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Recommandations de sécurité aérienne du Bureau de la Sécurité des Transports du Canada

RECOMMANDATIONS DE SÉCURITÉ AÉRIENNE DU BUREAU DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS DU CANADA

DATE DE DIFFUSION : 27 mars 2008

TRANSMIS À :

L'honorable Lawrence Cannon, C.P., B.A., M.B.A.
Ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités

OBJET : Réglementation relative aux ballons servant au transport de passagers

Introduction

Le 11 août 2007 vers 9 h 8, heure avancée du Centre Note de bas de page 1, la montgolfière FireFly 12B immatriculée C-FNVM fait une tentative d'atterrissage dans un champ jouxtant le parc provincial Birds Hill, situé à la limite nord de la ville de Winnipeg (Manitoba). Le ballon est exploité par Sundance Balloons International en vertu du certificat d'opérations aériennes spécialisées (COAS) 5812-10-36 délivré par Transports Canada. À bord se trouvent 11 passagers et l'aérostier pour un vol touristique local d'environ une heure. Le vol a débuté au sud-est de Winnipeg et doit se terminer au nord-est de Winnipeg.

Le vol se prolonge au-delà de Winnipeg car l'aérostier cherche un endroit convenable pour l'atterrissage. Le vent dans la zone choisie pour l'atterrissage est beaucoup plus fort que prévu. La nacelle heurte le sol, fait plusieurs bonds et est traînée sur environ 700 pieds sur un de ses côtés avant de s'immobiliser. À un certain moment, les brûleurs percutent le sol. Une fois le ballon immobilisé, l'aérostier ordonne aux passagers d'évacuer la nacelle. Une fuite de propane se produit, et un violent incendie non maîtrisé se déclare avant que tous les occupants aient le temps d'évacuer la nacelle. L'aérostier et deux passagers sont grièvement blessés dans le violent incendie; quatre passagers sont légèrement blessés (certains subissent des brûlures). Deux des bouteilles de propane et un extincteur explosent; la nacelle est détruite dans l'incendie. L'enquête (dossier A07C0151) se poursuit.

Avant le départ, l'aérostier a obtenu un exposé météorologique auprès du Centre d'information de vol de Winnipeg. L'exposé indique que, pour la durée prévue du vol, il faut s'attendre à un vent soufflant du 120 degrés à 5 nouds. L'enquête du BST révèle que le ballon s'est posé avec un vent de 10 à 17 nouds.

Un ballon est un aéronef au sens de la Loi sur l'aéronautique. Comme certains exploitants de ballons utilisent ce genre d'aéronef contre rémunération, ils sont des transporteurs aériens assurant des services aériens commerciaux au sens de la loi. Toutefois, même si le FireFly 12B et d'autres ballons de grande taille peuvent transporter jusqu'à 12 passagers payants, ces exploitants ne sont pas assujettis à des dispositions réglementaires comparables à celles des autres exploitants aériens commerciaux.

Certificats d'opérations aériennes spécialisées

Le transport de passagers payants dans un ballon est autorisé par Transports Canada en vertu d'un COAS. Pour obtenir un COAS, le demandeur doit fournir un certain nombre de renseignements de base, comme la liste des ballons qu'il va utiliser, ainsi que leur immatriculation, la marque, le modèle et la taille. Transports Canada délivre ensuite un COAS. Le COAS énonce que l'exploitant de ballons possède l'équipement nécessaire pour transporter en toute sécurité des passagers payants à bord de ballons. Dans ce cas précis, Transports Canada n'avait effectué aucune inspection initiale de l'entreprise à l'appui de cet énoncé. Le COAS n'a aucune date d'expiration et, contrairement aux autres transporteurs aériens, les exploitants de ballons ne font l'objet d'aucune vérification.

Transports Canada a fait savoir qu'il n'existe actuellement aucune liste nationale ni par région de Transports Canada des COAS qui ont été délivrés. Transports Canada a délivré 89 COAS, mais il ne sait pas lesquels sont utilisés. Transports Canada croit qu'une seule entreprise assure 85 % des vols grâce aux 59 ballons qu'elle utilise au pays.

Transports Canada indique que les exploitants de ballons peuvent faire l'objet d'une inspection effectuée par un inspecteur de l'aviation générale une fois tous les 10 ans. Toutefois, Transports Canada ne compile pas des données sur quels exploitants sont actifs ni sur l'endroit où les exploitants effectuent leurs vols.

L'entreprise FireFly Balloons a construit le ballon en cause dans l'accident en 2007 et Transports Canada a délivré un certificat de navigabilité. On avait modifié le ballon conformément à un certificat de type supplémentaire restreint approuvé par Transports Canada. En effet, on avait installé un système de ventilation de direction et modifié les suspentes de parachute.

Données historiques

À l'heure actuelle, 482 ballons sont immatriculés au Canada. Les ballons évoluent sous immatriculation privée, qu'ils servent ou non au transport de passagers payants. Depuis le 1er janvier 1997, on a enregistré 15 accidents de ballon au Canada; 12 de ces accidents ont fait des morts et/ou des blessés graves. Le total pour cette période s'élève à 3 morts et à 26 blessés graves. Trois des 15 accidents sont survenus au cours de vols autorisés en vertu d'un COAS; ces trois accidents ont fait 2 morts et 15 blessés graves parmi les 31 passagers payants de ces vols. Deux de ces accidents ont été classés comme événements de catégorie 3 (A07C0151 et A07P0295) et font l'objet d'une enquête. Un autre accident mortel (A01O0200) a été classé comme événement de catégorie 3 et a fait l'objet d'une enquête, mais il n'est pas survenu au cours d'un vol autorisé en vertu d'un COAS et le ballon ne transportait pas de passagers payants.

Conditions dangereuses et facteurs sous-jacents

En vertu de l'article 602.07 du Règlement de l'aviation canadien (RAC), les exploitants sont tenus de respecter les limites figurant dans le manuel de vol du ballon. Le ballon FireFly 12B possède une certification faisant état d'un manuel de vol approuvé en date du 20 mai 2005. Toutefois, la section des limites du manuel de vol du FireFly 12B ne précise aucune limite de vent. Dans la section des performances du manuel de vol du FireFly 12B, il est dit que la vitesse maximale du vent démontrée à l'atterrissage pendant les essais de certification est de 7 mi/h. La section des procédures normales du manuel de vol du FireFly 12B contient une mise en garde qui indique de faire preuve d'une extrême prudence en cas d'atterrissage à des taux de descente approchant les 500 pieds à la minute et/ou en présence de vents supérieurs à 7 mi/h.

Sundance Balloons International avait préparé volontairement un manuel d'exploitation et le tenait à jour. Ce manuel n'était pas approuvé par Transports Canada et il était de nature générale. Dans certains domaines, le manuel d'exploitation ne donnait pas de conseils précis. À titre d'exemple, le manuel indiquait que les ballons ne devaient pas être utilisés par des vents de surface dépassant les limites fixées par le constructeur et définies dans le manuel de vol, et qu'ils ne devaient en aucun cas être utilisés en présence de vents de surface supérieurs à 15 nouds ou qui seraient probablement supérieurs à 15 nouds pendant le vol. Cette vitesse du vent de 15 nouds est la limite générale fixée par l'entreprise pour tous les types de ballon.

En conséquence, comme aucune limite de vent ne figure dans le manuel de vol du ballon, il était possible d'utiliser le ballon en présence d'un vent de surface pouvant atteindre les 15 nouds, une vitesse beaucoup plus élevée que la vitesse du vent démontrée pendant les essais de certification. Il s'agit là d'un important danger pour la sécurité, car un vent fort empêche l'enveloppe du ballon de se dégonfler et fait que la nacelle sera traînée au sol à la vitesse du vent. En cas d'atterrissage par vent fort, les risques d'éjection des passagers et de dommages aux brûleurs et au circuit carburant sont plus grands. Le manuel de vol du ballon donne des conseils sur la façon de gérer le carburant pendant un atterrissage par vent fort, mais le manuel d'exploitation n'en donne pas.

Les exploitants de ballons ne sont pas régis par la partie VII du RAC. La tenue de manuels d'exploitation et de manuels de maintenance, tout comme l'obligation de respecter les manuels de vol, est un moyen reconnu de maîtriser les risques inhérents aux opérations aériennes. Les exploitants de ballons ne sont pas obligés de tenir à jour des manuels d'exploitation ou des manuels de contrôle de maintenance. En l'absence de tels manuels approuvés ou de normes réglementaires précises, les exploitants ne peuvent gérer efficacement les risques. Bien que le libellé du COAS certifie que l'exploitant de ballons possède l'équipement nécessaire pour transporter en toute sécurité des passagers payants à bord de ballons, rien ne permet d'assurer ou de vérifier, par des inspections ou par des vérifications, que les normes sont respectées.

Notamment, comme les ballons ne sont pas régis par la partie VII du RAC, ils tombent dans la catégorie de priorité la plus basse pour ce qui est du Programme national d'inspection - Sécurité des cabines de Transports Canada. Cela veut dire qu'aucun ballon de grande taille servant au transport de passagers payants ne sera inspecté en vertu de ce programme. De plus, le classement des ballons dans la catégorie de l'aviation générale signifie qu'aucune norme relative à la sécurité des cabines n'a été préparée pour les ballons afin d'assurer la normalisation pendant le processus de certification de nouveaux types et de nouveaux exploitants dans le domaine du transport de passagers. L'examen de la nacelle d'un ballon semblable révèle que les passagers peuvent atteindre les conduites du collecteur de carburant ainsi que les conduites passant au-dessus d'eux pour se rendre aux brûleurs, tout comme les suspentes. Les passagers se recroquevillent à côté des bouteilles de propane pendant que la nacelle est traînée au sol à l'atterrissage. Le manuel de l'entreprise indique que le rebord des bouteilles constitue un objet convenable pour s'agripper pendant l'atterrissage.

Recommandation

Certains exploitants commerciaux de ballons au Canada transportent un nombre de passagers payants égal à celui que transportent des exploitants de navette ou de taxi aérien lors d'un vol, mais la réglementation et les normes en vigueur ne permettent pas de garantir le même niveau de sécurité et de surveillance réglementaire pour les passagers des ballons. Le Bureau craint qu'en l'absence de normes et de dispositions réglementaires suffisantes régissant les exploitants de ballons, la sécurité des passagers des ballons sera compromise. En conséquence, le Bureau recommande que :

le ministère des Transports s'assure de garantir le même niveau de sécurité pour les opérations commerciales de transport de passagers payants à bord des ballons que celui garanti pour les autres aéronefs ayant la même capacité de transport de passagers.
Recommandation A08-01 du BST

Évaluation Catégorie : Intention satisfaisante

Le Bureau se réserve le droit de formuler d'autres recommandations si l'enquête révèle d'autres lacunes de sécurité.

La présidente,



Wendy A. Tadros
Au nom du Bureau