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Rapport d'enquête aéronautique A05C0109

Amerrissage dur et capotage
du Stinson 108-1 C-FEXL
à l'hydrobase de Burntwood River
à Thompson (Manitoba)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

De retour d'une excursion de pêche qui a débuté la veille, l'hydravion Stinson 108-1 (portant l'immatriculation C-FEXL et le numéro de série 108-1172) se rend du lac Rock (Manitoba) jusqu'à l'hydrobase de Burntwood River située à Thompson (Manitoba). Les conditions météorologiques pour la région de Thompson sont inférieures aux limites permettant le vol selon les règles de vol à vue de jour et le vent souffle en rafales. Vers 15 h 30, heure avancée du Centre, le pilote effectue une approche afin d'amerrir en vent arrière et il se pose brutalement à la surface de l'eau. Au premier impact, l'hydravion rebondit, puis il remonte de quelque 30 pieds dans les airs avant de capoter au moment du second toucher. Il s'immobilise à l'envers et subit des dommages importants. Les passagers tentent en vain de secourir le pilote, mais celui-ci subit des blessures mortelles. Les deux passagers subissent des blessures mineures, mais ils arrivent à évacuer l'avion à l'envers et à nager jusqu'au rivage.

Renseignements de base

La veille de l'accident, le pilote et les deux passagers avaient décollé de Thompson pour effectuer une excursion de pêche devant durer jusqu'au lendemain et, pour ce faire, ils s'étaient rendus jusqu'au camp éloigné du pilote situé sur le lac Rock, lequel se trouve à quelque 20 milles marins au nord de Thompson. Le vol au cours duquel l'accident est survenu avait débuté au lac Rock vers 15 h , heure avancée du Centre (HAC)Note de bas de page 1, l'hydravion devant se rendre à l'hydrobase de Burntwood River, laquelle se trouve dans la zone de contrôle de Thompson.

L'approche finale à l'amerrissage s'est effectuée en direction du village de Thompson, à un cap de quelque 230°, directement en vent arrière (voir l'annexe A). Amerrir en vent arrière augmente la vitesse et, par conséquent, les forces d'impact avec lesquelles l'avion entre en contact avec la surface d'amerrissage. La vitesse d'approche était de quelque 100 mi/h, bien supérieure à la vitesse d'approche normale de 75 mi/h. À l'amerrissage, il n'y a eu aucun arrondi perceptible avant le contact avec la surface de l'eau. Après avoir évacué l'épave avec un certain degré de difficulté, les passagers se sont assis sur les flotteurs renversés et ils y sont demeurés en attendant que l'épave ait suffisamment dérivé pour qu'ils puissent nager jusqu'à la rive. Ils ont ensuite marché dans les buissons jusqu'à ce qu'ils atteignent une ligne de transport d'énergie, qu'ils ont suivie jusqu'à Thompson. C'est alors que les services d'urgence ont été informés de l'accident. Il n'y a eu aucun autre témoin de cet accident. Le pilote et le passager qui prenait place dans le siège avant ne portaient pas leur ceinture de sécurité. Le second passager se trouvait à l'arrière de la cabine, où il n'y avait ni siège ni système de retenue.

Le pilote était titulaire d'une licence canadienne de pilote privé annotée pour le pilotage d'avions terrestres et d'hydravions monomoteurs, et il totalisait quelque 200 heures de vol. Un rapport toxicologique publié après l'accident n'a révélé la présence d'aucune substance qui aurait pu nuire au jugement ou aux capacités du pilote. L'étude du dossier relatif à la licence du pilote a permis d'établir que ce dernier avait eu de la difficulté à passer les examens nécessaires à l'obtention de sa licence de pilote privé. Même s'il était qualifié, il possédait moins de 100 heures de vol sur le type d'avion en question dans cet accident.

Au moment de l'accident, les conditions météorologiques qui prévalaient à Thompson étaient les suivantes : quelques nuages à 400 pieds au-dessus du sol; plafond fragmenté à 600 pieds, couvert nuageux à 800 pieds; visibilité de 2½ milles dans de la pluie de faible intensité; vent du 050° vrai (T) à 13 noeuds avec des rafales à 20 noeuds; température de 11 °C; point de rosée de 13 °C; calage altimétrique de 29,76; remarques - plafond déchiqueté. Les prévisions terminales et régionales, valables de 14 h à 17 h, étaient les suivantes : vent du 040° T à 12 noeuds; visibilité de 6 milles dans de la pluie de faible intensité; nuages épars à 400 pieds, couvert nuageux à 1200 pieds; de 14 h à 22 h, temporairement, 3 milles dans de la pluie de faible intensité et du brouillard; plafond fragmenté à 400 pieds, couvert nuageux à 1200 pieds. Les conditions météorologiques qui prévalaient étaient inférieures aux conditions minimales requises pour le vol selon les règles de vol à vue (VFR) dans une zone de contrôleNote de bas de page 2. De telles conditions météorologiques obligeaient un pilote à obtenir une autorisation VFR spéciale de la part du contrôle de la circulation aérienne (ATC) avant d'entrer dans la zone de contrôle de Thompson. À l'hydrobase, le vent produisait des vagues hautes de deux à trois pieds.

L'avion avait été construit en 1947. Le passage en revue de la documentation de cet appareil a permis d'établir qu'il était entretenu et équipé conformément à la réglementation de Transports Canada. La radiobalise de repérage d'urgence de l'appareil (ELT) venait tout juste d'être révisée, mais elle n'avait pas été réinstallée à bord et, de plus, elle n'était pas nécessaire pour un vol de cette durée.

L'inspection de l'épave de l'avion a permis d'établir les faits suivants :

Les dommages aux flotteurs et au montant de l'aile droite correspondaient à ceux provoqués par un impact à angle de tangage nul avec la surface de l'eau. On n'a décelé aucune condition préexistante qui aurait pu provoquer la rupture des ferrures de fixation des flotteurs.

Pour assurer un espacement adéquat entre les aéronefs, l'ATC n'accorde pas d'autorisation VFR spéciale lorsque des aéronefs volant selon les règles de vol aux instruments (IFR) sont censés se trouver dans la zone de contrôle. Au moment de l'accident, un aéronef IFR volait dans la zone de contrôle de Thompson. Le pilote de C-FEXL était au courant de la présence de cet aéronef IFR.

Le Règlement de l'aviation canadien (RAC) exige que les pilotes de tous les aéronefs qui ont l'intention d'entrer dans une zone de contrôle transmettent cette intention sur une fréquence obligatoire (MF) spécifiée. D'après les renseignements recueillis au cours de l'enquête, le pilote de C-FEXL n'a pas communiqué avec la station d'information de vol de Thompson ni avec aucun autre aéronef sur la MF.

Analyse

L'amerrissage à une vitesse d'approche de quelque 100 mi/h et dans un vent arrière de 23 mi/h a presque doublé la vitesse normale de poser de l'avion et grandement augmenté les forces d'impact au contact avec la surface de l'eau, lesquelles forces d'impact ont dû être amplifiées davantage par les conditions d'eau agitée qui prévalaient au moment de l'accident. Les forces exercées lors de cet amerrissage en particulier étaient suffisantes pour provoquer la rupture en surcharge des ferrures de fixation des flotteurs.

Cet avion était exploité sans que l'on tienne dûment compte de plusieurs règlements et pratiques sécuritaires conçus pour assurer la sécurité de l'équipage, des passagers et des autres aéronefs. Les passagers n'étaient pas assis et attachés de façon sécuritaire; l'approche a été effectuée en vent arrière, ce qui a donné lieu à un amerrissage dur à vitesse élevée; les conditions météorologiques qui prévalaient étaient inférieures à celles requises pour un vol VFR dans une zone de contrôle; les intentions du pilote n'ont pas été transmises sur la fréquence radio obligatoire; et l'ATC ainsi que l'équipage de l'aéronef IFR ignoraient que C-FEXL volait dans la zone de contrôle de Thompson.

En l'absence de témoin, de communication avec l'ATC et de signal d'ELT, il a fallu attendre près de trois heures avant que l'accident soit signalé.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Le pilote a effectué l'approche à une vitesse élevée, dans un vent arrière soufflant à 23 mi/h, et il a amerri en eau agitée, ce qui s'est traduit par un amerrissage dur.
  2. Les forces d'impact à l'amerrissage ont provoqué la rupture des ferrures de fixation des flotteurs; les flotteurs de l'avion se sont enfoncés dans l'eau, et l'avion a capoté.

Faits établis quant aux risques

  1. Les transmissions requises sur la fréquence obligatoire n'ont pas été effectuées, ce qui a engendré un risque de collision entre C-FEXL et l'appareil qui volait selon les règles de vol aux instruments.
  2. L'avion volait dans une zone de contrôle où prévalaient des conditions météorologiques qui étaient inférieures aux limites admissibles pour un tel vol.
  3. L'avion volait dans une zone de contrôle sans avoir reçu de la part du contrôle de la circulation aérienne (ATC) l'autorisation spéciale requise pour voler selon les règles de vol à vue.
  4. Le pilote et le passager qui prenait place dans le siège avant ne portaient pas leur ceinture de sécurité, ce qui a augmenté les risques de blessures graves.
  5. Le passager qui prenait place à l'arrière ne disposait ni d'un siège ni d'un dispositif de retenue appropriés.

Autre fait établi

  1. L'absence d'une radiobalise de repérage d'urgence fonctionnelle à bord de l'avion et le fait que l'on ignorait que l'avion se trouvait dans la région de Thompson ont empêché l'ATC de prévenir les services d'urgence. Par conséquent, le personnel d'urgence n'a pas répondu à l'accident.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .

Annexes

Annexe A - Trajectoire de vol