Les procédures d’utilisation normalisées exigeaient que les équipages amorcent une approche interrompue lorsque la vitesse indiquée cible est dépassée de 5 nœuds plus ou moins. Il est vraisemblable que l’équipage ne pensait pas que la situation exigeait une remise des gaz; l’équipage croyait que l’ensemble de l’approche était stabilisé et la piste était en vue.

Une augmentation de 5 % de la vitesse d’approche finale entraîne une augmentation de la distance d’atterrissage de 10 % si un arrondi et un toucher des roues normaux sont accompagnés d’une décélération de l’aéronef au sol. En prolongeant l’arrondi et en laissant l’aéronef flotter et éliminer l’excès de vitesse indiquée, on utilise habituellement 3 fois plus de piste qu’en décélérant au sol. L’aéronef a fait un atterrissage long et s’est posé à environ 2270 pieds au-delà du seuil, bien que dans le premier tiers de la distance d’atterrissage disponible. L’analyse des performances à l’atterrissage d’Embraer a déterminé que malgré l’atterrissage long à vitesse élevée, on aurait dû être en mesure d’immobiliser l’avion à 1800 pieds avant l’extrémité de la piste.

Le toucher des roues en douceur, combiné à une piste mouillée, a augmenté le risque d’hydroplanage. La technique pour effectuer un atterrissage sur piste mouillée ou contaminée est de se poser durement, à la plus basse vitesse possible, dans la zone de poser. On aurait atteint la plus basse vitesse possible en réglant les volets à 45°.

Il a été démontré que les inverseurs de poussée jouent un rôle important dans la réduction des distances accélération-arrêt sur pistes mouillées et contaminées et qu’ils fournissent une force de freinage qui ne dépend pas du frottement de piste. Lorsque le freinage à l’atterrissage est de mauvaise qualité sur une piste, l’effet des inverseurs de poussée peut faire toute la différenceFootnote 56.

Dans ce cas particulier, le coefficient de frottement de freinage de l’aéronef était très faible tout au long de la course à l’atterrissage, et il n’a pas commencé à augmenter avant que l’aéronef ralentisse à environ 90 KIAS. Si l’aéronef avait été équipé d’inverseurs de poussée, l’utilisation de l’inversion de poussée le plus vite possible après le toucher des roues aurait permis de ralentir l’aéronef sous la vitesse d’hydroplanage beaucoup plus tôt, et possiblement d’empêcher la sortie en bout de piste.

La publication générale GP145/1650 d’Embraer comportait des documents d’orientation sur l’hydroplanage qui contenaient de l’information ne figurant pas dans les manuels approuvés pour l’EMB-145 ou les manuels de TSA. Notamment, on recommandait que les équipages gardent à l’esprit la vitesse critique de la NASA, qu’ils évitent un freinage excessif lorsque cette vitesse est dépassée et aussi qu’ils rentrent les volets tout de suite après le toucher des roues pour mettre davantage de la masse de l’aéronef sur les pneus. Cette information aurait pu être utilisée par un exploitant pour élaborer des politiques ou des procédures faisant appel à des techniques non approuvées pour l’exploitation de l’EMB145.

2.4 Utilisation d’un réglage des volets à 22° par rapport à un réglage des volets à 45°

L’équipage de conduite a consulté les valeurs de performance fournies, et a choisi l’approche avec volets réglés à 22° sur la piste 07; la pratique courante pour les équipages de conduite de TSA était de régler les volets à 22° pour l’atterrissage. Après avoir été informé qu’il avait commencé à pleuvoir, l’équipage a poursuivi l’approche avec volets à 22°, même si les procédures d’utilisation normalisées de TSA recommandaient de régler les volets à 45° pour les opéra tions sur piste mouillée. Il existait des différences entre les 3 autres transporteurs interrogés quant à l’utilisation des volets à 22° par rapport à 45°.

2.5 Formation

La formation aux opérations aériennes de TSA comporte de la formation relative aux opérations sur piste mouillée et contaminée, à la performance et à l’hydroplanage. Même si l’équipage de conduite en cause avait beaucoup d’expérience aux commandes de l’EMB-145, l’équipage peut ne pas avoir été conscient des risques que présente un atterrissage sur une piste non rainurée mouillée. En outre, à la section 2 des procédures d’utilisation normalisées de TSA (page 69), on suggère que les pistes non rainurées sont inhabituelles. L’absence de pistes rainurées n’était donc pas mise en évidence pour les équipages de conduite qui effectuaient des vols à destination et en provenance d’aéroports canadiens. En l’absence d’information et de formation relatives aux pistes non rainurées, il existe un risque que les équipages n’utilisent pas les techniques d’atterrissage appropriées lorsque ces pistes sont mouillées.

2.6 Hydroplanage

Il n’a pas été possible de déterminer la profondeur de la couche d’eau sur la piste; cependant, les mesures automatiques des chutes de pluie prises à ce moment indiquaient qu’il était tombé environ 2 mm de pluie dans les 12 minutes avant l’accident. La quantité d’eau sur la piste était peut-être plus grande que ce à quoi on s’attendrait en raison de la direction dominante du vent pendant la chute de pluie et du bombé de la piste qui passe progressivement à gauche de l’axe sur les derniers 6000 pieds de la piste 07. Les données de l’enregistreur des données de vol (FDR) pour le vol LOF8050 indiquent que les roues du train principal ont bel et bien continué de tourner tout au long de la course à l’atterrissage, bien que leur mise en rotation ait eu lieu moins vite qu’à la normale.

L’hydroplanage sur une piste mouillée peut être causé par divers facteurs, notamment :

Pour l’événement en question, les facteurs apparents pendant la course à l’atterrissage sont caractéristiques de l’hydroplanage visqueux et non pas de l’hydroplanage dynamique. Ces facteurs sont un toucher des roues en douceur, une mise en rotation des roues moins vite qu’à la normale sans blocage et de très faibles pressions de freinage fournies par l’unité de commande de freinage (BCU) jusqu’à de très basses vitesses. Le frottement entre les pneus et la piste était réduit, mais pas au point de nuire à la rotation des roues. Il ne s’est pas produit d’hydroplanage dynamique parce que la rotation des roues s’est poursuivie, et la profondeur de la couche d’eau calculée était inférieure aux 3 mm normalement associés au début de l’hydroplanage dynamique. Une fois que l’hydroplanage débute, il persiste jusqu’à des vitesses beaucoup plus basses que la vitesse d’hydroplanage initiale minimale. Même si les pédales des 2 pilotes étaient braquées vers la droite durant la dernière étape de la course à l’atterrissage, l’aéronef s’est déporté sur la gauche, indiquant le manque de frottement et le manque de maîtrise en direction qui sont associés à l’hydroplanage.

Un examen après l’accident n’a pas révélé de zones de dévulcanisation sur les pneus du train principal de l’aéronef. L’aéronef est sorti de la piste avant que la température de dévulcanisation du caoutchouc soit atteinte; par conséquent, il n’y a pas eu d’hydroplanage dû à la dévulcanisation du caoutchouc. Cependant, il y avait des marques de chauffage à la vapeur à l’extrémité de la piste, ce qui indiquait que la température à laquelle la vapeur se forme avait été atteinte.

2.7 Fatigue

L’historique des cycles veille-sommeil du commandant de bord et du copilote a été analysée; lorsqu’il n’était pas possible de déterminer avec précision les heures de sommeil et de veille, on a recouru à des estimations prudentes.

La nuit précédant l’événement, le commandant de bord a dormi 2 ou 3 heures de moins qu’à la normale. Étant donné que les habitudes de sommeil du commandant de bord étaient inférieures à la moyenne minimale requise, et que la période de sommeil la plus récente avait été encore moins longue, le commandant de bord était vraisemblablement fatigué au moment de l’événement.

Le copilote avait le sommeil léger, de mauvaise qualité par surcroît, avec 2 périodes d’éveil par nuit. Les environnements de sommeil imposés par l’horaire, les périodes de sommeil restreintes et la moins bonne qualité, dans l’ensemble, du sommeil léger du copilote ont fait que ce dernier était vraisemblablement fatigué au moment de l’événement.

Les membres de l’équipage n’auraient été en mesure d’obtenir 8 heures de sommeil réparateur que s’ils avaient pu s’endormir immédiatement à leur arrivée à l’hôtel et avaient bien dormi toute la nuit. Il y a de nombreuses situations raisonnablement prévisibles dans lesquelles les pilotes obtiendraient moins de repos que le maximum possible. En conséquence, les équipages de conduite dont l’horaire de travail, semblable à celui du commandant de bord et du copilote, respecte les règles liées aux heures de travail et de repos (section 121.471 des FAR) peuvent devenir fatigués parce qu’ils obtiennent moins de sommeil qu’ils en ont normalement besoin et moins de sommeil que la moyenne minimale requise de 7,5 à 8,5 heures.

La recherche à l’appui de la diminution du rendement liée à la fatigue est abondante. Bien que les pilotes en cause étaient vraisemblablement fatigués, il n’a pas été possible de déterminer dans quelle mesure la fatigue a contribué à la sortie en bout de piste. Les règles en vigueur liées aux heures de travail et de repos ne préviennent pas nécessairement la fatigue des équipages de conduite.

2.8 Aérodrome

2.8.1 Introduction

L’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et Transports Canada (TC) ont tous deux établi des normes et des pratiques recommandées afin que les pistes soient conçues pour fournir de bonnes caractéristiques de frottement lorsqu’elles sont mouillées. Les facteurs qui ont une incidence sur le coefficient de frottement des pistes comprennent les pentes longitudinales et transversales, la macrorugosité et la microrugosité. Les  surfaces adjacentes à la piste devraient être construites de façon à réduire les dommages causés aux aéronefs en cas de sortie de piste. Les renseignements sur l’état de la surface des pistes doivent aussi être exacts, fournis en temps opportun et diffusés à ceux qui peuvent utiliser le mieux l’information pour prendre la décision d’atterrir ou non.

2.8.2 Caractéristiques de la piste

Tout facteur qui favorise la rétention d’eau sur la piste ou en réduit l’écoulement augmente le risque d’hydroplanage. Le profil de la piste 07/25 à l’Aéroport international Macdonald-Cartier d’Ottawa (CYOW) n’était pas optimal à cet égard, avec comme résultat que la surface de la piste peut retenir l’eau davantage que celle d’une piste qui satisfait toutes les normes et les pratiques recommandées de la publication Aérodromes – Normes et pratiques recommandées de TC (TP 312). Une comparaison des niveaux de frottement de la piste 14/32 et ceux de la piste 07/25 indique que les niveaux de frottement de la piste 07/25 étaient considérablement inférieurs. La pente transversale des derniers 6000 pieds de la piste 07 (surtout alliée à un vent de travers soufflant de la droite comme dans le cas présent) faisait que l’eau s’écoulait plus lentement, ce qui rendait la piste plus glissante.

Les résultats des essais de coefficient de frottement effectués d’avril à août 2011 indiquent que lorsqu’on utilise une couche d’eau de 0,5 mm, les valeurs de frottement sont supérieures à ce que les lignes directrices de TC précisent pour envisager des mesures correctives. Cependant, si on utilise une couche d’eau de 1,0 mm, les valeurs de frottement sont inférieures à celles précisées dans la partie 2 du Manuel des services d'aéroport (document 9137) de l’OACI, et des mesures correctives devraient être prises immédiatement. L’enquête n’a pas permis de déterminer la raison des différences entre les valeurs de frottement minimales et les méthodes d’essai publiées par TC et l’OACI/FAA (Federal Aviation Administration). Cette différence peut entraîner de faibles niveaux de frottement de piste aux aéroports canadiens.

2.8.3 État de la surface de la piste

Il est essentiel d’assurer un entretien efficace de la surface d’une piste pour conserver les caractéristiques de frottement maximal. La mesure périodique du frottement, au moyen d’un appareil automouillant de mesure continue du frottement, permet de déterminer si la surface devient plus glissante lorsqu’elle est mouillée. Ainsi, l’aéroport peut prévoir des mesures d’entretien, comme l’enlèvement du caoutchouc, pour rétablir les niveaux de frottement de la piste. Le relevé de frottement, combiné à des données précises sur le profil de surface des pistes, permettraient également aux administrations aéroportuaires de déterminer si une piste doit être considérée comme glissante lorsqu’elle est mouillée, de sorte que les renseignements appropriés puissent être diffusés dans les avis aux navigants (NOTAM). Le personnel opérationnel des entreprises, y compris les équipages d’aéronefs, pourrait être ensuite informé à l’avance qu’il faut utiliser des techniques d’atterrissage appropriées pour réduire les risques d’hydroplanage.

Les efforts à l’échelle nationale et internationale visant à établir une corrélation étroite entre les mesures de frottement de la surface de pistes mouillées et l’efficacité de freinage des aéronefs n’ont pas abouti. En conséquence, le coefficient de frottement des pistes n’est pas mesuré lorsqu’il n’y a que de l’eau sur la surface de la piste. La difficulté de définir l’état de la surface des pistes, le manque de mesures de frottement de la surface et la subjectivité des comptes rendus de quantité d’eau sur la piste, tous ces facteurs se combinent pour potentiellement ne fournir que peu ou pas d’information sur l’état de la surface d’une piste au personnel navigant.  

Pour que le personnel navigant soit en mesure d’évaluer correctement les conditions à l’atterrissage, il devrait être informé de la quantité d’eau sur la surface de la piste. Les enregistrements vidéo captés au moment de l’accident ont révélé un épais brouillard d’eau pulvérisée provenant de l’aéronef à l’atterrissage. La publication TP 312 ne présente pas de directives sur la façon d’évaluer l’état de la surface des pistes pour déterminer la quantité d’eau sur celles-ci. Pendant les mois non hivernaux, aucune politique à CYOW n’exige l’inspection de la surface des pistes lorsqu’il commence à pleuvoir, ni leur inspection périodique pendant qu’il continue de pleuvoir.

2.8.4 Rainurage des pistes

Une des méthodes adoptées à l’échelle mondiale pour améliorer l’écoulement de l’eau d’une piste est de faire des rainures sur la surface de la piste. Des études ont montré que l’eau s’écoule beaucoup plus rapidement d’une piste rainurée, à un point tel que la piste semble humide même lorsqu’il continue de pleuvoir. En conséquence, le niveau de frottement de la piste demeure plus élevé, ce qui assure un meilleur freinage. Les pistes rainurées améliorent le drainage et la résistance au dérapage, réduisent le risque d’hydroplanage, et sont recommandées par la FAA. Des études ont montré que le niveau de freinage qu’offrent les pistes rainurées mouillées n’est souvent que légèrement inférieur à celui qu’offrent les pistes sèches.

Une enquête limitée auprès de moyens et de grands aéroports aux États-Unis, où le climat est semblable à celui de CYOW, révèle que les pistes sont rainurées à la majorité d’entre eux. Cela indique qu’un climat froid n’est pas un facteur limitatif dans la décision de rainurer une piste. Il a été démontré que le rainurage de piste permettait de maintenir des niveaux de frottement plus élevés dans des conditions mouillées.

L’absence de normes ou de pratiques recommandées au Canada exigeant la prise de mesures d’amélioration du frottement, telles que le rainurage des pistes, augmente le risque de sortie en bout de piste dû à l’hydroplanage sur piste mouillée.

Même si l’étude de TC fait couramment référence aux pistes rainurées et aux pistes revêtues d’une couche de frottement poreuse (PFC), elle ne fait pas de distinction entre les deux. La FAA et EurocontrolFootnote 57 recommandent de ne pas revêtir d’une PFC les pistes où le trafic aérien est élevé parce qu’il est difficile d’enlever les dépôts de caoutchouc sans remplacer la couche de roulement au complet.

2.8.5 Mesure des précipitations

Les observateurs météorologiques à CYOW n’ont pas de dispositif de mesure des précipitations à distance. L’intensité des chutes de pluie est une mesure qualitative, déterminée en conformité avec le Manuel d’observations météorologiques de surface d’Environnement Canada (MANOBS d’EC). À partir des renseignements obtenus au moyen de l’équipement de mesure de l’Unité de gestion des eaux pluviales de la ville d’Ottawa situé à l’aéroport, l’intensité de la pluie était modérée selon les critères du MANOBS d’EC. Ces renseignements auraient pu être utiles à l’équipage du vol LOF8050 pour décider s’il convenait mieux de continuer l’approche ou de choisir une autre piste disponible.

Le message d’observation météorologique spéciale d’aérodrome (SPECI) transmis à 14 h 18 faisait état de pluie de faible intensité. Un changement d’intensité de la pluie à modérée ou à forte avant la transmission de l’observation horaire suivante, ne peut pas, à lui seul, satisfaire à l’exigence d’émission d’un autre SPECI. Bien que cela ne s’applique pas au présent accident, un changement d’intensité de la pluie (plus particulièrement une augmentation) devrait être signalé afin de garantir que le personnel navigant puisse prendre en considération la baisse d’efficacité de freinage et un plus grand risque d’hydroplanage.

2.8.6 Pente de la piste

La valeur d’une piste dotée d’une pente transversale adéquate pour faciliter l’écoulement rapide de l’eau est clairement reconnue dans la publication TP 312. En fait, l’OACI et TC ont établi des normes et des pratiques recommandées afin que les pistes soient conçues « … de manière à fournir de bonnes caractéristiques de frottement lorsque cette piste est mouillée »Footnote 58. La pente transversale et longitudinale de la piste doit être conçue pour assurer l’écoulement rapide de l’eau pendant les périodes de pluie.

Le profil du bombé de la piste 07, combiné à un fort vent de travers de 90° soufflant de la droite, aurait nui au débit d’écoulement de l’eau de la surface de la piste. Cela aurait pu rendre la surface de la piste plus glissante lorsqu’il pleuvait.

Depuis qu’on a refait la surface en 1994, la piste 07/25 à CYOW n’est pas conforme à la pratique minimale recommandée en ce qui concerne le degré d’inclinaison de la pente transversale et la position du bombé par rapport à l’axe de la piste.

2.8.7 Aire de sécurité d’extrémité de piste

L’aéronef a dépassé le seuil et la bande de piste pour ensuite rencontrer une importante dépression, où le train avant s’est affaissé vers l’arrière, ce qui a causé des dommages considérables au nez de l’aéronef.

En 2007, le BST a recommandé que TC exige que toutes les pistes de code 4 aux aéroports canadiens soient pourvus d’une aire de sécurité d’extrémité de piste (RESA) de 300 m (60 m + 240 m) ou d’un autre moyen d’immobilisation des aéronefs offrant un niveau de sécurité équivalent. TC mène des consultations sur l’adoption de la norme de l’OACI actuellement en vigueur d’une RESA de 150 m, mais il n’existe aucune réglementation qui exige que les aéroports canadiens soient pourvus d’une RESA.

3.0 Faits établis

3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L’équipage a calculé une VAPP (c.-à-d., une vitesse d'approche visée) incorrecte, et a effectué l’approche à une vitesse supérieure à celle recommandée.

  2. L’aéronef a franchi le seuil à une vitesse de 8 nœuds supérieure à la VREF (c.-à-d., la vitesse de référence d’atterrissage), ce qui a entraîné un arrondi prolongé pour un atterrissage à 2270 pieds, soit 770 pieds au-delà du point de toucher voulu de Trans States Airlines (TSA), qui se situe entre 800 et 1500 pieds, mais dans le premier tiers de la distance d’atterrissage disponible selon les procédures d’utilisation normalisées de TSA.

  3. L’atterrissage en douceur sur une piste mouillée a engendré un hydroplanage visqueux, ce qui a entraîné un mauvais freinage et réduit la vitesse de décélération de l’aéronef, contribuant ainsi à la sortie en bout de piste.

  4. L’eau de pluie s’est accumulée sur la piste 07/25 en raison du vent de travers et de la conception de la pente transversale, ce qui a entraîné une diminution supplémentaire du coefficient de frottement pour le vol en question.

  5. L’équipage n’a pas choisi un réglage des volets à 45°, comme les procédures d’utilisation normalisées de Trans States Airlines l’encouragent pour un atterrissage sur une piste non rainurée mouillée, ce qui a entraîné une vitesse d’atterrissage plus élevée et une distance d’atterrissage plus longue.

  6. L’équipage n’a pas remis les gaz lorsque la VREF a été dépassée de plus de 5 KIAS (vitesse indiquée en nœuds).

  7. Le dispositif de freinage antipatinage a fonctionné comme prévu en empêchant les pressions de freinage de monter aux valeurs commandées après le serrage des freins, et ce, afin d’empêcher le blocage des roues. En raison du freinage insuffisant pendant la course à l’atterrissage, l’aéronef est sorti en bout de piste.

  8. L’aéronef a dépassé le seuil et la bande de piste pour ensuite rencontrer une importante dépression, où le train avant s’est affaissé vers l’arrière, ce qui a causé des dommages considérables au nez de l’aéronef.

3.2 Faits établis quant aux risques

  1. En l’absence d’information et de formation relatives aux pistes non rainurées, il existe un risque que les équipages n’utilisent pas les techniques d’atterrissage appropriées lorsque ces pistes sont mouillées.

  2. La fatigue crée le risque de baisse de rendement dans l’exploitation d’aéronefs, et les règles liées aux heures de travail et de repos n’ont pas nécessairement prévenu la fatigue chez les équipages de conduite.

  3. La publication Aérodromes – Normes et pratiques recommandées de Transports Canada (TP 312) et le manuel d’exploitation de l’Aéroport international Macdonald-Cartier d’Ottawa (CYOW) ne comportent aucune directive précise sur la façon d’évaluer et de signaler l’état de la surface des pistes pendant les mois non hivernaux. Par conséquent, les équipages ne sont peut-être pas en mesure d’évaluer correctement les conditions à l’atterrissage.

  4. Si une augmentation de l’intensité des chutes de pluie n’est pas signalée rapidement, les équipages ne peuvent pas prendre en considération la baisse de performance de freinage, et il y a un risque accru d’hydroplanage.

  5. Les valeurs de frottement minimales publiées par Transports Canada sont inférieures à celles de l’Organisation de l’aviation civile internationale et de la Federal Aviation Administration, et les méthodes d’essai sont également différentes. Ces différences peuvent expliquer les faibles niveaux de frottement des pistes aux aéroports canadiens.

  6. L’absence de normes ou de pratiques recommandées au Canada exigeant la prise de mesures d’amélioration du frottement, telles que le rainurage des pistes, augmente le risque de sortie en bout de piste sur piste mouillée.

  7. L’absence d’inverseurs de poussée augmente le risque de sortie en bout de piste lors d’un atterrissage sur piste mouillée.

  8. Les valeurs de coefficient de frottement de l’alinéa 25.109(c)(1) des United States Federal Aviation Regulations donnent une distance d’atterrissage considérablement plus courte que celle de l’aéronef en cause et que celles dans d’autres événements ayant fait l’objet d’une enquête du National Transportation Safety Board. Cette différence augmente le risque de sortie en bout de piste sur piste mouillée.

3.3 Autres faits établis

  1. En raison de l’absence d’un dispositif qui mesure continuellement la quantité de pluie et qui en fait le compte rendu, l’intensité des chutes de pluie à l’Aéroport international Macdonald-Cartier d’Ottawa (CYOW) est déterminée de façon subjective. En conséquence, la quantité et l’intensité de pluie signalées peuvent être différentes de celles avec lesquelles les équipages doivent réellement composer à l’atterrissage.

  2. Le matériel d’information produit par Embraer dans la publication générale GP145/1650 n’a pas été inclus dans les manuels approuvés par Embraer ni dans ceux de Trans States Airlines. Le matériel était essentiellement contradictoire et pourrait faire en sorte que les exploitants élaborent des politiques ou des procédures qui font appel à de mauvaises techniques pour l’exploitation de l’EMB-145.

  3. Les données de l’enregistreur de données de vol de l’aéronef en cause et d’autres appareils EMB-145 comportaient le même écart entre la vitesse de rotation des roues et la vitesse sol. Il n’a pas été possible de déterminer la raison des données anormales de vitesse de rotation des roues.

  4. Certains passagers ont emporté leurs bagages à main pendant l’évacuation, contrairement à ce que leur avait demandé l’agent de bord.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures de sécurité prises

4.1.1 Trans States Airlines

Le 25 juin 2010, Trans States Airlines (TSA) a publié le bulletin de procédures d’exploitation numéro 01-2010, qui signale la révision de l’alinéa 4.2.C de la section 1 des procédures d’utilisation normalisées. Le bulletin stipule ce qui suit :

[Traduction] À partir de maintenant :

Le réglage des volets à 22° est la configuration d’atterrissage privilégiée pour la plupart des opérations normales. Cependant, les volets doivent être réglés à 45° pour atterrir dans les conditions suivantes :

Les atterrissages avec les volets réglés à 22° sont autorisés sur les pistes dont le coefficient de freinage est moins que bon ou sur les pistes qui sont mouillées ou contaminées si la vitesse d’approche corrigée en fonction du vent est égale ou supérieure à 145 KIAS ou si une liste de vérifications du manuel de référence rapide (QRH) le demande.

Le même jour, TSA a aussi publié le bulletin d’exploitation numéro 6-2010, signalant la révision de la partie 2.20 de la section 3-1 du manuel d’exploitation générale (First Officers Restrictions) qui ajoute la restriction suivante : « [traduction] Le commandant de bord doit effectuer tous les décollages et les atterrissages sur des pistes non rainurées qui sont mouillées et contaminées, peu importe la longueur de la piste ».

En août 2010, TSA a commencé à joindre une note à chaque autorisation de vol, et a publié un avis aux navigants (NOTAM) d’entreprise. Ces documents stipulaient ce qui suit : « [traduction] À partir de maintenant, les départs de YOW (Ottawa) et les arrivées à cet aéroport sur la piste 07/25 sont interdits si l’état de la surface de celle-ci est signalé comme humide ou mouillé ».

Le 12 octobre 2010, TSA a publié le bulletin de procédures d’exploitation numéro 03-2010. Le bulletin précise que l’alinéa 4.2.C de la section 1 des procédures d’utilisation normalisées en vigueur autorise les pilotes à atterrir avec un réglage des volets à 22° ou à 45°. Le bulletin ajoute ensuite ce qui suit :

[Traduction] À partir de maintenant :

La position des volets normale est de 45°.

Les volets sortis à 22° pour l’atterrissage ne sont autorisés que lorsque :

4.1.2 NAV CANADA

NAV CANADA a réitéré l’exigence pour les contrôleurs de s’assurer d’obtenir une observation météorologique de contrôle en cas d’accident lorsqu’un accident d’aéronef se produit à un aéroport ou à proximité d’un aéroport. L’alinéa 124.1.D de la partie 1 du Manuel d’exploitation du contrôle de la circulation aérienne (MANOPS ATC) a été modifié comme suit :

124 ACCIDENT D’AVIATION

124.1 Si un accident se produit sur un aéroport, ou près d’un aéroport, la tour doit, le plus tôt possible : […] D. si un observateur météorologique recueille des renseignements météorologiques à un aéroport, demandez une observation météorologique de contrôle en cas d’accident à l’observateur.

4.1.3 Bureau de la sécurité des transports du Canada

Le 2 mars 2011, le Bureau de la sécurité des transports (BST) a envoyé à l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa un avis de sécurité aérienne (A10H0004-D1-A1) désignant la piste 07/25 de CYOW comme « glissante lorsque mouillée ». Cette lettre contenait un examen des exigences d’essais de frottement et les mesures à prendre subséquemment si les valeurs relevées sont inférieures aux limites prescrites. On y mentionne aussi que l’aéroport doit fournir une piste qui est « [traduction] construite de manière à fournir de bonnes caractéristiques de frottement lorsque cette piste est mouillée ». Cette exigence comprendrait un profil de piste approprié pour assurer « [traduction] un écoulement d’eau aussi rapide que possible ». Un examen du profil de la piste 07/25 en ce qui concerne la pente transversale a révélé que cette piste ne satisfaisait pas aux recommandations minimales de 1 % précisées dans la publication TP 312. En conclusion, l’avis suggérait à l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa d’examiner ses procédures opérationnelles conjointement avec les directives contenues dans la publication TP 312 pour envisager de désigner la piste 07/25 comme « glissante lorsque mouillée ».

4.1.4 Embraer

Le 10 août 2011, Embraer a envoyé un avis d’annulation de la publication générale GP-145/1650. L’information contenue dans ce document était essentiellement contradictoire, et n’était mentionnée dans aucun des manuels approuvés. L’information aurait pu être utilisée par un exploitant pour élaborer des politiques ou des procédures faisant appel à des techniques non approuvées pour l’exploitation de l’EMB-145.

4.1.5 Administration de l’aéroport international d’Ottawa

L’Administration de l’aéroport international d’Ottawa a effectué des essais de frottement en avril 2011. Même si les essais révélaient des valeurs de frottement supérieures au niveau où des mesures correctives seraient requises, certaines valeurs le long de la piste 07/25 étaient rendues à un niveau à partir duquel des mesures d’entretien doivent être prises. En attendant l’enlèvement du caoutchouc de la piste 07/25 prévu en mai 2011, l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa a envoyé un NOTAM indiquant qu’il se peut que la piste 07/25 soit glissante lorsqu’elle est mouillée. Ce NOTAM devait arriver à échéance le 15 juin 2011. L’Administration de l’aéroport international d’Ottawa effectue des essais de frottement tous les mois depuis avril 2011. Ces essais comprenaient non seulement l’exigence de la publication TP 312 d’une couche d’eau d’une profondeur de 0,5 mm, mais des essais ont aussi été effectués selon la norme internationale de 1 mm. En outre, des essais ont été effectués dans des conditions réelles de pluie. En raison des niveaux de frottement considérablement plus élevés obtenus après l’enlèvement du caoutchouc, le NOTAM a été annulé. L’enlèvement du caoutchouc a aussi été effectué à 2 reprises durant cette période. De plus, en octobre 2011, un appareil Skidabrader a été utilisé pour augmenter les niveaux de frottement des pistes 07/25 et 14/32.

En 2012, l’Administration de l’aéroport international d’Ottawa a repavé la piste 07/25 en plus d’en corriger le bombé et la pente transversale. En même temps, en tenant compte des pratiques recommandées de l’OACI, elle a construit une aire de sécurité d’extrémité de piste (RESA) de 300 m à chaque extrémité, le premier aéroport du Canada qui l’a fait.

4.1.6 Environnement Canada

Environnement Canada a publié la modification 18, 7e édition, du Manuel d’observations météorologiques de surface (MANOBS), entrant en vigueur en janvier 2013. Les critères de l’alinéa 10.3.5.6[c] du MANOBS pour l’émission d’une observation SPECI ont été modifiés pour exiger le signalement de changements d’intensité des précipitations (p. ex., de LGT [léger] à MDT [modéré] ou HVY [fort]; MDT ou HVY à LGT; MDT à HVY; ou HVY à MDT).

4.1.7 Transports Canada

Transports Canada a publié la Circulaire d’information (CI) no 300-008 – Rainurage des pistes, en vigueur le 8 avril 2013. Ce document a pour objet de fournir des renseignements et des conseils concernant le rainurage des revêtements de piste.

Le présent rapport met un terme à l’enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le . Il est paru officiellement le .

Annexes

Annexe A – Liste des rapports de Laboratoire du BST

Le Laboratoire du BST a produit les rapports suivants :

Ces rapports peuvent être fournis sur demande par le Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Annexe B – Séquence des événements (vol LOF8050) de 14 h 30 min 7 s à 14 h 30 min 59 s

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Annexe B –Séquence des événements (vol LOF8050) de 14 h 30 min 7 s à 14 h 30 min 59 s

Annexe C – Intensité des chutes de pluie

Comme il est précisé à la section 3.9.5 du Manuel d’observations météorologiques de surface d’Environnement Canada (MANOBS d’EC), « lorsque l’intensité de la pluie, d’averses de pluie ou de pluie verglaçante doit être déterminée sans l’aide d’instruments de mesure, le tableau suivant peut servir de guide » :

Pluie faible Pluie modérée Pluie forte
Gouttes individuelles Faciles à voir Difficiles à voir Impossible à distinguer (pluie torrentielle)
Rejaillissement sur une surface dure Presque aucun Moyen Fort, plusieurs centimètres de hauteur
Flaques Se forment lentement Se forment rapidement Se forment très rapidement

Source : MANOBS d’EC

Si un pluviomètre est disponible, l’intensité des chutes de pluie peut être mesurée avec précision (en mm par heure) :

Pluie

FAIBLE si le taux de précipitation est de 2,5 mm/h ou moins

Averses de pluie

MODÉRÉE si le taux de précipitation est de 2,6 à 7,5 mm/h

Pluie verglaçante

FORTE si le taux de précipitation est de 7,6 mm/h ou plus

Source : MANOBS d’EC

Annexe D – Tableau de vitesses d’atterrissage (en anglais seulement)

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Annexe D – Tableau de vitesses d'atterrissage de Trans States Airlines pour un Embraer EMB-145LR (en anglais seulement)

Annexe E – Aire de sécurité d’extrémité de piste

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Annexe E – Aire de sécurité d'extrémité de piste

Recommandation A07-06 du BST :Bande de piste de 60 m + RESA de 240 m = 300 m

Pratique recommandée de l’OACI :Bande de piste de 60 m + RESA de 240 m = 300 m

Norme de l’OACI :Bande de piste de 60 m + RESA de 90 m = 150 m

Pratique recommandée de TC :Bande de piste de 60 m + RESA de 90 m = 150 m

Norme de TC :Bande de piste de 60 m = 60 m

Annexe F – Valeurs d’essais de frottement sur piste à CYOW

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Annexe F – Valeurs d'essais de frottement sur piste à CYOW

Annexe G – Piste rainurée

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Annexe G – Piste rainurée

Un rainurage non standard de la piste 11/29 à Port Hardy (Colombie-Britannique) illustre l'effet d'écoulement de l'eau des zones rainurées et non rainurées.

Annexe H – Exemple d’aéroports du nord des États-Unis : Construction des pistes

Exemple d'aéroports du nord des États-Unis : Construction des pistes
Code d'aéroport de l'OACI Nom Type de surface de la piste Traitement sur la surface de la piste Nombre de pistes Piste la plus longue (pieds) État
Asphalte Béton Combinaison asphalte/béton Rainurée * Non rainurée Couche de frottement poreuse (PFC) Rainurée + PFC Peigne métallique
KJMS Jamestown X X 2 6502 Dakota du Nord
KSTP St. Paul/Holman Field X X 2 6491 Minnesota
KGFK Grand Forks X X 4 7349 Dakota du Nord
KBIS Bismarck X X 2 8794 Dakota du Nord
KDSM Des Moines X X 2 9003 Iowa
KSYR Syracuse/Hancock X X 2 9003 New York
PANC Ted Stevens/Anchorage X X 3 11 584 Alaska
KBUF Buffalo/Niagara X X 2 8827 New York
KGTF Great Falls X X 3 10 502 Missouri
KAXN Alexandria/Chandler Field X X 2 5100 Minnesota
KANE Minneapolis/Blaine X X 2 5000 Minnesota
KGPZ Grand Rapids/Itasca X X 3 5755 Minnesota
KBIL Billings/Logan X X 3 10 518 Missouri
KORD Chicago/O'Hare X X 7 13 001 Illinois
KMKE Milwaukee X X 5 9690 Wisconsin
KDLH Duluth X X 2 10 162 Minnesota
KFAR Fargo X X 3 9000 Dakota du Nord
KMSP Minneapolis X X 4 11 006 Minnesota
KABR Aberdeen X X 2 6901 Dakota du Sud
KOFF Offutt AFB X X 1 11 702 Nebraska
KSUX Sioux City X X 2 9002 Iowa
KRCA Ellsworth AFB X X 1 13 503 Dakota du Sud
KFSD Sioux Falls X X 3 8999 Dakota du Sud
Totaux 13 8 2 17 3 1 1 1

* Les pistes d'un aéroport particulier n'étaient pas toutes rainurées.

Annexe I – Paramètres de l’enregistreur de données de vol (en anglais seulement)

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Annexe I – Paramètres de l'enregistreur de données de vol (en anglais seulement)

Annexe J – Autres événements sur la piste 07/25 de CYOW

A00H0004, le 15 septembre 2000

Le Boeing 727-200A de Miami Air, numéro de série 22437, arrivait de Miami (Floride) et était en rapprochement de l’Aéroport international d’Ottawa/MacDonald-Cartier (Ontario). À bord se trouvaient 9 membres d’équipage, mais aucun passager. L’équipage de conduite a effectué une approche au radar vers la piste 07 à l’aide du système d’atterrissage aux instruments et du pilote automatique. L’aéronef a franchi le seuil de piste à 160 KIAS à 110 pieds au-dessus du sol (agl). L’aéronef a touché des roues à 3800 pieds au-delà du seuil de piste à une vitesse de 148 KIAS. L’équipage a sélectionné le ralenti poussée inverse et a serré les freins doucement. Alors que l’aéronef s’approchait de l’extrémité de piste, l’inversion de poussée a été appliquée à fond et les freins ont été serrés à fond. L’aéronef s’est immobilisé à 234 pieds au-delà de l’extrémité de piste. L’aéronef n’a pas été endommagé. Les membres de l’équipage n’ont pas été blessés. La piste d’une longueur de 8000 pieds était mouillée au moment de l’événement.

A04O0188, le 14 juillet 2004

L’aéronef Embraer 145LR de US Airways Express (Trans States Airlines) (vol LOF3504, immatriculation N829HK, numéro de série 145281) quitte Pittsburgh (Pennsylvanie) en direction de l’Aéroport international d’Ottawa/Macdonald Cartier (Ontario) avec à son bord 2 membres d’équipage de conduite, 1 agent de bord et 28 passagers. À 17 h 20, heure avancée de l’Est, l’avion atterrit sur la piste 25 à Ottawa, sort en bout de piste et s’immobilise à environ 300 pieds de l’extrémité de la piste sur une surface gazonnée. Personne n’est blessé. Le pneu intérieur gauche du train d’atterrissage principal de l’aéronef est légèrement endommagé. Il pleuvait au moment de l’atterrissage et la piste était mouillée, mais il n’y avait aucune indication de quantités excessives d’eau stagnante.

A08O0035, le 17 février 2008

Le Boeing 737-700 de WestJet, immatriculé C-GLWS assurant le vol WJA846, a atterri sur la piste 07 à CYOW et a fait une sortie en bout de piste sur une distance d’environ 200 pieds. L’aéronef s’est immobilisé dans environ 2 pieds de neige. Personne n’est blessé parmi les passagers et membres d’équipage, et l’aéronef n’est pas endommagé. Le rapport d’état de la surface de la piste 07 publié à 22 h 50 (8 minutes avant l’atterrissage) se lisait comme suit : dégagée sur 120 pieds au centre; 60 % à nu et mouillée; 40 % glacée; présence de sable et de produits chimiques (répandus à 22 h 43); largeur restante : 60 % neige compactée et 40 % verglas; coefficient de frottement – CRFI de 0,35 à 22 h 44. La piste était plus glissante que ce qui avait été signalé, ce qui, combiné à l’atterrissage long et à vitesse élevée, s’est traduit par une augmentation de la distance nécessaire à l’atterrissage. Cette augmentation a donné un résultat supérieur à la distance encore disponible à l’atterrissage, et c’est pour cela qu’il y a eu sortie en bout de piste.