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Rapport d'enquête aéronautique A03Q0092

Collision avec un plan d'eau
du Bell 206 Jet Ranger (hélicoptère) C-GNPI
exploité par Héli-Star Inc.
au lac Boucher (Québec)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

L'appareil, un Bell 206B hélicoptère exploité par Héli-Star Inc., immatriculé C-GNPI, numéro de série 2353, a décollé du lac Boucher vers 20 h 15, heure avancée de l'Est, en direction de l'aéroport de La Tuque (Québec). Le pilote était seul à bord. Peu de temps après le décollage, l'appareil s'est écrasé dans le lac Boucher. Le pilote a subi des blessures légères tandis que l'appareil a été fortement endommagé.

Renseignements de base

L'examen des dossiers a révélé que l'appareil était équipé et entretenu selon la réglementation en vigueur, et que le pilote possédait les compétences et les qualifications nécessaires pour effectuer le vol prévu. Il avait accumulé environ 4000 heures sur le Bell 206.

Photo 1. Trajectoire estimée de l'hélicoptère
Photo of Trajectoire estimée de l'hélicoptère

Les conditions météorologiques étaient propices au vol à vue, et le vent était calme. Le pilote a décollé du stationnement de la pourvoirie du lac Boucher où, 30 minutes plus tôt, quatre passagers étaient descendus de l'hélicoptère. À une hauteur d'environ 100 pieds au-dessus du sol, l'hélicoptère a amorcé le vol en direction sud-ouest. Lorsque l'appareil a atteint la vitesse de translation, le pilote a remarqué que le régime turbine de puissance (N2) et le régime rotor (Nr) étaient passés de 100 % à 95 % et continuaient de décroître. Il n'a cependant pas entendu l'avertisseur sonore bas régime. Afin de réduire la demande de puissance et d'augmenter le régime rotor, le pilote a à la fois abaissé le collectif et piqué du nez pour accélérer. Peu de temps après, l'indicateur N2 affichait 85 %. Le pilote, qui se trouvait alors au-dessus des arbres, a dirigé l'appareil vers le lac Boucher, qui se trouvait sur sa gauche. L'appareil en descente au-dessus du lac a contourné une presqu'île. Après avoir parcouru une distance d'environ un kilomètre, à quelques pieds au-dessus du lac, le pilote a observé une reprise du régime moteur dans la plage normale d'exploitation. Toutefois, il a conclu que, compte tenu de l'assiette, de la vitesse et de l'altitude de l'appareil, l'accident était inévitable. Le pilote a cabré l'appareil juste avant la collision avec la surface de l'eau. Des résidents de la pourvoirie ont secouru le pilote quelques minutes après l'accident.

Le panneau de bord et la console ont été arrachés lors de l'impact. Le panneau à disjoncteurs au plafond était plié vers le bas. Une pale du rotor principal a percuté le côté gauche du fuselage et du moteur. Le mât du rotor principal était sectionné en mode de torsion sous la tête rotor. Les accouplements de l'arbre de transmission étaient fracturés. Les dommages observés donnent à penser que l'hélicoptère a heurté la surface du lac avec une certaine vitesse.

Aucun problème moteur (Rolls Royce A250-C20B, numéro de série CAE83144) n'a été observé ou signalé avant l'accident. Le moteur, le régulateur de débit et le régulateur de carburant ont été examinés. L'examen du moteur et de ses composants a révélé que tous les dommages observés ont été causés par l'impact. Le moteur était alimenté et il fonctionnait au moment de la collision; aucune anomalie qui aurait pu causer une diminution de puissance n'a été observée. L'enquête n'a pu déterminer la puissance fournie par le moteur au moment de l'impact. La plage normale du régime moteur se situe entre 95 % et 100 % du N2. Selon le manuel de vol de l'appareil, une défaillance du régulateur de débit ou du régulateur de carburant se manifeste par un changement de puissance ou de régime. Dans le cas d'une sous-vitesse moteur, le pilote doit utiliser le pas collectif pour maintenir le régime moteur et prévoir un atterrissage en autorotation.

Le panneau annonciateur a été examiné au Laboratoire technique du BST. Le panneau annonciateur comprenait 20 voyants annonciateurs. Chacun des voyants pouvait contenir deux ampoules. L'analyse des filaments de chacune des ampoules a permis d'établir qu'aucun voyant n'était allumé au moment de l'impact.

Photo 2. Bretelles de la ceinture de sécurité du pilote
Photo of Bretelles de la ceinture de sécurité du pilote

Le pilote portait sa ceinture de sécurité qui comprenait une sangle sous-abdominale et des bretelles reliées à un tambour à inertie fixé sur la cloison arrière du siège du pilote. À la suite de l'impact, les bretelles se sont rompues en surcharge. Toutefois, la sangle sous-abdominale a résisté. Le pilote s'est détaché avant d'évacuer l'hélicoptère. Bien qu'il portait un casque, le pilote a subi des lésions importantes à la tête. L'examen de la ceinture effectué par le Laboratoire technique du BST a révélé que les sangles retenant les épaules étaient fortement décolorées. Aucun signe d'usure par frottement ou par tension n'a été observé. L'épaisseur des sangles était relativement uniforme. Aucune date de fabrication n'était inscrite sur les bretelles; une étiquette sur la sangle sous-abdominale indiquait qu'elle avait été fabriquée en décembre 1976. Un essai de résistance a établi que la partie supérieure de la sangle a cédé en tension à 1500 livres et que les parties inférieures ont cédé à 600 livres. La norme applicable, TSO C22 de la Federal Aviation Administration, stipule qu'une sangle d'une largeur de deux pouces a une résistance nominale de 1500 livres et ne doit pas rompre en deçà de 2250 livres de tension. Les ceintures sont remplacées lorsqu'on juge qu'elles sont en mauvais état. La décoloration n'est pas un critère de remplacement de la ceinture. Selon le manuel d'entretien de la compagnie Bell Helicopter, le bon fonctionnement, la sécurité des attaches et l'état de détérioration des ceintures doivent être vérifiés lors de l'inspection de 100 heures.

Transports Canada a émis l'avis de navigabilité no B050 le 21 janvier 2000 aux propriétaires, aux exploitants et aux spécialistes de la maintenance d'aéronefs concernant la dégradation des ceintures de sécurité due à une exposition de longue durée à la lumière solaire (dégradation actinique). Toutefois, ce document est en cours de révision et n'est plus disponible. L'avis signalait que, dans certains cas, il y a eu une réduction importante de la résistance des sangles moins de trois ans après leur installation. Il recommandait de remplacer les ceintures du poste de pilotage qui avaient été fabriquées avant le 27 mars 1987. De plus, l'avis de navigabilité rappelait que « toute sangle présentant des signes de décoloration ou de dégradation doit être réparée ou remplacée conformément aux recommandations du fabricant ». La deuxième édition de l'avis de navigabilité no B050 devrait être disponible au début de 2005; elle soulignera l'importance des signes de décoloration. Toutes les ceintures devaient être examinées lors des visites d'entretien annuelles et de 100 heures. On a jugé qu'elles respectaient les normes du fabricant. Selon le dossier de l'aéronef, Transports Canada a inspecté l'appareil en mars 2001 et en novembre 2002. D'après les rapports d'inspection, l'état des ceintures a été vérifié et répondait aux normes du fabricant.

L'enquête a donné lieu aux rapports de laboratoire suivants :

On peut obtenir ces rapports en s'adressant au Bureau de la sécurité des transports.

Analyse

L'appareil était équipé et entretenu selon la réglementation en vigueur, et le pilote possédait les compétences et les qualifications nécessaires pour le vol prévu.

Le moteur de l'appareil fournissait de la puissance au moment de la collision avec la surface de l'eau. L'examen de l'épave et un examen détaillé des différents composants n'ont révélé aucun indice d'une perte de puissance. Par conséquent, l'enquête n'a pu déterminer la cause de la baisse transitoire de régime signalée par le pilote.

Le fait que l'appareil ait heurté violemment la surface de l'eau à près de un kilomètre d'où a eu lieu la baisse de régime donne à penser qu'un atterrissage de précaution ou en autorotation n'avait pas été prévu. Un atterrissage de précaution ou en autorotation aurait réduit les forces d'impact horizontales.

Le blanchissement des sangles inférieures des bretelles de sécurité a été causé par les effets des rayons ultraviolets du soleil. La partie supérieure des bretelles, moins exposée au soleil parce qu'elle était enroulée autour du tambour à inertie, n'était pratiquement pas délavée. Puisque les sangles inférieures ont cédé à 600 livres de tension et que la sangle supérieure a cédé à 1500 livres, il est raisonnable de conclure que le degré d'affaiblissement des sangles correspondait à leur durée d'exposition à la lumière solaire. De plus, étant donné que la partie supérieure de la sangle, bien que moins exposée au soleil, a cédé à 66 % de la limite exigée de la norme TSO C22, il est permis de conclure que même une sangle ne présentant pas des signes de décoloration peut avoir subi une dégradation actinique. Puisque leur résistance mécanique était réduite à environ 26 % de la résistance originale, les sangles inférieures des bretelles ont cédé avant d'atteindre la limite prescrite. Par conséquent, le pilote a subi une force de décélération plus importante qu'il aurait dû subir lors de l'accident. Le degré de décoloration des sangles inférieures des bretelles laissait présager une dégradation de leur résistance. Toutefois, puisque aucun signe d'usure physique n'a été décelé, les ceintures ont été évaluées en bon état de service lors des visites d'entretien de l'appareil et lors des inspections de Transports Canada. Donc, il semble que l'absence de critères d'évaluation précis concernant la dégradation actinique des ceintures a contribué à la remise en service de ceintures de sécurité qui ne répondaient plus aux exigences réglementaires.

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. L'enquête n'a pu déterminer la cause de la baisse transitoire de régime moteur signalée par le pilote.
  2. L'assiette, la vitesse et l'altitude de l'appareil ne permettaient pas d'éviter la collision avec la surface du lac au moment où le pilote a cabré l'hélicoptère.

Autres faits établis

  1. Les bretelles de la ceinture de sécurité du pilote se sont rompues à une tension inférieure aux exigences réglementaires. Cette rupture est survenue à la suite d'une dégradation des sangles causée par une exposition prolongée à la lumière solaire.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .