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Rapport d'enquête sur le vol 111 de Swissair - Résumé

Voici un résumé du rapport du Bureau de la sécurité des transports (BST) du Canada sur l'accident du vol 111 de Swissair, qui s'est produit près de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse) dans la nuit du 2 septembre 1998. L'avion, un MD-11 de McDonnell Douglas, ayant 215 passagers et 14 membres d'équipage à son bord, effectuait un vol régulier de New York (États-Unis) à Genève (Suisse).

Résumé de l'accident

Environ 53 minutes après le départ, alors que l'avion volait au niveau de vol 330 (environ 33 000 pieds), l'équipage de conduite a senti une odeur anormale dans le poste de pilotage. Une petite quantité de fumée s'est infiltrée dans le poste de pilotage, puis il semble que l'infiltration de fumée ait cessé pendant un certain temps. L'équipage de conduite a estimé que l'anomalie était associée au système de conditionnement d'air.

Après s'être entretenu avec les services de la circulation aérienne, l'équipage de conduite a décidé de se dérouter vers l'aéroport international de Halifax (Nouvelle-Écosse), au Canada. Alors que les membres de l'équipage de conduite préparaient l'atterrissage à Halifax, ils ne savaient pas qu'un incendie se propageait au-dessus du plafond, dans la partie avant de l'avion.

Environ 13 minutes après que l'odeur anormale eut été détectée, l'enregistreur de données de vol s'est mis à enregistrer une succession rapide de défaillances de systèmes. L'équipage de conduite a déclaré une situation d'urgence et a indiqué que l'avion devait se poser immédiatement. Environ une minute plus tard, les communications radio et le contact au radar secondaire ont été perdus, et les enregistreurs de bord ont cessé de fonctionner. Environ cinq minutes et demie plus tard, à 22 h 31, heure avancée de l'Atlantique (HAA), l'avion s'est écrasé dans l'océan à environ cinq milles marins au sud-ouest de Peggy's Cove (Nouvelle-Écosse), au Canada. L'avion a été détruit, et il n'y a eu aucun survivant.

Résumé des faits établis et des recommandations du Bureau

Environ 98 % de l'avion, en termes de masse, a été repêché. À partir de l'examen des morceaux d'épave, on a déterminé qu'un incendie s'était déclaré dans le plafond avant de l'avion. Des parties de la zone avant de l'avion ont été reconstruites pour permettre une analyse approfondie des sources d'inflammation potentielles et pour évaluer de quelle façon l'incendie s'était propagé.

On a déterminé que l'incendie s'était fort probablement déclaré à la suite d'un amorçage d'arc électrique qui s'était produit au-dessus du plafond, du côté droit du poste de pilotage, près de la paroi arrière de ce dernier. L'amorçage d'arc a mis le feu au matériau de recouvrement inflammable des matelas d'isolation thermique et acoustique recouverts de poly(éthylène) téréphtalate (PET) métallisé qui se trouvaient dans le voisinage. Comme l'incendie se propageait à la surface des matelas isolants, d'autres matières combustibles ont été touchées, notamment des embouts en élastomère de silicone, des attaches à bouclettes de nylon, des matériaux mousse, des adhésifs, des bandes adhésives pour joints d'isolation thermique et acoustique ainsi que du matériau de recouvrement de matelas isolant en fluorure de polyvinyle (PVF) métallisé. La progression de l'incendie a été rapide, et une combinaison de ces matériaux ont alimenté et propagé ensemble l'incendie.

Inflammabilité des matériaux

Le Bureau a conclu que les normes de certification des aéronefs relatives à l'inflammabilité des matériaux étaient insuffisantes, en ce qu'elles permettaient l'utilisation de matériaux qui pouvaient s'enflammer et alimenter ou propager un incendie. Dans une recommandation rendue publique au cours de l'enquête, le Bureau a demandé aux organismes de réglementation de prendre des mesures, de façon urgente, pour réduire ou éliminer le risque associé à l'utilisation de matelas isolants recouverts de PET métallisé dans les aéronefs. Le Bureau a aussi recommandé que les organismes de réglementation testent tous les matériaux d'isolation thermique et acoustique en fonction de critères d'essai plus rigoureux, et que les normes d'inflammabilité visant les matériaux utilisés dans la fabrication de tout produit aéronautique soient révisées, selon des scénarios d'inflammation réalistes, pour éviter l'utilisation de tout matériau de construction d'aéronef qui alimente ou propage un incendie.

Amorçage d'arc initial

La reconstruction de l'épave a révélé qu'un morceau de câble électrique ayant subi un amorçage d'arc et associé au réseau de divertissement de bord (RDB) se trouvait à l'endroit où l'incendie s'était fort probablement déclaré. Le Bureau a conclu que l'arc électrique de câble avait probablement été associé à l'événement déclencheur de l'incendie. Le Bureau a aussi conclu qu'il est probable qu'un ou plusieurs autres fils avaient participé à l'amorçage d'arc déclencheur de l'incendie et que ce fil ou ces autres fils pouvaient être des fils du RDB ou de l'avion. Par conséquent, il n'a pas été possible de déterminer que l'amorçage d'arc constaté sur le câble du RDB situé dans cette zone où l'incendie s'était fort probablement déclaré avait lui-même déclenché l'incendie.

Au cours de l'enquête, en vue de découvrir et d'éliminer les sources d'inflammation potentielles à bord du MD-11, la Federal Aviation Administration (FAA) a promulgué plus de 70 consignes de navigabilité. Ces consignes de navigabilité demandaient que diverses mesures soient prises, comme des inspections non répétitives des fils et des composants électriques, principalement dans le plafond avant de l'avion.

Au cours de l'amorçage d'arc déclencheur de l'incendie, le ou les disjoncteurs associés ne se sont pas déclenchés. Le Bureau a conclu que bien que les disjoncteurs utilisés dans l'avion, y compris ceux utilisés pour le RDB, ressemblaient à ceux qui sont généralement utilisés à bord des avions, ils n'étaient pas en mesure d'assurer la protection contre tout type d'amorçage d'arc. Le Bureau a recommandé qu'un ensemble d'essais de certification soit rendu obligatoire pour évaluer les caractéristiques de défaillance des fils électriques de bord en fonction de conditions opérationnelles réalistes et selon des critères de rendement précis, afin de réduire le risque d'inflammation de matières combustibles voisines.

Rien n'indique que l'équipage de conduite de SR 111 a réenclenché les disjoncteurs. Toutefois, pendant l'enquête, il est devenu évident que les principes et les procédures régissant le réenclenchement des disjoncteurs variaient considérablement parmi les constructeurs, les exploitants, les équipages de conduite et le personnel de maintenance au sein de l'industrie. Bien qu'une standardisation des pratiques ait fait beaucoup de progrès pendant l'enquête, le Bureau réclame des instructions plus claires de la part des organismes de réglementation.

Détection et extinction d'un incendie

Divers profils de circulation d'air et de propagation d'incendie ont fait l'objet d'une analyse visant à évaluer les indices qui auraient été à la disposition des pilotes pendant les premiers stades de l'incendie. On a déterminé que la petite quantité de fumée et l'odeur d'abord décelées par les pilotes provenaient d'un petit feu rampant qui se propageait à partir de la source d'inflammation initiale vers l'arrière dans la zone située au-dessus du plafond de la partie avant de la cabine.

À mesure que l'incendie se propageait vers l'arrière, il est probable que la fumée qui lui était associée ait temporairement cessé de se manifester dans le poste de pilotage. Comme l'avion n'était pas tenu d'être équipé d'un circuit intégré de détection incendie dans la zone dissimulée où l'incendie a été localisé, les pilotes n'ont pas été avertis de la présence de l'incendie. Le Bureau a conclu que les mesures prises par l'équipage de conduite en vue de préparer l'avion pour l'atterrissage, y compris la décision de préparer la cabine pour l'atterrissage et de larguer le carburant, indiquait que l'équipage de conduite ne savait pas qu'un incendie en vol était en train de se propager. Le calcul d'un profil de descente théorique effectué par le BST pendant l'enquête a confirmé qu'en raison de la progression rapide de l'incendie et de ses effets néfastes sur les divers systèmes de bord et dans le poste de pilotage, l'avion n'aurait pu se poser en toute sécurité à Halifax, même si les pilotes avaient entrepris de le poser au moment de la communication du signal d'urgence PAN PAN, à 22 h 14 HAA.

Le Bureau a rendu publiques plusieurs recommandations visant à réduire les risques d'incendie dans les zones dissimulées d'un aéronef, dont une recommandation demandant aux organismes de réglementation appropriés, de concert avec la communauté de l'aviation, de revoir la méthode établissant les zones désignées comme zones de feu à l'intérieur de la partie pressurisée de l'avion afin d'améliorer les capacités de détection de fumée et d'extinction d'incendie.

Caractère adéquat de la lutte contre les incendies en vol

Les renseignements disponibles indiquent que par le temps que l'équipage de bord s'est rendu compte qu'il y avait un incendie en vol, l'incendie s'était intensifié au point où l'équipement et les méthodes de lutte contres les incendies n'en seraient probablement pas venus à bout. Le Bureau a conclu que des modifications à l'échelle de l'industrie sont nécessaires pour fournir aux équipages de bord des moyens efficaces de détecter et d'éteindre les incendies dans les zones dissimulées ainsi qu'un moyen d'accéder facilement à ces zones pour lutter contre un incendie.

Il n'y avait aucun plan de lutte contre les incendies pour l'avion en question, et ce plan n'était pas exigé par la réglementation. Par conséquent, l'équipage de l'avion ne disposait pas des procédures ni de l'entraînement qui lui auraient permis de tenter énergiquement de localiser et d'éliminer la source de la fumée, et d'accélérer ses préparatifs en vue d'un éventuel atterrissage d'urgence. En l'absence d'un tel plan de lutte contre les incendies, l'équipage de l'avion s'est concentré à préparer l'avion pour le déroutement et l'atterrissage. Le Bureau a recommandé que les organismes de réglementation appropriés, de concert avec la communauté de l'aviation, revoient le caractère adéquat de la lutte contre les incendies en vol dans son ensemble pour assurer que les équipages de bord puissent profiter d'un système dont les éléments sont complémentaires et optimisés pour offrir le plus de chances possible de détecter et d'éteindre tout incendie en vol.

Défaillance de systèmes menant à une propagation accrue de l'incendie

Au cours de l'incendie, la défaillance des embouts en élastomère de silicone fixés sur les gaines d'air conditionné a fourni un approvisionnement continu d'air conditionné qui a contribué à la propagation et à l'intensité de l'incendie.

Le capuchon en aluminium utilisé sur la conduite d'oxygène en acier inoxydable située au-dessus du plafond du poste de pilotage pouvait fuir ou se briser lorsqu'il était exposé aux températures qui existaient probablement lors des dernières minutes du vol. Ces défaillances attiseraient le feu et pourraient compromettre l'approvisionnement en oxygène destiné à l'équipage. Il n'a pas été possible de déterminer si c'est ce qui s'était passé pendant le vol.

Rien n'exige qu'il soit tenu compte des défaillances causées par un incendie lorsqu'est exécutée une analyse des systèmes de sécurité, requise pour la certification d'un aéronef. Le Bureau a recommandé qu'en préalable à la certification, tous les systèmes de bord présents dans la partie pressurisée d'un aéronef, notamment les sous-systèmes, les composants et les raccords, soient évalués pour qu'on puisse assurer que les systèmes, dont la défaillance pourrait aggraver un incendie en cours, sont conçus pour réduire le risque de défaillances causées par un incendie.

Instruments de secours – Emplacement et alimentation électrique

Pendant au moins une partie des dernières minutes du vol, les écrans de vol principaux ont cessé de fonctionner. L'absence de références visuelles a forcé les pilotes à se fier aux instruments de secours.

La situation dans le poste de pilotage se détériorant, l'emplacement et la petite taille des instruments de secours auraient rendu difficiles pour les pilotes la transition vers l'utilisation de ces instruments ainsi que le maintien de l'orientation spatiale de l'avion.

Le Bureau a demandé à Transports Canada de travailler avec la FAA et les Joint Aviation Authorities pour traiter les préoccupations liées à la sécurité qui ont été cernées, y compris l'absence d'une alimentation électrique des instruments de secours qui soit indépendante du système électrique et de la batterie de l'avion.

Le Bureau est d'avis que les instruments de secours devraient être regroupés de façon normalisée comme le sont les instruments de vol principaux et qu'il soient placés dans le champ de vision normal de l'équipage de conduite. Le Bureau croit aussi que la technologie actuelle rend possible une instrumentation de secours indépendante pour la navigation et les communications de secours.

Identification de risques additionnels en matière de sécurité

Au cours de l'enquête, on a cerné des risques additionnels qui pourraient compromettre la sécurité aérienne. Bien qu'on n'ait pas été en mesure de démontrer que ces facteurs avaient joué un rôle direct dans l'accident, les manquements qui y étaient associés pourraient mener à d'autres accidents s'ils ne sont pas corrigés.

Sujets de préoccupation

En plus des 14 recommandations en matière de sécurité rendues publiques par le Bureau pendant l'enquête, neuf nouvelles recommandations sont présentées dans le rapport final :

Le rapport final mentionne aussi des préoccupations liées à la sécurité qui nécessitent un suivi additionnel. Le BST va continuer à travailler avec les organismes de réglementation pour aider à assurer que les améliorations recommandées en matière de sécurité sont exécutées de la façon la plus efficace possible. On peut consulter la liste complète des recommandations du Bureau à la Partie 4, « Mesures de sécurité » du Rapport d'enquête sur le vol 111 de Swissair, sur le site Web www.bst.gc.ca .

Mesures de sécurité prises

À la suite des conclusions et des recommandations du BST au cours de l'enquête, de nombreuses mesures de sécurité ont été prises par divers organismes de réglementation, diverses lignes aériennes et divers constructeurs pour traiter les recommandations, les avis et les observations formulés par le Bureau. Les mesures de sécurité prises jusqu'à présent ont considérablement amélioré la sécurité aérienne partout dans le monde. Par exemple, :

D'autres mesures de sécurité émanant des recommandations du BST sont en train d'être mises en oeuvre. Consultez la Partie 4, « Mesures de sécurité » du Rapport d'enquête sur le vol 111 de Swissair pour en obtenir la liste complète.