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Rapport d'enquête aéronautique A94Q0215

Approche aux instruments - collision avec le sol
Air Satellite
Cessna 402b C-FFAS
1,5 nm à l'est de Havre-Saint-Pierre (Qué



Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.

Résumé

Le pilote, seul à bord, a décollé de Lourdes-de-Blanc-Sablon (Québec) pour un vol à destination de Havre-Saint-Pierre (Québec). À environ 25 milles marins de la destination, le pilote a commencé sa descente vers l'aéroport. Durant la descente, l'aéronef a pénétré dans des averses de neige. Le pilote a continué son approche aux instruments jusqu'à l'altitude minimale de descente (MDA). Peu après, l'aéronef a touché le sol et s'est écrasé à environ 1,5 mille marin du seuil de piste. Le pilote a subi des blessures légères; l'avion a subi des dommages importants.

Le Bureau a déterminé que le pilote a poursuivi la descente au-dessous de la MDA sans les références visuelles nécessaires.

1.0 Renseignements de base

1.1 Déroulement du vol

Le Cessna 402B de la compagnie Air Satellite, assurant le vol 638, a décollé de Lourdes-de-Blanc-Sablon (Québec) selon les règles de vol aux instruments (IFR) Note de bas de page 1 à destination de Havre-Saint-Pierre (Québec) avec un chargement de courrier.

À 6 000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl), il régnait des conditions météorologiques de vol à vue (VMC). À environ 35 milles marins (nm) de Havre-Saint-Pierre, le pilote a commencé sa descente. À 25 nm de l'aéroport et à une altitude de 5 000 pieds asl, le pilote a contacté le spécialiste de la station d'information de vol (FSS) de Sept-Îles (Québec) par le biais de l'installation radio télécommandée (RCO). Il a demandé les conditions météorologiques pour l'aéroport de Havre-Saint-Pierre. Le spécialiste lui a transmis le dernier rapport météorologique disponible pour la FSS de Havre-Saint-Pierre. Ce rapport avait été émis trois heures auparavant par Environnement Canada. La séquence météorologique indiquait des conditions VMC. Le pilote pouvait apercevoir la ville de Havre-Saint-Pierre quand il a commencé l'approche faisceau arrière pour la piste 27.

Durant la descente, l'aéronef a pénétré dans des averses de neige. Le pilote a contacté la compagnie pour vérifier les conditions météorologiques à l'aéroport de Havre-Saint-Pierre et on lui a mentionné qu'il y avait des chutes de neige légère. Le pilote a continué son approche jusqu'à la MDA indiquée sur la carte d'approche de Havre-Saint-Pierre, soit 420 pieds asl. Il y avait de la turbulence modérée durant l'approche. Le pilote a essayé de garder le contrôle de l'appareil pendant qu'il communiquait par radio pour essayer d'obtenir des informations plus précises sur les conditions météorologiques. Un des pilotes de la compagnie lui a signalé que les chutes de neige étaient plus importantes. L'aéronef s'est alors incliné à droite. Le pilote a corrigé ce mouvement et, au même moment, les roues ont touché le sol. L'aéronef s'est écrasé et a glissé sur le ventre sur une distance d'environ 100 pieds avant de s'arrêter. Le pilote a subi des blessures légères; l'appareil a subi des dommages importants.

L'accident s'est produit à environ 1,5 mille marin du seuil de la piste 27 à Havre-Saint-Pierre, sur un terrain marécageux. Le pilote est demeuré en contact radio avec les aéronefs le survolant et a mentionné qu'il resterait à bord de l'appareil jusqu'à l'arrivée des secours. Des équipes de Recherches et sauvetage se sont dirigées à pied vers les lieux de l'écrasement, mais ils n'ont pu localiser l'appareil à cause du terrain accidenté et de la visibilité réduite. Cinq heures plus tard, un hélicoptère de Recherches et sauvetage a pu localiser l'aéronef à l'aide du radiogoniomètre. Le faible signal de la radiobalise de détresse (ELT) était toujours perceptible et a pu être capté. Le pilote a été transporté à l'hôpital pour y recevoir les premiers soins.

L'accident s'est produit de nuit, vers 17 h 14, heure normale de l'Est (HNE) Note de bas de page 2, par 50° 16′ de latitude Nord et 63° 36′ de longitude Ouest Note de bas de page 3.

1.2 Victimes

Équipage Passagers Tiers Total
Tués - - - -
Blessés graves - - - -
Blessés légers/indemnes 1 - - 1
Total 1 - - 1

1.3 Dommages à l'aéronef

L'aéronef a subi des dommages importants au train d'atterrissage, aux moteurs et aux hélices. Les dommages structuraux sont assez importants.

1.4 Autres dommages

L'aéronef a déraciné quelques arbustes avant de s'immobiliser.

1.5 Renseignements sur le pilote

Pilote
Âge 22 ans
Licence pilote professionnel
Date d'expiration du certificat de validation 1er septembre 1995
Nombre d'heures de vol 689
Nombre d'heures de vol sur type en cause 29
Nombre d'heures de vol dans les 90 derniers jours 192
Nombre d'heures de vol sur type en cause dans les 90 derniers jours 25
Nombre d'heures de service avant l'événement 8
Nombre d'heures libres avant la prise de service 8

1.5.1 Expérience et qualifications du pilote

Le pilote possédait la licence et les qualifications nécessaires au vol et en vertu de la réglementation en vigueur. Il avait subi avec succès sa vérification de compétence pilote (PPC) et son annotation de vol aux instruments sur le Cessna 402B de la compagnie le 4 novembre 1994. Il était qualifié pour voler comme commandant de bord sur cet appareil.

Cependant, le manuel d'exploitation de la compagnie et l'Ordonnance sur la navigation aérienne (ONA) série VII, no 3 (4) mentionnent que lorsque :

la mise en oeuvre d'un avion sera autorisée sans commandant en second, cet avion devra être piloté conformément aux conditions et limitations contenues à l'annexe C, paragraphe 1 (e) :

aucun vol ne doit se terminer sur un aéroport dans des conditions météorologiques inférieures aux minima météorologiques d'aéroport de dégagement mentionnés pour cet aéroport dans le Canada Air Pilot.ou dans les spécifications d'exploitation.

Pour l'aéroport de Havre-Saint-Pierre, l'altitude minimale de dégagement spécifiée dans le Canada Air Pilot.est de 1 600 pieds asl avec trois milles de visibilité.

Le pilote, en tant que commandant de bord seul à bord, n'était pas autorisé à descendre plus bas que les minima météorologiques d'aéroport de dégagement à destination. Le pilote ne connaissait pas bien cette limitation qu'il devait respecter en tant que pilote commandant de bord seul à bord.

1.6 Renseignements sur l'aéronef

Constructeur Cessna Aircraft Company
Type 402B
Année de construction 1975
Numéro de série 402B0820
Certificat de navigabilité valide
Nombre total d'heures de vol cellule 7 012
Type de moteur (nombre) Continental TSIO 520 (2)
Type d'hélice (nombre) McCauley 3AF32C87 (2)
Masse maximale autorisée au décollage 6 300 lb
Types de carburant recommandés essence aviation 100 LL
Type de carburant utilisé essence aviation 100 LL

L'aéronef était certifié, équipé et entretenu conformément à la réglementation en vigueur et aux procédures approuvées. La masse et le centrage de l'aéronef se trouvaient dans les limites prescrites.

Les deux altimètres ont été vérifiés immédiatement après l'accident. Ils avaient été étalonnés récemment et l'erreur indiquée était en deçà des 50 pieds requis pour le vol aux instruments. Aucune défectuosité n'a été décelée ni signalée par le pilote.

L'aéronef n'était pas équipé d'un altimètre radar ni d'un avertisseur d'altitude. La réglementation en vigueur n'imposait pas l'emport de ces instruments pour ce type d'aéronef.

1.7 Renseignements météorologiques

Lorsque le pilote a quitté Lourdes-de-Blanc-Sablon pour Havre-Saint-Pierre, les conditions météorologiques actuelles et prévues pour la destination Havre-Saint-Pierre étaient des conditions VMC. Vers 17 h 5, en route de Lourdes-de-Blanc-Sablon à Havre-Saint-Pierre, le pilote a volé de nuit dans des conditions VMC.

À 25 milles de sa destination, le pilote a communiqué avec le spécialiste de la FSS de Sept-Îles par le biais du RCO, de qui il a obtenu la dernière séquence météorologique pour Havre-Saint-Pierre. Cette séquence avait été transmise à 14 h par la station AWOS (système automatisé d'observations météorologiques) au centre de données météorologiques d'Environnement Canada de Dorval, qui l'a communiquée à 14 h 14 au spécialiste de la FSS de Sept-Îles. Selon la séquence, il y avait une couche de nuages épars à 3 000 pieds, la visibilité était supérieure à neuf milles et les vents soufflaient du 290 degrés à 25 noeuds avec des rafales pouvant atteindre 35 noeuds.

Aucune donnée météorologique n'a été transmise par le centre de données météorologiques d'Environnement Canada entre 14 h 14 et 17 h 35. À 17 h 35, soit quelque 20 minutes après l'accident, la station AWOS ne signalait pas de plafond mais indiquait une visibilité de 0,7 mille dans la neige faible.

Le pilote avait volé dans des conditions VMC toute la journée. En route pour Havre-Saint-Pierre, il a reçu un rapport météorologique indiquant des conditions VMC.

1.7.1 Stations AWOS

L'AWOS est composé d'un ensemble de capteurs météorologiques, d'un système de traitement de données, et d'un système de communications. Les capteurs mesurent et signalent la température de l'air, le point de rosée, la visibilité, la vitesse du vent, le calage altimétrique, les nuages (hauteur et nébulosité), les précipitations et le givrage. Toutes ces données transmises par les capteurs sont recueillies, identifiées puis mises en ordre par un contrôleur central, lequel les achemine ensuite vers un contrôleur de communications (CC) situé sur le site de la station AWOS. Par la suite, ces données sont envoyées par ligne téléphonique aux ordinateurs d'Environnement Canada à Dorval. Les données AWOS sont acheminées par le biais de trois ordinateurs, avant d'être acheminées à l'ordinateur central (CODCON) qui transforme les données brutes (RA) en rapports météorologiques (SA, RS, SP). À partir du CODCON, les données sont transmises à un autre CMC (ordinateur TANDEM), qui les transmet au ANIKOM (FSS, DEA, Météomédia, etc.).

Au cours des années 80, Environnement Canada a procédé à l'installation de stations d'observations météorologiques automatiques (qui n'étaient pas tenues de répondre aux exigences aéronautiques) à certains aéroports ayant un faible trafic, comme Parent, Chévery, Port-Menier et Rivière-du-Loup. Transports Canada a ensuite graduellement installé des stations AWOS plus performantes pour améliorer ou remplacer le programme d'observations météorologiques en surface de certaines FSS. La station AWOS de Havre-Saint-Pierre est entrée en service le 17 novembre 1994.

1.7.2 Station AWOS de Havre-Saint-Pierre

Le jour de l'accident, les capteurs de la station AWOS ont bien fonctionné, et les observations horaires et spéciales ont été transmises au centre de données météorologiques d'Environnement Canada à Dorval. Cependant, une défectuosité au niveau de l'ordinateur central CODCON a causé un retard d'environ trois heures dans la transmission des données, soit de 14 h 14 à 17 h 35.

Environnement Canada a dû remplacer le logiciel en place car il n'était pas assez efficace. Depuis, un nouvel ordinateur CODCON II a été installé et le traitement des données est plus efficace. De plus, le plan d'action régional de Transports Canada prévoit la reprise des observations météorologiques à Havre-Saint-Pierre en attente de l'amélioration du système AWOS.

1.7.3 Exigences de calage altimétrique

La partie Minimums opérationnels - atterrissage du manuel des cartes d'approche Canada Air Pilot - Est.stipule ce qui suit :

Avant d'entamer une procédure d'approche aux instruments, le pilote doit régler l'altimètre de l'aéronef sur un calage altimétrique en cours utilisable pour l'endroit où l'approche aura lieu. Le calage altimétrique est fourni avec le rapport météorologique horaire régulier. De telles lectures sont considérées valides pour 90 min après le moment d'observation.

ATTENTION : L'utilisation de calages altimétriques dépassant 60 min ou les baisses rapides de pression signalées devraient faire l'objet de soins particuliers.

Le pilote a utilisé le calage altimétrique du rapport météorologique horaire régulier, transmis 180 minutes avant l'approche. La différence entre les deux calages altimétriques était de l'ordre de 0,02 pouce de mercure, soit 20 pieds.

1.8 Aides à la navigation

L'émetteur d'alignement de piste du faisceau arrière de la piste 27 à l'aéroport de Havre-Saint-Pierre fonctionnait normalement, et aucune anomalie n'a été signalée durant la vérification périodique de l'unité ou par les pilotes l'ayant utilisée, que ce soit avant ou après l'accident.

1.9 Télécommunications

Les communications entre l'aéronef et la FSS de Sept-Îles par le biais du RCO ont été normales. Aucune défectuosité n'a été signalée, que ce soit avant ou après l'accident.

1.10 Renseignements sur l'aéroport

L'aéroport de Havre-Saint-Pierre possède une piste asphaltée de 4 500 pieds de longueur sur 100 pieds de largeur. Il y a deux types d'approche. Il y a un radiophare d'alignement de piste (LOC) coimplanté avec un équipement de mesure de distance (DME) sur la piste 09 et un alignement arrière (BC) sur la piste 27. La MDA publiée pour l'approche LOC(BC)/DME de la piste 27 que le pilote a suivie est de 420 pieds asl.

1.11 Enregistreurs de bord

L'aéronef n'était pas équipé d'un enregistreur de données de vol (FDR) ni d'un enregistreur phonique (CVR). La réglementation en vigueur n'imposait pas l'emport d'enregistreurs de bord pour ce type d'aéronef.

1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact

L'aéronef a touché le sol à environ 1,5 mille du seuil de la piste 27. L'aéronef était dans une assiette horizontale et le train d'atterrissage était sorti au moment de l'impact. L'altitude du lieu de l'accident est de 124 pieds asl.

1.13 Renseignements médicaux

Rien n'indique qu'une incapacité ou des facteurs physiologiques ou psychologiques aient pu perturber les capacités du pilote.

1.14 Incendie

Rien n'indique qu'il y ait eu un incendie, que ce soit avant ou après l'accident.

1.15 Questions relatives à la survie des occupants

Le pilote a subi des blessures légères lors de l'impact. Il portait une ceinture de sécurité à quatre points d'ancrage; il n'a toutefois pas été possible de déterminer comment le baudrier avait été serré.

Pour se garder au chaud au sol, le pilote a utilisé le manteau d'hiver fourni par la compagnie et est resté à bord de l'appareil jusqu'à ce que les secouristes arrivent sur les lieux. La radiobalise de détresse a bien fonctionné et a transmis un signal faible.

Des recherches ont été entreprises par la police locale et par le personnel de l'aéroport. Cependant, ces derniers n'ont pu localiser l'aéronef à cause du terrain accidenté et des rivières qu'il fallait traverser. De plus, la visibilité était réduite. Un hélicoptère de Recherches et sauvetage a localisé l'aéronef à l'aide du radiogoniomètre. Le signal de la radiobalise était toujours perceptible et a pu être capté.

1.16 Renseignements sur l'organisation et la gestion

Le chef pilote de la compagnie connaissait bien le manuel d'exploitation de la compagnie et la réglementation aérienne ( ONA, série VII, no 3 (4).. Il connaissait les limites que le pilote devait respecter, et lui avait expliqué qu'il pouvait voler seul dans des conditions VMC et, également, en conditions IMC lorsque celles-ci sont égales ou supérieures aux altitudes minimales de dégagement spécifiées dans le Canada Air Pilot. Il lui avait demandé de voler avec un deuxième pilote si les conditions météorologiques exigeaient le vol aux instruments (IMC).

1.17 Renseignements supplémentaires

1.7.1 Entraînement de vol aux instruments

L'entraînement, l'exécution des listes de vérification, l'apprentissage et l'exécution mécanique et routinière des procédures d'exploitation contribuent à assurer un pilotage en toute sécurité. Lorsque le pilote apprend à voler aux instruments, il apprend l'importance de la préparation du vol, de l'approche et de l'approche manquée avec remontée.

Le pilote doit se préparer mentalement à son plan d'action avec les limites et les décisions à prendre selon les options, comme la hauteur minimale de descente (MDA) et la distance à laquelle l'approche manquée doit être faite. Plusieurs études ont démontré que le temps de réaction est beaucoup plus lent si l'individu n'est pas préparé mentalement à l'événement qui survient.

1.17.2 Modèle mental

Le pilotage comporte des tâches d'observations et de réactions à des indices ou des événements qui sont présents à l'intérieur et à l'extérieur de l'appareil. Au fur et à mesure que le temps passe, ces indices et événements changent et le pilote doit adapter le pilotage de l'aéronef en conséquence et prendre des décisions pour que le vol se poursuive en toute sécurité.

Les indices visuels extérieurs et les indications des instruments à l'intérieur de l'aéronef perçus par le pilote font en sorte que ce dernier se fait un modèle mental de son environnement et de la position de l'aéronef dans l'espace. Durant le vol, les informations perçues par le pilote vont confirmer ou défaire le modèle mental établi.

1.17.3 Transition du vol VFR au vol IFR

La transition entre le vol VFR et le vol IFR est considérée comme une tâche très difficile. Le pilote doit parfois s'ajuster très rapidement à des différences d'échelles, de format et de contenu d'information. Le pilote doit prêter attention à la fois à l'information extérieure et à l'information à l'intérieur du poste de pilotage.

Durant le vol dans des conditions IMC, l'information nécessaire à la poursuite du vol provient des instruments de vol. Cette information doit être intégrée à un modèle mental de position et d'altitude de l'appareil dans l'espace. Ce modèle mental doit inclure des caractéristiques extérieures qui seront présentes lors de la transition du vol VFR au vol IFR.

Lors d'une approche aux instruments, de la confusion peut exister dans l'esprit du pilote lorsque les conditions réelles ne correspondent pas à celles du modèle mental établi. Le pilote tentera alors de discerner les indices extérieurs qui lui permettront de confirmer ou de mettre à jour son modèle mental, parfois au détriment du balayage des instruments.

1.17.4 Charge de travail

Un pilote volant seul dans des conditions IMC a une charge de travail déjà plus élevée que s'il y avait deux pilotes à bord. Le vol dans des conditions turbulentes ou difficiles augmente aussi la charge de travail. Lors d'un vol avec deux membres d'équipage, c'est habituellement le pilote aux commandes qui s'occupe du pilotage de l'appareil, tandis que l'autre pilote s'occupe des communications radio, de la contre-vérification des instruments, des annonces des altitudes minimales et autres. Ce partage des tâches permet d'équilibrer la charge de travail.

Lorsque la charge de travail est plus élevée, il arrive que le pilote balaie les instruments plus lentement ou moins attentivement et même qu'il fixe son attention sur un instrument donné. Lorsque le vol se déroule sans deuxième pilote à bord pour contre-vérifier les instruments, des aide-mémoire comme un altimètre radar ou un avertisseur d'altitude peuvent être utilisées; ces aide-mémoire permettent d'alerter le pilote puisqu'un avertissement visuel ou sonore, ou les deux, se déclenche lorsque l'aéronef atteint l'altitude sélectionnée.

1.17.5 Attention canalisée

L'attention canalisée se manifeste lorsqu'une personne se concentre exclusivement sur un stimulus à l'exclusion des autres. Cela devient un problème si cette personne n'accomplit pas une tâche ou ne traite pas l'information plus prioritaire ou plus pressante, et ainsi ne remarque pas les indices qui exigent immédiatement son attention ou n'a pas le temps d'y réagir. Le pilote doit balayer les instruments rapidement, sans fixer un instrument en particulier. S'il fixe un instrument trop longtemps, il laisse passer de l'information importante dans un environnement qui change constamment.

1.17.6 Minimums d'atterrissage

Le Règlement de l'Air no 555.stipule que les atterrissages sont gérés par les hauteurs de décision (DH) et les altitudes minimales de descente (MDA). Le Canada Air Pilot.précise que les pilotes d'aéronef, effectuant des approches aux instruments, ne peuvent continuer leur descente à moins que la référence visuelle requise ne soit établie et maintenue pour réaliser un atterrissage sûr. Les références visuelles requises par le pilote pour continuer l'approche en vue d'un atterrissage devraient comprendre au moins une des références suivantes et elles devraient être visibles et identifiables :

  1. la piste ou son balisage;
  2. le seuil de piste ou son balisage;
  3. la zone de posé ou son balisage;
  4. les feux d'approche;
  5. le système indicateur de pente d'approche;
  6. les feux d'identification de piste (RILS)
  7. les feux de seuil et d'extrémité de piste;
  8. les feux de zone de posé;
  9. les feux de bord de pistes parallèles;
  10. les feux de l'axe de piste.

Aucune des références visuelles mentionnées ci-dessus n'a été établie par le pilote lors de l'approche avant l'impact au sol.

2.0 Analyse

2.1 Les conditions météorologiques et la station AWOS

Au moment de l'accident, la station AWOS a transmis des données qui correspondaient aux conditions météorologiques qui prévalaient à Havre-Saint-Pierre. Cependant, ces données n'ont pas été retransmises au pilote par le biais du spécialiste de la FSS de Sept-Îles.

Une défectuosité de l'ordinateur central CODCON à Dorval a causé un retard d'environ trois heures dans la transmission des données pour Havre-Saint-Pierre, soit de 14 h 14 à 17 h 35, période au cours de laquelle s'est produit l'accident.

2.2 Préparation du pilote

À 25 nm de Havre-Saint-Pierre, le pilote a commencé la descente. Il a demandé la dernière séquence météorologique au spécialiste de la FSS de Sept-Îles. Celle-ci lui a été donnée et elle faisait état de conditions VMC. Le pilote a utilisé un calage altimétrique qui datait de plus de 90 minutes, ce qui donnait une erreur d'environ 20 pieds sur l'altimètre. Toutefois, cette erreur est négligeable et n'est pas considérée comme un facteur dans l'accident.

Après avoir aperçu les lumières de la ville et se fiant au rapport météo qu'il avait reçu, le pilote a entrepris d'effectuer l'approche aux instruments sur la piste 27. Le pilote s'attendait à rencontrer des conditions VMC au cours de l'approche et il ne s'est pas préparé à la possibilité d'effectuer une remontée.

Comme il faisait nuit, le pilote n'a pas pu apercevoir les nuages ni les averses de neige autour de l'aéroport. Au cours de l'approche aux instruments, le pilote ne s'est pas aperçu que les conditions IMC qui prévalaient étaient très différentes des conditions VMC auxquelles il s'attendait. Les conditions IMC qui prévalaient ne lui ont pas permis d'établir les références visuelles nécessaires au cours de l'approche.

2.3 La charge de travail et l'attention du pilote

Le fait que le pilote a dû exécuter une approche aux instruments, alors qu'il était seul à bord et qu'il faisait nuit, dans des conditions de turbulence modérée et sans avoir établi les références visuelles auxquelles il s'attendait, a augmenté sa charge de travail. De plus, les appels radio, qu'il a effectués au cours de l'approche finale parce qu'il voulait connaître les conditions météorologiques qui prévalaient à l'aéroport, ont également augmenté cette charge de travail.

Pendant l'approche, le pilote a dû effectuer le balayage des instruments, essayer d'établir les références visuelles nécessaires et effectuer des appels radio. Parce que le pilote a dû concentrer son attention sur toutes ces tâches pendant l'approche, le balayage des instruments a été fait moins attentivement, en particulier, le balayage de l'altimètre. N'effectuant plus un suivi efficace de la trajectoire verticale, le pilote a laissé l'aéronef descendre au-dessous de la MDA jusqu'à ce qu'il heurte le sol.

Selon la réglementation aérienne et le Canada Air Pilot. le pilote n'était pas autorisé à descendre à une altitude inférieure à 1 600 pieds asl sans avoir établi et maintenu les références visuelles nécessaires avec la piste ou son balisage. N'ayant pas établi les références visuelles nécessaires, le pilote a continué l'approche dans des conditions IMC jusqu'à ce que l'aéronef heurte le sol, alors qu'il aurait pu faire une remontée. Cette remontée aurait permis au pilote soit d'effectuer une autre approche aux instruments, cette fois dans des conditions IMC connues, soit de se diriger vers l'aéroport de dégagement si les conditions ne lui permettaient pas de se poser à l'aéroport de Havre-Saint-Pierre.

3.0 Faits établis

  1. Le pilote était qualifié pour le vol entrepris.
  2. La station AWOS de Havre-Saint-Pierre a transmis les conditions météorologiques qui avaient été captées.
  3. L'ordinateur CODCON d'Environnement Canada à Dorval n'a pu traiter ni transmettre les données aux usagers pendant trois heures, période au cours de laquelle le vol et l'accident ont eu lieu.
  4. Le pilote ne s'est pas préparé à effectuer l'approche aux instruments dans des conditions IMC.
  5. Le pilote ne s'est pas préparé à effectuer une remontée à une altitude prédeterminée au cas où il n'établirait pas le contact visuel avec la piste ou ses environs.
  6. Le pilote a poursuivi la descente au-dessous de la MDA, sans avoir établi et maintenu les références visuelles nécessaires avec la piste ou son balisage.
  7. En approche finale, l'appareil a heurté des arbres et s'est écrasé sur l'axe du prolongement de la piste 27, à environ 1,5 mille du seuil de piste.

3.1 Causes

Le pilote a poursuivi la descente au-dessous de la MDA sans les références visuelles nécessaires.

4.0 Mesures de sécurité

4.1 Mesures prises

4.1.1 Système automatisé d'observations météorologiques (AWOS)

Depuis cet accident, Transports Canada a publié un avis aux aviateurs (NOTAM) de classe 1 et a envoyé à tous les titulaires de licence de pilote au Canada un avis aux navigants concernant les lacunes du système AWOS. De plus, Transports Canada, de concert avec Environnement Canada, a mis sur pied un groupe de travail chargé de corriger les lacunes du système AWOS et de valider l'amélioration de la performance du système AWOS. La mise en service officielle d'autres stations AWOS a été suspendue temporairement, et certaines stations AWOS déjà en service sont surveillées par des observateurs.

Le présent rapport met fin à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports sur cet accident. La publication de ce rapport a été autorisée le par le Bureau qui est composé du Président John W. Stants et des membres Zita Brunet et Hugh MacNeil.

Annexes

Annexe A - Sigles et abréviations

AWOS
système automatisé d'observations météorologiques
BST
Bureau de la sécurité des transports du Canada
CVR
enregistreur phonique
DME
équipement de mesure de distance
ELT
radiobalise de détresse
FDR
enregistreur de données de vol
h
heure(s)
HNE
heure normale de l'Est
IFR
règles de vol aux instruments
IMC
conditions météorologiques de vol aux instruments
lb
livre(s)
MDA
altitude minimale de descente
nm
mille(s) marin(s)
ONA
Ordonnance sur la navigation aérienne
PPC
vérification de compétence pilote
RCO
installation radio télécommandée
SA
bulletin météo horaire
SP
observation spéciale
UTC
temps universel coordonné
VFR
règles de vol à vue
VMC
conditions météorologiques de vol à vue
°
degré(s)
minute(s)