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Rapport d'enquête aéronautique A00Q0141

Surchauffe du ventilateur causant
De la fumée dans la cabine
Cessna 550 C-FJCZ
Exploité par Transports Canada
Rouyn-Noranda (Québec)
le



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le Cessna 550, immatriculé C-FJCZ, numéro de série 550-0700, a décollé à 17 h 45, heure normale de l'Est, pour effectuer un vol selon les règles de vol aux instruments entre l'aéroport de Rouyn-Noranda (Québec) et l'aéroport international de Montréal/Dorval (Québec) avec deux pilotes et un passager à son bord. L'aéronef avait été autorisé à monter à une altitude de 5 000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl). Lorsque l'aéronef s'est mis en palier à 5 000 pieds asl, le commandant de bord a aperçu de la fumée qui se propageait dans la cabine. L'équipage a avisé le contrôle de la circulation aérienne qu'il y avait de la fumée dans la cabine, a déclaré une situation d'urgence et a demandé l'autorisation de revenir à Rouyn-Noranda. L'équipage a atterri sans autre incident sur la piste 08 de l'aéroport de Rouyn-Noranda et a roulé jusqu'à l'aérogare où les deux pilotes et le passager ont évacué l'avion. Personne n'a été blessé.

Renseignements de base

Déroulement du vol

L'après-midi du 6 octobre 2000, le Cessna Citation II immatriculé C-FJCZ (vol Transport 858), reçoit l'autorisation d'effectuer un vol selon les règles de vol aux instruments (IFR)Note de bas de page 1 entre l'aéroport de Rouyn-Noranda (Québec) et l'aéroport international de Montréal/Dorval (Québec). L'autorisation mentionne que l'avion doit décoller de la piste 08 et effectuer un virage à droite en route avec une limite d'autorisation à 5 000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl). L'appareil décolle à 17 h 45, heure normale de l'Est (HNE)Note de bas de page 2. Le décollage et la montée initiale se déroulent normalement jusqu'à ce que l'appareil se mette en palier à 5 000 pieds asl. Le commandant de bord réalise alors que de la fumée se propage en arrière du siège du premier officier.

Les membres de l'équipage mettent leur masque à oxygène. L'équipage signale au contrôleur de la circulation aérienne qu'il y a de la fumée dans le poste de pilotage, déclare une situation d'urgence et demande à rentrer immédiatement à l'aéroport de Rouyn-Noranda selon les règles de vol à vue (VFR). Le commandant de bord a de la difficulté à mettre son masque à oxygène, avec son casque d'écoute sur la tête. Le premier officier a aussi de la difficulté avec son masque à oxygène et avec les communications du centre de contrôle de la circulation aérienne.

Le commandant de bord reconnaît l'environnement au sol et se dirige vers l'aéroport de Rouyn-Noranda. Le commandant de bord essaie, mais en vain, de procurer de l'oxygène au passager. Après une brève discussion avec le passager, il juge que le passager n'a pas besoin de mettre son masque à oxygène. Entre-temps, le premier officier a toujours de la difficulté avec son masque à oxygène et il exécute la liste d'urgence en silence car il n'y a plus de communication verbale entre les deux membres de l'équipage; ils ne communiquent que par signes. La liste de vérifications qui figure à la section Environmental Smoke and Odour, point 2, précise qu'il faut placer le commutateur OXY MIC à la position MASK pour assurer les communications. Ce point de la liste de vérifications n'a pas été exécuté par l'équipage.

Le commandant de bord a du mal à voir à l'extérieur, trouvant que la visibilité à travers la vitre du masque est embrouillée. Pour mieux évaluer la hauteur de l'aéronef en vent arrière, il décide de lever son masque à oxygène. Il le lèvera à au moins deux reprises jusqu'à l'atterrissage. Pendant ce temps, le premier officier décide d'enlever complètement son masque à oxygène jusqu'à la fin du vol pour régler le problème de communication. La liste de vérifications qui figure à la section Environmental Smoke and Odour a été exécutée, et le commutateur OVHD FAN (point 5) et le commutateur DEFOG FAN (point 6) ont été placés sur OFF; quant au commutateur FLOOD COOLING FAN (point 7), le premier officier ne se rappelle pas s'il l'avait mis sur OFF parce que ce commutateur est normalement sur OFF au décollage. Une fois les commutateurs sur OFF, la fumée a diminué considérablement dans la cabine.

L'atterrissage se déroule normalement, et l'appareil roule jusqu'à l'aérogare où les occupants évacuent l'appareil. Le commandant de bord se rend ensuite avec les pompiers à la soute à bagages arrière pour identifier la source de la fumée. En ouvrant la trappe d'accès, la fumée est dense et ils ne voient rien. De l'intérieur de l'appareil, ils essaient de localiser la source par le compartiment arrière, mais en vain.

Victimes

  Équipage Passagers Tiers Total
Tués - - - -
Blessés graves - - - -
Blessés légers/Indemnes 2 1 - -
Total 2 1 - -

Autres dommages

L'examen préliminaire a révélé que la fumée provenait du ventilateur situé sous le plancher à l'arrière de la cabine et à l'avant de la cloison pressurisée. On a constaté qu'une des vis retenant le boîtier du ventilateur s'était rompue, qu'elle s'était déplacée vers l'arrière et qu'elle faisait contact avec l'armature du ventilateur, ce qui avait fait surchauffer le ventilateur et avait causé la fumée. Le disjoncteur de 20 ampères ne s'est pas ouvert pour protéger le circuit et le ventilateur. Le ventilateur de cabine a été endommagé par suite de la rupture de la vis de retenue du boîtier. La gaine protectrice recouvrant le faisceau de fils électriques avoisinant le ventilateur présentait des traces de brûlure. Aucuns dommages n'ont été constatés sur les fils électriques du moteur du ventilateur de cabine.

Renseignements sur le personnel

Généralités

Commandant de bord Premier officier
Âge 45 ans 54 ans
Licence Pilote de ligne - avion Pilote de ligne - avion
Date d'expiration du certificat de validation 1er mars 2001 1er décembre 2000
Heures de vol totales 16 120 9 585
Heures de vol sur type 90 500
Heures de vol dans les 90 derniers jours 24 9
Heures de vol sur type dans les 90 derniers jours 24 9
Heures de service avant l'événement 11 11
Heures libres avant la prise de service 15 15

L'équipage

Le commandant de bord et le premier officier possédaient les licences et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Le commandant de bord avait été promu commandant de bord sur le Cessna Citation le 10 août 2000. Au moment de l'accident, les deux membres de l'équipage possédaient une licence de pilote de ligne.

Entraînement des équipages sur l'utilisation du masque à oxygène

Les vitres des masques à oxygène étaient recouvertes d'une pellicule de protection en plastique qui pouvait être retirée en tirant sur une languette. La pellicule fournit une protection supplémentaire contre les égratignures et peut être retirée rapidement en cas de givrage lié à une dépressurisation. Transports Canada avait produit un film vidéo pour montrer aux pilotes comment utiliser les masques à oxygène. Dans le film vidéo, on montrait que la vitre des masques à oxygène était recouverte d'une pellicule de protection transparente et on montrait comment la retirer quand on utilisait le masque à oxygène.

Les membres de l'équipage n'avaient pas l'habitude d'utiliser les masques à oxygène et ne savaient pas très bien comment les utiliser; les masques leur ont causé des problèmes au niveau de la communication et de la visibilité.

Renseignements sur l'aéronef

Constructeur Cessna Aircraft Corporation
Type et modèle 550
Année de construction 1992
Numéro de série 550-0700
Certificat de navigabilité 11 mai 1992
Heures de vol cellule 3 622
Moteurs Deux moteurs Pratt & Whitney
JT15D-4
Masse maximale autorisée au décollage 14 100 lb
Types de carburant recommandés Jet A, A-1, A-2, Jet B et JP-4
Type de carburant utilisé Jet B

La masse de l'avion au décollage était de 12 248 livres; la masse maximale autorisée au décollage est de 14 100 livres. Le centre de gravité de l'appareil se trouvait à l'intérieur des limites prescrites.

Renseignements météorologiques

Les conditions météo à 22 h UTC étaient les suivantes : vent du 050 degrés à 6 noeuds, visibilité de 10 milles terrestres, averses de pluie de faible intensité, couche de nuages fragmentés à 1 700 pieds, couche de nuages fragmentés à 4 000 pieds; température de 4 degrés Celsius; point de rosée de 3 degrés Celsius; calage altimétrique de 30,00 pouces de mercure.

Ventilateurs de cabine et de désembuage

Description

Le moteur (réf. 12323-2, numéro de série 1990) du ventilateur de cabine a été construit par la société Advance Industry. Il est muni d'un disjoncteur de 20 ampères marqué CABIN FAN. Le ventilateur de cabine et le ventilateur de désembuage sont tous les deux alimentés par la barre bus numéro 1 et ils sont protégés par un disjoncteur de 20 ampères (réf. S2899L20.0) marqué CABIN FAN. Le moteur du ventilateur de cabine a une plaque signalétique qui fournit des renseignements sur sa capacité équivalant à 9 ampères avec du courant continu (CC) de 28 volts.

Les bouches de ventilation du ventilateur de cabine sont situées le long du plafond de la cabine et du poste de pilotage. Elles sont alimentées en air par le ventilateur de cabine qui conditionne et recircule l'air frais. Un système de conduites distribue l'air par des sorties d'air situées le long du panneau supérieur de la cabine et par deux sorties d'air dans le poste de pilotage.

Le ventilateur de cabine se trouve sous le plancher, dans le circuit de ventilation à la station 345. Le ventilateur possède deux vitesses et un commutateur marqué OVHD qui contrôle le fonctionnement du ventilateur grâce à trois positions (LOW, OFF, HIGH). À la position HIGH, le commutateur marqué OVHD contrôle également deux ventilateurs de distribution qui fournissent une ventilation complémentaire au poste de pilotage. Le commutateur marqué OVHD fonctionne comme ceci : quand le ventilateur de cabine est sur HIGH, les ventilateurs de distribution fonctionnent, et quand le ventilateur de cabine est sur LOW, les ventilateurs de distribution ne fonctionnent pas.

Selon le manuel de formation du Service des aéronefs de Transports Canada et le manuel de maintenance du constructeur, le système de conduites contient un détecteur de fumée. En effet, puisque la conduite de détection de fumée est connectée à l'entrée du ventilateur, la fumée à l'arrière est détectée immédiatement via la conduite d'air frais au poste de pilotage. Un petit orifice distribue l'air de façon continue et prévient les pilotes de la présence de fumée dans le système. Le C-FJCZ n'était pas équipé de cette installation. On a découvert par la suite que les aéronefs portant un numéro de série supérieur à 0696 ne sont pas munis de cette installation.

Le ventilateur de désembuage est utilisé pour augmenter le débit d'air au chauffe-pieds, aux pare-brises et aux fenêtres latérales du poste de pilotage. Le commutateur du ventilateur de désembuage est marqué DEFOG et a trois positions (LOW, OFF, HIGH); il se trouve sur le côté droit du tableau de bord à proximité du commutateur du ventilateur de cabine.

Essais du moteur du ventilateur de cabine

Le moteur du ventilateur de cabine a été récupéré avec la vis de retenue du boîtier partiellement déplacée vers l'extérieur. La vis de retenue a été enlevée; elle présentait des marques d'usure causées par le frottement sur l'armature du moteur. Le moteur pouvait tourner librement sans signes de frottement ou de dommages au coussinet. L'extérieur du moteur présentait des dommages causés par la chaleur autour du passe-câble en caoutchouc d'où sortait les fils électriques. D'autres marques de frottement ont été observées à l'extrémité du moteur et correspondaient au matériau de la gaine protectrice entourant le faisceau de fils principal portant le numéro de spécification 6508011.

Lors des essais effectués au Laboratoire technique du BST, le moteur a été branché à une source d'alimentation électrique de 28 volts CC protégée par un disjoncteur de 20 ampères. Un ampèremètre mesurait la charge du moteur en tout temps. On a appliqué une charge au moteur et l'appel de courant a été de quelque 40 ampères pour une durée de 12 secondes, lorsque le disjoncteur s'est ouvert. Un deuxième essai a donné les mêmes résultats. Lors du troisième essai, on a installé un thermocouple pour mesurer la température sur le corps du moteur. Cette fois-ci, on a obtenu un appel de courant de 26 ampères pour une période de 3 minutes et 50 secondes. Le moteur dégageait une fumée abondante et a atteint une température supérieure à 320° F jusqu'à ce qu'on l'arrête délibérément. Le disjoncteur ne s'est jamais ouvert. Lorsqu'on a enlevé la charge, la température a continué de grimper jusqu'à 340° F. À noter qu'aucun air forcé n'a été appliqué au moteur durant ces essais.

Le Cessna Citation a été approuvé conformément à la partie 25 des Federal Aviation Regulations. La norme FAR 25.1357 stipule que les dispositifs de protection et de commande du système de génération doivent être conçus pour désexciter et déconnecter les sources d'énergie et les équipements de transmission d'énergie défectueux de leurs barres bus correspondantes avec une rapidité suffisante pour assurer une protection contre une surtension dangereuse et autre mauvais fonctionnement. De plus, chaque circuit de charge essentielle doit avoir une protection individuelle.

Une autre analyse a porté sur la vis de retenue qui a cédé. L'analyse a révélé que la crique s'était propagée progressivement et de façon continue. Ce mode de propagation correspond à de la fatigue oligocyclique. On a conclu que la vis s'était affaiblie et finalement rompue en service sous une charge normale quand la crique de fatigue a atteint des dimensions critiques. Rien n'indique que la crique était présente lors de l'installation de la vis au moment de la révision.

Liste d'équipement mininal et certification

Une liste principale d'équipement minimal (MMEL) est un document approuvé créé spécialement pour réglementer l'utilisation d'un type d'aéronef avec de l'équipement inutilisable. Ce document définit, pour un type précis d'aéronef, l'équipement qui peut être inutilisable dans certaines conditions, et il constitue la base de la liste d'équipement minimal (MEL).

En vertu de la MEL du Cessna Citation (point 17 de la partie 21), l'appareil peut voler sans restriction même si le ventilateur de cabine n'est pas utilisable. Par contre, vu que le ventilateur de désembuage n'est pas couvert par la MEL, il devient essentiel au décollage.

Le Cessna Citation a été construit aux États-Unis selon la base de certification américaine, en vertu de la FAR 25, entrée en vigueur le 1er février 1965. L'appareil a été importé au Canada en 1992 et a obtenu un certificat de navigabilité canadien. En conformité avec le certificat de type canadien A-130, à la section Equivalent Safety Items, (6), il est mentionné que l'appareil doit répondre aux exigences de la norme de certification FAR 25.773 (b) (2) au niveau de la visibilité de l'équipage. La visibilité doit être assurée en tout temps et surtout dans des conditions de pluie ou de givrage. Cette norme stipule que le pilote commandant de bord doit disposer d'un moyen secondaire pour conserver une bonne vue dans les conditions précisées dans la norme FAR 25.1353 (a). Cette dernière norme précise que les équipements, commandes et câblages électriques doivent être installés de façon telle que le fonctionnement de n'importe quelle unité ou groupe d'unités ne vienne pas compromettre le fonctionnement simultané de toute autre unité électrique ou système essentiel à la sécurité de fonctionnement.

L'installation du ventilateur de désembuage est exigé par la norme de certification de l'appareil et elle nécessite par le fait même une alimentation électrique. De ce fait, cette alimentation d'énergie devient automatiquement une charge essentielle. En vertu de la FAR 25.1357 (e), chaque circuit de charge essentielle devrait avoir une protection individuelle.

Le Cessna Citation a aussi été approuvé en conformité avec la norme FAR 25.1309 qui stipule que les équipements, systèmes et installations dont le fonctionnement est exigé, doivent être conçus pour s'assurer qu'ils remplissent leurs fonctions prévues dans toutes les conditions prévisibles de fonctionnement. Les systèmes de l'avion et les composants associés, considérés séparément et en relation avec d'autres systèmes, doivent être conçus de façon à ce que l'apparition de toute condition de panne qui empêcherait la poursuite du vol en sécurité et l'atterrissage de l'avion soit extrêmement improbable. L'apparition de toute autre condition de panne qui réduirait la capacité de l'avion ou l'aptitude de l'équipage à faire face à des conditions de fonctionnement défavorables doit aussi être improbable. Chaque installation dont le fonctionnement est exigé dans cette norme de certification et qui nécessite une alimentation électrique constitue une charge essentielle pour cette alimentation d'énergie.

Système électrique

Analyse de la charge

Selon la norme canadienne énoncée à la partie V, chapitre 551.200 (2) (i) du Manuel de navigabilité, une analyse de la charge électrique constitue « une exigence en vue d'une certification initiale pour le type d'aéronef. »La charge électrique utilisée est celle indiquée dans le manuel de maintenance de la compagnie Cessna. Dans cette analyse de charge électrique, le ventilateur de désembuage reçoit son alimentation électrique de la barre bus principale de gauche via le disjoncteur numéro 23 marqué CABIN FAN. Le ventilateur de cabine a été catégorisé selon un ampérage de 4 ampères alors que le ventilateur installé est de 9 ampères; il reçoit son alimentation électrique sur le même disjoncteur que le ventilateur de désembuage.

Disjoncteurs et filage

Les disjoncteurs sont conçus pour interrompre le courant électrique sous des conditions spécifiques de surcharge. Ils doivent correspondre à la performance du filage électrique lorsqu'ils sont exposés à une surcharge et couper le circuit avant que la chaleur endommage le harnais des câbles, y compris les connecteurs. Ils ne sont pas conçus pour protéger l'équipement électrique du circuit qui, dans certains cas, possède sa propre protection interne ou des systèmes mitigés. Un disjoncteur doit s'ouvrir (pour couper le circuit) avant qu'un composant dans le circuit surchauffe et génère de la fumée ou du feu. De plus, Cessna nous a fait savoir que selon les spécifications du vendeur, l'intensité minimale de déclenchement du disjoncteur thermique S2899L20.0 est de 22 ampères (110 %) à 25°C pour une période d'une heure, alors que son intensité maximale est de 30 ampères (150 %) à 25°C pour une période d'une heure.

Le système électrique du disjoncteur CABIN FAN protège deux circuits distincts, celui du système de désembuage et celui du ventilateur de cabine. Selon la base de certification, le circuit du ventilateur de désembuage est obligatoire au vol contrairement au circuit de ventilation cabine qui ne l'est pas. Dans l'installation électrique observée sur le C-FJCZ, le circuit du ventilateur de cabine est en fonction de façon régulière alors que le circuit de désembuage est utilisé à certains moments spécifiques du vol et/ou dans des conditions atmosphériques nécessitant un surplus d'alimentation en air.

Le filage électrique utilisé dans les deux systèmes électriques est de calibre 16 AWG (American Wire Gauge). Selon les normes de l'industrie aéronautique, ce filage doit être protégé en tout temps par un disjoncteur de 15 ampères maximum. S'il survient une défectuosité de l'un ou l'autre des circuits alors qu'il n'y a qu'un seul circuit utilisé, et tel que démontré dans les essais en laboratoire, le disjoncteur de 20 ampères ne pourra pas s'ouvrir pour protéger l'intégrité des circuits. De plus, il existe une variante quant au calibre des fils utilisés dans cette installation. En effet, le ventilateur de cabine est alimenté en électricité par du filage de calibre 18 AWG MILW16878 type E, d'une longueur de 12 pouces. Toujours selon les normes de l'industrie aéronautique, un filage de calibre 18 AWG doit être protégé par un disjoncteur de 10 ampères maximum. En raccordant ainsi un fil de calibre 18 AWG du ventilateur de cabine à un circuit de fils de calibre 16 AWG du circuit de l'aéronef, la partie la plus vulnérable du système demeure le filage du ventilateur de cabine et non le disjoncteur.

Anomalies

Dans le magasin de pièces, on a retrouvé deux ventilateurs qui présentaient une usure excessive à l'endroit où le faisceau de fils se trouvait à proximité du ventilateur. Cette condition a été causée par un frottement de câble sur le boîtier du ventilateur. Transports Canada a effectué une campagne de vérifications de ces appareils, et sur 5 des 9 appareils examinés, des manques d'espacement ont été relevés entre le ventilateur de cabine et la gaine protectrice du harnais principal droit.

Divers rapports de la Federal Aviation Administration (FAA) et du National Transportation Safety Board (NTSB) concernant les problèmes reliés au mauvais assemblage du filage électrique et à l'espacement des fils en rapport avec les documents AC 43-13-1A et AC 65-15 ont été produits. Plusieurs anomalies ont été découvertes lors des inspections de la FAA sur différents appareils construits par Boeing, Cessna et Beechcraft. Sur le Cessna Citation plus spécifiquement, depuis 1986, 18 incidents directement reliés à un problème de fumée dans la cabine causée par des ventilateurs sont survenus au Canada et aux États-Unis. De ce nombre, au moins 3 incidents ont été directement reliés à de la fumée causée par le ventilateur de cabine dont le disjoncteur ne s'était pas ouvert.

Analyse

Les membres de l'équipage possédaient les qualifications nécessaires pour le vol. Par contre, ils ne savaient pas très bien comment utiliser les masques à oxygène, ce qui leur a causé des problèmes de visibilité et de communication. De plus, les membres de l'équipage ne connaissaient pas bien le fonctionnement du circuit d'alimentation en oxygène pour les passagers.

L'une des deux vis retenant l'armature du ventilateur de cabine présentait une crique. La vis s'est finalement rompue en service sous une charge normale quand la crique de fatigue a atteint des dimensions critiques. Rien n'indique que la crique était présente lors de la révision de la pièce. Le couple utilisé par les techniciens est celui indiqué dans le document AC 43-13-1A (manuel de procédures générales). Il n'a pas été possible d'établir si, lors de la révision, un couple trop fort avait été utilisé et avait affaibli l'ensemble de la vis. Ces deux dispositifs de sécurité n'auraient pas empêché la vis de se rompre.

Les deux sorties d'air frais du poste de pilotage n'ont pas de petit orifice permettant à l'équipage de détecter promptement la présence de fumée dans les conduites d'air. Cette description d'installation et la description de l'orifice se trouvent dans le manuel de formation du Service des aéronefs de Transports Canada ainsi que dans le manuel de maintenance du constructeur. Aucune des personnes que nous avons rencontrées n'était au courant de la présence d'une telle installation. La compagnie Cessna a indiqué que sur les aéronefs portant le numéro de série 0696 et suivants, il n'y a pas d'orifice dans les sorties d'air du poste de pilotage. Ce changement résulte en partie du mécontentement des clients. Une lettre d'entente entre la FAA et Cessna demandait que la partie arrière de la cabine soit déclarée un espace de rangement au lieu d'une soute à bagages. Par le fait même, le système de détection de fumée et d'incendie devenait facultatif à bord.

Les normes de navigabilité doivent être respectées lors de la certification d'un appareil. La norme FAR 25.1309, qui spécifie l'apparition improbable de panne qui réduirait la capacité de l'avion ou l'aptitude de l'équipage à faire face à des conditions de fonctionnement défavorables, doit aussi être respectée. Dans le cas précis de la défaillance du ventilateur de cabine (MEL) et de l'ouverture du disjoncteur, le ventilateur de désembuage (non couvert par la MEL) devient inutilisable. Le fait de ne pas pouvoir utiliser le ventilateur de désembuage (essentiel au vol) compromet la sécurité de l'appareil lors de certaines phases critiques du vol comme la descente, l'approche et l'atterrissage.

L'installation du ventilateur de désembuage est exigé par la norme de certification de l'appareil et devient automatiquement une charge essentielle. En vertu de la norme FAR 25.1357 (e), chaque circuit de charge essentielle devrait avoir une protection individuelle.

L'identification des commutateurs et du disjoncteur n'est pas cohérente. Les commutateurs sont marqués OVHD FAN et DEFOG FAN, alors que le disjoncteur est marqué CABIN FAN.

Selon les données de l'analyse de la charge électrique, le ventilateur de cabine a été catégorisé selon un ampérage de 4 ampères alors que les ventilateurs qui sont installés fonctionnent selon un ampérage de 9 ampères. L'analyse de la charge électrique ne représente pas la charge réelle présente dans ce circuit.

La fonction d'un disjoncteur électrique est de s'ouvrir avant que le courant nominal du fil électrique soit dépassé dans le circuit. Or, lors de cet incident et des essais en laboratoire, la charge en courant a été dépassée suffisamment pour que le ventilateur génère de la fumée, mais sans provoquer l'ouverture du disjoncteur. La capacité limite varie d'un fil à l'autre selon le calibre du fil. L'installation des deux ventilateurs a été faite avec du filage de calibre 16 AWG et 18 AWG. Toutefois, le constructeur a choisi de protéger le système avec un disjoncteur de 20 ampères, résultant en un système sous-protégé en cas de défaillance.

Lorsque l'une des vis retenant l'armature du ventilateur de cabine a cédé, elle a fait contact avec l'armature du ventilateur, ce qui a causé des étincelles, une surchauffe et de la fumée. Le circuit de protection aurait dû s'ouvrir immédiatement pour empêcher une dégradation de la situation mais n'a pas pu le faire parce que le niveau de protection du disjoncteur n'était pas adéquat. Cet événement ne semble pas isolé puisqu'il y a eu plus de 18 incidents dans le passé présentant les mêmes problèmes, à savoir la surchauffe du ventilateur de cabine produisant de la fumée. Dans trois incidents répertoriés, le disjoncteur ne s'est pas ouvert.

L'enquête a donné lieu au rapport de laboratoire suivant :

Faits établis

Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs

  1. Une vis de retenue de l'armature du ventilateur de cabine s'est rompue, ce qui a fait surchauffer le ventilateur de cabine et causé de la fumée dans la cabine.
  2. Le disjoncteur de 20 ampères sous-protège le circuit du ventilateur de cabine et le circuit du ventilateur de désembuage; le disjoncteur ne s'est pas ouvert alors qu'il aurait dû protéger le circuit électrique.

Faits établis quant aux risques

  1. Les membres de l'équipage ne savaient pas très bien comment utiliser les masques à oxygène, ce qui leur a causé des problèmes de visibilité et de communication

Autres faits établis

  1. Selon le manuel de formation du Service des aéronefs de Transports Canada et le manuel de maintenance du constructeur, chacune des deux sorties d'air cabine du poste de pilotage devrait être munie d'un petit orifice distribuant l'air de façon continue pour signaler la présence de fumée dans le système de ventilation cabine; le C-FJCZ n'était pas équipé de cette installation.
  2. Le fait de perdre l'usage du ventilateur de désembuage (essentiel au vol) compromet la sécurité de l'appareil lors de certaines phases critiques du vol.
  3. L'identification des commutateurs et du disjoncteur n'était pas cohérente.
  4. Un seul disjoncteur protégeait deux circuits électriques ayant des fonctions distinctes : le ventilateur de cabine (non essentiel au vol) et le ventilateur de désembuage (essentiel au vol). Selon la norme de certification, le ventilateur de désembuage est une charge essentielle et devrait avoir une protection individuelle.
  5. Le ventilateur de cabine installé est de 9 ampères, ce qui est en désaccord avec l'analyse de la charge électrique du constructeur qui spécifie 4 ampères.
  6. Le ventilateur de cabine a été livré avec du filage de calibre 18 AWG et a été raccordé aux circuits de filage de calibre 16 AWG, ce qui le rendait moins résistant à la surcharge que tous les autres éléments des circuits.

Mesures de sécurité

Le 16 octobre 2000, la Direction générale des services des aéronefs (DGSA) de Transports Canada a émis l'avis 851-014 Rev. A pour sa flotte de Cessna Citation C550 pour signaler le présent événement et fournir des procédures d'inspection au personnel de maintenance de la DGSA.

La DGSA a également pris les mesures suivantes :

  1. Les vis du bâti moteur font dorénavant l'objet d'essais non destructifs dans le cadre du contrôle magnétoscopique que la DGSA de Transports Canada effectue à chaque révision du moteur en question.
  2. De nouveaux masques à oxygène ont été installés sur tous les Cessna Citation C550.
  3. Des modifications ont été apportées au programme d'entraînement des équipages concernant l'utilisation des masques à oxygène lors des procédures d'urgence.

Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet incident. La publication de ce rapport a été autorisée par le Bureau le .

Annexes

Annexe A - Sigles et abréviations

asl
au-dessus du niveau de la mer
AWG
American wire gauge (calibrage américain normalisé des fils)
BST
Bureau de la sécurité des transports du Canada
CC
courant continu
DGSA
Direction générale des services des aéronefs
FAA
Federal Aviation Administration
FAR
Federal Aviation Regulations
h
heure
HNE
heure normale de l'Est
IFR
règles de vol aux instruments
lb
livres
MEL
liste minimale d'équipement
MMEL
liste principale d'équipement minimal
NTSB
National Transportation Safety Board
UTC
temps universel coordonné
VFR
règles de vol à vue