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Documents d'information technique A98H0003

Mesures de sécurité

Recommandations provisoires en matière de sécurité aérienne

Capacité d'enregistrement et alimentation électrique des enregistreurs de bord

Date d'envoi : le 9 mars 1999

À l'intention de :

L'Honorable David Michael Collenette, c.p., député
Ministre des Transports

M. K. Koplin, secrétaire général
Joint Aviation Authorities (Pays-Bas)

Object : Capacité d'enregistrement et alimentation électrique des enregistreurs de vol

Contexte

Le 2 septembre 1998, à 21 h 18, heure avancée de l'Atlantique, le vol 111 de Swissair (SR 111), un avion McDonnell Douglas MD-11, immatriculé HB-IWF, a décollé de l'aéroport John F. Kennedy de New York à destination de Genève, en Suisse. L'avion transportait 215 passagers et 14 membres d'équipage. Environ 53 minutes après le décollage, alors que l'avion volait en croisière au niveau de vol 330, l'équipage a perçu une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Au bout de trois minutes et demie environ, l'équipage de conduite a observé de la fumée et a envoyé le signal international d'urgence « PAN, PAN, PAN » au centre de contrôle régional de Moncton, avisant le contrôleur des Services de la circulation aérienne (ATS) de la présence de fumée dans le poste de pilotage. Le vol SR 111 a par la suite été autorisé à se rendre directement à l'aéroport de Halifax à partir de sa position, soit 58 milles marins au sud-ouest de Halifax (Nouvelle-Écosse). Alors que l'avion manœuvrait pour se préparer à atterrir, l'équipage a avisé les ATS qu'il devait se poser immédiatement et qu'il déclarait une urgence. Une vingtaine de minutes après que l'équipage de conduite eut perçu pour la première fois l'odeur inhabituelle, et environ sept minutes après qu'il eut déclaré la situation d'urgence, l'avion s'est abîmé dans l'océan près de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse), tuant les 229 occupants à son bord.

Jusqu'ici, l'enquête (A98H0003) a révélé la présence de dommages causés par la chaleur et typiques d'un incendie dans le plafond, devant et derrière la cloison du poste de pilotage. L'enregistreur des données de vol (FDR) et l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) ont tous deux cessé de fonctionner alors que l'avion se trouvait à environ 10 000 pieds, à peu près six minutes avant de percuter le plan d'eau.

Des lacunes sur le plan de la capacité d'enregistrement des CVR et de l'alimentation électrique des enregistreurs de bord ont été relevées au cours de l'enquête sur cet accident et sur d'autres accidents d'aviation récents.

Durée de l'enregistrement de l'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage

Le CVR du vol SR 111 était du type à ruban magnétique à boucle continue d'une durée de 30 minutes. Les premières données du CVR du vol SR 111 ont été enregistrées environ 15 minutes avant la perception de l'odeur inhabituelle par l'équipage. Les conversations des membres de l'équipage et les bruits dans le poste de pilotage avant le début de l'enregistrement du CVR auraient peut-être fourni des renseignements importants sur tout signe précurseur ou sur tout événement à l'origine de l'accident.

Environ 38 minutes avant la perception de l'odeur inhabituelle, le centre de Boston avait communiqué au vol SR 111 un changement de fréquence radio. Au cours des 13 minutes qui ont suivi, le centre de Boston a tenté à plusieurs reprises de communiquer avec le vol SR 111, mais sans parvenir à établir le contact. Toute conversation et tout bruit dans le poste de pilotage ou toute tentative de communication de l'équipage pendant ce temps ont par la suite été remplacés par d'autres données sur le CVR, et ces éléments n'ont pu être examinés.

La capacité d'enregistrement de 30 minutes du CVR est fondée sur la technologie qui existait au début des années 1960; elle correspondait à la quantité de ruban qui pouvait être protégée en cas d'écrasement. Le Bureau s'inquiète du fait que la capacité d'enregistrement de 30 minutes ne permet pas, dans de nombreux cas, d'enregistrer les événements ayant mené à un accident ainsi que les renseignements importants le concernant. Par exemple, dans les cas d'incendie en vol ou de défaillance structurale progressive, les événements à l'origine de l'accident se déroulent habituellement sur une période plus longue que la capacité d'enregistrement de 30 minutes. Si les CVR avaient une capacité d'enregistrement supérieure, il serait également plus facile d'enquêter sur les événements non catastrophiques, notamment dans les cas où l'enregistrement des 30 minutes pertinentes a déjà été remplacé par d'autres données quand l'avion se pose finalement au sol.

La capacité d'enregistrement des CVR peut facilement être augmentée grâce à la technologie actuelle. En fait, la majorité des CVR à mémoire à semi-conducteurs fabriqués récemment présentent une capacité d'enregistrement de deux heures, et l'on note partout dans le monde une tendance de l'industrie vers les CVR d'une capacité d'enregistrement de deux heures. Les Joint Airworthiness Requirements européennes exigent que les avions qui ont été homologués pour la première fois après le 1er avril 1998 soient équipés de CVR d'une capacité d'enregistrement de deux heures. Il y a également une proposition visant à ajouter une telle exigence dans les Normes et pratiques recommandées de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI). Le Groupe d'experts de l'OACI sur les enregistreurs de vol, qui regroupe des experts de plusieurs États, s'est réuni du 12 au 20 novembre 1998 et il a recommandé à la Commission de la navigation aérienne de l'OACI que les avions construits après le 1er janvier 2003 soient équipés de CVR d'une capacité d'enregistrement de deux heures.

Le BST sait que de nombreux exploitants ont déjà choisi de remplacer leurs anciens FDR et CVR à ruban par des enregistreurs modernes à mémoire à semi-conducteurs. L'utilisation de ces nouveaux enregistreurs améliore non seulement la sécurité, mais présente aussi des avantages directs pour les exploitants en ce qu'ils permettent d'éviter les coûts élevés et les problèmes techniques associés à l'entretien d'enregistreurs à ruban désuets. De plus, les enregistreurs à ruban ne répondent plus aux nouvelles normes de résistance aux accidents des Technical Standard Orders (TSO) C123a et TSO C124a des États-Unis. Compte tenu de cette tendance de l'industrie vers les enregistreurs à mémoire à semi-conducteurs, le temps est venu d'exiger que les avions soient équipés de CVR d'une capacité d'enregistrement de deux heures.

L'absence d'enregistrement phonique ou sonore peut gêner les enquêtes de sécurité et retarder ou empêcher la découverte de manquements à la sécurité. Comme il s'avère nécessaire de disposer de plus longues périodes d'enregistrement sonore pour connaître les événements à l'origine des accidents d'aviation et puisqu'il y a sur le marché des CVR d'une capacité d'enregistrement de deux heures, le Bureau croit que ces enregistreurs devraient être rendus obligatoires par les organismes de réglementation partout dans le monde. Le Bureau reconnaît, toutefois, qu'il serait raisonnable d'accorder plusieurs années aux constructeurs et aux exploitants pour la mise en œuvre de ce changement. En conséquence, le Bureau recommande, pour les aéronefs de construction récente, que :

dès le 1er janvier 2003, tout CVR installé à bord d'un aéronef comme condition préalable à la délivrance d'un certificat de navigabilité d'origine soit tenu d'avoir une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures.
Recommandation A99-01 du BST

Le Bureau croit également que, moyennant un délai raisonnable, un programme de modification des avions déjà en service est tout à fait justifié. En conséquence, le Bureau recommande que :

dès le 1er janvier 2005, tous les aéronefs qui doivent être équipés d'un FDR et d'un CVR soient tenus d'être équipés d'un CVR d'une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures.
Recommandation A99-02 du BST

Source d'alimentation électrique indépendante

Lorsque l'alimentation électrique des enregistreurs de bord du vol SR 111 a été interrompue à 10 000 pieds, le FDR et le CVR ont cessé de fonctionner. Le vol s'est poursuivi pendant environ six minutes, mais aucune information n'a été enregistrée. L'absence d'information enregistrée a nui au déroulement de l'enquête sur cet accident.

Des interruptions de l'alimentation électrique des enregistreurs de bord ont empêché l'enregistrement continu des dernières minutes de vol de plusieurs autres avions qui ont subi des accidents ces dernières années, notamment : le DC-9-32 de Valuejet à Miami (Floride), le 11 mai 1996; le Boeing 747-131, vol TWA 800 à East Moriches (New York), le 17 juillet 1996; le Boeing 737-300 de Silk Air à Palembang (Indonésie), le 19 décembre 1997; le MD–11 de Delta Air Lines à Cork (Irlande), le 8 octobre 1998; et le Boeing 737-232 de Delta Express à Orlando (Floride), le 15 décembre 1998.

Les équipages de conduite et les systèmes de bord des avions modernes utilisent des données de vol et d'autres données de sources diverses pour le pilotage de l'avion. Pour enregistrer les paramètres dont il a besoin, le FDR capture simplement les données qui passent par les bus de données. Si un capteur ou un bus de données n'est plus alimenté, l'information du FDR relative à ce capteur ou à ce bus de données disparaît. S'il y a une panne totale de l'alimentation électrique, en pratique, le FDR n'a aucune donnée à enregistrer. Il serait peut-être justifié que le FDR et son bloc d'acquisition des données de vol soient pourvus d'une alimentation électrique indépendante afin d'enregistrer toute donnée disponible lors de pannes d'électricité localisées. Le BST croit qu'à tout le moins le CVR et le microphone d'ambiance du poste de pilotage doivent continuer à être alimentés pendant de brèves périodes, que l'alimentation électrique normale de l'avion soit disponible ou non. Cette source d'alimentation électrique indépendante permettrait de continuer à enregistrer les bruits dans le poste de pilotage, notamment les conversations et les bruits ambiants, pendant une période établie.

Grâce aux sources d'alimentation électrique indépendante sans maintenance, il est maintenant possible d'alimenter, pendant un certain temps, les nouveaux CVR et le microphone d'ambiance du poste de pilotage indépendamment de la source d'alimentation électrique normale de l'avion, en cas d'interruption ou de panne de la source d'alimentation électrique du CVR. Par conséquent, afin d'augmenter les possibilités d'enregistrement de l'information nécessaire à l'enquête en cas d'accident, le Bureau recommande que :

dès le 1er janvier 2005, tous les avions équipés de CVR d'une capacité d'enregistrement d'au moins deux heures soient tenus d'avoir une source d'alimentation électrique indépendante, près du CVR ou à même l'enregistreur, pour alimenter le CVR et le microphone du poste de pilotage pendant 10 minutes, chaque fois que les sources d'alimentation électrique normales du CVR sont interrompues.
Recommandation A99-03 du BST

Bus électriques distincts

Selon la configuration actuelle du MD–11, le FDR et le CVR sont tous deux alimentés par le bus électrique c.a. numéro 3. La liste des vérifications d'urgence du MD–11, qui traite de la présence de fumée ou de vapeurs d'origine inconnue, demande d'actionner le sélecteur SMOKE ELEC/AIR. Ce sélecteur permet de couper l'alimentation électrique de chacun des trois bus électriques à tour de rôle afin de permettre d'isoler la source de la fumée ou des émanations. Cette procédure de dépannage exige que le sélecteur reste sur chaque position pour une durée indéterminée, habituellement au moins quelques minutes. Quand le sélecteur SMOKE ELEC/AIR est placé sur la première position (3/1 OFF), le bus électrique c.a. numéro 3 et le groupe de conditionnement d'air numéro 1 sont coupés, ce qui coupe par le fait même l'alimentation du FDR et du CVR. De plus, si la fumée ou les émanations sont dissipées dans cette première position, le sélecteur SMOKE ELEC/AIR doit rester sur cette position pendant tout le vol, ce qui signifie que pendant ce temps le FDR et le CVR ne fonctionnent pas alors qu'il y a des données à enregistrer. L'enquête n'a pas établi si les enregistreurs du vol SR 111 avaient cessé de fonctionner à la suite d'une panne des circuits électriques ou de l'actionnement du sélecteur SMOKE ELEC/AIR, mais le fait que les deux enregistreurs peuvent être coupés par le simple actionnement d'un seul sélecteur présente le risque inutile de perdre des données d'enregistrement d'une importance capitale.

Les FAR 25.1457 (CVR) et FAR 25.1459 (FDR) de la Federal Aviation Administration des États-Unis, les articles 551.100 et 551.101 du chapitre 551 du Manuel de navigabilité - Partie V des Normes du Règlement de l'aviation canadien de Transports Canada ainsi que les spécifications électroniques de l'aviation civile européenne (Eurocae) exigent que les enregistreurs soient montés de manière à être alimentés par le bus électrique offrant la fiabilité maximale de fonctionnement sans compromettre l'alimentation des charges essentielles ou de secours. Cependant, comme le CVR et le FDR sont alimentés par le même bus, une défaillance de ce bus ou la coupure délibérée de ce bus (comme l'exige la liste de vérifications d'urgence) interrompt d'un seul coup l'alimentation électrique des deux enregistreurs.

Afin d'augmenter les possibilités d'enregistrement de l'information nécessaire pour relever les manquements à la sécurité, le Bureau recommande que :

les enregistreurs de bord des avions tenus d'être équipés de deux enregistreurs de bord soient tenus d'être alimentés par des bus distincts.
Recommandation A99-04 du BST

Les avantages que présentent les enregistreurs combinés parole-données, tant sur le plan opérationnel que sur le plan de la sécurité, sont de plus en plus reconnus dans l'industrie. Le Bureau appuie cette approche et croit que les avions équipés de deux enregistreurs combinés seraient conformes à l'esprit des présentes recommandations pour autant que ces derniers soient alimentés par des bus électriques distincts et qu'ils incorporent tous deux des CVR d'une capacité d'enregistrement de deux heures ayant chacun une source d'alimentation électrique indépendante. En outre, sur la plupart des avions, il serait préférable d'installer un de ces enregistreurs dans le nez de l'avion et l'autre dans la queue.

Si d'autres manquements à la sécurité devant faire l'objet de mesures immédiates sont relevés à mesure que l'enquête se poursuit, le Bureau s'empressera de faire d'autres recommandations en matière de sécurité aérienne.

Benoît Bouchard

Président
au nom du Bureau


Matériaux d'isolation thermique et acoustique

Date d'envoi : le 11 août 1999

À l'intention de :

L'Honorable David Michael Collenette, c.p., député
Ministre des Transports

M. K. Koplin, secrétaire général
Joint Aviation Authorities (Pays-Bas)

L'Honorable Jane Garvey, administrateur
Federal Aviation Administration (États-Unis)

Objet : Matériaux d'isolation thermique et acoustique

Contexte

Le 2 septembre 1998, à 21 h 18, heure avancée de l'Atlantique, le McDonnell Douglas MD–11 immatriculé HB-IWF assurant le vol 111 de la Swissair (SR 111) décolle de l'aéroport John F. Kennedy de New York à destination de Genève, en Suisse. Il transporte 215 passagers et 14 membres d'équipage. Quelque 53 minutes après le décollage, alors que l'appareil est en vol de croisière au niveau de vol 330, l'équipage perçoit une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Moins de trois minutes et demie plus tard, l'équipage de conduite voit de la fumée et lance aussitôt le signal d'urgence international « PAN, PAN, PAN » au centre de contrôle régional de Moncton, puis il avise le contrôleur des Services de la circulation aérienne (ATS) de la présence de fumée dans le poste de pilotage. Le vol SR 111 est autorisé à se diriger directement vers l'aéroport de Halifax à partir de sa position, soit 58 milles marins au sud-ouest de Halifax (Nouvelle-Écosse). Pendant qu'il effectue les manœuvres en vue de l'atterrissage, l'équipage avise les Services de contrôle de la circulation aérienne qu'il doit se poser immédiatement et qu'il déclare une situation d'urgence. Une vingtaine de minutes après que l'équipage eut perçu pour la première fois l'odeur inhabituelle, et quelque sept minutes après qu'il eut déclaré une « situation d'urgence », l'appareil percute la surface de l'eau au large de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse), tuant les 229 personnes à son bord. L'avion s'étant abîmé dans l'océan, il n'y a pas eu d'incendie après l'accident.

Jusqu'ici, l'enquête (dossier no A98H0003) a révélé la présence de dommages causés par le feu dans la partie du plafond située à l'avant de la cloison du poste de pilotage, ainsi que sur plusieurs mètres à l'arrière de la cloison. La source d'inflammation n'a pas encore été déterminée, mais il y a tout lieu de croire que le matériau des matelas d'isolation thermique et acoustique a alimenté l'incendie de façon importante. Des restes brûlés de ce matériau, ayant été éteints par l'eau de mer, ont été trouvés dans l'épave.

Des anomalies relatives à la résistance au feu de certains matériaux d'isolation thermique et acoustique ainsi que des anomalies relatives aux critères d'essai utilisés pour certifier ces matériaux ont été relevées dans le cadre de la présente enquête et d'enquêtes sur d'autres accidents d'aviation récents.

Matelas d'isolation thermique et acoustique

Les matelas d'isolation thermique et acoustique sont utilisés pour protéger l'intérieur des aéronefs contre les variations de température, le bruit et l'humidité, et leur usage est très répandu dans l'industrie de l'aviation. Ces matelas sont habituellement fabriqués de lisières de matériau isolant encapsulé dans une enveloppe ou une pellicule. Quand il faut couvrir une grande superficie, on scelle plusieurs matelas ensemble à l'aide de rubans pour n'en faire qu'une seule unité. Le matériau de l'enveloppe est choisi en fonction de sa durabilité, de sa résistance au feu, de son poids, de son imperméabilité et de sa facilité d'installation. Les matériaux d'enveloppe les plus utilisés à l'heure actuelle dans l'aviation sont le fluorure de polyvinyle (PVF)Note de bas de page 1 métallisé et le poly(éthylène téréphtalate) (PET)Note de bas de page 2 métallisé et non métallisé. Le MD–11 du vol SR 111 était équipé de matelas d'isolation munis d'une enveloppe en PET métallisé.

La firme Douglas Aircraft Company a utilisé pour la première fois des enveloppes d'isolation en pellicule plastique renforcée au moment de la mise au point du DC-10. Dès 1987, le constructeur (qui s'appelait alors McDonnell Douglas Corporation) commençait à utiliser sur ses appareils de série des matelas isolants munis d'une enveloppe en PET métallisé. D'autres recherches et de nouveaux développements ont mené à la confection de matelas d'isolation thermique et acoustique plus légers munis d'une enveloppe en PET non métallisé. En 1994, on commençait à utiliser ces nouveaux matelas pour remplacer les matelas munis d'une enveloppe en PET métallisé sur les nouveaux appareils de série. Les DC-10, les MD-80 et les MD–11 de la McDonnell Douglas ont été équipés à l'origine de matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé. Nous ne savons pas combien d'aéronefs à travers le monde ont utilisé ce matériau comme pièce de rechange ou dans le cadre de réparations, mais il est certain qu'un grand nombre d'aéronefs utilisent des matelas d'isolation thermique et acoustique munis d'enveloppe en PET métallisé.

Le MD–11 est équipé de matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé en de nombreux endroits. On en retrouve notamment beaucoup dans la partie du plafond située à l'avant et à l'arrière de la cloison du poste de pilotage. C'est dans cette partie du MD–11 en question que l'on a observé des dommages causés par le feu. Les enquêteurs ont trouvé des fragments de PET métallisé qui avaient brûlé. L'annexe A présente quelques cas d'incendie à bord. Dans tous les cas, on a jugé que les matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé avaient alourdi les dommages.

En septembre 1996, à la suite de plusieurs incendies au sol dans des MD-80 et des MD–11 équipés de matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé, la firme McDonnell Douglas avisait les exploitants de cesser d'utiliser ce matériau. La firme faisait également savoir qu'elle installait désormais des matelas d'isolation à enveloppe en PET non métallisé dans ses appareils de série. En 1997, la firme commençait à utiliser le PVF métallisé pour ses appareils de série. En octobre de la même année, McDonnell Douglas publiait le bulletin technique MD–11-25-200 qui incitait les exploitants de MD–11 à remplacer les matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé par des matelas à enveloppe en PVF métallisé. Ce bulletin précisait également que la firme n'utilisait plus le matériau d'enveloppe en PET non métallisé qui avait été utilisé depuis septembre 1996 pour construire les appareils de série parce que ce matériau ne donnait pas des résultats uniformes en réponse à un essai d'inflammabilité spécifique de McDonnell Douglas. Ce bulletin ajoutait que McDonnell Douglas utilisait désormais le PVF métallisé pour ses nouveaux appareils de série. La firme avait publié des bulletins semblables concernant l'utilisation d'enveloppe de matelas d'isolation en PET métallisé à l'intention des exploitants de DC-8, DC-9, DC-10, MD-80 et MD-90.

Les bulletins techniques des constructeurs visent à renseigner les exploitants. L'application du bulletin est facultative à moins que l'organisme de réglementation concerné ne rende cette application obligatoire en publiant une consigne de navigabilité.

Les isolants thermiques et acoustiques, les revêtements d'isolant et les matelas d'isolation doivent satisfaire aux exigences d'inflammabilité stipulées à l'annexe F de la Federal Aviation Regulation (FAR) 25.853 des États-Unis. En 1997, préoccupé par le grand nombre de cas où le feu s'était propagé dans les matelas d'isolation thermique et acoustique, le service de recherche et de développement de la Federal Aviation Administration (FAA) entreprenait une étude visant à évaluer des conditions d'essai d'inflammabilité plus rigoureuses que celles stipulées à l'annexe F du FAR 25.853. L'étude comprenait l'essai d'une variété de matériaux d'enveloppe de matelas d'isolation, dont le PET métallisé. Les échantillons de PET métallisé ont échoué aux essais effectués dans des conditions plus rigoureuses, ce qui a amené les auteurs de l'étude à conclure que le type de PET métallisé utilisé comme matériau d'enveloppe soumis à l'évaluation était inflammable et qu'il pouvait permettre la propagation du feu dans certaines conditions. En mars et en mai 1999, la FAA a fait des essais de combustion dans l'espoir d'améliorer les critères d'essai imposés en vertu de l'annexe F de la FAR 25.853. La FAA a placé un matelas d'isolation dans une maquette représentant la partie supérieure du fuselage d'un avion commercial. Les résultats préliminaires ont démontré que le PET métallisé pouvait s'enflammer et que l'incendie pouvait se propager dans certaines conditions en créant une grande quantité de fumée, ce qui avait pour effet d'aggraver les dangers liés à un incendie en vol. Ces résultats correspondent aux observations faites dans le cadre des incendies en service cités ci-devant, ainsi qu'aux résultats des autres essais de la FAA.

Compte tenu des antécédents en service, de l'inflammabilité démontrée de l'enveloppe de matelas d'isolation en PET métallisé, et de la découverte de restes brûlés de ce matériau dans l'épave de l'appareil du vol 111 de la Swissair, il y a lieu de croire que ce matériau a alimenté l'incendie de façon importante et a contribué à la propagation du feu. Le Bureau considère que l'exploitation d'aéronefs équipés de matelas d'isolation thermique et acoustique munis d'une enveloppe en PET métallisé fait courir des risques inutilement. C'est pourquoi le Bureau recommande que :

les autorités de réglementation s'assurent, de toute urgence, que des mesures suffisantes sont prises en vue de réduire ou d'éliminer le risque associé à l'utilisation, dans les aéronefs, de matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé.
Recommandation A99-07 du BST

Critères d'essai d'inflammabilité

Dans le cadre de l'essai d'inflammabilité pour les isolants thermiques et acoustiques, les revêtements d'isolant et les matelas d'isolation, l'annexe F de la FAR 25.853 stipule que les échantillons doivent faire l'objet d'un essai d'inflammabilité vertical à l'aide d'un brûleur approuvé. Le type de matériau de l'enveloppe du matelas d'isolation installé dans l'avion de la Swissair avait fait l'objet de cet essai qui avait révélé que le matériau répondait aux critères d'inflammabilité relatifs à l'obtention de la certification de la FAA.

Les incendies en service de l'enveloppe en PET métallisé et les résultats irréguliers obtenus lors des essais d'inflammabilité verticaux stipulés dans la FAR 25.853 ont amené les constructeurs à rechercher d'autres critères d'essai d'inflammabilité. Par la suite, les avionneurs ont mis au point un essai de type « tampon de coton » qui a fourni des résultats plus uniformes lors de la vérification des caractéristiques d'inflammabilité de divers matériaux d'enveloppe. Plusieurs avionneurs importants ont adopté cet essai supplémentaire et ont modifié leurs spécifications internes pour ces matériaux. En 1996, se basant sur les résultats de l'essai d'inflammabilité de type « tampon de coton », la firme McDonnell Douglas avisait ses clients de ne plus utiliser le PET métallisé et cessait d'utiliser ce matériau pour la construction de ses appareils de série. En 1997, une étude menée sous l'égide de la FAA confirmait que l'essai d'inflammabilité de type « tampon de coton » s'avérait une méthode d'essai plus fiable et plus facilement reproductible pour évaluer les caractéristiques d'inflammabilité de l'enveloppe en PET métallisé; toutefois, la FAA n'a pas modifié l'annexe F de la FAR 25.853 pour renforcer les exigences des critères d'essai.

Les cas présentés à l'annexe B confirment que le problème des critères d'essai de l'annexe F de la FAR 25.853 peut ne pas se limiter au fait que les critères ne permettent pas de mesurer de façon précise et fiable les caractéristiques d'inflammabilité de l'enveloppe en PET métallisé.

Le 14 octobre 1998, la FAA déclarait que les critères d'essai utilisés pour certifier les caractéristiques d'inflammabilité des matériaux d'isolation thermique et acoustique étaient inadéquats, et elle s'engageait à mener les recherches nécessaires afin d'établir une norme d'essai plus complète. Au même moment, la FAA faisait savoir que les matériaux contenant une pellicule polyimide répondaient aux exigences de la nouvelle réglementation puisqu'ils avaient donné de bons résultats lors des essais d'inflammabilité préliminaires. Il ne sera pas possible d'établir si les matériaux contenant une pellicule polyimide, ou d'autres matériaux, assurent une protection suffisante contre la propagation du feu, aussi longtemps qu'il n'y aura pas de critères d'essai d'inflammabilité adéquats. Les matériaux d'isolation thermique et acoustique sont installés dans les aéronefs en tant que systèmes comprenant des composants connexes comme les rubans, les pièces de fixation et les reniflards. Le Bureau croit que les matériaux d'isolation thermique et acoustique destinés à l'industrie aéronautique devraient être évalués en fonction de critères d'essai d'inflammabilité plus rigoureux, non en tant que composants isolés, mais en tant qu'éléments d'un système. C'est pourquoi le Bureau recommande que :

les autorités de réglementation valident, de toute urgence, les matériaux d'isolation thermique et acoustique utilisés à l'heure actuelle ou devant être utilisés dans les aéronefs, en fonction de critères d'essai d'inflammabilité plus rigoureux que ceux de l'annexe F de la FAR 25.853 et d'autres règlements semblables et plus représentatifs des performances en service actuelles du système.
Recommandation A99-08 du BST

Si d'autres manquements à la sécurité devant faire l'objet de mesures immédiates sont relevées pendant l'enquête, le Bureau s'empressera de faire d'autres recommandations en matière de sécurité aérienne.

Benoît Bouchard

Président
au nom du Bureau

Annexe A

Voici quelques cas où l'enveloppe de matelas d'isolation en PET métallisé est en cause :

  • Le 24 novembre 1993, un incendie s'est déclaré dans un McDonnell Douglas MD-87 pendant le roulage. On a d'abord vu de la fumée s'échapper du côté arrière droit de la cabine, puis, après l'évacuation des passagers et de l'équipage, l'incendie a augmenté d'intensité et s'est propagé rapidement. L'enquête a révélé que les matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé avaient alimenté l'incendie et avaient contribué à la propagation du feu. [Bureau d'enquête sur les accidents d'aviation du Danemark]
  • Le 6 septembre 1995, il y a eu un incendie dans le compartiment électronique et technique d'un McDonnell Douglas MD–11. L'enquête a révélé que du métal fondu en provenance d'un arc électrique entre des fils était tombé sur les matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé situés près du revêtement du fuselage, provoquant un violent incendie et causant des dommages importants. [Ministre de l'Administration générale de l'Aviation civile de la République populaire de Chine]
  • Le 26 novembre 1995, il y a eu un incendie dans la cabine d'un McDonnell Douglas MD-82 avant le décollage. L'enquête a révélé qu'un boîtier de ballast rompu avait provoqué un incendie qui s'était propagé rapidement et violemment dans les matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé. [Ministère de l'Aviation civile de la République italienne]
  • Le 8 novembre 1998, un incendie s'est déclaré pendant les opérations de chargement d'un McDonnell Douglas MD–11. Il y a lieu de croire qu'on aurait par mégarde fait passer une palette de fret sur un câble électrique qui alimentait en courant l'un des rouleaux de plancher. Un boîtier qui renfermait des circuits électroniques a provoqué des étincelles qui ont mis le feu à un matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé tout près. [National Transportation Safety Board des États-Unis]
  • Le 29 mars 1999, lors de travaux de maintenance effectués sur un avion cargo McDonnell Douglas MD–11, on a découvert que le matériau d'un matelas d'isolation montrait des signes de dommages causés par le feu. L'enquête préliminaire a révélé la présence de fils électriques usés par frottement, situés sous les panneaux du plancher de la soute arrière. Les fils avaient produit un arc électrique qui avait mis le feu au matelas d'isolation à enveloppe en PET métallisé tout près. L'incendie s'est propagé dans les matelas d'isolation et a brûlé une superficie de 60 pouces sur 26 pouces. [National Transportation Safety Board des États-Unis]
Annexe B

Voici des cas où l'enveloppe de matelas d'isolation en PVF métallisé est en cause :

  • Le 10 octobre 1994, après l'atterrissage, le personnel de piste a perçu une odeur de brûlé qui se dégageait d'un Boeing 737-100. L'enquête a révélé qu'un serre-fil mal installé avait provoqué un court-circuit. Un arc électrique avait mis le feu à un matelas d'isolation voisin muni d'une enveloppe en PVF métallisé. [Ministre de l'Administration générale de l'Aviation civile de la République populaire de Chine]
  • Le 13 novembre 1995, dans le cadre d'une inspection de maintenance d'un Boeing 737-300, il a fallu retirer un boulon à écrou à l'aide d'une perceuse pneumatique, ce qui a provoqué des éclats métalliques chauds qui ont mis le feu au matelas d'isolation à enveloppe en PVF métallisé situé sous le plancher. Les flammes se sont propagées et ont brûlé une superficie de 18 pouces sur 40 pouces. [Ministre de l'Administration générale de l'Aviation civile de la République populaire de Chine]

Lutte contre les incendies en vol

Date d'envoi : le 4 décembre 2000

À l'intention de :

L'Honorable David Michael Collenette, c.p., député
Ministre des Transports

Frank Hilldrup,
représentant accrédité pour l'enquête sur l'accident du vol 111 de Swissair
National Transportation Safety Board États-Unis

Jean Overney,
chef inspecteur
Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation Suisse

Objet : Lutte contre les incendies en vol

Circonstances entourant l'accident du vol 111 de Swissair

Le 2 septembre 1998, un McDonnell Douglas MD–11 (vol 111 de Swissair) effectuait un vol entre New York et Genève avec 215 passagers et 14 membres d'équipage à son bord. Environ 53 minutes après le décollage, alors que l'avion se trouvait en croisière au niveau de vol 330, l'équipage a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Dans les trois minutes et demie environ qui ont suivi, l'équipage de conduite a noté la présence de fumée et a envoyé le signal d'urgence international « PAN, PAN, PAN » aux Services de la circulation aérienne (ATS) de Moncton. Le vol 111 de Swissair a été autorisé à se rendre à l'aéroport de Halifax à partir de sa position située à 58 milles marins au sud-ouest. Alors qu'il manœuvrait pour se préparer à atterrir, l'équipage de conduite a avisé les ATS qu'il devait se poser immédiatement et a déclaré une situation d'urgence. Environ 20 minutes après que l'équipage eut senti l'odeur inhabituelle, et environ 7 minutes après qu'il eut déclaré une « situation d'urgence », l'avion a heurté le plan d'eau près de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, tuant les 229 occupants.

Contexte

L'avion s'est abîmé dans l'océan. Tous les dommages attribuables à un incendie se sont produits en vol. L'enquête (dossier A98H0003) a permis de relever des dommages considérables causés par un incendie au-dessus du plafond, dans la partie avant de l'avion et se prolongeant d'environ 1 mètre et demi devant et 5 mètres derrière la cloison du poste de pilotage. L'origine de l'incendie n'a pas été établie, mais l'enquête a révélé des manquements à la sécurité concernant la conception, l'équipement et l'entraînement de l'équipage, la sensibilisation et les procédures relatives à la lutte contre les incendies en vol. L'élimination de ces manquements à la sécurité permettrait d'augmenter les chances de détecter et d'éteindre rapidement les incendies en vol et, par le fait même, de réduire le nombre de pertes de vie.

Le BST se préoccupe de l'approche adoptée par la communauté aéronautique pour réduire les risques et fournir aux équipages les moyens de détecter et d'éteindre à coup sûr les incendies dans les parties pressurisées des avionsNote de bas de page 3.

Quand un incendie se déclare en vol, l'équipage de l'aéronef doit être prêt à ne compter que sur son expérience, l'entraînement reçu et l'équipement de bord. Par conséquent, pour pouvoir lutter efficacement contre les incendies, les mesures de lutte contre les incendies doivent permettre à l'équipage de déceler, d'analyser et d'éteindre rapidement tout incendie en volNote de bas de page 4. Il est difficile de prédire combien de temps il faut pour maîtriser un incendie en vol, mais il vaut mieux déceler l'incendie tôt.

De l'information anecdotique laisse croire que la présence d'odeurs, d'émanations et de fumée qui ne se traduit pas par des incendies en vol n'est pas inhabituelle, mais que si un incendie se déclare réellement en vol, on dispose de très peu de temps pour le maîtriser. Le BST a examiné un certain nombre de bases de données en vue de confirmer cette information. Cet examen a confirmé qu'il y a de nombreux cas de présence d'odeurs, d'émanations ou de fumée; par contre, les cas qui se traduisent par des incendies non maîtrisés, semblables à celui du vol 111 de Swissair, sont rares. L'annexe A présente les données de l'examen fait par le BST. Ces cas d'incendie en vol ont été choisis parce qu'ils présentent des similitudes avec l'accident du vol 111 de Swissair. Les données indiquent que, dans les cas d'un incendie en vol qui se propage, il peut s'écouler de 5 à 35 minutes entre le moment où l'incendie est détecté et le moment où l'avion s'écrase.

De plus, le BST a examiné de nombreux cas d'incendies en vol qui n'ont pas été inclus dans le processus parce qu'ils présentaient des variantes par rapport aux critères établis pour l'examen. Bon nombre de ces accidents ont causé des pertes de vie, et chaque cas renferme des exemples où un composant ou plus du système de lutte contre les incendies n'a pas fourni une protection suffisante. Ces cas sont présentés à l'annexe B.

Manquements à la sécurité

Le BST a relevé des manquements à la sécurité à plusieurs égards dans les exigences gouvernementales et les normes de l'industrie en vigueur relatives à la lutte contre les incendies en vol. Ces manquements augmentent le temps nécessaire à l'évaluation et à la maîtrise d'une situation qui risque de s'aggraver rapidement. Pris dans leur ensemble, ces manquements révèlent un problème au niveau des efforts faits par les gouvernements et par l'industrie pour reconnaître la nécessité de traiter un incendie en vol d'une façon systématique et efficace.

Les recommandations provisoires sur la sécurité aérienne formulées par le Bureau portent sur des manquements à la sécurité relevés dans les domaines suivants :

  • l'absence d'une approche coordonnée et détaillée relativement à la lutte contre les incendies en vol augmente les risques;
  • les systèmes de détection et de suppression de la fumée et des incendies sont insuffisants;
  • l'importance de se préparer rapidement à faire un atterrissage d'urgence n'est pas reconnue;
  • le temps qu'il faut pour résoudre des problèmes causés par de la fumée ou un incendie est trop long;
  • l'accès aux zones critiques à l'intérieur des avions laisse à désirer.

Mesures intégrées de lutte contre les incendies

Un aspect important du mandat du Bureau en ce qui concerne la promotion de la sécurité des transports consiste à regarder au-delà des circonstances immédiates d'un accident donné afin de déceler s'il y a des manquements systémiques à la sécurité. Au fil des ans, les enseignements qui se sont dégagés de certains accidents ont permis de modifier certains avions, certains systèmes et certaines procédures en vue de corriger des défaillances spécifiquesNote de bas de page 5. Toutefois, les modifications de conception apportées à l'équipement et aux aéronefs qui avaient pour objet de fournir de meilleurs moyens de lutte contre les incendies ont parfois été faits indépendamment les unes des autres. Bien que de très grands efforts aient été faits pour préparer les équipages et leur donner les moyens nécessaires pour lutter contre les incendies en vol, ces efforts n'ont pas réussi à préparer les équipages à déceler et à repérer les incendies en vol, à y avoir accès, à les évaluer et à les éteindre d'une manière coordonnée et cohérente.

Les « systèmes » de lutte contre les incendies en vol devraient comprendre toutes les procédures et tout l'équipement nécessaires à la prévention, à la détection, à la maîtrise et à l'extinction des incendies d'aéronef. Cette approche systémique comprendrait les normes sur l'inflammabilité des matériaux, l'accessibilité, la détection de la fumée et des incendies ainsi que le matériel d'extinction, les procédures d'urgence et l'entraînement. Tous ces éléments devraient être examinés ensemble, et il faudrait réévaluer les relations entre chaque mesure individuelle de lutte contre les incendies en ayant à l'esprit l'élaboration de moyens détaillés et efficaces pour lutter contre les incendies. Le Bureau croit qu'on pourra lutter plus efficacement contre les incendies en vol lorsqu'on disposera d'un système de lutte contre les incendies comprenant des éléments intégrés et complémentaires. En conséquence, le Bureau recommande que :

les organismes de réglementation pertinents, de concert avec la communauté aéronautique, examinent la question de la lutte contre les incendies en vol dans son ensemble pour assurer que les équipages d'aéronef disposent d'un système dont les éléments sont complémentaires et optimisés en vue d'offrir le plus de chances possible de détecter et d'éteindre tout incendie en vol.
Recommandation A00-16 du BST

Détection et suppression de la fumée et des incendies
Zones désignées comme des zones de feu

À l'heure actuelle, les exigences relatives aux systèmes intégrés de détection et de suppression de la fumée et des incendies se limitent aux endroits difficiles d'accès et qui demandent un grand nombre de précautionsNote de bas de page 6. Ces endroits, qu'ils soient à l'intérieur ou à l'extérieur des parties pressurisées de l'avion, sont désignées comme des « zones de feu », en raison de la présence de sources d'inflammation et de matières inflammables. C'est pourquoi les avionneurs doivent prévoir des circuits de détection et d'extinction intégrés dans les groupes motopropulseurs (y compris les groupes auxiliaires de bord (APU)), les toilettes, les soutes et les compartiments à bagagesNote de bas de page 7. Ces dispositifs d'extinction intégrés sont soit automatiques, comme dans les toilettes, soit commandés du poste de pilotage, comme dans les groupes motopropulseurs. Dans chaque cas, l'agent extincteur doit être fourni en quantité suffisante et convenir aux types d'incendie le plus susceptibles de se déclarer dans la zone où l'extincteur est utiliséNote de bas de page 8.

Rien n'exige que les autres zones de la partie pressurisée de l'aéronef soient équipées de systèmes intégrés de détection et de suppression de la fumée et des incendies. Pour ce qui est de la détection et de la suppression de la fumée et des incendies dans les zones non désignées comme des zones de feu, comme le poste de pilotage, la cabine, les offices, les compartiments du matériel électrique et électronique et les espaces inoccupés, il faut s'en remettre principalement à l'intervention humaineNote de bas de page 9.

Zones non désignées comme des zones de feu

La détection de la fumée et des incendies dans des zones non désignées comme des zones de feu dépend de la vue, de l'ouïe et de l'odorat des membres d'équipage et des passagers. Il est à peu près certain qu'il y aura une présence humaine dans certaines zones de l'avion pendant une bonne partie du vol, toutefois d'autres endroits, comme les compartiments de matériel électrique et électronique et les espaces inoccupés, sont moins faciles d'accès. Un incendie risque de se déclarer et de se propager dans ces zones, là où il n'est pas facile pour l'être humain de déceler un incendie. Le rapport du National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis sur un incendie en vol à bord d'un DC-9 d'Air Canada, qui s'est produit près de Cincinnati le 2 juin 1983, indique que l'équipage a décelé pour la première fois la présence de fumée environ 11 minutes après le déclenchement des disjoncteurs connexesNote de bas de page 10. La situation est d'autant plus compliquée que dans la plupart des avions de transport, les zones occupées sont isolées des zones difficiles d'accès par des systèmes de filtration et de ventilation très efficaces pouvant évacuer les produits de combustion des petits incendies. À cause de la présence de ces systèmes, de petits incendies peuvent continuer à faire rage sans être détectés par les occupants de la cabineNote de bas de page 11.

On a jugé que certaines zones non désignées comme des zones de feu présentaient « peu » de danger d'incendie. L'industrie de l'aviation n'a pas jugé que ces zones nécessitaient du matériel intégré de détection et d'extinction d'incendie. En outre, on n'a pas reconnu la nécessité de donner de la formation aux équipages pour qu'ils puissent lutter contre les incendies dans les zones non désignées comme des zones de feu. On n'a pas reconnu non plus la nécessité de construire les avions de façon à permettre d'accéder facilement et rapidement à ces zones pour lutter contre un incendie.

Les matériaux utilisés dans les avions doivent être conformes aux normes relatives aux incendies. Ces normes exigent que les matériaux utilisés à l'intérieur de la cabine et dans les soutes et compartiments à bagages répondent aux critères d'essai connexesNote de bas de page 12. Dans la recommandation provisoire sur la sécurité aérienne A99-08, datée du 11 août 1999, le BST a cerné les limites de ces critères d'essai qui permettent la certification pour utilisation à bord des avions d'un matériau inflammable pour les matelas d'isolation thermique et acoustique. La Federal Aviation Administration (FAA) travaille activement à un programme de remplacement d'un matériau de matelas d'isolation spécifique (le Mylar métallisé), lequel semble présenter les plus grands risques. De plus, un essai plus efficace est en train d'être mis au point. Les Notices of Proposed Rulemaking (NPRM) (avis publics concernant l'établissement de règlements) connexes de la FAA indiquent qu'il y a d'autres matériaux de matelas d'isolation qui, une fois enflammés, présentent des propriétés de propagation des flammes semblables à celles du Mylar métalliséNote de bas de page 13. Par conséquent, malgré les mesures prises par la FAA pour remplacer le Mylar métallisé, il restera de nombreuses zones difficiles d'accès contenant des matières combustibles, mais qui se trouvent à bonne distance des systèmes de détection de la fumée et des incendies. Enfin, ces matières, situées dans les endroits difficiles d'accès, sont sujettes à la contamination en surface qui pourrait alimenter l'incendie et le propager.

Beaucoup de zones, dont certaines sont assez grandes à l'intérieur d'un avion de transport, sont rarement inspectées et elles peuvent être contaminées par de la saleté, des débris et des rognures de métal. Des inspections exécutées en vertu du Aging Transport Non-Structural Systems Plan (plan des systèmes non structuraux vieillissants) de la FAA ont révélé que la contamination en surface des faisceaux de fils constituait un risqueNote de bas de page 14. L'équipe d'enquête du vol 111 de Swissair a observé, sur divers types d'avion, une contamination semblable du matériau des matelas d'isolation et des faisceaux de fils. L'importance de cette contamination n'a pas encore été déterminée, mais avec le temps, des débris comme des rognures de métal pourraient endommager l'isolant des fils et causer des courts-circuits et des arcs électriques. De plus, de la saleté et des débris combustibles pourraient alimenter l'incendie et permettre qu'il se propage. Des programmes de maintenance bien conçus et bien exécutés peuvent limiter cette contamination, mais il est peu probable qu'on puisse l'éliminer complètement.

Au cours des dernières années, des modifications ont été apportées aux exigences relatives à la détection et à l'extinction des incendies dans des zones non désignées auparavant comme des zones de feu. Par exemple, on a désigné les toilettes comme une zone de feu, en grande partie en raison des enseignements qui se sont dégagés de l'accident du DC-9, près de Cincinnati. L'accident du vol 111 de Swissair et d'autres accidents démontrent clairement qu'il faut absolument détecter et combattre rapidement tout incendie en vol pour arriver à le maîtriser. La situation actuelle n'est pas satisfaisante, et il faut prendre des mesures supplémentaires pour améliorer les moyens de détection et d'extinction des incendies dans certaines parties pressurisées des avions. Il y a des zones importantes dans les parties pressurisées des avions qui ne sont pas désignées comme des zones de feu à l'heure actuelle; ces zones sont très difficiles d'accès et il pourrait s'y trouver des sources d'inflammation et des matières combustibles.

Le Bureau croit qu'on pourrait réduire les risques pour le public voyageur grâce à un nouvel examen des désignations des zones de feu en vue de déterminer quelles autres zones de l'avion devraient être équipées de systèmes de détection et de suppression de la fumée et des incendies. En conséquence, le Bureau recommande que :

les organismes de réglementation pertinents, de concert avec la communauté aéronautique, examinent la méthodologie régissant la détermination des zones désignées comme des zones de feu à l'intérieur des parties pressurisées des avions en vue de fournir de meilleurs moyens de détection et d'extinction des incendies.
Recommandation A00-17 du BST

Danger de poursuivre le vol et atterrissage d'urgence

Tant l'examen du BST qu'une étude de la FAA indiquent que la présence d'odeurs ou de fumée se traduit rarement par des incendies en vol non maîtrisésNote de bas de page 15. Il y a eu tout un débat dans l'industrie de l'aviation au sujet des décisions à prendre quand un équipage de conduite décèle la présence d'odeurs ou de fumée. Bien des gens dans l'industrie croient qu'en général ces situations s'avèrent « sans conséquences ». Résultat, on s'inquiète moins des « petites » odeurs. Au sein de la communauté aéronautique, l'expérience laisse supposer que la source de ces odeurs sera découverte rapidement et que les procédures d'évaluation permettront de « régler le problème ». L'examen du BST révèle également que si l'incendie en vol n'est pas éteint, l'équipage a peu de temps pour poser l'avion en toute sécurité. Par conséquent, dans les cas où l'origine des odeurs ou de la fumée est inconnue, la décision de se dérouter et de se préparer à faire un atterrissage d'urgence doit être prise rapidement.

Un certain nombre de facteurs peuvent empêcher les équipages de conduite d'entreprendre immédiatement un déroutement et de se poser, entre autres la culture de l'entreprise, des considérations commerciales, les inconvénients que cela pourrait poser aux occupants, le confort des passagers, les préoccupations de sécurité liées à l'exécution d'une descente d'urgence, les complications liées à un déroutement vers un aéroport moins connu et les limites d'utilisation de l'avion.

L'accident du vol 111 de Swissair a sensibilisé les gens aux odeurs et à la fumée et à leurs conséquences. Depuis lors, le nombre de déroutements a augmenté. Le niveau de conscientisation va sûrement diminuer avec le temps. Récemment, quelques lignes aériennes ont modifié leurs listes de vérifications et leurs procédures pour assurer que les équipages de conduite disposent des politiques, des procédures et de l'entraînement nécessaires pour se dérouter et se poser immédiatement si de la fumée de source inconnue est décelée et qu'on n'arrive pas à l'évacuer facilement. Parmi d'autres initiatives, la société Swissair a modifié sa liste de vérifications pour le MD–11 relativement à la rubrique « Fumée ou émanations d'origine inconnue »; elle y a ajouté « Atterrir à l'aérodrome d'urgence le plus proche » comme première mesure à prendre.

La société Boeing a publié le bulletin no MD–11-99-04 qui stipule ceci : « Boeing recommande, chaque fois que de la fumée est détectée et que son origine ne peut être déterminée AVEC CERTITUDE ni éliminée, d'atterrir le plus tôt possible. »

Bien que ces mesures permettent de réduire les risques d'accident, le Bureau croit qu'il faut faire plus à l'échelle de l'industrie. En plus de mettre en œuvre d'autres éléments d'un plan d'ensemble de lutte contre les incendies, il est essentiel que les équipages de conduite se préoccupent sans tarder de préparer l'avion à atterrir à l'aéroport convenable le plus proche. En conséquence, le Bureau recommande que :

les organismes de réglementation pertinents prennent des mesures pour assurer que les normes de l'industrie indiquent bien que lorsque des odeurs ou de la fumée de source inconnue sont décelées dans un avion, le plan d'action le plus approprié consiste à se préparer à atterrir le plus rapidement possible.
Recommandation A00-18 du BST

Temps nécessaire pour évaluer la situation une fois que des odeurs ou de la fumée ont été décelées

Si la source des odeurs ou de la fumée n'est pas évidente, les équipages de conduite sont entraînés à suivre les procédures d'évaluation figurant sur les listes de vérifications afin d'éliminer la source des odeurs ou de la fumée. Dans le cadre de certaines procédures, il faut couper l'alimentation électrique ou isoler un système de ventilation. Un certain temps doit s'écouler avant de pouvoir évaluer les répercussions de chaque mesure prise. L'exécution de la liste de vérifications peut prendre beaucoup de temps, y compris les mesures d'évaluation. Par exemple, l'exécution de la liste des vérifications du MD–11 relativement à la fumée et aux émanations d'origine inconnue peut prendre jusqu'à 30 minutesNote de bas de page 16. Aucune directive réglementaire ni aucune norme de l'industrie ne précise combien de temps doit prendre l'exécution de ces listes de vérifications. Plus l'on prend de temps à exécuter les listes de vérifications prescrites, plus il y a de risques que l'incendie devienne incontrôlable.

Les procédures d'évaluation sont plus efficaces si les mesures prises par l'équipage de conduite permettent d'éliminer les odeurs ou la fumée avant qu'un incendie se déclare. Ces procédures peuvent aussi permettre d'éteindre un début d'incendie si l'équipage découvre la source de l'incendie suffisamment tôt. Toutefois, une fois qu'un incendie est capable de se propager sans être continuellement alimenté à la source, toute autre mesure d'évaluation visant à éliminer la source ne permettra pas de venir à bout de l'incendie.

Les données sur les accidents d'aviation révèlent qu'un incendie qui se propage de lui-même peut gagner en intensité en peu de temps. Par conséquent, les listes de vérifications relatives aux odeurs et à la fumée doivent être conçues de sorte que les procédures d'évaluation puissent être exécutées rapidement et de façon efficace. Le Bureau s'inquiète que ce ne soit pas le cas à l'heure actuelle et recommande donc que :

les organismes de réglementation pertinents s'assurent que les procédures des listes de vérifications d'urgence relatives à la présence d'odeurs ou de fumée d'origine inconnue soient conçues pour être exécutées dans un délai permettant de minimiser les risques qu'un incendie se déclare en vol et se propage.
Recommandation A00-19 du BST

Efficacité de la lutte contre les incendies dans les parties pressurisées des avions

On utilise des extincteurs portatifs pour lutter contre les incendies dans les parties pressurisées des avions. Le nombre et la répartition des extincteurs à bord varient selon le nombre de passagers que l'avion est autorisé à transporterNote de bas de page 17. Le poste de pilotage et les offices doivent obligatoirement être équipés d'extincteurs portatifs. L'efficacité du matériel portatif de lutte contre les incendies dépend de l'importance, du type et du lieu de l'incendie, de son accessibilité et de l'entraînement de l'équipage. De par leur conception, les extincteurs portatifs sont plus efficaces pour lutter contre les petits incendies et ont une portée limitée (jusqu'à trois mètres). Les extincteurs portatifs ont donné de bons résultats lorsque l'incendie était petit et facile d'accès. Dans un gros avion commercial comme le MD–11, il y a des endroits qui ne sont pas faciles d'accès pour l'équipage, et certains sont même très difficiles d'accès. Par exemple, il serait difficile pour l'équipage d'un gros avion commercial d'éteindre certains incendies avec des extincteurs portatifs, notamment dans les espaces inoccupés ou les compartiments de matériel électrique et électronique.

Dans les endroits d'accès relativement facile comme les offices non protégées, on a constaté que les procédures en vigueur et l'entraînement des équipages à utiliser des extincteurs portatifs étaient satisfaisants. Par contre, dans les cas où la source de la fumée ou de l'incendie n'est pas évidente, ou que l'endroit est difficile d'accès, la situation peut devenir dangereuse très rapidement. Les zones difficiles d'accès n'ont pas été prises en compte lors de la planification de la lutte contre les incendies en vol. Par conséquent, peu d'entraînement, voire aucun, a été dispensé aux équipages sur la façon d'accéder aux endroits situés derrière les panneaux électriques ou derrière d'autres panneaux, les espaces inoccupés ou les compartiments de matériel électrique et électronique. En général, les avions en service à l'heure actuelle n'ont pas d'ouvertures à accès rapide ni d'autres moyens du genre pour permettre d'accéder facilement à ces endroits.

L'enquête du BST sur l'incendie en vol de SR 111 et l'examen d'autres cas d'incendie en vol ont montré que lorsqu'un incendie en vol gagne en intensité, on a peu de temps entre le moment où l'incendie est détecté et celui où l'on perd la maîtrise de l'avion. Il faut prévoir que les systèmes de l'avion seront touchés, que ce soit directement par l'incendie ou à la suite des procédures d'urgence, comme la coupure de l'alimentation électrique des bus. Il est impératif que les procédures de lutte contre les incendies soient bien définies et que les équipages soient bien entraînés à combattre tous les types d'incendie en vol.

Les équipages sont entraînés à lutter contre les incendies en vol; cependant, rien n'exige que l'équipage de conduite et le personnel de cabine s'entraînent ensemble, ni qu'ils s'entraînent à suivre un plan de lutte contre les incendies et une procédure de liste de vérifications intégrésNote de bas de page 18. Par exemple, ni les équipages de conduite ni le personnel de cabine ne sont entraînés à combattre des incendies en vol dans le poste de pilotage. Plusieurs exploitants contactés par le BST ont indiqué que les équipages de conduite et le personnel de cabine ne recevaient pas un entraînement spécifique à la lutte contre les incendies dans le poste de pilotage. La répartition des rôles et des responsabilités entre les équipages de conduite et le personnel de cabine, à savoir qui doit combattre un incendie en vol dans le poste de pilotage, n'est pas clairement indiquée dans les manuels et les procédures des compagnies.

Un incendie en vol qui n'est pas maîtrisé est une situation d'urgence complexe et très grave. L'incendie peut provenir de diverses sources et peut se propager très rapidement. Chaque seconde compte. Les équipages doivent bien connaître l'avion et ses systèmes, et ils doivent être entraînés à combattre n'importe quel type d'incendie rapidement et efficacement dans toutes les parties de l'avion, y compris celles qui ne sont pas faciles d'accès. Le Bureau croit que le manque de procédures détaillées de lutte contre les incendies en vol et le manque de coordination dans l'entraînement des équipages pouvant leur permettre d'utiliser ces procédures constituent un manquement à la sécurité. En conséquence, le Bureau recommande que :

les organismes de réglementation pertinents examinent les normes de lutte contre les incendies en vol, notamment les procédures, l'entraînement, l'équipement et l'accessibilité aux endroits comme les espaces inoccupés, pour assurer que les équipages sont en mesure d'intervenir rapidement et d'une manière efficace et coordonnée, et de lutter contre tout incendie en vol.
Recommandation A00-20 du BST

Si d'autres manquements à la sécurité devant faire l'objet de mesures immédiates sont relevés à mesure que l'enquête se poursuit, le Bureau s'empressera de faire d'autres recommandations en matière de sécurité aérienne.

Benoît Bouchard

Président
au nom du Bureau

Annexe A

Le BST a examiné les données relatives aux incendies en vol qui se sont produits entre janvier 1967 et septembre 1998 en vue d'établir un temps moyen entre le moment où l'on détecte un incendie et celui où l'on effectue un amerrissage ou un atterrissage forcé ou que l'aéronef s'écrase. Pour représenter plus précisément le scénario du vol 111 de Swissair, les cas où l'avion s'est posé sans encombre n'ont pas été inclus dans l'échantillon. L'examen a été limité aux incendies à bord d'avions de transport commerciaux dont la masse maximale au décollage (MTOW) était supérieure à 50 000 livres. L'examen comprenait tous les incendies qui se sont déclarés à l'intérieur du fuselage (soute, cabine ou poste de pilotage). Étaient exclus tous les incendies de moteur, les incendies de logement de train d'atterrissage et les explosions (bombes).

Les données provenaient de l'OACI, du NTSB, du Aviation Safety Reporting System, du BST, des AirClaims et du Aviation Safety Network. Comme on pouvait s'y attendre, certains accidents figuraient dans plus d'une base de données.

On s'est servi des 15 cas suivants pour calculer la moyenne qui a été établie à environ 17 minutes :

Type Date Année Temps écoulé après la détection
AN-12 14 janvier 1967 <10 minutes
BAC-111 23 juin 1967 <10 minutes
Caravelle 26 juillet 1969 26 minutes
Viscount 6 mai 1970 <10 minutes
IL-62 14 août 1972 <15 minutes
IL-18 31 août 1972 <20 minutes
B-707 11 juillet 1973 ~7 minutes
B-707 3 novembre 1973 35 minutes
B-707 26 novembre 1979 17 minutes
B-737 23 septembre 1983 <20 minutes
Tu-134 2 juillet 1986 <20 minutes
B-747 26 novembre 1987 19 minutes
DC-9 11 mai 1996 <5 minutes
AN-32 7 mai 1998 <20 minutes
MD–11 2 septembre 1998 20 minutes

La recherche du BST révèle que, pour un avion dont la masse maximale au décollage (MTOW) est supérieure à 50 000 livres, il est plutôt rare qu'un incendie dans le fuselage cause un accident. Les quelques exemples pertinents dans ces cas sont répartis sur près de 31 ans.

Annexe B

Les cas suivants ont été choisis parce qu'il s'agit d'accidents où il s'est produit un incendie à bord :

  • Le 11 juillet 1973 - Après avoir signalé un incendie en vol, un B707 a effectué un atterrissage forcé. L'avion s'est immobilisé sur le ventre et a continué à brûler. L'enquête a révélé que 123 des 134 personnes à bord avaient succombé à l'inhalation de fumée. Le rapport du bureau d'enquête a recommandé des améliorations en matière de détection de la fumée et de la chaleur partout dans les avions, notamment aux endroits situés derrière le faux-plafond. Le rapport demandait également des améliorations au chapitre des communications entre les membres d'équipage et au chapitre des consignes en cas d'incendie afin de mieux préparer les membres d'équipage à intervenir lors d'un incendie en vol. (Bureau Enquêtes-Accidents, France)
  • Le 19 août 1980 - Environ 7 minutes après le décollage, l'équipage d'un L-1011 a entendu un avertissement sonore signalant la présence de fumée dans la soute arrière. Lorsque l'avion a atterri, quelque 20 minutes plus tard, le feu avait pénétré dans la cabine. Les 301 personnes à bord ont toutes perdu la vie dans l'incendie. Le bureau d'enquête a recommandé notamment le recours à des matériaux pare-feu pour empêcher les incendies de se propager, des modifications à l'entraînement des équipages aux situations d'urgence et un examen des procédures d'utilisation normalisées (SOP) de l'exploitant et des listes de vérifications en cas d'urgence. (Autorités d'enquête sur les accidents, Arabie saoudite)
  • Le 16 octobre 1993 - Environ 10 minutes après le décollage, de la fumée de plus en plus dense est apparue dans le tableau supérieur du poste de pilotage d'un MD-81. L'équipage n'a pas réussi à localiser la source de la fumée et a demandé à revenir à son aéroport de départ. Les enquêteurs ont découvert qu'un interrupteur d'alimentation de secours défectueux avait causé un feu électrique couvant. L'enquête a également établi que les procédures des listes de vérifications en cas d'urgence n'avaient pas réussi à évacuer la fumée. (Bureau fédéral allemand d'enquête sur les accidents d'aviation)
  • Le 5 septembre 1996 - Au niveau de vol (FL) 330, l'équipage de conduite d'un McDonnell Douglas DC-10F a été alerté de la présence de fumée dans la soute de la cabine lorsque les détecteurs de fumée se sont déclenchés. Après un atterrissage et une évacuation sans problème, l'incendie a persisté et a fini par détruire l'avion. L'origine de l'incendie et la manière dont il s'était propagé n'ont jamais été déterminées. (National Transportation Safety Board, États-Unis)
  • Le 9 janvier 1998 - En croisière, des voyants d'alarme se sont allumés sur les instruments de bord d'un Boeing 767 et des disjoncteurs se sont déclenchés. L'équipage s'est dérouté et l'atterrissage s'est bien passé, mais de la fumée est apparue dans la partie avant de la cabine. Les enquêteurs ont déterminé que les disjoncteurs s'étaient déclenchés à la suite d'un arc électrique et à cause de dommages causés par la chaleur à un faisceau de fils se trouvant dans le compartiment du matériel électrique et électronique. L'enquête a conclu que des particules de métal étaient présentes sur le faisceau de fils, ce qui a probablement causé l'arc électrique. (Air Accidents Investigation Branch, Royaume-Uni)
  • Le 9 novembre 1998 - Le mécanicien navigant d'un Lockheed L-1011 a observé de la fumée, des étincelles et une petite flamme en provenance d'un tableau supérieur de disjoncteurs. L'incendie a été éteint, mais plusieurs systèmes sont tombés en panne pendant la descente. L'enquête a révélé qu'un disjoncteur s'était déclenché après la formation d'un arc électrique avec un collier de fils mal posé. L'arc électrique a mis le feu à de la saleté et à des débris combustibles derrière le tableau des disjoncteurs. (National Transportation Safety Board, États-Unis)
  • Le 28 novembre 1998 - Un Boeing 747 est retourné à son aéroport de départ après une défectuosité apparente associée à la soupape d'échappement au sol du circuit de refroidissement du compartiment du matériel électrique et électronique. Les enquêteurs ont découvert plusieurs fils endommagés par des arcs électriques dans un petit faisceau de fils associé à la soupape d'échappement. Le matériau de l'enveloppe du matelas d'isolation s'est par la suite enflammé et a été consumé dans l'incendie. (Air Accidents Investigation Branch, Royaume-Uni)

Normes d'inflammabilité des matériaux

Date d'envoi : le 28 août 2001

À l'intention :

L'Honorable David Michael Collenette, c.p., député
Ministre des Transports

Mme Carol Carmody
Présidente par intérim
National Transportation Safety Board
États-Unis

M. Jean Overney, chef inspecteur
Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation Suisse

Objet : Normes d'inflammabilité des matériaux

Circonstances entourant l'accident du vol 111 de Swissair

Le 2 septembre 1998, le vol 111 de Swissair (SR 111), un avion McDonnell Douglas MD–11, était en route de New York à Genève avec 215 passagers et 14 membres d'équipage à son bord. Environ 53 minutes après le décollage, alors que l'avion se trouvait en croisière au niveau de vol 330, l'équipage a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Dans les trois minutes et demie environ qui ont suivi, l'équipage de conduite a noté la présence de fumée dans le poste de pilotage et a envoyé le signal d'urgence international « PAN, PAN » aux services de la circulation aérienne de Moncton. Le vol SR 111 a été autorisé à se rendre à l'aéroport de Halifax à partir de sa position, située à 57 milles marins au sud-ouest. Alors qu'il manœuvrait pour se préparer à atterrir à Halifax, l'équipage de conduite ne se doutait pas qu'un incendie était en train de progresser au-dessus du plafond de la partie avant de l'avion. Environ 11 minutes après que l'équipage eut noté pour la première fois la présence d'une certaine quantité de fumée visible, la situation dans le poste de pilotage a commencé à se détériorer rapidement. Le pilote automatique a débrayé, et l'enregistreur de données de vol s'est mis à enregistrer une succession rapide d'anomalies témoignant de défaillances reliées à divers circuits de l'aéronef. L'équipage de conduite a déclaré une « situation d'urgence », en précisant qu'il devait se poser immédiatement. Dans la minute qui a suivi ou presque, soit quelque 12 minutes après que la présence d'une certaine quantité de fumée visible eut été notée pour la première fois dans le poste de pilotage, les communications radio et le contact au radar secondaire ont été perdus avec le vol SR 111 alors que l'avion se trouvait en palier à environ 10 000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Quelque six minutes plus tard, l'avion s'est abîmé dans l'océan, près de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, au Canada, accident qui a provoqué la mort des 229 occupants.

Contexte

L'avion s'étant abîmé en mer, tous les dommages causés par l'incendie se sont produits en vol. L'enquête en cours (A98H0003) a permis de relever des dommages considérables causés par un incendie au-dessus du plafond suspendu, dans la partie avant de l'avion, et se prolongeant d'environ 1,5 mètre devant jusqu'à 5 mètres derrière la cloison du poste de pilotage. Bien que l'origine de l'incendie n'ait pas été déterminée, l'enquête a révélé plusieurs manquements à la sécurité dans les normes d'inflammabilité des matériaux. L'élimination de ces manquements réduirait la probabilité de pertes de vie résultant d'incendies en vol.

En août 1999, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a rendu publiques deux recommandations en matière de sécurité aérienneNote de bas de page 19. Celles-ci portaient sur des manquements à la sécurité liés à la propension des matelas d'isolation thermique et acoustique recouverts d'une enveloppe en poly(éthylène téréphtalate) (PET) métalliséNote de bas de page 20 à propager un incendie. Ces recommandations traitaient principalement des critères d'essai stipulés dans les Federal Aviation Regulations (FAR) des États-Unis en vue de la certification de tels matériaux. Par la suite, la Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis a publié des consignes de navigabilitéNote de bas de page 21 rendant obligatoire la dépose des matelas recouverts de PET métallisé des aéronefs immatriculés aux États-Unis. De plus, la FAA a proposé des modifications réglementaires qui rendraient plus rigoureux les essais de tous les matériaux d'isolation thermique et acoustiqueNote de bas de page 22.

Manquements à la sécurité

Toutefois, malgré de telles initiatives, le BST s'inquiète de voir qu'on retrouve encore des manquements à la sécurité dans les normes d'inflammabilité des matériaux, une situation qui fait courir un risque inacceptable au public voyageur. En premier lieu, dans une série de recommandations en matière de sécurité aérienne rendue publique en décembre 2000 et intitulée Lutte contre les incendies en vol, le Bureau a déclaré que les normes d'inflammabilité des matériaux destinés à être utilisés à bord d'aéronefs faisaient partie intégrante de tout « système » de lutte contre les incendies en vol. Le Bureau constate avec une certaine inquiétude que les normes d'inflammabilité pour certains matériaux utilisés dans la partie pressurisée d'un aéronef sont insuffisantesNote de bas de page 23. En second lieu, et malgré plusieurs initiatives visant à pallier les anomalies des fils électriques (y compris les mesures prises à la suite de la publication de l'avis de sécurité aérienne A980031-1 du BST en date du 22 décembre 1998), le Bureau est d'avis que les critères des essais en vue de la certification des fils électriques des aéronefs ne tiennent pas suffisamment compte du risque que des fils électriques rompus ne provoquent un incendie ou le propage. En troisième lieu, selon des indices permettant de croire que la défaillance de certains circuits d'aéronef, comme le circuit d'oxygène de l'équipage, pourrait aggraver la situation lors d'un incendie, il y a tout lieu de se demander si l'analyse des défaillances des systèmes du point de vue de la sécurité n'est pas insuffisante.

En résumé, les recommandations en matière de sécurité aérienne formulées par le Bureau portent sur les manquements à la sécurité suivants :

  • l'insuffisance des normes d'inflammabilité de certains matériaux destinés à être utilisés à bord des aéronefs;
  • l'insuffisance des essais en vue de la certification des fils électriques des aéronefs;
  • le fait que l'analyse actuelle de la sécurité des systèmes ne tient pas suffisamment compte des conséquences possibles de la défaillance de divers systèmes pouvant être provoquée par un incendie à bord.
Normes d'inflammabilité des matériaux
Introduction

L'enquête s'est intéressée aux caractéristiques d'inflammabilité des matériaux présents dans les parties de l'avion du vol SR 111 endommagées par l'incendie ainsi qu'à la réglementation et aux lignes directrices qui s'appliquent à la certification de ces matériaux. L'anomalie la plus importante qui a été constatée en matière d'inflammabilité des matériaux portait sur les mauvaises caractéristiques d'inflammabilité des matelas d'isolation thermique et acoustique recouverts de PET métallisé. D'autres matériaux, dont il est question à l'annexe A, présentent également des caractéristiques de propagation du feu indésirables. L'analyse permettant d'établir comment ces matériaux—pris isolément ou ensemble—ont pu contribuer au déclenchement et à la progression de l'incendie à bord du vol SR 111 est une opération complexe qui est toujours en cours. Toutefois, les caractéristiques d'inflammabilité des matériaux concernés ainsi que la vitesse à laquelle les dommages causés par l'incendie se sont produits, soulèvent des questions quant aux normes d'inflammabilité actuelles auxquelles doivent répondre les matériaux utilisés dans la fabrication de produits destinés à être utilisés à bord des aéronefs.

Dans la majorité des cas, les autorités de l'aviation civile (AAC) ont chacune leurs propres normes d'inflammabilité des matériaux et, d'un pays à l'autre, il peut y avoir de légères différences réglementaires entre les diverses AAC. Toutefois, les normes s'inspirent de celles décrites dans les FAR, ou elles leur ressemblent beaucoup, et c'est pourquoi la présente discussion se limite aux normes d'inflammabilité des matériaux spécifiées dans les FAR. Ces normes réglementaires constituent le minimum à respecter en vue de la certification des aéronefs. Bien que les instances de réglementation ne l'exigent pas, les constructeurs ont pour habitude de soumettre à des essais supplémentaires les matériaux utilisés dans leurs produits.

Essais obligatoires

En général, chaque matériau d'aéronef doit subir des essais pour démontrer sa tendance à s'enflammer et à propager une flamme. La FAA a élaboré une série d'essais qui, en principe, sont censés être représentatifs du genre d'incendie auquel un matériau donné pourrait être exposéNote de bas de page 24. Comme condition préalable à la certification, la FAA s'attend à ce que chaque matériau soit soumis à un ou à plusieurs essais de tenue au feuNote de bas de page 25. Le nombre et la rigueur des essais d'inflammabilité que doit subir un matériau donné est largement fonction de trois critères : les endroits où ce matériau est censé être utilisé à bord de l'aéronef, le type de matériau et la quantité de ce matériau à bord de l'aéronef. Par exemple, les matériaux utilisés à un certain endroit, comme dans les cloisons qui séparent la partie intérieure occupée de la cabine, peuvent être assujettis à des essais plus rigoureux que les matériaux utilisés ailleurs, comme dans certains espaces inoccupés. De plus, des pièces construites à partir d'un type de matériau donné, comme les élastomères, peuvent être soumises à des essais moins stricts, peu importe l'endroit où elles sont censées être installées. Enfin, plus un matériau donné est présent à bord d'un aéronef (qu'il s'agisse de sa quantité comme telle ou de sa présence dans de gros composants), plus les essais nécessaires à la certification de ce matériau sont exigeants.

Recherche et développement en la matière

Les règlements se fondent sur des travaux permanents menés en recherche et développement (R&D), lesquels visent constamment à améliorer la sécurité aérienne en cas d'incendie. Les travaux de R&D portent essentiellement sur trois facteurs : l'analyse des accidents et des incidents, la technologie naissante et les nouvelles conceptions des aéronefsNote de bas de page 26. Bien que ces travaux soient d'envergure internationale, historiquement parlant, la FAA a toujours joué le rôle de chef de file, une conséquence directe du mandat qui lui a été confiéNote de bas de page 27. Les normes d'inflammabilité des matériaux font partie intégrante de ces travaux de R&D.

Les règlements actuels sont le résultat des efforts déployés au cours de nombreuses années pour réussir, malgré des ressources de R&D limitées, à maximiser les améliorations apportées à la sécurité. En 1975-1976, la FAA a lancé une étude visant à déterminer la faisabilité de deux approches de base, et à en comparer les avantages relatifs, afin d'améliorer la sécurité en cas d'incendie dans le fuselage des avions gros porteurs modernesNote de bas de page 28. Deux approches ont été examinées dans le cadre de cette étude :

  • l'application des plus récentes techniques disponibles portant sur des systèmes capables de détecter et de combattre rapidement les incendies (appelés « systèmes de gestion des incendies »);
  • l'utilisation, à l'intérieur des cabines, de matériaux améliorés ayant d'excellentes qualités ignifuges et dégageant peu de fumée et de gaz toxiques.

L'étude a permis de conclure que chacune de ces deux approches avait ses avantages et ses limites, et qu'une approche favorisant un système de gestion des incendies combiné à des améliorations sélectives des matériaux pourrait être à même d'offrir le meilleur moyen de protection rapide contre les incendies dans tous les casNote de bas de page 29.

En fin de compte, les travaux de R&D n'ont pas été axés pleinement sur cette approche combinée, et seules quelques recherches subséquentes se sont intéressées au concept d'élaboration d'un système embarqué de gestion des incendiesNote de bas de page 30. On a pensé que les incendies en vol étaient rares et qu'ils prenaient généralement naissance dans des endroits cachés ou inaccessibles et que, par conséquent, un recours limité au concept de gestion des incendies devrait suffire. Il a été conclu que la meilleure protection contre les incendies en vol serait obtenue par l'utilisation ciblée de matériaux ayant des propriétés anti-feu et de résistance à l'inflammation poussées. On est arrivé à la conclusion que l'utilisation de tels matériaux, combinée à un usage sélectif de techniques de détection rapides et fiables et de techniques d'extinction efficaces, devrait offrir le niveau de protection nécessaire. Les travaux de R&D en ce qui a trait aux incendies en vol ont donné lieu à une nette amélioration du niveau de protection contre les incendies, notamment dans les soutes et les bloc toilettes.

Bien qu'on ait pris certaines mesures, comme celles dont il a été question plus haut, pour réduire les risques associés aux incendies en vol, au cours des années 80, les travaux de R&D de la FAA ont été principalement consacrés à l'augmentation des possibilités de survie à un incendie consécutif à un accident. Ces travaux ont été basés et se basent toujours sur un scénario après accident dans lequel on trouve un fuselage intact tout à côté d'un incendie alimenté par une source de carburant non confinée. Des essais de combustion grandeur nature faisant appel à ce scénario ont conclu qu'un incendie consécutif à un accident à l'intérieur d'un aéronef serait essentiellement alimenté par la combustion des matériaux à l'intérieur de la cabine. Cette recherche de la FAA a également conclu que la perte des moyens de tout survivant potentiel serait surtout fonction des gaz toxiques produits par un phénomène appelé « embrasement généralNote de bas de page 31 ». Lorsque survient l'embrasement général, les conditions se détériorent rapidement pour atteindre un niveau auquel la survie est peu probableNote de bas de page 32. On en a déduit—quoique cette déduction ne soit pas acceptée par tous—que la menace que représente pour les occupants la fumée et les gaz toxiques / irritants résultant de la combustion, avant qu'il y ait embrasement général, ne justifie pas l'adoption de normes en matière de toxicité des matériaux. Par conséquent, les travaux de R&D ultérieurs se sont concentrés sur l'élaboration de meilleures normes d'inflammabilité relatives à l'aménagement intérieur des cabines pour retarder l'apparition de l'embrasement général de façon à augmenter les possibilités de survie. Ces travaux ont abouti à de nettes améliorations des normes d'inflammabilité de certains matériaux de cabine bien précis, comme les revêtements ignifuges des coussins de siège et les panneaux qui dégagent peu de chaleur ou de fumée, ou les deux.

Conséquences des règlements actuels sur les normes d'inflammabilité

À la lumière de ce qui précède, en vertu de la réglementation actuelle de la FAA, les normes d'inflammabilité des matériaux les plus rigoureuses ne s'appliquent qu'aux panneaux de grande surface (comme les parois latérales, les plafonds, les casiers porte-bagages et les cloisons) qui se trouvent dans les parties occupées d'un aéronef. Les normes d'inflammabilité des matériaux utilisés dans le reste de l'intérieur d'un aéronef sont moins rigoureuses.

Les FAR spécifient le niveau de protection incendie exigé, en fonction surtout de l'emplacement du matériau à l'intérieur de l'aéronef. Pour la plupart des matériaux employés à l'extérieur des parties occupées de la cabine, les critères de rendement sont définis par « l'essai au bec Bunsen à l'horizontale » pour matériaux divers, tel qu'il figure à l'Annexe F de la Partie I de la Partie 25 des FARNote de bas de page 33. Contrairement à d'autres essais de tenue au feu, lesquels mesurent à la fois la durée d'inflammation et la longueur consumée de manière à établir la capacité d'auto-extinction du matériau, l'essai de combustion à l'horizontale ne mesure que le taux de combustion du matériau. Dans le cas d'un matériau soumis uniquement à l'essai de combustion à l'horizontale, la seule caractéristique d'inflammabilité connue se résume à savoir s'il va se consumer à un taux prédéterminé ou au-dessousNote de bas de page 34. Si de tels matériaux ne sont pas tenus de pouvoir s'éteindre d'eux-mêmes, il faut donc en conclure qu'ils sont inflammablesNote de bas de page 35 et capables d'alimenter ou de propager un incendie. Qui plus est, comme les normes d'inflammabilité les plus rigoureuses ne s'appliquent qu'aux panneaux de grande surface qui se trouvent dans les parties occupées de la cabine, il y a tout lieu de croire que les matériaux les plus inflammables vont se trouver dans les endroits éloignés, cachés ou inaccessibles d'un aéronef. Et c'est précisément dans ces endroits que diverses sources électriques de mise à feu risquent de déclencher un incendie en vol et c'est également à ces endroits qu'il y a le moins de moyens de défense en ce qui a trait à la détection et à l'extinction des incendies.

Aperçu des exigences actuelles des FAR

Voici quel est le classement hiérarchique de l'inflammabilité des matériaux en vertu des exigences actuelles des FAR :

  • les matériaux inflammables ayant un taux de combustion acceptable;
  • les matériaux qui peuvent s'éteindre d'eux-mêmes et qui ont une durée d'inflammation et une longueur de partie consumée acceptables;
  • certains matériaux de cabine bien précis qui peuvent s'éteindre d'eux-mêmes en ne dégageant pas plus qu'une quantité prédéterminée de chaleur et de fumée.

Par conséquent, de nombreux matériaux utilisés à bord des aéronefs à l'heure actuelle sont inflammables ou répondent à des critères de combustion établis.

Essais de tenue au feu additionnels

Seul un nombre limité de matériaux, dont la plupart sont utilisés dans la cabine, sont certifiés à l'aide d'essais additionnels portant sur la production de fumée et le dégagement de chaleur. Pourtant, certains incendies en vol ont démontré que la fumée peut envahir la partie occupée d'un aéronef et ainsi compromettre la capacité de l'équipage à prendre les mesures qui s'imposent pour faire face à la situation d'urgence (voir les exemples à l'annexe B). Qui plus est, en vertu de la réglementation actuelle, aucun matériau n'est tenu de subir, en vue de la certification, un essai de tenue au feu mesurant la toxicité. À part l'obligation de répondre à une norme de durée d'inflammation et de longueur consumée, il n'existe aucune exigence réglementaire visant à déterminer des caractéristiques additionnelles d'inflammabilité pour bon nombre des matériaux utilisés dans les aéronefs.

L'annexe C renferme des renseignements sur la façon dont les matériaux qui ne font pas l'objet d'essais visant à déterminer leurs caractéristiques d'inflammabilité, comme le dégagement de chaleur, la production de fumée et la toxicité, peuvent attiser un incendie en vol. Néanmoins, ces caractéristiques d'inflammabilité étant le sous-produit du processus de combustion, le Bureau est d'avis que le meilleur moyen de réduire ces risques supplémentaires est d'éliminer l'utilisation de tout matériau qui peut alimenter ou propager un incendie.

Résumé

Les normes actuelles d'inflammabilité des matériaux permettent l'utilisation de matériaux inflammables ainsi que de matériaux qui propagent une flamme dans des limites prédéterminées. En plus des risques d'incendie comme tel, la majorité de ces matériaux créent des dangers additionnels, car il n'existe aucun règlement exigeant que d'autres caractéristiques d'inflammabilité, comme le dégagement de chaleur, la production de fumée et la toxicité, soient mesurées. Actuellement, les essais les plus stricts de tenue au feu s'appliquent aux matériaux situés dans les parties accessibles de la cabine. Il en résulte que certains des matériaux les plus inflammables dans les parties pressurisées d'un aéronef se trouvent dans des endroits cachés, éloignés ou inaccessibles. Or, ces endroits risquent fort d'être touchés par des incendies en vol qui pourraient s'avérer impossibles à maîtriser.

Le Bureau est d'avis que l'utilisation d'un matériau, peu importe l'endroit où il se trouve, son type ou sa quantité, qui alimente ou propage un incendie dans des scénarios réalistes d'inflammationNote de bas de page 36, constitue un risque inacceptable, et que, à tout le moins, les matériaux utilisés dans la construction de tout produit aéronautique ne devraient ni alimenter ni propager un incendie dans tout milieu opérationnel réaliste. C'est pourquoi le Bureau recommande que :

en ce qui concerne la partie pressurisée d'un aéronef, les normes d'inflammabilité des matériaux servant à la fabrication de tout produit aéronautique soient révisées, en se fondant sur des scénarios d'inflammation réalistes, de manière à empêcher l'utilisation de tout matériau qui alimente ou propage un incendie.
Recommandation A01-02 du BST

Exigences en matière de test d'inflammabilité des matériaux du câblage électrique des aéronefs

Les gros aéronefs modernes peuvent contenir plus de 250 kilomètres de fils électriques de différentes tailles et recouverts de matériaux isolants différents. Certains circuits de commandes de vol numériques font appel exclusivement à des interconnexions de fils électriques, plutôt qu'aux câbles et aux poulies que l'on trouvait dans les appareils de conception plus ancienne. La quantité et l'importance du câblage électrique des aéronefs vont en augmentant.

Au cours d'un examen détaillé de l'épave de l'avion du vol SR 111, du cuivre fondu résultant d'un phénomène d'arc électrique a été trouvé sur 20 fils électriques de cuivreNote de bas de page 37. L'importance de ces arcs, quant à savoir s'ils ont ou non déclenché l'incendie à bord de l'avion du vol SR 111, est encore à l'étude, et cette possibilité n'a pas été écartée. Un examen des données rassemblées par la FAA, l'Airline Pilots Association et Boeing, montre que les circuits électriques ont constitué un facteur dans quelque 50 % de tous les événements aéronautiques où il y a eu de la fumée ou un incendie, le câblage électrique étant quant à lui cité dans quelque 10 % de ces événements. Des exemples significatifs de tels événements sont présentés à l'annexe D.

Contrairement à la plupart des matériaux utilisés dans la construction de produits aéronautiques, lesquels sont passifs jusqu'à ce qu'ils se retrouvent dans un incendie, une défaillance du câblage électrique d'un aéronef peut pour sa part jouer un rôle actif dans le déclenchement d'un incendie. La défaillance du matériau isolant d'un fil électrique sous tension peut entraîner l'apparition d'un arc électrique à haute température et l'inflammation des matériaux voisins. Toutefois, malgré la possibilité que les fils déclenchent un incendie, un « essai au bec Bunsen à 60°Note de bas de page 38 » est le seul essai d'inflammabilité des matériaux exigé en vue de la certification des fils électriques d'un aéronef, y compris du matériau isolant qui les recouvre. Cet essai est conçu pour mesurer la longueur consumée et le temps d'extinction du matériau isolant d'un fil électrique donné. Dans les faits, le seul critère de rendement en matière d'inflammabilité des matériaux qui est exigé du matériau isolant des fils électriques d'un aéronef consiste à déterminer la tenue au feu d'un fil électrique simple qui n'est pas sous tension face à un incendie en cours. Il s'agit essentiellement de la même caractéristique d'inflammabilité de base qui s'applique à la plupart des matériaux passifs utilisés dans la partie pressurisée de l'aéronef.

En général, le fil électrique d'un aéronef qui déclenche un phénomène d'arc a subi certains dommages antérieurs. Des dommages comme des criques, des coupures, un étirement, de la contamination et de l'usure par frottement, peuvent provoquer une rupture du matériau isolant, et le conducteur se trouve alors à nu. Bien qu'un tel dommage soit jugé sérieux au point de nécessiter une réparation, il n'empêche qu'il peut passer inaperçu dans bien des cas. Un conducteur peut rester ainsi indéfiniment sans nuire ou presque aux performances d'un aéronef. Ce n'est que lorsque le conducteur à nu est mis en court-circuit qu'un phénomène d'arc électrique se produit.

Malgré toute l'attention spéciale qui est portée à la conception, à la pose et à la maintenance des câblages électriques d'un aéronef, des anomalies peuvent apparaître dans les aéronefs. Le 22 décembre 1998, le BST a émis l'avis de sécurité aérienne 980031-1, lequel détaille les diverses anomalies du câblage électrique des MD–11 constatées au cours de nombreuses inspections de ce type d'aéronef. On y trouvait des fils électriques et des fils de mise à la masse usés par frottement, criqués, cassés ou coupés; des incohérences dans le cheminement des fils et des faisceaux de fils; des connexions de borne pas assez serrées; des rayons de pliage beaucoup trop faibles; enfin des guide-fils électriques non scellés. Dans le cadre de son MD–11 Wiring Corrective Action Plan, la FAA a par la suite publié un certain nombre de consignes de navigabilité relatives aux fils électriques (pour divers aéronefs, y compris le MD–11).

De plus, la FAA a lancé un projet d'inspection intrusive des aéronefs de transport (Transport Aircraft Intrusive Inspection Project ) au sein de son Aging Transport Systems Rulemaking Advisory Committee. Dans le cadre de ce projet, on a inspecté six avions de la catégorie transport récemment retirés du service et provenant de divers avionneurs et exploitants. Au cours de cette étude, on a relevé des fils abîmés à cause de réparations ou d'épissures mal faites, des fils endommagés par la chaleur ou brûlés, des dommages dus aux vibrations ou de l'usure par frottement, de l'isolant criqué, des traces d'arcs électriques et un décollement de l'isolantNote de bas de page 39. Le rapport conclut qu'il y a des risques associés à ces conditions dégénératives non corrigées et recommande diverses options pour prévenir ou réduire de telles défaillances. Si l'augmentation de la fréquence et de la qualité des inspections de maintenance est une option envisageable, il n'en demeure pas moins que comme la plupart du câblage électrique est constitué de faisceaux de fils qui passent dans des endroits cachés ou inaccessibles, il est difficile de vérifier l'état du câblage électrique d'un aéronef pendant la maintenance périodique avec l'équipement et les procédures actuelles. On peut donc s'attendre à ce que des défaillances de fils pouvant provoquer le déclenchement d'un incendie continuent de se produire, tant que l'équipement et les méthodes d'inspection de maintenance des fils n'auront pas été perfectionnés.

La protection électrique du câblage d'un aéronef repose sur un ensemble de dispositifs protégeant les circuits. Les dispositifs les plus courants sont les disjoncteurs, lesquels sont conçus pour protéger le circuit de distribution électrique, à savoir les fils, contre toute surcharge électrique. Toutefois, les disjoncteurs présentent des limites inhérentes à leur conception. Il se peut qu'une surcharge causée par la défaillance d'un fil ne conduise pas le disjoncteur à mettre le circuit hors tension, ce qui peut créer une chaleur intense et un risque d'inflammation. Bien que les travaux de R&D se poursuivent en vue d'améliorer les dispositifs de protection des circuits électriques, il existe actuellement des parties du câblage électrique des aéronefs qui peuvent ne pas être protégées contre toutes les surcharges électriques.

Malgré les efforts déployés au niveau de la qualité de la conception, de la pose et de la maintenance du câblage électrique, il n'empêche que des anomalies touchant les fils vont probablement continuer de se produire et pourraient entraîner la défaillance de certains fils. Bien que tout fil soit capable de produire un arc électrique dans des circonstances données, la dynamique entourant la façon dont un fil va subir une défaillance pendant un arc électrique dépend largement de la composition de l'isolant de ce filNote de bas de page 40. Il serait fort utile de connaître la dynamique de défaillance d'un fil dans des conditions réalistes compte tenu des conséquences connues de la défaillance d'un fil électrique sous tension. La FAA reconnaît plusieurs essais de défaillance (comme la procédure d'essai de repérage d'un arc en milieu sec), mais elle n'exige aucun essai de défaillance comme base en vue de la certification d'un fil électrique.

Le Bureau est d'avis que, eu égard à la probabilité de défaillances de fils électriques dans un aéronef et à la possibilité qu'une telle défaillance déclenche un incendie, l'absence d'une exigence en vue de la certification mesurant les caractéristiques de défaillance d'un fil et précisant les normes de rendement dans des conditions d'utilisation réalistes, constitue un risque. C'est pourquoi le Bureau recommande que :

un régime d'essais en vue de la certification visant à évaluer les caractéristiques de défaillance des fils électriques dans des conditions d'exploitation réalistes et par rapport à des critères de rendement établis soit rendu obligatoire afin de réduire les risques d'inflammation.
Recommandation A01-03 du BST

Évaluation des systèmes : considérations liées à une meilleure résistance au feu

Divers matériaux, y compris les embouts des circuits d'oxygène et de climatisation du MD–11, ont montré des caractéristiques de propagation d'incendie loin d'être idéales, comme il est précisé à l'annexe A. Une défaillance prématurée soit du capuchon en aluminium utilisé dans le circuit d'oxygène de l'équipage, soit des embouts en élastomère des gaines du circuit de climatisation, aurait probablement attisé l'incendie en vol à bord de l'avion du vol SR 111. En vertu de la réglementation actuelle, l'emplacement et l'utilisation prévus d'un matériau doivent être identifiés afin que l'on puisse déterminer quels sont les essais de tenue au feu exigés en vue de la certification de ce matériau. Si un matériau est destiné à être utilisé dans une zone désignée comme une zone de feu (par exemple, un compartiment réacteur), il doit présenter une meilleure résistance afin de supporter les conditions plus rigoureuses inhérentes à cet environnement et ainsi retarder une défaillance susceptible de contribuer à un incendie en coursNote de bas de page 41. Dans la plupart des autres parties d'un aéronef, il n'y a aucune exigence visant à déterminer si la défaillance d'un matériau donné attiserait ou non un incendie en cours. Cependant, le choix de matériaux inadaptés peut entraîner des ruptures prématurées dans certains circuits—oxygène, hydraulique, électrique, conditionnement d'air, etc.—susceptibles d'attiser un incendie en vol.

C'est une pratique bien établie dans l'industrie de l'aviation d'envisager les conséquences de la défaillance d'un système pendant le processus de certification. La FAR 25.1309 exige la tenue d'une analyse de sécurité d'un système dans le cadre du processus de certification du système en question. Une telle analyse a pour but de confirmer que le système a bien été conçu et posé en faisant appel à une méthode à sûreté intégréeNote de bas de page 42. Cette approche garantit que des défaillances de l'équipement n'empêcheront pas un aéronef de voler et de se poser en toute sécurité. En règle générale, cette analyse ne comprend pas d'évaluation des conséquences de la défaillance d'un système par suite d'un incendie. À titre d'exemple, la certification de circuits d'oxygène dont la conception fait appel à des matériaux ayant des propriétés différentes, sans égard à la façon dont cette combinaison pourrait nuire à l'intégrité du système en cas d'exposition à un incendie, peut permettre à une défaillance latente de persister. De même, si un circuit de conditionnement d'air est constitué de matériaux différents (par exemple des gaines en aluminium munies d'embout en élastomère), il se peut qu'un incendie en vol provoque la défaillance d'un embout en élastomère avant celle des conduites en aluminium de ce même circuit. La défaillance du matériau de l'embout pourrait se traduire par l'arrivée d'air forcé dans un incendie en cours, ce qui aurait pour effet d'attiser ce dernier. Une évaluation des conséquences d'une défaillance d'un système en présence d'un incendie, et la conception de systèmes de bord de façon à retarder des défaillances qui risquent fort d'intensifier un incendie en vol, offriraient un moyen de défense additionnel en limitant l'envergure et la progression des incendies en vol.

Le Bureau est d'avis que la défaillance de matériaux dans certains systèmes de bord provoquée par un incendie risque d'intensifier le processus de combustion et d'aggraver les conséquences d'un incendie en vol. C'est pourquoi le Bureau recommande que :

comme condition préalable à la certification, tous les systèmes de bord situés dans la partie pressurisée d'un aéronef, y compris leurs sous-systèmes, leurs composants et leurs branchements, soient évalués afin de s'assurer que les systèmes susceptibles d'attiser un incendie en cours s'ils subissent une défaillance sont conçus de façon à réduire le risque de défaillance par suite d'un incendie.
Recommandation A01-04 du BST

Si d'autres manquements à la sécurité devant faire l'objet de mesures immédiates sont relevés à mesure que l'enquête se poursuit, le Bureau s'empressera de faire d'autres recommandations en matière de sécurité aérienne.

Benoît Bouchard

Président
au nom du Bureau

Annexe A

Les essais d'inflammabilité effectués dans le cadre de l'enquête A98H0003 ont révélé que certains matériaux certifiés utilisés à bord du MD–11 avaient des caractéristiques de propagation d'un incendie qui n'étaient pas idéales :

  • Système de fermeture à bouclettes de nylon : le matériau utilisé dans ce système de fixation léger se retrouve dans une multitude d'applications dans tout l'avion. Il sert tant dans des zones occupées que dans des endroits peu accessibles de l'avion. Aucune documentation indiquant précisément quels essais ont été utilisés en vue de la certification de ce matériau n'a été retrouvée. Des essais ultérieurs effectués par le BST et la FAA ont montré que ce matériau présentait des caractéristiques inacceptables de propagation des flammes, qu'il ait été testé seul ou qu'il ait servi dans un montage type avec le matériau constituant la mince pellicule recouvrant les matelas d'isolation thermique et acoustique.

  • Élastomères : de tels matériaux sont constitués de divers polymères et possèdent les propriétés élastiques du caoutchouc naturel. Parmi d'autres applications, les élastomères servent à bord du MD–11 à boucher les ouvertures des gaines non utilisées du circuit de conditionnement d'air. Bien qu'on n'ait trouvé aucun document de certification, l'Annexe F de la Partie I de la Partie 25 des FAR exige que de tels élastomères soient testés conformément à l'essai au bec Bunsen à l'horizontale. Des essais effectués par le BST et la FAA ont révélé que, même si ce genre de matériau réussissait à l'essai à l'horizontale, l'essai au bec Bunsen à la verticale avait été qualifié « d'échec ».

  • Au début, lorsque des échantillons de l'élastomère des embouts ont été testés à l'aide de l'essai au bec Bunsen à la verticale, ils ont rougeoyé sans prendre feu. Ce matériau serait donc réputé conforme, car les critères de réussite pour cet essai permettent au matériau de rougeoyer. Toutefois, en poursuivant l'essai, on a découvert que le matériau rougeoyant finissait par prendre feu jusqu'à être entièrement consumé.

  • Embouts en aluminium : les conduites originales du circuit d'oxygène du MD–11 étaient constituées exclusivement de tuyaux d'aluminium. Le circuit comporte une conduite munie d'un embout qui est conçue pour servir dans une configuration différente du MD–11. En raison de difficultés de montage éprouvées pendant la construction de l'avion, l'avionneur d'origine a remplacé la conduite d'aluminium par une autre en acier pendant la production de l'appareil. Pour des raisons indéterminées, l'embout en aluminium n'a pas été remplacé par un autre en acier à ce moment-là. Inquiet du comportement que pourrait avoir cette configuration hétérogène en présence d'une température élevée, le BST a mené plusieurs expériences. Pendant les essais, le circuit a fui et, dans certains cas, l'embout s'est complètement rompu, permettant à l'oxygène de s'écouler librement. Une telle fuite d'oxygène pendant un incendie en vol risque d'avoir des conséquences catastrophiques.

  • Ruban de matelas isolant : certains montages comportant le matériau constituant la mince pellicule recouvrant les matelas d'isolation thermique et acoustique exigent l'emploi de ruban adhésif. En général, le ruban est constitué d'un matériau similaire à celui de l'enveloppe du matelas isolant. Pendant la fabrication, bien que le matériau recouvrant le matelas ait dû subir l'essai au bec Bunsen à la verticale, aucun essai d'inflammabilité n'a été exigé pour le ruban de type 4 répondant à la spécification de matériau 1984 de Douglas qui était présent à bord de l'avion en question. Des essais ultérieurs de tenue au feu effectués par le BST et la FAA ont montré que ce type de ruban présentait des caractéristiques inacceptables de propagation d'un incendie.

  • Mousse de polyéthylène : de tels matériaux servent dans diverses applications dans tout l'avion, sous des formes et des dimensions différentes. Les essais préliminaires sur quelques échantillons de ce type de matériau ont montré qu'il avait tendance à propager les flammes. Aucune documentation indiquant quels critères avaient servi pour la certification de ces matériaux n'a été retrouvée. D'autres essais sont prévus afin d'évaluer toutes les propriétés d'inflammabilité de ce matériau.

  • Gaines en composite : des composants du circuit de conditionnement d'air de l'avion en question se trouvant dans la partie fortement endommagée par l'incendie étaient faits d'un matériau composite. Les enquêteurs sont intéressés à déterminer quels sont les essais d'inflammabilité auxquels avait été soumis ce matériau pendant le processus de certification. Le BST et la FAA préparent des essais de tenue au feu dans le but de déterminer les propriétés d'inflammabilité de ce matériau.

Annexe B

Voici quelques cas d'incendie à bord d'aéronefs dans lesquels la visibilité dans le poste de pilotage était en cause :

  • Le 18 janvier 1990, le poste de pilotage d'un MD-80 a été envahi par la fumée, à cause de l'isolant d'un fil électrique ayant surchauffé. La borne du câble d'alimentation de phase B de la génératrice gauche avait fondu sous l'action d'un puissant arc électrique. De plus, de la fumée est apparue lorsque le métal fondu s'est répandu sur le matériau voisin et l'a enflammé. (National Transportation Safety Board des États-Unis)

  • Le 16 octobre 1993, de la fumée d'origine électrique a pénétré par l'arrière du panneau supérieur dans le poste de pilotage d'un MD-81 qui venait de se mettre en palier au niveau de vol 180. Peu après, la fumée est devenue si épaisse que les pilotes n'ont pas pu lire les listes de vérifications d'urgence ni les procédures d'approche aux instruments. Les enquêteurs ont déterminé que la fumée avait été provoquée par un important feu qui couvait au niveau de l'interrupteur d'alimentation de secours. (Bureau allemand d'enquêtes sur les accidents d'aviation)

  • Le 8 août 2000, un incendie en vol s'est déclaré dans un DC-9; le commandant de bord et le copilote avaient senti une odeur de fumée peu après le décollage. L'équipage de conduite a immédiatement mis les masques à oxygène et les lunettes anti-fumée. La fumée est devenue très épaisse et a empêché l'équipage de bien voir les instruments du poste de pilotage et les références visuelles extérieures. L'enquête a permis de découvrir d'importants dommages causés par la chaleur dans les fils et l'isolant du panneau électrique situé derrière le siège du commandant de bord. La chaleur a été telle qu'elle a boursouflé l'apprêt sur le revêtement du sommet du fuselage. (National Transportation Safety Board des États-Unis)

  • Le 1er octobre 2000, un incendie d'origine électrique a pris naissance à bord d'un MD-80 quelque 15 minutes après le décollage, le poste de pilotage a été envahi par la fumée, et un violent bruit sec accompagné d'étincelles a retenti dans la région du strapontin. L'examen de l'avion a permis de relever un trou dû à un incendie mesurant 2 pouces sur 1 1/2 pouce dans la paroi du strapontin gauche. Plusieurs fils électriques de fort calibre étaient soudés ensemble de l'autre côté de la paroi. Il y avait également quatre disjoncteurs de 50 ampères qui s'étaient déclenchés sur le panneau des disjoncteurs du circuit gauche situé derrière le siège du pilote. (National Transportation Safety Board des États-Unis)

Annexe C
Dégagement de chaleur

Le dégagement de chaleur est une mesure de la quantité de chaleur émise par un matériau qui brûle. La rapidité avec laquelle un incendie atteint l'embrasement général dépend du taux de la chaleur dégagée par les combustibles présents. Certains matériaux destinés à être utilisés dans les parties occupées de la cabine doivent montrer qu'ils ne dépasseront pas un taux de dégagement de chaleur maximum et un dégagement total de chaleur maximum bien précis. Cette exigence est destinée à retarder l'apparition de l'embrasement général en cas d'incendie consécutif à un accident, puisqu'il y a corrélation directe entre la chaleur que dégage un matériau et sa contribution à l'apparition de l'embrasement général. Par contre, une grande partie des matériaux inflammables qui risquent d'être mis en cause dans un incendie en vol se trouvent dans des endroits peu accessibles, comme les « espaces inoccupés ». Mis à part les questions d'écoulement d'air, de tels compartiments peuvent favoriser l'accumulation de gaz chauds et de sous-produits de combustion, créant par le fait même des conditions propices à un embrasement général.

En vertu des règlements actuels, les matériaux autres que des matériaux de cabine bien précis n'ont pas à subir le moindre essai de dégagement de chaleur. On peut en déduire qu'aux yeux des autorités de réglementation la nécessité de retarder l'embrasement général en cas d'incendie dans ces endroits inoccupés ne passe pas comme une amélioration à la sécurité justifiant l'adoption de nouveaux règlements. Le fait d'exiger que tous les matériaux respectent une norme en matière de dégagement de chaleur augmenterait la résistance à l'embrasement général et aurait des avantages comparables à ceux déjà tirés des exigences qui s'appliquent à certains matériaux de cabine bien précis. Le Bureau s'inquiète de l'absence de normes plus exhaustives visant à limiter la quantité de chaleur pouvant se dégager à la suite de la combustion de matériaux à l'intérieur d'un aéronef; il est d'avis que les risques qui en découlent pourraient être réduits par l'élimination de l'emploi de matériaux qui alimentent ou propagent un incendie.

Production de fumée

Les exigences en matière de production de fumée sont conçues pour mesurer la quantité de fumée que dégagent des matériaux qui brûlent. Le principal objectif visé par la limitation de la production de fumée consiste à maintenir la visibilité pour permettre aux occupants d'évacuer en cas d'incendie après un accident. Par conséquent, les essais relatifs à la fumée ne sont généralement exigés que pour les seuls matériaux utilisés dans les parties occupées de la cabine. Pour la majorité des matériaux se trouvant dans le reste de l'aéronef, il n'existe aucune exigence relative à des essais visant à mesurer la production de fumée. Des incendies en vol, comme ceux donnés à titre d'exemples à l'annexe B, montrent que la fumée peut envahir les parties occupées de l'aéronef, ce qui risque d'empêcher l'équipage de prendre les mesures qui s'imposent dans une telle situation d'urgence. À plusieurs égards, on ignore quel serait l'effet sur les passagers d'une exposition prolongée à la fumée provoquée par un incendie en vol auquel il serait par ailleurs possible de survivre. Comme il n'existe actuellement aucune disposition conçue pour isoler les passagers d'une telle fumée, on peut s'attendre à ce que la visibilité soit réduite au cours de l'évacuation au sol qui va s'ensuivre. L'existence d'une norme de certification limitant la production de fumée pour tous les matériaux d'un aéronef augmenterait la visibilité et les possibilités de survie.

Le Bureau s'inquiète de l'absence de normes en matière de production de fumée inhérente à la combustion de matériaux d'aéronef; il est d'avis que les risques liés à la fumée pourraient être réduits par l'élimination de l'emploi de matériaux qui alimentent ou propagent un incendie.

Toxicité

Les matériaux conçus pour être utilisés dans les aéronefs ne sont pas tenus, en vertu de la réglementation, de respecter la moindre norme de toxicité, bien que les constructeurs puissent imposer leurs propres critères de toxicité. Les exigences réglementaires et les stratégies se sont concentrées sur les moyens d'améliorer les possibilités de survie des passagers en cas d'incendie consécutif à un accident. Pour ce faire, on exige que certains matériaux de cabine bien précis respectent des normes de dégagement de chaleur qui permettent de retarder l'apparition de l'embrasement général. Cette approche traduit une croyance voulant que les effets toxiques d'un matériau ne seront pas un facteur tant qu'il n'y aura pas eu embrasement général. Comme ce dernier est généralement considéré comme un phénomène ne présentant aucune possibilité de survie, il y aurait, selon l'argument avancé, peu d'avantages à établir une norme de toxicité relative aux matériaux en train de brûler. Au niveau de la capacité d'un passager à évacuer l'aéronef, on juge comme minimes les effets physiologiques inhérents à l'inhalation de sous-produits toxiques probablement présents, avant l'embrasement général, dans un incendie consécutif à un accident. Toutefois, en cas d'incendie en vol, l'évacuation des passagers n'est pas envisageable. Même si l'équipage de conduite peut être capable de prendre des mesures limitées pour évacuer une certaine quantité de fumée de la cabine, il n'empêche que les occupants de l'aéronef devront être soumis aux effets potentiellement débilitants des gaz toxiques et irritants dégagés par les matériaux de l'aéronef en train de brûler.

Comme on l'a vu dans les recommandations en matière de sécurité aérienne A00-16 à A00-20 du BST, un équipage ne dispose que de moyens limités pour bien évaluer et éteindre de tels incendies cachés et inaccessibles. Par conséquent, la phase de naissance la plus probable d'un incendie en vol consisterait en un incendie non maîtrisé mettant en cause des matériaux qu'on sait être inflammables. Comme les matériaux utilisés à l'intérieur des aéronefs ne sont assujettis à aucun critère réglementaire de toxicité, il est probable que certains d'entre eux peuvent devenir toxiques en brûlant. Les sous-produits toxiques risquent alors d'être disséminés par la circulation d'air dans la coque sous pression et, éventuellement, de nuire aux facultés des passagers et de l'équipage. Bien que l'on puisse avancer que les membres de l'équipage de conduite possèdent un masque respiratoire qui leur permet de continuer à travailler, les passagers ne disposent de rien de tel. Le circuit d'oxygène destiné aux passagers est conçu pour servir en cas de dépressurisation, et il ne protégera pas ces derniers contre la fumée ou les toxines présentes à bord. En fait, le manuel d'exploitation du MD–11 contient un avertissement demandant de ne pas libérer les masques à oxygène des passagers au-dessous de 14 000 pieds en présence de fumée ou d'une source de chaleur inhabituelle, car l'oxygène risque d'augmenter la possibilité ou l'intensité d'un incendie dans la cabineNote de bas de page 43.

Certains incendies en vol ont pu être maîtrisés avec des opérations minimales de lutte contre les incendies à bord, couplées à des mesures immédiates d'atterrissage (les membres de l'équipage de conduite ayant mis leur masque anti-fumée). Toutefois, il n'est pas toujours possible de se rendre à un aéroport de secours, notamment pendant une traversée océanique. Dans de tels cas, les passagers risquent de souffrir d'une exposition prolongée aux sous-produits de combustion dont les effets sur leur possibilité de survie est inconnue. Le Bureau s'inquiète de l'absence de normes visant à limiter la quantité d'émissions toxiques pouvant éventuellement se dégager à la suite de la combustion de matériaux à l'intérieur d'un aéronef; il est d'avis que les risques qui en découlent pourraient être réduits par l'élimination de l'emploi de matériaux qui alimentent ou propagent un incendie.

Annexe D

Voici le résumé de quelques événements dans lesquels le câblage électrique était en cause :

  • Le 24 novembre 1993, un MD-87 roulait lorsque de la fumée a été détectée dans la cabine. Par la suite, un incendie a éclaté et a détruit la partie intérieure arrière de la cabine. Les enquêteurs ont conclu que deux fils usés par frottement ont fini par établir un contact entre leur conducteur et le cadre métallique, ce qui a enflammé le matériau environnant. (National Transportation Safety Board des États-Unis)
  • Le 17 juillet 1996, un Boeing 747 s'est disloqué en vol. Les enquêteurs ont découvert que la dislocation avait été provoquée par une surpression dans le réservoir central d'aile. Cette surpression résultait quant à elle de l'explosion d'un mélange de vapeurs de carburéacteur Jet A et d'air. L'enquête a conclu que la source la plus probable de l'inflammation tenait à un court-circuit à l'extérieur du réservoir central d'aile qui était entré dans le réservoir par un fil électrique associé au système d'indication de quantité carburant. (National Transportation Safety Board des États-Unis)
  • Le 28 novembre 1998, un Boeing 747 est revenu à son aéroport de départ après un ennui apparemment lié à la soupape d'échappement sol du circuit de refroidissement du compartiment électrique et électronique. Les enquêteurs ont découvert plusieurs traces d'arcs électriques dans un petit faisceau de fils associé à la soupape d'échappement. Le matériau recouvrant le matelas isolant avait ensuite pris feu et avait été entièrement consumé. (Air Accidents Investigation Branch du Royaume-Uni)
  • Le 22 décembre 1998, des arcs électriques sont apparus à l'intérieur du compartiment avionique d'un Lockheed L-1011 quand un faisceau de fils a subi de arcs électriques entre les différents fils. De plus, les faisceaux de fils étaient saturés de liquide. (National Transportation Safety Board des États-Unis)
  • Le 29 mars 1999, le personnel de maintenance a relevé des traces d'incendie à bord d'un MD–11 pendant qu'il inspectait les panneaux de plancher arrière dans le cadre d'une vérification de maintenance. L'inspection a révélé qu'un faisceau de fils avait généré des arcs électriques avec le cadre de l'avion et avait enflammé le matériau de l'isolant thermique et acoustique adjacent. Le matériau de l'enveloppe du matelas isolant s'était entièrement consumé. (National Transportation Safety Board des États-Unis)
  • Le 29 décembre 2000, un incendie d'origine électrique a éclaté en avant du poste du mécanicien navigant d'un Lockheed L-1011, un arc électrique ayant été vu au niveau du faisceau de fils du réchauffage pare-brise au-dessus de la fenêtre latérale du copilote. L'examen des fils en cause a révélé qu'un arc électrique s'était produit entre la structure de l'avion, un collier de serrage et un faisceau de 30 fils, dans lequel 20 fils ont brûlé. (National Transportation Safety Board des États-Unis)
  • Le 10 janvier 2001, un Boeing 767 a atterri au milieu du brouillard à Salt Lake City, en Utah. Au moment du toucher des roues ou juste après, plusieurs disjoncteurs se sont déclenchés, il y a eu un court-circuit dans un faisceau de fils électriques situé dans le compartiment électrique et électronique, et un petit incendie a éclaté, dégageant de la fumée dans le poste de pilotage. L'avion a roulé jusqu'à la porte d'embarquement sans autre incident, et la fumée s'est dissipée une fois les réacteurs coupés. (National Transportation Safety Board des États-Unis)

Avis de sécurité aérienne

Câblage électrique du MD–11 (980031-1)

Place du Centre
200, promenade du Portage
4e étage
Hull (Québec)
615-980031
K1A 1K8

Le 22 décembre 1998

Monsieur Bernard Loeb, directeur
Office of Aviation Safety
National Transportation Safety Board
490 L'Enfant Plaza East, S.W.
Washington, DC 20594

(par l'intermédiaire de)

M. Jerome Frechette, représentant accrédité des États-Unis
à l'enquête sur l'accident du vol 111 de la Swissair

Objet : Avis de sécurité aérienne 980031-1

Câblage électrique du MD–11

Monsieur,

La semaine dernière, votre représentant accrédité et vos conseillers des États-Unis ont rencontré à Halifax des personnes faisant partie de l'équipe d'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur l'accident du vol 111 de la Swissair afin de partager de l'information sur les progrès de l'enquête et de planifier la prochaine étape du travail. L'information sur le déclenchement et la propagation de l'incendie qui s'est déclaré en vol ainsi que sur tout manquement à la sécurité connexe qui aurait pu exister au niveau des circuits électriques de l'avion et de son câblage a été d'un intérêt tout particulier pour les membres de l'équipe.

Même si toute l'étendue de tout manquement à la sécurité et des risques qui pourraient lui être associés dans ce domaine ne sont pas encore clairement déterminés, il est souhaitable de résumer à cette étape-ci la compréhension que l'équipe d'enquête a des problèmes et des initiatives qui ont déjà été prises pour y remédier. C'est une pratique normale du BST que de communiquer des avis de sécurité aérienne de cette nature au ministère des Transports du Canada afin qu'il puisse prendre toute mesure qu'il juge nécessaire. Toutefois, comme les répercussions potentielles sur la sécurité se limitent à l'heure actuelle à la flotte des MD–11 construits par Boeing/McDonnell Douglas, il serait plus indiqué pour le moment de vous fournir directement cette information en votre qualité de représentant de l'état de construction.

Avant d'aborder les éléments techniques, j'aimerais vous faire part de la grande satisfaction du BST au sujet de l'appui remarquable que nous ont apporté votre représentant accrédité et vos conseillers des États-Unis dans le cadre de cette enquête; nous sommes également redevables à l'équipe de la Suisse. Je crois qu'il convient de dire que le niveau de coopération internationale déployée pour cette enquête a été des plus encourageants.

Les circonstances de l'accident sont maintenant bien connues. Le 2 septembre 1998, un McDonnell Douglas MD–11 de la Swissair (numéro de série 48448), immatriculé HB-IWF, a quitté l'aéroport John F. Kennedy, situé à Jamaica (New York), à 21 h 18, heure avancée de l'Atlantique, en route vers Genève, en Suisse. Environ 53 minutes après le décollage, alors que l'appareil volait en croisière au niveau de vol 330, les membres de l'équipage de conduite ont senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Trois minutes et demie plus tard, l'équipage a envoyé un message « PAN, PAN, PAN », a avisé le contrôleur des services de la circulation aérienne (ATS) de la présence de fumée dans le poste de pilotage et a demandé un déroutement. Environ 11 minutes plus tard, la situation s'est aggravée au point où les circuits électriques étaient gravement touchés, et l'équipage a déclaré une situation d'« urgence » aux ATS. Approximativement six minutes et demie plus tard, vers 22 h 31, l'avion s'est abîmé dans l'océan Atlantique, près de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, au Canada. Les 215 passagers et les 14 membres d'équipage à bord ont péri dans l'accident. L'enquête du BST se poursuit.

Tôt dans le travail du Groupe des Systèmes, l'enquête technique s'est portée principalement sur le câblage électrique de l'avion. Jusqu'à présent, on a découvert des signes d'importants dommages causés par la chaleur au plafond de l'avion, tant devant que derrière la cloison du poste de pilotage. Ces dommages correspondent aux effets d'un incendie à ces endroits; la source qui a déclenché l'incendie n'est pas connue. Il est bien connu que des arcs électriques peuvent se produire à la suite d'une détérioration du matériau isolant des fils, et que l'amorçage d'arcs peut produire une chaleur intense. L'isolant des fils est susceptible de se détériorer en présence de conditions propices, comme une combinaison de vibrations, d'humidité, de température, d'efforts ou de contraintes, de contacts avec des surfaces rugueuses, de pliages excessivement serrés ou d'autres dommages matériels.

L'équipe d'enquête a récupéré plusieurs fils électriques de l'avion accidenté qui montrent des signes d'amorçage d'arc, et divers autres fils qui avaient été endommagés à divers degrés par la chaleur et dont l'isolant avait été terni, carbonisé ou fragilisé. Si certains de ces fils font partie d'un système de divertissement propre aux appareils de la Swissair, d'autres fils endommagés par la chaleur se retrouvent à bord de tous les avions MD–11.

Les enquêteurs du BST ont récupéré deux fils d'alimentation de bus de l'avion HB-IWF qui ont été identifiés comme étant le fil d'alimentation de bus c.a. d'urgence de gauche (B205-1-10) et le fil d'alimentation de bus c.c. d'urgence de gauche (B205-4-6); les deux présentaient des signes d'amorçage d'arc électrique. La partie de ces fils endommagée par les arcs électriques est située à environ deux pouces à l'extérieur du côté droit du tableau de distribution supérieur dans le poste de pilotage, à l'endroit où les fils pénètrent dans ce qui est appelé la « cuvette ». Quelques autres fils identifiés comme faisant partie du câblage électrique d'origine de l'avion montrent des signes d'amorçage d'arc, mais ils n'ont pu être identifiés de façon plus précise ni situés à l'intérieur de l'avion à cause de l'absence de la gaine isolante portant les marques d'identification. Divers autres fils du plafond présentaient des dommages causés par la chaleur allant d'un léger ternissement à une forte carbonisation et fragilisation de l'isolant des fils. De plus, un certain nombre de fils d'alimentation électrique du système de divertissement présentaient des dommages causés par des arcs électriques. Immédiatement après ces constatations, Swissair a volontairement débranché le système de divertissement de bord par mesure de précaution.

La découverte de fils endommagés par la chaleur sur l'avion en question a donné lieu à l'examen du câblage électrique dans un certain nombre d'avions MD–11 en vue d'aider à cerner les zones potentielles d'amorçage d'arc ou d'autres sources génératrices de chaleur. Les enquêteurs du BST ont visité deux installations de maintenance et examiné plusieurs avions MD–11. Ces examens ont porté sur la zone comprise entre le poste de pilotage jusqu'à la référence 600, et les anomalies suivantes ont été découvertes :

  • Le plafond suspendu avant, au-dessus des portes 1G et 1D, contenait des fils qui étaient coupés et usés par frottement.
  • Le tableau de distribution supérieur du poste de pilotage, près de l'endroit où les fils pénètrent dans la « cuvette », comptait plusieurs fils dont le revêtement de la gaine isolante était légèrement usé par frottement.
  • Divers fils endommagés, fendus ou usés par frottement ont été découverts.
  • Il y avait des fils de mise à la masse brisés et des fils qui présentaient des rayons de pliage inférieurs aux spécifications du fabricant.
  • Des connexions de bornes de fil étaient insuffisamment serrées.
  • Il y avait des incohérences dans l'acheminement des fils et des faisceaux de fils.
  • Les guide-fils électriques entre le poste de pilotage et la cabine n'étaient pas scellés.
  • Les rideaux anti-fumée entre le poste de pilotage et la cabine étaient ouverts.
  • Les batteries des lampes de secours à l'entrée de la porte du poste de pilotage ne se trouvaient pas toutes au même endroit.

Les conseillers américains de votre équipe ont été avisés de ces diverses anomalies dès qu'elles ont été connues, et des mesures rapides ont déjà été prises aux États-Unis pour corriger certains des points mentionnés. La Federal Aviation Administration (FAA) a publié une consigne de navigabilité (AD 98-25-11) exigeant une inspection non répétitive au-dessus des portes 1G et 1D pour traiter de la question des fils usés par frottement, mise en lumière au cours de cette enquête. La Division de Long Beach de la Boeing Aircraft Company a rédigé deux bulletins de service alerte pour les MD–11 (MD-24A068, révision 1, et MD-25A194, révision 4) pour traiter les anomalies spécifiquement relevées au-dessus des portes 1G et 1D. Ces mesures rapides décrétées par la FAA et Boeing ont été prudentes, et les résultats des inspections devraient améliorer la compréhension qu'a l'équipe chargée de l'enquête sur le vol 111 de la Swissair de la nature et de la portée de tout manquement à la sécurité attribuable au câblage électrique.

L'équipe d'enquête du BST n'a pas établi de lien direct entre les anomalies constatées dans le câblage électrique des MD–11 en service qui ont été inspectés récemment et les fils endommagés de l'épave du vol 111 de la Swissair. Toutefois, compte tenu du fait que plusieurs anomalies relatives aux fils ont été découvertes dans deux installations de maintenance de MD–11 distinctes, on peut se demander quelle est l'étendue de ces phénomènes au sein de la flotte des MD–11. De concert avec la société Boeing, SR Technics, pour le compte de Swissair, a volontairement élaboré et rédigé une notice technique définissant un examen approfondi du câblage électrique dans les parties avant des avions MD–11 de Swissair. Le BST applaudit à cet effort proactif.

Bien que toute la portée des manquements à la sécurité attribuables au câblage électrique et les risques qu'ils peuvent poser à la flotte mondiale de MD–11 ne soient pas connus, il pourrait néanmoins être opportun que le NTSB et l'organisme de réglementation des États-Unis fassent le point sur ces diverses constatations préliminaires et sur les mesures de sécurité spécifiques qui ont été prises. À la suite de cette revue, vous pourriez décider que la situation appelle un examen plus approfondi de l'état du câblage électrique équipant la flotte actuelle des MD–11, et peut-être celui d'autres flottes d'appareils.

L'équipe d'enquête du BST dirigée par M. Gerden va, bien entendu, continuer à travailler étroitement avec votre représentant et vos conseillers ainsi qu'avec vos homologues suisses. J'apprécierais d'être mis au courant de toutes les mesures prévues à la suite du présent Avis sur la sécurité aérienne.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
J.L. Maxwell

c.c.

M. Jean Overney, représentant accrédité pour la Suisse
Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation
Bahnholfplatz 10 B
CH -3003 Berne, Suisse

M. J. C. Montplaisir, observateur du ministre des Transports du Canada
Place Héritage
95, rue Foundry.
C.P. 42, Moncton, NB E1C 8K6

M. Bob Henley, enquêteur sur la sécurité aérienne
FAA
FAA Headquarters
800 Independence Ave., S.W.
Washington, DC 20591


Lampes de lecture (liseuses de carte) de l'équipage de conduite du MD–11 (A000008-1)

Place du Centre
200, promenade du Portage
4e étage
Hull (Québec)

Le 2 mars 2000

Monsieur Bernard Loeb, directeur
Office of Aviation Safety
National Transportation Safety Board
490 L'Enfant Plaza East, S.W.
Washington, DC 20594

(par l'intermédiaire de)

M. Frank Hildrup, représentant accrédité des États-Unis
à l'enquête sur l'accident du vol 111 de la Swissair

Objet : Avis de sécurité aérienne A000008-1

Lampes de lecture (liseuses de carte) de l'équipage de conduite du MD–11

Monsieur,

Le mois dernier, les représentants accrédités et conseillers des États-Unis et de la Suisse ont rencontré à Halifax des membres de l'équipe d'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur le vol 111 de la Swissair pour partager de l'information sur les progrès de l'enquête et planifier la prochaine phase du travail. L'équipe s'intéresse toujours à l'identification de toute source de chaleur potentielle à proximité de combustibles qui pourrait causer une inflammation. À cet égard, des constatations récentes laissent croire à un manquement potentiel à la sécurité associé au montage des lampes de lectureNote de bas de page 44 de l'équipage de conduite (habituellement appelées liseuses de carte) à bord des MD–11.

Normalement, le BST fait parvenir les Avis de sécurité aérienne de cette nature au ministère des Transports du Canada afin qu'il prenne toute mesure jugée nécessaire. Toutefois, comme les répercussions potentielles pour la sécurité se limitent pour le moment à la flotte des MD–11 construits par Boeing/McDonnell Douglas, il convient mieux à ce moment-ci de vous fournir directement cette information à titre de représentants de l'État constructeur.

Les circonstances de l'accident sont maintenant bien connues. Le 2 septembre 1998, un avion McDonnell Douglas MD–11 (numéro de série 48448) de la Swissair a décollé de l'aéroport John F. Kennedy, à Jamaica, New York, à 21 h 18, heure avancée de l'Atlantique, à destination de Genève, en Suisse. Environ 53 minutes après le décollage, alors que l'avion était en croisière au niveau de vol 330, l'équipage a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Trois minutes et demie plus tard, l'équipage a envoyé le signal « PAN, PAN, PAN » et a avisé le contrôleur des Services de la circulation aérienne (ATS) de la présence de fumée dans le poste de pilotage pour lui demander un déroutement. Environ 11 minutes plus tard, la situation s'était détériorée au point où les circuits électriques étaient gravement touchés, et l'équipage a déclaré une « urgence » aux ATS. Quelque six minutes et demie plus tard, vers 22 h 31, l'avion s'est abîmé dans l'océan Atlantique, près de Peggy's Cove, Nouvelle-Écosse, Canada. Les 215 passagers et 14 membres d'équipage à bord ont péri. L'enquête du BST se poursuit.

Dans le cadre de son enquête sur les causes, les facteurs contributifs et les problèmes potentiels de sécurité soulevés par l'accident du vol 111 de la Swissair, le BST a publié, le 11 août 1999, les recommandations provisoires en matière de sécurité aérienne A99-07 et A99-08. Ces recommandations portaient sur des manquements à la sécurité en ce qui a trait aux caractéristiques d'inflammabilité des matelas isolants recouverts de poly(éthylène de téréphtalate) (PET) métallisé et aux critères des essais d'inflammabilité exigés en vertu des Federal Aviation Regulations (FAR) 25.853. Par la suite, la Federal Aviation Administration a publié un avis de projet de réglementation (NPRM)Note de bas de page 45 qui exigerait, s'il était adopté comme il est écrit, l'enlèvement complet de tous les matelas isolants recouverts de PET métallisé de tous les avions MD–11 immatriculés aux États-Unis dans les quatre ans suivant la date d'entrée en vigueur de toute consigne de navigabilité (AD) en découlant. L'avis de projet de réglementation indiquait que les matelas isolants recouverts de PET métallisé pouvaient contribuer à la propagation d'un incendie émanant de petites sources d'inflammation, comme un amorçage d'arc ou la production d'étincelles. Au moment d'écrire ces lignes, aucune AD n'a encore été finalisée relativement à cette proposition.

À la suite des recommandations du BST, un exploitant de MD–11 a adopté une approche proactive et il s'est lancé dans un programme de remplacement des matelas pour retirer tout matériau isolant recouvert de PET métallisé du poste de pilotage, de l'office avant et du compartiment central des accessoires. Comme la procédure de remplacement des matelas isolants a nécessité le repositionnement de nombreux faisceaux de fils électriques à ces endroits, une inspection du câblage a aussi été effectuée pour qu'on s'assure que les fils n'avaient pas été endommagés au cours du processus.

Le BST a pris des dispositions pour être présent lors du remplacement des matelas isolants afin d'être en mesure d'évaluer si des dommages indirects avaient été causés au câblage et pour vérifier la présence de toute anomalie. Au cours d'une des premières inspections, on a remarqué qu'un matelas isolant touchait à la partie supérieure de la liseuse de carte encastrée, montée du côté droit du plafond du poste de pilotage. Le matériau isolant recouvert de PET métallisé avait été physiquement endommagé et, à cause d'un contact continu, il portait la marque de l'arrière de la monture de la liseuse de carte, laquelle renferme une lampe halogène. Un des isolants de borne circulaires fixé à un fil allant à la liseuse de carte présentait aussi des dommages, peut-être causés par la chaleur. Une inspection de la liseuse de carte montée du côté gauche a permis de constater des dommages semblables quoique moins importants. Aucun dommage n'a été signalé à la monture de la liseuse de carte du poste de l'observateur.

Sur la foi des observations précédentes, environ une douzaine d'avions MD–11 de deux exploitants ont été inspectés. Parmi les anomalies découvertes, on note les suivantes :

  • Les couvercles de protection de plusieurs liseuses de carte faits d'un matériau plastique quelconque étaient fissurés sur le dessus de la borne positive de la lampe.
  • Il était évident qu'on avait réparé les fissures de certaines de ces liseusesNote de bas de page 46.
  • Dans un cas, le couvercle recouvrant normalement le dessus de la borne positive était partiellement manquant, et le bornier positif présentait des signes de fusion et d'armorçage d'arc.
  • Sur un certain nombre de liseuses de carte, le matériau isolant recouvrant les connecteurs circulaires de borne était aussi déformé par la chaleur.
  • Le matériau isolant recouvert de PET métallisé était pressé contre le dos de bon nombre de montures. Le dommage causé aux matelas isolants en mylar métallisé semblait être le résultat de contraintes mécaniques et thermiques exercées par la liseuse de carte.

L'enquête du BST en ce qui a trait à l'état des montures de ces liseuses de carte continue d'évaluer l'ampleur du manquement relevé. Bien qu'on ignore encore la pleine portée de ce manquement et les risques qu'il présente pour les flottes de MD–11 à travers le monde, à la lumière des risques d'inflammabilité associés aux matelas isolants recouverts de PET métallisé, le moment est probablement venu pour le NTSB et l'organisme de réglementation des États-Unis de se pencher sur ces constatations préliminaires. À la suite de cette revue, vous pourriez décider que la situation justifie une évaluation plus poussée du montage des liseuses de carte dans la flotte actuelle des MD–11, et peut-être dans d'autres flottes d'aéronefs, le cas échéant.

L'équipe d'enquête du BST dirigée par M. Gerden continuera évidemment de travailler étroitement avec votre représentant et vos conseillers ainsi qu'avec vos homologues suisses. J'aimerais être tenu au courant de toute mesure que vous comptez prendre à la suite du présent Avis de sécurité aérienne.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

William T. Tucker
Directeur général
Coordination des enquêtes

c.c.

M. Jean Overney, représentant accrédité pour la Suisse
Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation
Bahnholfplatz 10 B
CH -3003 Berne, Suisse

M. G. Michael Doiron,
observateur du ministre des Transports du Canada
Place Heritage
95, rue Foundry
C.P. 42, Moncton (N.-B.) E1C 8K6

M. Bob Henley, enquêteur sur la sécurité aérienne, FAA
FAA Headquarters
800 Independence Ave., S.W.
Washington, DC 20591, U.S.A.

M. André Auer, directeur
Bureau fédéral de l'aviation civile
Maulbeerstrasse 9
CH-3003 Berne, Suisse


Connaissance qu'ont les contrôleurs des procédures d'urgence suivies par les équipages de conduite (A010020-1)

Place du Centre
200, promenade du Portage
4e étage
Hull (Québec) K1A 1K8

825-A98H0003
615-A010020-1

Le 14 août 2001

Transports Canada

Mme Louise Laflamme, directrice
Liaison avec le BST
330, rue Sparks, 12e étage
Ottawa (Ontario)
K1A 0N5

Objet : Avis de sécurité aérienne modifié A010020-1 (A98H0003)
Connaissance qu'ont les contrôleurs des procédures d'urgence suivies par les équipages de conduite

Madame,

Le 2 septembre 1998, à 22 h 11, heure avancée de l'Atlantique, l'équipage de conduite de l'avion McDonnell Douglas MD–11 du vol 111 de la Swissair (SR 111) en croisière au niveau de vol 330 assurant la liaison entre l'aéroport international John F. Kennedy de New York (JFK) et Genève, en Suisse, a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Environ trois minutes et demie plus tard, l'équipage de conduite a envoyé le signal d'urgence international « PAN, PAN, PAN » au contrôle de la circulation aérienne (ATC) de Moncton, signalant la présence de fumée dans le poste de pilotage. L'équipage a d'abord demandé à se dérouter vers Boston, puis il a décidé de se rendre à l'aéroport international de Halifax (Nouvelle-Écosse), lequel était plus proche. Le contrôleur de Moncton a autorisé l'avion à se diriger vers l'aéroport de Halifax, situé à une distance de 57 milles, puis il a transféré le vol au contrôleur terminal de Halifax.

Quelque six minutes plus tard, ou environ dix minutes après l'émission du signal « PAN, PAN, PAN », la situation a commencé à se détériorer rapidement dans le poste de pilotage. Le pilote automatique a débrayé, et l'enregistreur de données de vol s'est mis à enregistrer une succession rapide d'anomalies témoignant de défaillances reliées à divers circuits de bord. L'équipage de conduite a déclaré une situation d'urgence, en précisant qu'il commençait à larguer du carburant et qu'il devait se poser immédiatement. Par la suite, aucune autre communication radio n'a été établie avec SR 111, bien que le contrôleur eût transmis à l'équipage une autorisation lui permettant de commencer à larguer du carburant de l'avion. En l'absence de réponse de l'équipage, le contrôleur lui a réitéré son autorisation de larguer du carburant. Ensuite, le contact au radar secondaire a été perdu avec SR 111 alors que l'avion se trouvait en palier à environ 10 000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Quelque six minutes plus tard, vers 1 h 31 UTC, l'avion s'est abîmé dans l'océan Atlantique, près de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, accident qui a provoqué la mort des 215 passagers et 14 membres d'équipage. Au cours des six dernières minutes, le contrôleur n'a transmis aucun autre message radio à SR 111, et aucun message en provenance de SR 111 n'a été reçu. Selon toute vraisemblance, un incendie à bord aurait fait tomber en panne certains systèmes de bord, y compris le système de télécommunication, dans la dernière partie du vol. L'enquête A98H0003 du BST se poursuit.

Il est apparu au cours de l'enquête que certains contrôleurs croyaient que les équipages de conduite pouvaient couper certains systèmes électriques et radio de bord pendant des opérations de largage de carburant pour des raisons de sécurité. C'est cette croyance erronée qu'ont utilisée les contrôleurs ATS pour expliquer l'interruption des communications radio et l'absence de renseignements tirés du radar secondaire qui se sont produites immédiatement après l'indication fournie par l'équipage qu'il commençait à larguer du carburant.

Depuis 1998, le BST a consigné annuellement plus de 200 événements au cours desquels des aéronefs ont déclaré une situation d'urgence ou demandé un traitement prioritaire auprès du contrôle de la circulation aérienne au Canada. Compte tenu du grand nombre de vols qui se déroulent annuellement au Canada sans le moindre incident, les situations d'urgence sont rares. Quoi qu'il en soit, dans de telles situations, les possibilités de minimiser toute issue désagréable et d'améliorer les services offerts aux équipages de conduite pourraient dépendre, en partie, de la conscience qu'ont les contrôleurs des ramifications des procédures spéciales ou d'urgence suivies par les équipages concernés. En connaissant les attentes des équipages de conduite et en étant quelque peu familiers avec les capacités des aéronefs commerciaux, les contrôleurs pourraient éventuellement être plus conscients des besoins opérationnels des équipages de conduite.

Avant le présent accident, les contrôleurs recevaient peu de renseignements, aussi bien pendant leur formation de base que pendant leur formation ultérieure, sur les capacités et les limites de base des aéronefs, ou encore sur les procédures typiques suivies par les équipages de conduite pendant des situations d'urgence ou de détresse. Rien, dans les dispositions réglementaires canadiennes, n'oblige les contrôleurs à suivre une formation spéciale portant sur la façon de composer avec des aéronefs en situation d'urgence, que ce soit pendant la formation de base ou celle de recyclage.

Il n'est nullement question de sous-entendre que les mesures prises par le contrôleur auraient eu une incidence sur l'issue de l'accident. Quoi qu'il en soit, après les événements, NAV CANADA a réagi rapidement pour augmenter les connaissances des contrôleurs en matière de scénarios d'urgence, l'approche retenue ayant consisté à lancer volontairement un cours complet de formation obligatoire non récurrent portant sur la préparation et l'intervention en cas d'urgence. Le programme de recyclage inclut des plans d'urgence en cas de pannes de radar, de communication ou d'alimentation électrique, ou encore en cas d'aéronefs en situation d'urgence. Il se concentre sur des discussions et des interactions en groupe en présence d'experts en la matière. Les contrôleurs régionaux et terminaux bénéficient d'un entraînement en simulateur et ont l'occasion d'améliorer leurs aptitudes. Le cours est actuellement dispensé à tous les contrôleurs de la circulation aérienne qualifiés de NAV CANADA pendant une période de deux ans qui prendra fin en août 2001. Bien que NAV CANADA ait pris ces mesures concrètes pour sensibiliser les contrôleurs actuellement qualifiés, rien n'est prévu pour poursuivre la sensibilisation des contrôleurs stagiaires après août 2001, pour éduquer les contrôleurs n'appartenant pas à NAV CANADA ou pour mettre périodiquement au courant les contrôleurs qualifiés des modifications qui sont apportées aux procédures en poste de pilotage et à la technologie des aéronefs et qui sont susceptibles d'être pertinentes au travail des contrôleurs.

D'autres pays ont reconnu le besoin de connaissances et de formation des contrôleurs en ce qui concerne les divers aspects du traitement des aéronefs en situation d'urgence et ont pris des mesures à cet effet. L'Aircraft Accident Investigation Board (AAIB) britannique, dans son rapport sur l'accident survenu au BAC One-eleven, G-BJRT, au-dessus de Didcot, dans l'Oxfordshire, au Royaume-Uni (R.-U.), le 10 juin 1990, a déclaré que la formation des contrôleurs en gestion des situations d'urgence et autres événements peu fréquents était jugée essentielle. L'AAIB a recommandé à la Civil Aviation Authority (CAA) du R.-U. que, avant la délivrance d'une qualification ATC, un candidat soit tenu de suivre un cours approuvé contenant une partie théorique et une partie pratique sur la façon de traiter les situations d'urgence. Cette formation pourrait être ensuite améliorée à l'étape de la validation et, par la suite, au moyen d'exercices réguliers de formation continue et de recyclage.

La CAA a accepté cette recommandation et, en janvier 1996, elle a mis en vigueur à l'intention des contrôleurs une formation continue obligatoire sur les situations d'urgence.

Dans la même veine, la Flight Safety Foundation a publié une série de recommandations émanant de son groupe de travail sur la réduction des accidents en approche et à l'atterrissage (ALAR). Un sous-groupe du groupe de travail ALAR s'est intéressé à la formation et aux procédures ATC. Voici les recommandations qu'il a formulées quant à la formation des contrôleurs ATC :

L'ATC devrait mettre en place des programmes visant les contrôleurs et les pilotes pour :

  • promouvoir la compréhension mutuelle des procédures, des instructions, des exigences opérationnelles et des limites des autres;
  • améliorer les connaissances qu'ont les contrôleurs des capacités et des limites des postes de pilotage faisant appel aux plus récentes technologies;
  • favoriser une meilleure gestion des communications et des tâches de la part des pilotes et des contrôleurs pendant des situations d'urgence;
  • mettre en œuvre des procédures exigeant qu'un contrôleur obtienne une clarification ou une vérification immédiate si le message d'un pilote indique une éventuelle urgence;
  • mettre en œuvre des procédures de traitement, par l'ATC, des aéronefs en situation d'urgence de manière à minimiser les sources de distraction des pilotes.

Transports Canada souhaitera peut-être examiner les exigences relatives à la formation des contrôleurs pour voir s'il n'y aurait pas lieu d'y ajouter une formation traitant de scénarios d'aéronefs en situation d'urgence avant la délivrance initiale, en vertu du Règlement de l'aviation canadien, d'une licence ATC aux contrôleurs de la circulation aérienne. De façon plus spécifique, il faudra peut-être dispenser une formation supplémentaire permettant aux contrôleurs d'acquérir les connaissances et les aptitudes requises afin qu'ils soient mieux en mesure d'offrir des services de contrôle de la circulation aérienne sûrs et rapides à des aéronefs aux prises avec des conditions d'urgence ou de détresse. Il faudra peut-être également s'intéresser au besoin d'exercices réguliers de formation continue et de recyclage traitant de scénarios d'aéronefs en situation d'urgence.

Veuillez agréer, Madame, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
Daniel Verreault, ing.

c.c.

M. John Crichton, président et chef de la direction de NAV CANADA
M. Phil Cutts, président de SerCo Facilities Management Inc.


Instruments de secours (secondaires) du MD–11 (A010042-1)

Place du Centre
200, promenade du Portage
4e étage
Hull (Québec)
K1A 1K8

615-A010042-1
825-A98H0003

Le 28 septembre 2001

Mme Louise Laflamme
Directrice, Liaison avec le BST
Sécurité et sûreté
Transports Canada - Aviation
Place-de-ville, tour C, 12e étage
330, rue Sparks
Ottawa (Ontario)
K1A 0N5

Objet : Avis de sécurité aérienne A010042-1 (A98H0003)
Instruments de secours (secondaires) du MD–11

Madame,

Le 2 septembre 1998, à 22 h 11, heure avancée de l'Atlantique (HAA)Note de bas de page 47, l'équipage de conduite de l'avion McDonnell Douglas MD–11 du vol 111 de la Swissair (SR 111) en croisière au niveau de vol 330 assurant la liaison entre l'aéroport international John F. Kennedy de New York (JFK) et Genève, en Suisse, a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Environ trois minutes et demie plus tard, l'équipage de conduite a envoyé le signal d'urgence international « PAN, PAN, PAN » au contrôle de la circulation aérienne (ATC) de Moncton, signalant la présence de fumée dans le poste de pilotage. L'équipage a d'abord demandé à se dérouter vers Boston, puis il a décidé de se rendre à l'aéroport international de Halifax (Nouvelle-Écosse), lequel était plus près.

Quelque 10 minutes après que l'équipage de conduite eut envoyé le signal « PAN, PAN, PAN », la situation a commencé à se détériorer rapidement dans le poste de pilotage. Le pilote automatique a débrayé et diverses pannes touchant d'autres systèmes, certaines reliées aux écrans des instruments primaires, se sont produites. L'équipage de conduite a déclaré une situation d'urgence et a fait savoir qu'il lui fallait se poser immédiatement. D'après certaines indications, ce sont les instruments de secours qui étaient utilisés. Vers 22 h 26, l'ATC a perdu le contact radio avec l'équipage, et le transpondeur de l'avion a cesser d'émettre. Vers 22 h 31, l'avion s'est abîmé dans l'océan Atlantique, près de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, accident qui a provoqué la mort des 215 passagers et 14 membres d'équipage. L'enquête (A98H0003) se poursuit.

Pendant la situation d'urgence, la charge de travail de l'équipage de conduite a été importante. Les pilotes devaient se dérouter de nuit vers un aéroport qu'ils ne connaissaient pas bien tout en portant leur masque à oxygène à cause de la présence de fumée dans le poste de pilotage. Il est difficile de savoir avec certitude si les pilotes ont pu bénéficier de renseignements limités provenant des instruments de vol primaires dans les dernières minutes du vol. Une recherche dans plusieurs bases de données a montré que des incidents au cours desquels les équipages de conduite avaient été contraints d'utiliser les instruments de vol de secours (secondaires) comme unique moyen de connaître leur assiette, leur direction de vol et leur vitesse, étaient rares. Toutefois, quand des pilotes ont été obligés de se fier aux instruments de secours dans des situations d'urgence, ils ont constaté certains manquements, notamment un mauvais emplacement des instruments, des affichages trop petits, de la difficulté à faire la transition à partir des instruments de vol primaires et une formation insuffisante.

Voici comment le Règlement de l'aviation canadien (RAC) et les Federal Aviation Regulations (FAR) des États-Unis abordent le sujet :

Pour les instruments de secours

  • quand les dispositions du RAC 605.41 et des FAR 121.305 l'exigent, un aéronef doit être équipé d'un indicateur d'assiette de secours placé sur le tableau de bord de manière à être vu et utilisé facilement par les pilotes assis à leur poste;
  • l'indicateur d'assiette de secours doit être alimenté indépendamment de la source principale d'alimentation électrique.

Pour l'instrumentation générale

  • chaque instrument de vol, de navigation et d'installation motrice à l'usage de tout pilote, doit lui être parfaitement visible de son poste avec l'écart minimal réalisable par rapport à sa position normale et à son axe de vision, quand il regarde droit devant lui, le long de la direction de la trajectoire de vol (FAR 25.1321);
  • les instruments de vol qui indiquent l'assiette, la vitesse, l'altitude et la direction du vol doivent être placés les uns à côté des autres et regroupés sur le tableau de bord selon un agencement relatif bien précis (FAR 25.1321);
  • les instruments doivent être regroupés de façon à ce que l'indicateur d'assiette se trouve au centre, l'anémomètre à gauche, l'altimètre à droite et l'indicateur de direction de vol directement au-dessous de l'indicateur d'assiette (ce type d'agencement est communément appelé « disposition classique en T »).

Quand les pilotes sont forcés d'utiliser les instruments de secours, ils doivent pouvoir ajuster rapidement leur technique de contre-vérification visuelle des instruments. La transition aux instruments de secours, notamment dans des circonstances difficiles, risque de se compliquer singulièrement si les instruments ne sont pas situés dans l'axe de vision normal et s'ils ne sont pas regroupés de la façon classique. Il pourrait alors en résulter une désorientation de l'équipage de conduite ainsi qu'une perte de maîtrise de l'aéronef.

Dans l'avion dont il est question ici, les instruments de secours indiquant l'assiette, l'altitude et la vitesse se trouvaient juste au-dessus du pylône central, au-dessous des écrans de visualisation. Quant aux renseignements sur la direction du vol, ils étaient fournis par le compas magnétique de secours, lequel devait être débloqué avant de pouvoir être utilisé. Ce compas se trouvait en haut du pare-brise, du côté gauche du montant central, un emplacement commun à beaucoup d'avions de la catégorie transport. Compte tenu de l'emplacement du compas magnétique de secours par rapport aux autres instruments de secours, un pilote devrait parcourir des yeux une distance verticale considérable, peut-être en effectuant simultanément un mouvement de la tête de haut en bas, pour effectuer une contre-vérification complète des instruments. Cette façon de procéder augmenterait les risques de désorientation (illusion de Coriolis).

En matière de vol à l'aide des instruments de secours, le défi risque d'être encore plus grand dans le cas d'équipages de conduite mal entraînés ou ne s'étant pas exercés récemment à une telle opération. Pour simuler des scénarios réalistes, il faudrait que les équipages de conduite soient entraînés à se servir des instruments de secours tout en étant confrontés à d'autres facteurs de complication, comme la panne d'autres systèmes, le port du masque à oxygène et de lunettes et la présence de fumée dans le poste de pilotage. La réglementation actuelle n'exige pas que les équipages de conduite suivent une formation particulière portant sur l'utilisation des instruments de secours.

Comme nous l'avons dit plus haut, la réglementation exige que l'indicateur d'assiette de secours soit alimenté indépendamment de la source principale d'alimentation électrique de l'avion. Dans la cas du MD–11, l'indicateur d'assiette de secours est alimenté par le bus de la batterie, lequel est indépendant. Toutefois, rien n'exige que les instruments de secours restent alimentés par une source d'alimentation indépendante distincte du circuit électrique et de la batterie de l'avion. Des avancées technologiques ont eu lieu récemment dans le domaine de l'instrumentation de secours indépendante ainsi qu'au niveau de la fourniture de moyens secondaires de navigation et de communication. Le BST évalue actuellement l'impact sur la sécurité qui résulterait de la présence à bord d'un aéronef d'un système de secours indépendant permettant aux équipages de conduite de disposer d'un « ensemble de retour au bercail » en cas de panne totale d'électricité. Autre éventuel avantage d'un tel système, il permettrait d'avoir plus d'options quand il faut couper un circuit électrique d'un avion à cause de la présence de fumée ou d'un incendie à bord.

Après l'accident de SR 111, Swissair a décidé de modifier les instruments de vol de secours de ses avions. Dans le cas du MD–11, la compagnie a choisi d'installer un écran secondaire de vol qui est agencé de la même façon que l'écran principal de vol de cet avion. On trouve ainsi regroupés sur un seul écran l'assiette, l'altitude, la vitesse et le cap. En cas de panne de l'alimentation électrique principale fournie par l'avion, l'instrument dispose d'une batterie auxiliaire qui lui permet d'être alimenté en électricité pendant au moins 45 minutes.

Il se pourrait que les autorités réglementaires et autres envisagent de se pencher sur les exigences applicables à l'instrumentation de secours, y compris sur des questions annexes comme les moyens de communication et de navigation de secours. Il se pourrait également que ces instances souhaitent examiner la réglementation et les pratiques actuelles afin de s'assurer que les équipages de conduite reçoivent une formation suffisante sur la façon d'utiliser les instruments de vol de secours, que les normes de conception sont suffisantes pour garantir que les instruments de secours sont regroupés les uns à côté des autres et que leur agencement est similaire à celui des instruments de vol primaires.

Veuillez agréer, Madame, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
Daniel Verreault, ing.

c.c.

Jim McMenemy
observateur du ministre des Transports du Canada

Willi Schurter
Swiss Air 111 Post Emergency Organisation

Pamela Rosnik
Boeing, Boeing Propulsion Technology

Steven Wallace
FAA, directeur des enquêtes sur les accidents

Vikki Anderson
FAA, enquêteur de la sécurité aérienne

Jean Overney
BEAA suisse, chef inspecteur

ALPA
Jim Stewart, coordonnateur de la sécurité aérienne - Canada

FOCA
Christine Gerber, chef de la section de maintien de la navigabilité


Instruments de secours (secondaires) du MD–11 (A010042-2)

Place du Centre
200, promenade du Portage
4e étage
Hull (Québec) K1A 1K8

615-A010042-2
825-A98H0003

Le 28 septembre 2001

M. John Clark
Director, Office of Aviation Safety
National Transportation Safety Board
490 L'Enfant Plaza East, S.W
Washington, D.C.
U.S.A, 20594

Objet : Avis de sécurité aérienne A010042-2 (A98H0003)
Instruments de secours (secondaires) du MD–11

Monsieur,

Le 2 septembre 1998, à 22 h 11, heure avancée de l'Atlantique (HAA)Note de bas de page 48, l'équipage de conduite de l'avion McDonnell Douglas MD–11 du vol 111 de la Swissair (SR 111) en croisière au niveau de vol 330 assurant la liaison entre l'aéroport international John F. Kennedy de New York (JFK) et Genève, en Suisse, a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Environ trois minutes et demie plus tard, l'équipage de conduite a envoyé le signal d'urgence international « PAN, PAN, PAN » au contrôle de la circulation aérienne (ATC) de Moncton, signalant la présence de fumée dans le poste de pilotage. L'équipage a d'abord demandé à se dérouter vers Boston, puis il a décidé de se rendre à l'aéroport international de Halifax (Nouvelle-Écosse), lequel était plus proche.

Quelque 10 minutes après que l'équipage de conduite eut envoyé le signal « PAN, PAN, PAN », la situation a commencé à se détériorer rapidement dans le poste de pilotage. Le pilote automatique a débrayé et diverses pannes touchant d'autres systèmes, certaines reliées aux écrans des instruments primaires, se sont produites. L'équipage de conduite a déclaré une situation d'urgence et a fait savoir qu'il lui fallait se poser immédiatement. D'après certaines indications, ce sont les instruments de secours qui étaient utilisés. Vers 22 h 26, l'ATC a perdu le contact radio avec l'équipage, et le transpondeur de l'avion a cesser d'émettre. Vers 22 h 31, l'avion s'est abîmé dans l'océan Atlantique, près de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, accident qui a provoqué la mort des 215 passagers et 14 membres d'équipage. L'enquête (A98H0003) se poursuit.

Pendant la situation d'urgence, la charge de travail de l'équipage de conduite était importante. Les pilotes devaient se dérouter de nuit vers un aéroport qu'ils ne connaissaient pas bien tout en portant leur masque à oxygène à cause de la présence de fumée dans le poste de pilotage. Il est difficile de savoir avec certitude si les pilotes ont pu bénéficier de renseignements limités provenant des instruments de vol primaires dans les dernières minutes du vol. Une recherche dans plusieurs bases de données a montré que des incidents au cours desquels les équipages de conduite avaient été contraints d'utiliser les instruments de vol de secours (secondaires) comme unique moyen de connaître leur assiette, leur direction de vol et leur vitesse, étaient rares. Toutefois, quand des pilotes ont été obligés de se fier aux instruments de secours dans des situations d'urgence, ils ont constaté certains manquements, notamment un mauvais emplacement des instruments, des affichages trop petits, de la difficulté à faire la transition à partir des instruments de vol primaires et une formation insuffisante.

Voici comment le Règlement de l'aviation canadien (RAC) et les Federal Aviation Regulations (FAR) des États-Unis abordent le sujet :

Pour les instruments de secours

  • quand les dispositions du RAC 605.41 et des FAR 121.305 l'exigent, un aéronef doit être équipé d'un indicateur d'assiette de secours placé sur le tableau de bord de manière à être vu et utilisé facilement par les pilotes assis à leur poste;
  • l'indicateur d'assiette de secours doit être alimenté indépendamment de la source principale d'alimentation électrique.

Pour l'instrumentation générale

  • chaque instrument de vol, de navigation et d'installation motrice à l'usage de tout pilote, doit lui être parfaitement visible de son poste avec l'écart minimal réalisable par rapport à sa position normale et à son axe de vision, quand il regarde droit devant lui, le long de la direction de la trajectoire de vol (FAR 25.1321);
  • les instruments de vol qui indiquent l'assiette, la vitesse, l'altitude et la direction du vol doivent être placés les uns à côté des autres et regroupés sur le tableau de bord selon un agencement relatif bien précis (FAR 25.1321);
  • les instruments doivent être regroupés de façon à ce que l'indicateur d'assiette se trouve au centre, l'anémomètre à gauche, l'altimètre à droite et l'indicateur de direction de vol directement au-dessous de l'indicateur d'assiette (ce type d'agencement est communément appelé « disposition classique en T »).

Quand les pilotes sont forcés d'utiliser les instruments de secours, ils doivent pouvoir ajuster rapidement leur technique de contre-vérification visuelle des instruments. La transition aux instruments de secours, notamment dans des circonstances difficiles, risque de se compliquer singulièrement si les instruments ne sont pas situés dans l'axe de vision normal et s'ils ne sont pas regroupés de la façon classique. Il pourrait alors en résulter une désorientation de l'équipage de conduite ainsi qu'une perte de maîtrise de l'aéronef.

Dans l'avion dont il est question ici, les instruments de secours indiquant l'assiette, l'altitude et la vitesse se trouvaient juste au-dessus du pylône central, au-dessous des écrans de visualisation. Quant aux renseignements sur la direction du vol, ils étaient fournis par le compas magnétique de secours, lequel devait être débloqué avant de pouvoir être utilisé. Ce compas se trouvait en haut du pare-brise, du côté gauche du montant central, un emplacement commun à beaucoup d'avions de la catégorie transport. Compte tenu de l'emplacement du compas magnétique de secours par rapport aux autres instruments de secours, un pilote devrait parcourir des yeux une distance verticale considérable, peut-être en effectuant simultanément un mouvement de la tête de haut en bas, pour effectuer une contre-vérification complète des instruments. Cette façon de procéder augmenterait les risques de désorientation (illusion de Coriolis).

En matière de vol à l'aide des instruments de secours, le défi risque d'être encore plus grand dans le cas d'équipages de conduite mal entraînés ou ne s'étant pas exercés récemment à une telle opération. Pour simuler des scénarios réalistes, il faudrait que les équipages de conduite soient entraînés à se servir des instruments de secours tout en étant confrontés à d'autres facteurs de complication, comme la panne d'autres systèmes, le port du masque à oxygène et de lunettes et la présence de fumée dans le poste de pilotage. La réglementation actuelle n'exige pas que les équipages de conduite suivent une formation particulière portant sur l'utilisation des instruments de secours.

Comme nous l'avons dit plus haut, la réglementation exige que l'indicateur d'assiette de secours soit alimenté indépendamment de la source principale d'alimentation électrique de l'avion. Dans la cas du MD–11, l'indicateur d'assiette de secours est alimenté par le bus de la batterie, lequel est indépendant. Toutefois, rien n'exige que les instruments de secours restent alimentés par une source d'alimentation indépendante distincte du circuit électrique et de la batterie de l'avion. Des avancées technologiques ont eu lieu récemment dans le domaine de l'instrumentation de secours indépendante ainsi qu'au niveau de la fourniture de moyens secondaires de navigation et de communication. Le BST évalue actuellement l'impact sur la sécurité qui résulterait de la présence à bord d'un aéronef d'un système de secours indépendant permettant aux équipages de conduite de disposer d'un « ensemble de retour au bercail » en cas de panne totale d'électricité. Autre éventuel avantage d'un tel système, il permettrait d'avoir plus d'options quand il faut couper un circuit électrique d'un avion à cause de la présence de fumée ou d'un incendie à bord.

Après l'accident de SR 111, Swissair a décidé de modifier les instruments de vol de secours de ses avions. Dans le cas du MD–11, la compagnie a choisi d'installer un écran secondaire de vol qui est agencé de la même façon que l'écran principal de vol de cet avion. On trouve ainsi regroupés sur un seul écran l'assiette, l'altitude, la vitesse et le cap. En cas de panne de l'alimentation électrique principale fournie par l'avion, l'instrument dispose d'une batterie auxiliaire qui lui permet d'être alimenté en électricité pendant au moins 45 minutes.

Il se pourrait que les autorités réglementaires et autres envisagent de se pencher sur les exigences applicables à l'instrumentation de secours, y compris sur des questions annexes comme les moyens de communication et de navigation de secours. Il se pourrait également que ces instances souhaitent examiner la réglementation et les pratiques actuelles afin de s'assurer que les équipages de conduite reçoivent une formation suffisante sur la façon d'utiliser les instruments de vol de secours, que les normes de conception sont suffisantes pour garantir que les instruments de secours sont regroupés les uns à côté des autres et que leur agencement est similaire à celui des instruments de vol primaires.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
Daniel Verreault, ing.

c.c.

Frank Hilldrup
NTSB, représentant accrédité pour l'enquête sur l'accident du SR 111

Willi Schurter
Swiss Air 111 Post Emergency Organisation

Pamela Rosnik
Boeing, Boeing Propulsion Technology

Steven Wallace
FAA, directeur des enquêtes sur les accidents

Vikki Anderson
FAA, enquêteur de la sécurité aérienne

Jean Overney
BEAA suisse, chef inspecteur

ALPA
Jim Stewart, coordonnateur de la sécurité aérienne - Canada

FOCA
Christine Gerber, chef de la section de maintien de la navigabilité


Lettre de sécurité aérienne

Lampe de lecture de l'équipage de conduite (A000061-1)

Place du Centre
4e étage
200, promenade du Portage
Hull (Québec)
K1A 1K8

622-A000061-1
825-A98H0003

Le 29 décembre 2000

Monsieur John Clark, directeur-adjoint
Office of Aviation Safety
National Transportation Safety Board
490 L'Enfant Plaza East, S.W.
Washington, DC 20594

Objet : Lettre de sécurité aérienne A000061-1 (A98H0003)
Lampe de lecture de l'équipage de conduite

Monsieur,

Le 2 mars 2000, dans le cadre de son enquête toujours en cours sur les circonstances entourant l'accident du vol 111 de Swissair (SR 111) survenu le 2 septembre 1998, le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a fait parvenir à votre bureau un Avis de sécurité aérienne traitant d'un problème spécifique d'amorçage d'arc dans une lampe de lecture de l'équipage de conduite du MD–11 (ci-après appelée « lampe de lecture »)Note de bas de page 49. Comme vous le savez sans doute, Boeing a publié un bulletin de service d'alerte portant sur ce sujet (voir le bulletin MD11 33A069) et, par la suite, la Federal Aviation Administration a publié la consigne de navigabilité (AD) 2000-07-02, laquelle est toujours en vigueur aujourd'huiNote de bas de page 50. L'enquête a permis d'identifier trois autres modes de défaillance de ces lampes de lecture, modes qui sont détaillés dans l'annexe ci-jointeNote de bas de page 51. La présente lettre a pour objet de mettre votre bureau au fait de ces renseignements supplémentaires concernant les anomalies des lampes de lecture qui ont été découvertes dans le cadre de l'enquête sur l'accident du vol SR 111.

Bien que l'AD 2000-07-02 ne s'applique qu'au MD–11, des lampes de lecture identiques ou similaires sont installées à bord de plusieurs autres types d'aéronef. L'annexe ci-jointe dresse la liste de ces lampes de lecture d'équipage de conduite similaires et des documents d'information en service qui s'y rattachent. Le fabricant de ces lampes de lecture a publié plusieurs bulletins de service (BS) et lettres d'information concernant certaines de ces variantes. La mise en œuvre des modifications recommandées dans les BS en question n'est pas obligatoire et le contenu desdits bulletins ne traite que du problème de court-circuit entre le ressort porte-contact de la lampe et le cadre de support de la lampe de lecture. Fait intéressant à noter, le fabricant des lampes de lecture n'a publié aucun document d'information en service visant les avions DC-10, MD–11 ou MD-80. Toutefois, d'après ce que sait le BST, des modifications à la conception apportées par le fabricant des lampes pour traiter des autres modes de défaillance sont à venir.

Dans le but de faciliter la prise de toute mesure qui pourrait s'avérer nécessaire pour réduire le risque souligné dans l'AD originale et dans les observations faites par la suite pendant l'enquête, le BST a tenu toutes les parties intéressées au courant des derniers développements en la matière. Par conséquent, les présents renseignements vous sont fournis afin que vous puissiez prendre toutes les mesures de suivi qui vous semblent pertinentes.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
Daniel Verreault, ing.

M. Jean Overney, représentant accrédité pour la Suisse
Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation
Bahnholfplatz 10 B
CH -3003 Berne, Suisse

M. J. McMenemy, observateur
du ministre des Transports du Canada
Place-de-Ville, tour C, 7e étage
330, rue Sparks
Ottawa (Ontario) Canada
K1A 0N8

M. Bob Henley, enquêteur sur la sécurité aérienne
FAA
SR-111 FAA Liaison
FAA Headquarters
800 Independence Ave., S.W.
Washington, DC 20591, U.S.A.

M. André Auer, directeur
Bureau fédéral de l'aviation civile
Maulbeerstrasse 9
CH-3003 Berne, Suisse

M. Ronald J. Hinderberger
Boeing Commercial Airplane Group
Director Air Safety Investigation
P.O. Box 3707
MC 67-PR
Seattle, Washington 98124-2207

M. Willi Schurter
SR 111 Post Emergency Organisation
SR Technics
CH-8058 Zurich-Aéroport
Suisse

M. Reinhard Sikora
Gestionnaire du support technique
Hella Aerospace GmbH
Bertramstrasse 8,
59557 Lippstadt
Allemagne

M. P. Schlegel
Chef inspecteur chargé des accidents
Bureau fédéral allemand des enquêtes sur les accidents d'aviation
BFU
Hermann-Blenk-Str. 16
38108 Braunschweig
Allemagne

Annexe à la lettre de sécurité aérienne A000061-1
Modes de défaillance des lampes de lecture de l'équipage de conduiteNote de bas de page 52  :
  1. Court-circuit entre le contact ressort positif de la lampe et le support de la lampe de lecture de l'équipage de conduite.

    Si la bague isolante (couvercle protecteur) est gravement endommagée ou absente, il est possible qu'il y ait court-circuit entre le contact ressort positif de la lampe et le support mis à la masse de la lampe de lecture de l'équipage de conduite.

    Lampe de lecture d'équipage de conduite (liseuse de carte) n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes d'arc électrique sur le contact ressort
    Lampe de lecture d'équipage de conduite (liseuse de carte) n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes d'arc électrique sur le contact ressort
    Lampe de lecture d'équipage de conduite (liseuse de carte) n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes d'arc électrique du contact ressort avec le support
    Lampe de lecture d'équipage de conduite (liseuse de carte) n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes d'arc électrique du contact ressort avec le support
  2. Court-circuit entre la fixation universelle (ayant la forme d'une languette en U) de la ferrure du rivet de la douille et le raccordement de la borne sous le capuchon isolant orange.

    La languette de la fixation universelle de la ferrure du rivet de la douille de cette lampe de lecture de l'équipage de conduite a un rayon de courbure de quelque 4,5 mm. Pour des raisons de conception, une distance inférieure à 1 mm sépare l'une de ces languettes de l'arrière du raccordement électrique de la borne qui est isolé au moyen d'un capuchon en caoutchouc orange. En cours d'utilisation, la languette peut transpercer le capuchon isolant et créer un court-circuit avec le raccordement électrique positif.

    Pièce produite n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes d'arc électrique sur la languette et le capuchon isolant orange
    Pièce produite n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes d'arc électrique sur la languette et le capuchon isolant orange
  3. Court-circuits entre les porte-ampoules de rechange et le microcontact et

  4. Court-circuits entre le microcontact et la fixation universelle (languette en U) de la ferrure du rivet de la douille.

    Certains porte-ampoules de rechange en métal présentaient des signes de court-circuits. Une telle situation s'est apparemment produite parce que, au moment de son insertion dans la lampe, le porte-ampoule de rechange a provoqué un court-circuit entre les raccordements non isolés du micro-contact et le support de la fixation universelle de la ferrure du rivet de la douille.

    Pièce produite n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes de court-circuit sur le porte-ampoules de rechange de la lampe
    Pièce produite n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes de court-circuit sur le porte-ampoules de rechange de la lampe
    Pièce produite n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes de court-circuit sur la ferrure du rivet de la douille
    Pièce produite n'appartenant pas au SR 111 montrant des signes de court-circuit sur la ferrure du rivet de la douille

Lampes de lecture de l'équipage de conduite
Numéro de pièce des lampes de lecture Constructeur d'aéronef Type d'aéronef Bulletin de service (BS) Lettre d'information de service (SIL)
2LA 004 626-00 IPTN
(Indonesian Aerospace) Fokker
N250

Fokker 50

Fokker 70
Fokker 100
AS-M (Aerospatiale) A300-600 SB
A310 SB
A330 SB
A340 SB
CASA CN-235 SIL
CN-295 SIL
Fairchild Dornier DO-228
2LA 004 626-05 Fairchild Dornier DO 328 SB
2LA 005 075-00 SAAB SAAB 340 SIL
SAAB 2000 SIL
2LA 005 075-05 Divers Railway, p. ex TGV
2LA 005 075-10 Divers Railway, p. ex TGV
2LA 005 435-00 Fokker Fokker 50
2LA 005 656-00 Fokker Fokker 50
2LA 005 916-00 Boeing MD11 SB(Boeing)
MD80 SB(Boeing)
DC10 SB(Boeing)
2LA 005 916-10 Boeing MD11
2LA 005 916-20 Boeing MD11
2LA 006 265-00 Embraer EMB 135 SIL
EMB 145 SIL
2LA 006 821-00 AS-M (Aerospatiale) A330
A340

Remarque : En date du 1er juin 2000, Hella Aerospace avait livré plus de treize mille de ces appareils d'éclairage (tous numéros de pièce confondus).


Plafonniers d'allée et éclairage d'urgence du MD–11 (A000062-1)

Place du Centre
4e étage
200, promenade du Portage
Hull (Québec)
K1A 1K8

622-A000062-1
825-A98H0003

Le 29 décembre 2000

Monsieur John Clark, directeur-adjoint
Office of Aviation Safety
National Transportation Safety Board
490 L'Enfant Plaza East, S.W.
Washington, DC 20594

Objet : Lettre de sécurité aérienne A000062-1 (A98H0003)
Plafonniers d'allée et éclairage d'urgence du MD–11

Monsieur,

L'enquête sur l'accident du vol 111 de Swissair (SR 111) a révélé une surchauffe des plafonniers d'allée et de l'éclairage d'urgence du MD–11. L'identification de toute source de chaleur potentielle qui pourrait constituer une source d'inflammation constitue un point particulièrement intéressant pour les enquêteurs. La présente lettre a pour objet de communiquer à votre bureau les résultats de l'enquête relativement à ces dispositifs d'éclairage.

L'intérêt porté aux plafonniers d'allée et à l'éclairage d'urgence du MD–11 découle de l'analyse des panneaux de plafond endommagés par la chaleur dans l'avion du vol SR 111. Ces dommages semblaient reliés à une surchauffe des dispositifs d'éclairage. L'examen des plafonniers d'allée et de l'éclairage d'urgence d'autres MD–11 en service a révélé que, sur certains plafonniers d'allée, la lentille avait été déformée par la chaleur et que des panneaux de plafond voisins avaient terni. L'annexe ci-jointe résume les résultats de l'enquête sur ces anomalies obtenus jusqu'à ce jour.

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada n'a connaissance d'aucun bulletin de service, d'aucune lettre d'information ni d'aucune modification de conception reliés à ce problème de surchauffe des plafonniers d'allée du MD–11. Par conséquent, les présents renseignements vous sont fournis afin que vous puissiez prendre toute mesure de suivi qui vous semblerait pertinente.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
Daniel Verreault, ing.

c.c.

M. Jean Overney, représentant accrédité pour la Suisse
Bureau d'enquêtes sur les accidents d'aviation
Bahnholfplatz 10 B
CH -3003 Berne, Suisse

M. J. McMenemy, observateur
du ministre des Transports du Canada
Place-de-Ville, tour C, 7e étage
330, rue Sparks
Ottawa (Ontario) Canada
K1A 0N8

M. Bob Henley, enquêteur sur la sécurité aérienne
FAA
SR-111 FAA Liaison
FAA Headquarters
800 Independence Ave., S.W.
Washington, DC 20591, U.S.A.

M. André Auer, directeur
Bureau fédéral de l'aviation civile
Maulbeerstrasse 9
CH-3003 Berne, Suisse

M. Ronald J. Hinderberger
Boeing Commercial Airplane Group
Director Air Safety Investigation
P.O. Box 3707
MC 67-PR
Seattle, Washington 98124-2207

M. Willi Schurter
SR 111 Post Emergency Organisation
SR Technics
CH-8058 Zurich-Aéroport
Suisse

Annexe à la lettre de sérité Aérienne A000062-1
  1. Observations sur les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgenceNote de bas de page 53 :

    Observations sur les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgence
    Observations sur les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgence
  2. Pièces n'appartenant pas à l'avion du vol SR 111 produites pour illustrer des lentilles endommagées par la chaleur ainsi que le ternissement de panneaux de plafond sous l'effet de la chaleur :

    Exemple de lentille endommagée par la chaleur
    Exemple de lentille endommagée par la chaleur
    Exemple de ternissement d'un panneau de plafond
    Exemple de ternissement d'un panneau de plafond

    Voici les résultats obtenus à partir de l'échantillon de trois avions :

    Nombre d'années en service Pourcentage des lentilles déformées par la chaleur Pourcentage du ternissement
    8 65 89
    4 3 90
    2 0 31

  1. Intensité électrique nominale : En procédant par échantillonnage, on a mesuré l'intensité électrique d'un plafonnier d'allée. Pour l'ampoule à incandescence GE 623 spécifiée par le fabricant, on a mesuré une intensité de 0,52 A. Une étiquette apposée sur l'appareil d'éclairage d'allée indique que celui-ci est conçu pour fonctionner sous une tension de 28 V c.c. et une intensité de 0,37 A. Par conséquent, l'intensité réelle mesurée correspondait à 143 % de l'intensité nominale.

  2. Températures en vol : Afin de déterminer les températures atteintes dans les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgence ainsi qu'à leurs abords immédiats pendant un vol normal, on a équipé trois avions de thermomètres-rubans. Dans les trois avions, les plafonniers d'allée ont atteint des crêtes de température avoisinant les 200 °C et des températures moyennes comprises entre 143 et 160 °C ont été atteintes. En général, les températures les plus élevées ont été mesurées dans le compartiment de première classe tandis que celles du compartiment de la classe affaires avaient tendance à être plus basses. Des températures allant de 110 à 138 °C ont été mesurées à l'extérieur de certains plafonniers d'allée.


Plafonniers d'allée et éclairage d'urgence du MD–11 (A000062-2)

Place du Centre
4e étage
200, promenade du Portage
Hull (Québec)
K1A 1K8

622-A000062-2
825-A98H0003

Le 29 décembre 2000

M. R. Presnell
Manager, Customer Service
Luminator Aircraft Products
1200 E. Plano Parkway, Suite 300
Plano, Texas 75074-0030

Objet : Lettre de sécurité aérienne A000062-2 (A98H0003)
Plafonniers d'allée et éclairage d'urgence du MD–11

Monsieur,

L'enquête sur l'accident du vol 111 de Swissair (SR 111) a révélé une surchauffe des plafonniers d'allée et de l'éclairage d'urgence du MD–11. L'identification de toute source de chaleur potentielle qui pourrait constituer une source d'inflammation constitue un point particulièrement intéressant pour les enquêteurs. La présente lettre a pour objet de communiquer à votre entreprise les résultats de l'enquête relativement à ces dispositifs d'éclairage.

Les circonstances de l'accident sont maintenant bien connues. Le 2 septembre 1998, un avion McDonnell Douglas MD–11 (numéro de série 48448) de la Swissair, immatriculé HB-IWF, a décollé de l'aéroport John F. Kennedy de New York, à 21 h 18, heure avancée de l'Atlantique, à destination de Genève, en Suisse. Environ 53 minutes après le décollage, alors que l'avion était en croisière au niveau de vol 330, l'équipage a senti une odeur inhabituelle dans le poste de pilotage. Trois minutes et demie plus tard, l'équipage a envoyé le signal « PAN, PAN, PAN » et a avisé le contrôleur des Services de la circulation aérienne (ATS) de la présence de fumée dans le poste de pilotage pour lui demander un déroutement. Environ 11 minutes plus tard, la situation s'était détériorée au point où les circuits électriques étaient gravement touchés, et l'équipage a déclaré une « urgence » aux ATS. Quelque six minutes et demie plus tard, vers 22 h 31, l'avion s'est abîmé dans l'océan Atlantique, près de Peggy's Cove, Nouvelle-Écosse, Canada. Les 215 passagers et 14 membres d'équipage à bord ont péri. L'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) se poursuit.

Le BST envoie des lettres de sécurité aérienne au ministère canadien des Transports et aux autres parties intéressées qui voudraient donner suite aux renseignements en matière de sécurité ayant été présentés.

L'intérêt porté aux plafonniers d'allée et à l'éclairage d'urgence du MD–11 découle de l'analyse des panneaux de plafond endommagés par la chaleur dans l'avion du vol SR 111. Ces dommages semblaient reliés à une surchauffe des dispositifs d'éclairage. L'examen des plafonniers d'allée et de l'éclairage d'urgence d'autres MD–11 en service a révélé que, sur certains plafonniers d'allée, la lentille avait été déformée par la chaleur et que des panneaux de plafond voisins avaient terni. L'annexe ci-jointe résume les résultats de l'enquête sur ces anomalies obtenus jusqu'à ce jour.

Le Bureau de la sécurité des transports du Canada n'a connaissance d'aucun bulletin de service, d'aucune lettre d'information ni d'aucune modification de conception reliés à ce problème de surchauffe des plafonniers d'allée du MD–11. Par conséquent, les présents renseignements vous sont fournis afin que vous puissiez prendre toute mesure de suivi qui vous semblerait pertinente.

Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.

Le directeur des enquêtes (Air),
Daniel Verreault, ing.

Annexe à la lettre de sécurité aérienne A000062-2
  1. Observations sur les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgenceNote de bas de page 53 :

    Observations sur les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgence
    Observations sur les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgence
  2. Pièces n'appartenant pas à l'avion du vol SR 111 produites pour illustrer des lentilles endommagées par la chaleur ainsi que le ternissement de panneaux de plafond sous l'effet de la chaleur :

    Exemple de lentille endommagée par la chaleur
    Exemple de lentille endommagée par la chaleur
    Exemple de ternissement d'un panneau de plafond
    Exemple de ternissement d'un panneau de plafond

    Voici les résultats obtenus à partir de l'échantillon de trois avions :

    Nombre d'années en service Pourcentage des lentilles déformées par la chaleur Pourcentage du ternissement
    8 65 89
    4 3 90
    2 0 31

  3. Intensité électrique nominale : En procédant par échantillonnage, on a mesuré l'intensité électrique d'un plafonnier d'allée. Pour l'ampoule à incandescence GE 623 spécifiée par le fabricant, on a mesuré une intensité de 0,52 A. Une étiquette apposée sur l'appareil d'éclairage d'allée indique que celui-ci est conçu pour fonctionner sous une tension de 28 V c.c. et une intensité de 0,37 A. Par conséquent, l'intensité réelle mesurée correspondait à 143 % de l'intensité nominale.

  4. Températures en vol : Afin de déterminer les températures atteintes dans les plafonniers d'allée et l'éclairage d'urgence ainsi qu'à leurs abords immédiats pendant un vol normal, on a équipé trois avions de thermomètres-rubans. Dans les trois avions, les plafonniers d'allée ont atteint des crêtes de température avoisinant les 200 °C et des températures moyennes comprises entre 143 et 160 °C ont été atteintes. En général, les températures les plus élevées ont été mesurées dans le compartiment de première classe tandis que celles du compartiment de la classe affaires avaient tendance à être plus basses. Des températures allant de 110 à 138 °C ont été mesurées à l'extérieur de certains plafonniers d'allée.